J'ai chaud, dans la pénombre de cette chambre je m'embrase. Les autres filles dorment c'est certain. Elles respirent avec un rythme si régulier qu'elles me berceraient si je n'avais pas si chaud dans cette petite chambre.
Un coup d'œil au réveil et je me lève en toute tranquillité, à cette heure tout le monde dort déjà, du moins personne ne doit être dans le salon.

Doucement, je me lève. Surtout ne pas les réveiller, je ne prends pas la peine de mettre un short, juste mon long tee-shirt trop grand. Celui qui m'arrive sous les fesses et ma petite culotte noire.
Personne ne sera en bas, j'ai besoin d'air frais.

J'ouvre la porte de la chambre et la referme dès que je suis sortie. Il fait déjà meilleur ici. En passant devant la porte des garçons, j'y jette un œil. Pas moyen de savoir s'ils y sont tous.
J'ai besoin d'être seule ; il n'y aura personne.
Marche après marche je descends l'escalier tournant lorsque j'entends chuchoter :

« Je te laisse, bisous à la prochaine. »

Doucement je descends les dernières marches mais Loïc m'a remarqué.

« Maria ... Tu ne dors pas ?
- Non je venais prendre un peu l'air et boire un verre d'eau avant de me recoucher.
- Reste un peu ... Moi non plus j'arrive pas à dormir. »

Je vais chercher sur le bords de l'évier un verre que je remplis d'eau. Une fois désaltérée, je traverse l'appartement jusqu'à la baie vitrée que j'ouvre doucement pour m'appuyer contre le mur, les genoux repliés vers moi.
Loïc s'installe tout près de moi et sans rien dire, face aux voitures garées pour la nuit, nous observons les étoiles.
Un souffle venant de l'océan me sort de ma transe. Il m'observe et murmure.

« Viens Maria on rentre, ça se voit que tu as froid. »

En effet, je me rends compte que je suis tendue et ma mâchoire crispée me fait mal. Je me relève souris et passe la porte fenêtre à mon tour.
Je me dirige vers les escaliers et me retourne pour souhaiter une bonne nuit à mon ami quand il m'attrape le bras.

« Ria ... Attends un peu encore s'il te plaît. »

Cela fait trois mois qu'il ne m'a plus appelée comme ça. Cela fait trois mois que nous sommes redevenus des amis.

Je le suis et m'installe en tailleur sur le canapé, de toute façon, maintenant qu'il m'a appelé Ria je n'arriverai plus à dormir.
J'engage la conversation. Ça se voit qu'il veut parler mais qu'il n'ose pas. Je le lis dans ses yeux.

« Avec qui tu téléphonais si tard tout à l'heure ?
- Avec ma sœur ...
- Car tu n'arrivais pas à dormir ou vous avez juste traînés ?
- Humm ... Un peu des deux disons ... »

Le silence retombe, je me relève chercher un verre d'eau et en ramène un à Loïc. Après en avoir bu une gorgée il me demande :

« Tu sais quand est ce-que c'était la dernière fois où on était réveillés juste tous les deux ? »

Je réfléchis avant de lâcher dans un souffle :

« L'anniversaire d'Axel ... Oui je me souviens. »

Ses lèvres, ses mains, son corps contre le mien ...

« Maria ? Tu regrettes ? »

Sa question me ramène à la réalité. Regretter ... Cette nuit là ? Je ne crois pas. Notre relation ? Je ne sais pas.

« Quoi ?
- Nous ? Tu regrettes ?
- Non. »

Si je devais recommencer, je referai la même chose, du début jusqu'à la fin sans hésiter.
Perdue dans mes pensées je ne le vois pas s'approcher de moi. Il pose sa main sur mon cou et ses lèvres contre les miennes.

Je prends part au baiser quelques secondes, puis le repousse. Que lui a-t-il prit ? Nous sommes amis maintenant.

« Je... Je... Excuse-moi, si je... Sinon j'aurai regretté. Je crois que ... Enfin je ... »

Je le laisse bégayer, trop déboussolée par cet échange. Ses lèvres...

« Je t'aime. »

Ses mots me glacent. Désemparée, je m'appuie contre lui et allonge mes jambes sur le canapé avant de les replier vers moi. Je l'entends me murmurer :

« Fais ce que tu veux Maria. »

Sur le même ton je réponds :

« Laisse moi réfléchir. »

Je sais que mon cœur a repris le dessus, le sien aussi. Nous nous installons comme nous l'avons toujours fait ma tête contre son torse et sa main sur mon ventre. Je la sens glisser sur ma peau et elle me berce.

~

Des pas descendent l'escalier et me font doucement émerger. Lorsque j'ouvre les yeux je vois la main de Loïc sur mon ventre nu, mon tee-shirt a dû remonter lors de la nuit. C'est le rire de Clément qui vient juste d'arriver qui me réveille complètement. La main de Loïc me rappelle notre baiser fugace. Je me sens rougir.

« Mais vous êtes sérieux ? Maria ! Après tu vas me soutenir que vous êtes plus ensembles ? Sérieusement ! En plus il va falloir réorganiser les chambres ! »

Je sens Loïc bouger à côté de moi. Lui aussi est gêné. Ça se lit dans ses yeux. Il se lève pour reprendre contenance, attrape les verres et les ramène à la cuisine tout en essayant d'expliquer à Clément qu'il ne s'est rien passé hier soir. Que je suis juste venue prendre l'air alors qu'il était au téléphone avec sa sœur. Il a raison. Il ne s'est rien passé ; juste un baiser volé. J'y réfléchis trop. Clément me pointe du doigt :

« Juste endormis ? Dans cette tenue je rigole ! Vous êtes passés à la pharmacie j'espère ! »

Louise est déjà au pied de l'escalier j'annonce que j'ai besoin d'air et lorsque je passe la baie vitrée je l'entends annoncer :

« Toi ... Si t'as fait le con, je te promet t'es mort. »

Elle m'arrache un sourire et je me laisse aller contre le mur. Non il n'a pas fait le con ... Je passe mes doigts sur mes lèvres et quelques larmes coulent sur mes joues. Tant pis si tout le monde est déjà levé, je ne veux plus de calme.

La porte n'est pas totalement fermée alors je la pousse d'un coup de main décidé et je rentre dans l'appartement d'un pas mal assuré. Les conversations s'arrêtent un instant. Tout le monde est là pour ma scène, Axel, Lauriane et Clara sont arrivés. Je m'arrête le temps que les conversations reprennent. Clément a du mettre tout le monde au courant. Seul Loïc n'a pas repris sa préparation de café. Il m'attend. J'hésite un instant avant de m'approcher.

J'approche ma main de sa joue et colle mes lèvres aux siennes. Nos langues se retrouvent après trois longs mois.

Doucement je me recule, pose ma tête sur son épaule et accroche mes mains autour de son cou.
Je murmure :

« Moi aussi je t'aime Lou. »

© ✓ictoire
mai 2019