Sur ses gardes, l'arme à la main il poussa la porte de la vieille maison.

Un rai de lumière illumina l'intérieur, de la poussière vola. Il avança prudemment, attentif. Les chambres étaient vides. Dans le salon, son regard se posa sur le vieux piano et des souvenirs s'emparèrent de lui. On dansait et valsait dans la maison autour du piano, sa mère et son jupon coloré ses cheveux lâchés. Peu impotrte ce qui se passait dehors, ignorant le terrible sort qui se préparait à leur tomber dessus. Sa tante jouait toujours la même mélodie au piano. Une vieille rengaine dont les souvenirs lui venaient distordus.

Il revoyait toute la famille dans le salon, les volets baissés d'où seul parvenaient quelques rayons de lumières par les interstices comme pour se couper du monde de dehors.

La guerre.

Les centaines de cadavre au sol.

Les cris de terreur des enfants.

Et cette mélodie entêtante qui s'échappait.

Il tenta de se concentrer sur ces souvenirs plus joyeux. Ces moments enchanteurs avec toujours cette incessante mélodie en fond.

Maman dansait au bras de papa. Son petit frère riait.

Et la bombe qui explosait dehors.

Non la mélodie ! Il faut se rappeler de la danse. Du jupon qui s'agite.

La porte qu'on défonce et les hommes lourdement armés qui débarquent.

La musique. Il faut se rappeler la musique.

Il ferma les yeux, tentant de s'abandonner à la mélodie. Mais il entendait derrière le sifflement des balles. Le hurlement de sa tante. Les pleurs de son frère.

La danse, al musique, la joie, c'est à ça qu'il devait penser.

Et sa mère qui avait cessé de danser à jamais. Son corps au sol sous lequel s'étalait le sang.

La musique semblait se désaccorder. Il se souvenait des hommes qui le soulevaient, des hurlements de sa famille qui suppliaient.

Il rouvrit les yeux. Il ne pouvait pas rester ici. L'armée devait encore être présente dans la zone. Cette fois s'ils tombaient sur lui il se ferait abattre. Il frôla les touches du piano et quitta la pièce discrètement. Laissant derrière lui ses souvenirs. Dans sa tête tournait encore cette mélodie mêlée à ses souvenirs les plus difficiles. 

Cette nouvelle a été écrite en écoutant un morceau sur soundcloud intitulé projet 13 : l'ombre de la porte qui m'a inspiré et porté le long de l'écriture de ce texte.