Chapitre 16
Paris, 19 janvier 1848
Quand elle revient à elle, Lora était dans une grande pièce. Les murs étaient couverts d'humidité. Sur le sol, il y avait une épaisse couche de poussière et des araignées avaient tissé leurs toiles dans les quatre coins de la pièce.
L'endroit était plongé dans la pénombre ; il n'y avait qu'une seule fenêtre.
Lora était couchée sur un lit. Sur une chaise qui faisait office de table de nuit, était posé un verre d'eau.
Lizzie et Cathie étaient conscientes.
Quand Lora ouvrit les yeux, ses amies se précipitèrent vers elles.
- Ouf ! Tu es enfin réveillée ! dit Cathie en poussant un soupir de soulagement.
- Tu veux de l'eau ? proposa Lizzie en lui tendant le verre.
Lora bu puis demanda :
- Où est-ce qu'on est ?
Cathie répondit qu'elles se trouvaient chez Gabrielle Muguet. Quand les agresseurs de Lora et Lizzie les avaient assommées, la peintre avait accourut auprès des trois amies. Les agresseurs avaient pris la fuite dès qu'ils avaient vu ce petit monde arriver. La jeune peintre avait ensuite proposé à Cathie (qui était consciente) de loger chez elle le temps que Lora et Lizzie se rétablissent.
- Comment savait-elle qu'on était dehors ? demanda Lora.
- Elle avait appris que Cathie a fait un malaise... Et comme elle ne nous trouvait pas à l'intérieur, elle est allée voir dehors... Par chance, nous étions juste en face de la galerie sur un banc ...
- Et j'ai dormi combien de temps ? demanda Lora.
- Deux semaines et moi une, lui répondit Lizzie.
- Deux semaines... ! Qu'est-ce que tu as fait, Cathie pendant tout ce temps-là ? demanda Lora à la concernée.
- Rien..., répondit-elle. Je me suis reposée et j'ai repensé au soir où on s'est fait agressées... Il s'est passé tellement de truc, d'abord la conversation entre la soi-disant fiancée de M. du Beau Lac, ensuite Jeanne qui est ici et enfin l'agression...
- D'ailleurs, dit Lizzie à Cathie, raconte donc à Lora ce que tu m'as dit hier... Tu sais, à propos de Mme du Beau Lac...
- Mme du Beau Lac, la mère de Camille ? Celle qu'on a vu le jour de notre agression ? La femme qui était habillée avec la robe à froufrou ? demanda Lora en levant un sourcil.
- Non, elle c'est Mme de Lamanche ! La mère de Camille, c'est Gabrielle Muguet !
- Quoi ? Je ne comprends rien ! dit Lora en portant une main à son front.
- T'inquiète, ça paraît compliqué à comprendre au début mais en fait, c'est super simple ! Et je peux te confirmer que Cathie a raison ; Gabrielle Muguet est Mme du Beau Lac !
- Allons bon ! Tu t'y mets aussi ? soupira Lora.
- Cathie m'a tout raconté ! C'est dingue ce que cette femme a vécu ! Je n'aurais jamais deviné !
- Dis-moi vite ! fit Lora à Cathie.
- D'abord, j'ai tout de suite remarqué que Mme du Beau Lac est Gabrielle Muguet car sa soupe est tout aussi dégueu qu'en 1865... Elle n'a pas fait de progrès en cuisine !
- Que tu es bête ! dit Lora en lançant un coussin sur la tête de Cathie.
- Surveillez votre langage et vos manières, mesdemoiselles, gronda une voix derrière elles.
Les trois amies se retournèrent ; Gabrielle Muguet se tenait près de la porte. Les jeunes filles ne l'avaient pas entendue entrer.
Cathie reposa le coussin à sa place, Lora se redressa et Lizzie essaya en vain de frotter une tache sur sa robe sale, froissée et déchirée.
- Je vois que ça va mieux, reprit l'artiste en s'adressant à Lora.
Cette dernière fit signe que oui.
- Quelle idée, aussi, de se promener la nuit ! On ne sait sur qui on peut tomber ! continua Gabrielle Muguet.
Elle prit des légumes qui n'avaient plus l'air très frais et demanda :
- Avez-vous faim ?
- Heu... Non, pas tellement, dirent les jeunes filles en cœur.
- Je sais que je ne suis pas une très bonne cuisinière mais vous devrez vous y faire, si vous ne voulez pas mourir de faim !
Elle coupa quand même les légumes et les jeta dans une marmite remplie d'eau. Elle la fit chauffer.
Une fois que ce fut près, elle servit la soupe dans des bols ébréchés.
Les jeunes filles fixèrent le mélange en ayant la certitude qu'elles n'y toucheraient pas.
Un lourd silence s'installa.
