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Un langage oublié

Il y a vraiment des moments agréables, se dit-elle en tournant la tête vers l'ouest et en inspirant l'air. Il est humide, rafraîchit tout en elle, et les pins l'emplissent d'un brin d'odeur acide. Mais à cet instant, ces grands arbres lui dégagent surtout la vue jusqu'au loin où apparaissent des montagnes, des pics, des forêts, tous surplombés par une explosion de couleurs.

Elle regarde longtemps cette vue apaisante du soleil qui rougit, enflamme, pimente le ciel et les nuages. L'astre se joue d'eux comme une jolie chose désirée, il les caresse, ils s'empourprent. Soudain il s'enfuit sans prévenir pour être sûr d'être aussi ardemment désiré le lendemain.

Un sourire se dessine sur son visage, elle laisse le ciel se faire envahir d'ombre et repart en avant. Un rapide coup d'œil à sa montre lui indique qu'il lui reste approximativement trente minutes avant d'arriver au refuge.

Pour ajouter encore à son bonheur, elle s'imagine le plat chaud qu'elle mangera bientôt là-bas, le lit et sa couette chaude... Et Armand, enfin. Armand qui la rejoint pendant son périple, pour une nuit. Évidemment ils ont réservé une petite chambre...

Mais brusquement, elle s'arrête. Quelque chose a bougé à côté, juste à sa droite, à l'opposé de là où elle a regardé le soleil se coucher. Pas un bruit, non. En y repensant c'était plutôt un pas, quelque chose qui tombe, de léger, sûrement une branche, une feuille...

Elle tourne la tête et retient un cri. Un cerf la fixe, immobile. Derrière lui elle voit des formes bouger, certainement son troupeau, se dit-elle. Elle respire vite et sent son corps répondre à l'alerte, il transpire sous sa polaire, sur son buste, ses bras, ses doigts, son front, partout.

Pendant une longue minute ils s'observent. Elle a le temps de voir que derrière lui, à une centaine de mètres, des biches et leurs petits ne bougent pas non plus. Elle sursaute en l'entendant pousser un cri étrange, rauque et qui la fait vibrer.

- Tout va bien, dit-elle au ralenti et d'une voix la plus douce possible.

Dans un réflexe étrangement universel, elle lève lentement les mains haut devant elle, et tend les paumes en avant. Certains signes comme celui-ci ont des significations qui se comprennent dans le monde entier.

Son cerveau, subitement en situation de survie, puise dans les recoins de l'évolution, s'éloigne du langage commun et en trouve un autre, plus primitif mais mille fois plus explicite. Dans l'urgence, elle devient une virtuose du langage des signes.

En même temps qu'elle lui montre ses mains elle continue à parler doucement :

- Je suis là... Ça va... Je vous veux pas de mal... Ça va... Je me décale doucement à droite, regarde, voilà, tu vois, je te veux pas de mal... Non, non ne bouge pas, je m'en vais, je m'en vais...

Aurélie n'est plus là, elle attend que son corps ait fini de gérer la situation. Plus tard, quand elle en reparlera, presque aucun souvenir ne lui reviendra. Tout simplement car elle n'était plus là. Quelque chose de caché, d'inconscient, prend le dessus dans ces moments-là, quelqu'un d'autre que nous. Il ressent le temps différemment, il est intelligent et en sait tellement plus sur la vie sauvage. C'est lui qui nous parle, qui a de mauvais pressentiments...

Quoi qu'il en soit, elle se déplace doucement tout en le fixant dans les yeux. Elle reculait mais vient de s'arrêter. Sa respiration se calme, elle regarde un à un les yeux du cerf. Il ressent comme elle en ce moment.

Ils se regardent avec la même peur, elle voit son souffle chaud faire trembler l'air dans la lueur restante du soleil qui s'éteint. Le soleil est parti et les danseuses du crépuscule viennent d'envoyer une de leurs brises subtiles, fraîches, qui semblent chuchoter à l'oreille que la nuit arrive et que les rôles vont changer.

Elle sent ses cheveux s'envoler sous le coup de vent. Les poils du cerf bougent en même temps, elle voit l'onde s'y dessiner clairement puis retomber. À ce moment, la bête imposante tourne sa tête vers le soleil couchant.

En le voyant faire, son cœur se crispe. Elle reste droite, ses bras tendus, et rien ne laisse deviner les larmes qui perlent et coulent lentement de ses yeux.

- Tu as compris, tu as ressenti toi aussi, ce coup de vent, c'était... merde... murmure-t-elle, admirative.

Le cerf regarde toujours là où le soleil brillait quelques instants plus tôt, puis il la regarde à nouveau. Cette fois elle ne veut plus le déranger, ni risquer sa vie, et elle recule pour de bon. Il ne la lâche pas du regard. Elle continue ainsi pendant plusieurs dizaines de mètres, se prend quatre ou cinq arbres dans le dos, jusqu'à ne plus le voir du tout.

Elle retrouve la trace du chemin et se met à courir. Après deux minutes, sa joie exulte en des hurlements.

- On s'est compris, on a pas parlé mais on s'est compris !

Elle rayonne de bonheur, étoile dans la nuit noire.

- C'était juste logique, on s'est expliqué l'un à l'autre qu'on voulait pas se faire de mal. Au final il y avait pas de risques !

Elle court, court, pousse des exclamations que je ne saurai pas vous retranscrire ici. Trente minutes plus tard, elle retrouve Armand et lui explique tout. Lui, pragmatique au possible réagit froidement sans même la féliciter :

- Après, un cerf c'est très dangereux mais c'est surtout très herbivore, lui lance-t-il, taquin.

- Non mais c'était magnifique, c'était magnifique ! s'écrie-t-elle pour de bon.

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