PDV LUCINDA

     Tout en lisant le journal du jour, je tripote mon pendentif sans grande conviction. Soudainement, les portes du salon s'ouvrent sur une Aurore haletante, presque paniquée, qui crie :

Aurore : les Grands Jeux Inter-Magiques commencent dans trois mois!

     Élizabeth lève les yeux vers elle en lui montrant son journal et en lâchant :

Élizabeth : c'est dans tous les journaux du royaume depuis ce matin.

Aurore : oh... Pardon.

Océane : c'est pas grave.

     Aurore s'assoit près d'Océane qui est couchée sur le canapé, l'air de s'ennuyer. Lætitia lit un livre comme à son habitude, Vénus regarde le jardin arrière, Emma somnole sur le fauteuil près de la baie vitrée et Hildegarde fait bouger continuellement sa montre à gousset.

     En gros, c'est l'ennui total pour Océane, Emma, Vénus et Hilda.

     Je soupire, et me lève en déposant mon journal sur la table basse.

Moi : on sort.

     Elles tournent toutes leurs têtes vers moi, confuses.

Vénus : pour faire quoi?

Moi : on va aller au zoo, puis au restaurant. Vous ressemblez à des cadavres avec ces têtes d'enterrement.

Aurore et Emma : c'est méchant, ça.

     N'empêche qu'elles se lèvent avec les autres et vont s'habiller plus convenablement. Après une heure trente minutes, nous quittons la maison.

     En chemin vers le parc animalier, Vénus et Aurore ne font que regarder partout. Il faut aussi dire qu'elles n'ont pas eu l'occasion de se promener cette semaine.

     Beaucoup de personnes nous regardent. Normal, mais assez dérangeant. Je ne pouvais pas non plus privatiser le jardin animalier pour quelques heures, ça aurait été plus ennuyeux.

     Une fois sur place, Vénus et Aurore courent vers l'espace réservé aux tigres.

Océane : faudrait penser à leur rendre visite un de ces quatre.

Hilda : tu crois?

Emma : moi, je suis d'accord avec elle.

Élizabeth : pareil de mon côté.

Moi : nous verrons cela plus tard. Nous les verrons à Crocus dans trois mois de toute façon.

Lætitia : on fait quoi d'elles?

Élizabeth : laissons les se balader un peu partout. En cas de problème, elles sauront parfaitement comment gérer.

Emma : si par gérer, tu veux littéralement dire créer une tornade, alors je ne crois pas qu'il serait approprié de les laisser sans surveillance.

Océane : j'y vais avec elles, dans ce cas.

Lætitia : je vais voir les pandas. Apparemment, il y aurait un nouveau né depuis hier.

Emma : tu vas où, Éllie?

Élizabeth : je vais voir les éléphants. Tu veux venir?

Emma : d'accord.

Hilda : je reste avec Lucinda. On se retrouve à la sortie à 18h?

     Elles acquiescent toutes, puis se séparent. Une fois seules, elle se tourne vers moi.

Hildegarde : tu n'as pas dormi de la nuit, hein?

Moi : qu'est-ce qui te fait dire ça?

Hildegarde : je ne sais pas vraiment. Juste une impression. Tu étais très pensive à la maison.

Moi : tu as vu juste.

Hildegarde : les autres aussi ont dû le remarquer. Tu faisais quoi, si ce n'est pas trop indiscret de ma part?

     Comment dire que je passais au peigne fin la bibliothèque pour trouver un moyen de...

     Un cri interrompt ma pensée. Je me tourne vers la source et vois une petite fille qui reste figée devant un serpentarium lorsqu'elle regarde un serpent change de peau.

Hildegarde : j'ai cru qu'il s'était passé quelque chose.

Moi : ce n'est qu'une enfant, elle a pris peur.

     J'ignore bien vite la situation et continue à avancer en jetant des regards aux différents animaux du zoo. À 18h, nous nous réunissons toutes à la sortie du parc... Enfin, ils manquent Aurore.

Élizabeth : je pensais que tu les surveillerais.

Océane : mais c'est ce que j'ai fait. Je ne sais même pas quand elle a disparu de mon champ de vision.

Vénus : quand tu regardais un stand de nourriture en venant.

Océane : oh...

     Je souffle. Au même moment, une explosion retentit en même temps que des feux d'artifice dans le ciel.

Emma : au moins, on sait où elle est maintenant.

Lætitia : je vais la chercher.

Moi : je viens. Vous, allez au restaurant près de la gare. On vous rejoint rapidement.

Hildegarde : d'accord.

     Elles s'en vont. Lætitia et moi nous dirigeons vers l'endroit d'où est provenu l'explosion. Nous trouvons aisément Aurore... Et trois hommes évanouis à terre, les vêtements presque brûlés.

Lætitia : qu'est-ce qu'il s'est passé ici?

Aurore : grandes sœurs!

     Elle court dans mes bras, et relève la tête vers moi.

Aurore : ces pervers ont essayé de m'enlever!

     Je pose une main délicate sur sa tête pour la rassurer.

Lætitia : pas besoin d'avoir peur, tu les as carrément cramés.

Aurore : j'aurais dû les tuer?

Moi : évidemment que non. Je vais appeler le Conseil pour qu'ils s'occupent de ça.

Lætitia : je vais m'en charger.

     Dit-elle avec une lacrima déjà en face d'elle.

Moi : merci. Allons y maintenant.

     J'installe les agresseurs de ma cadette dans une cage électrisée en m'en allant.

     Nous arrivons au restaurant et rejoignons nos sœurs qui, nous attendant visiblement pour pouvoir enfin commandé, discutent vivement des Grands Jeux Inter-Magiques. Nous prenons places aux places restantes et Élizabeth lève la main pour qu'un serveur vienne à notre table.

     Une serveuse s'approche timidement de nous, sûrement à cause de nos titres, et nous demande ce que nous prendrons.

Moi : du foie gras.

Élizabeth et Vénus : du cassoulet!

Hildegarde : une carbonnade flamande.

Emma : du gratin dauphinois.

Lætitia et Océane : du poulet basquaise.

Aurore : de la raclette, une tartiflette, du bœuf bourguignon et de la blanquette de veau, merci.

     Nous la regardons toutes, même la serveuse, étonnées du nombre de plats qu'elle a commandé.

Serveuse : vous... En êtes sûre?

     Je soupire quand elle acquiesce.

Moi : surveille ta ligne.

Aurore : ça donne faim de faire exploser des artifices en voulant se défendre de trois pédophiles.

     C'est elle qui les a assommés, probablement... Pas de probablement, c'est elle.

     La serveuse s'en va.

Vénus : ils sont morts?

Aurore : non...

Océane : heureusement.

Aurore : même si j'aurais bien voulu.

Emma : ils ont fait quoi?

     Au même moment, la lacrima de communication de Lætitia vibre. Elle décroche et la porte à son oreille. Après quelques minutes, durant lesquelles nous avons été servies, elle raccroche.

Élizabeth : c'était?

Lætitia : le Conseil.

Hildegarde : pour?

Lætitia : ils ont laissé partir les "agresseurs".

     Aurore, indignée, s'écrie :

Aurore : mais pourquoi?!

Lætitia : apparemment, c'étaient des commerçants dans le zoo et ils voulaient juste convaincre Aurore de s'intéresser à leurs marchandises. Alors, ils se la sont disputés et elle a cru qu'ils voulaient l'enlever.

     Je soupire, ainsi que les autres sauf Aurore qui rit nerveusement, véritablement désespérée cette fois.