Gabrielle Muguet se racla la gorge puis dit :
- J'attendais que vous soyez toutes remises de votre agression pour... vous dire que je sais que vous savez qui je suis vraiment... Je ne sais même pas qui vous êtes et vous vous connaissez mon plus lourd secret !
- J'ai dû louper quelque chose parce que moi, je ne sais rien et je ne comprends rien, intervint Lora.
Gabrielle Muguet allait répondre quand on toqua à la porte.
- Cela doit être le médecin ! Je l'ai fait venir à votre chevet, hier, dit-elle à Lora.
L'artiste enfonça son chapeau sur sa tête de façon à cacher ses yeux et alla ouvrir.
Elle avait raison ; ce fut bien le médecin. Il examina Lora puis lui dit qu'elle s'était bien rétablie.
Une fois que le docteur fut parti, on toqua de nouveau à la porte.
C'était le facteur qui apportait une lettre. Gabrielle Muguet l'ouvrit. Elle l'a lue puis s'affala sur le canapé et marmonna :
- Mon Dieu ! Que faire ? George m'invite à ses fiançailles ! Le problème est que je déteste la future Mme du Beau Lac !
- C'est embêtant ! commenta Lora.
La jeune peintre réfléchit un instant puis déclara :
- Non, je ne vais pas y aller ! Je suis fatiguée...
- Comme vous voulez, dit Cathie.
- Si ! Si ! Si ! Allez-y, s'exclama soudainement Lizzie.
Tout le monde se tourna vers elle.
- Pour entendre Geneviève dire : « Je suis bientôt la fiancée du puissant comte M. du Beau Lac » et se vanter toute la soirée puis me provoquer !? Non merci ! répondit Gabrielle Muguet.
- Mais... Et M. du Beau Lac ? C'est tout de même lui qui vous a invité ! insista Lizzie.
- Certes, mais...
- Et puis, ça vous fera une occasion de sortir...
- Je vous trouve bien insistante, Giselle !
Lizzie sursauta quand elle entendit ce prénom.
- Giselle ? demanda-t-elle interloquée.
- Vous vous appelez bien Giselle, non ?
- Ah, oui, oui..., dit-elle en se rappelant que Cathie l'avait présentée à M. du Beau Lac et Gabrielle Muguet sous ce nom.
- Pourquoi insistez-vous pour que j'y aille ? reprit la jeune artiste en plissant le front
- Eh bien, tout simplement par peur d'offenser M. du Beau Lac... C'est lui qui vous invite après tout ! Et, il vous aime bien, je crois... Et vous aussi... Non ?
Gabrielle Muguet se mit à rougir.
- Oui... Mais d'amitié, hein ! N'allez donc pas vous imaginer des histoires... !
Elle se leva.
- C'est quand même étrange, murmura-elle. Je n'ai vu aucun article parler de ces fiançailles... Et je n'ai entendu personne en parler...
Elle fit les cent pas à travers la pièce et reprit :
- Non, je vais décliner poliment... De tout façon, j'ai pleins de tableaux à terminer...
Mais, Lizzie ne renonça pas, et, elle insista tellement que l'artiste finit par céder :
- Très bien, j'irais, céda-t-elle. Mais je ne sais pas pourquoi vous insistez autant...
- Voulez-vous qu'on vous accompagne ? questionna Lizzie.
- Non, il vaut mieux que vous vous reposiez. Vous me semblez bien fatiguée...
Gabrielle Muguet ajouta :
- Vous ne comptez tout de même pas porter ces robes déchirées...
Depuis leur agression, Lora, Cathie et Lizzie n'avaient pas eu l'occasion de se changer.
Elles approuvèrent.
- Et j'aimerais bien me laver..., ajouta Lora qui ne s'était pas douchée depuis plus de cinq jours.
- Tu trouveras de l'eau dans la cruche et une bassine en-dessous du canapé... Mais, venez donc ici, les invita Gabrielle Muguet dans la pièce à côté.
Les jeunes filles s'exécutèrent.
La pièce était tout aussi défraîchie que la précédente. Une grande armoire surmontait le mur du fond.
- Celles-là seront plus présentable...dit la peintre en sortant d'autres robes de l'armoire. Et si vous pouviez éviter de me les rendre que dans le même état que celles que vous portez..., dit-elle avant de disparaître dans la pièce suivante.
Munie de la bassine et de la cruche, Lora se mit dans un coin sombre de la pièce.
- A quoi tu joues, Lizzie ? demanda Cathie. Pourquoi t'as tant insisté pour que Gabrielle Muguet sorte ? Tu sais que tu es en train de changer le cours du temps, là... Normalement...
Elle fut interrompue par Lora qui poussa une exclamation de dégout.
- Qu'est-ce qu'il y a ? lui demanda Lizzie.
- Il y a pleins d'insectes, dans la bassine..., répondit Lora.
- Normalement, reprit Lizzie, Gabrielle Muguet ne serait pas allé à ces fiançailles...
- D'ailleurs, intervient Lora, il faudrait qu'on m'explique cette histoire entre elle et M. du Beau Lac... Parce que moi, je n'y comprends toujours rien... Et qui est Mme de Lamanche dans tout ça... Et que vient faire Gabrielle Muguet dans le futur assassinat de Camille et sa famille... Et qui est cette Anna de Vertil que la future Mme du Beau et Gabrielle Muguet ont parlé l'autre jour... Ah ! C'est froid ! s'écria-t-elle en versant l'eau sur elle.
- Fais-moi confiance, Cathie ! Quant à toi Lora, on va t'expli...
Elle fut interrompue par Gabrielle Muguet qui leur informa qu'elle s'en alla.
- Je reviens dans une heure... Ces fêtes-là ne m'intéressent guère...
Puis, elle sortit.
Les jeunes filles se dépêchèrent ensuite de finir de s'habiller.
- La boule dorée, s'écria soudainement Lizzie.
- Mince ! On a dû la perdre..., fit Lora.
Mais, Cathie sortit de la poche de sa robe la boule dorée.
- Heureusement que je l'ai toujours sur moi, dit-elle à ses amies.
- Garde la bien... Tu la sortiras quand je te le dirais, ordonna Lizzie.
- Bien, chef ! ironisa Cathie en imitant un soldat au garde à vous.
- Bon. Venez, dit Lizzie en ouvrant la porte d'entrée.
- On va où ? demanda Lora.
- Suivre Gabrielle Muguet, répondit Lizzie. Quelque chose me dit qu'elle est tombée dans un piège...
- Oui, enfin, c'est un peu toi qui l'a forcé..., lui répondit Cathie.
- C'est pour vérifier un truc..., répondit Lizzie.
- Quel truc ? demandèrent Lora et Cathie.
- Vous verrez, répondit simplement Lizzie.
Cathie se précipita soudainement à la fenêtre. Elle observa attentivement la rue. Il faisait déjà nuit.
- Qu'est-ce qui te prend ? demanda Lora.
- Rien, j'ai cru entendre un bruit...
- On est en ville, c'est normal qu'il y ait du bruit... Bon, venez, il n'y a pas de temps à perdre, fit Lizzie.
- Oui, commandant, fit Cathie.
Elles sortirent en suivant de loin Gabrielle Muguet.
Quelques minutes plus tard, elles arrivèrent près de la maison de M. du Beau Lac et de sa fiancée.
C'était une vaste et charmante demeure.
Étrangement, la cour était déserte. Il n'y avait ni voitures, ni chevaux, ni valets, ni invités.
Gabrielle Muguet attendit patiemment devant l'imposant portail.
Les trois jeunes filles, quant à elle, trouvèrent un buisson dans lequel elles s'y cachèrent.
- Je déteste les robes... Ca gratte ! Je rêve de retrouver mon jean, grogna Lora.
Lizzie lui intima le silence.
Au bout d'un quart d'heure, Lora s'impatienta :
- C'est long ! Ils en mettent du temps à ouvrir ! Et puis, j'ai mal aux jambes à force de rester accroupi... Et cette satanée robe me gratte sérieusement ! Ah ! Vivement la maison que j'enfile un bon vieux jogging !
- Chut ! fit Lizzie.
Lora resta silencieuse pendant quelques secondes et reprit ses plaintes :
- J'ai envie d'aller faire pipi...
- Mon Dieu, Lora ! T'es pire que mes petits frères ! lui dit Lizzie.
Soudain, un jeune domestique passa dans la cour.
- Excusez-moi..., interpella Gabrielle Muguet. Pouvez-vous m'ouvrir ? Nous sommes invités au bal...
- Au bal ? Quel bal ? demanda le jeune homme interloqué.
- Mais enfin ! Le bal des fiançailles de M. du Beau Lac.
Le jeune homme paru surprit.
- C'est ce soir ? Ce n'était pas dans un mois ? Enfin, il faut dire que je suis un simple jardinier... Je ne suis pas au courant de tout ! Mais bon, je trouve cela étrange car, quand il y a bal, tous les domestiques s'agitent alors qu'aujourd'hui, tout le monde était calme...
- Qui va là ? cria une voix.
Le domestique sursauta et fit volte-face.
C'était la future fiancée de M. du Beau Lac.
- C'est que, madame, ces demoiselles prétendent qu'il y a un bal pour vos fiançailles et j'étais en train de leur expliquer qu'il n'y avait rien de prévu ce soir..., bredouilla le jeune homme.
- Qu'en savez-vous ? aboya la nouvelle venue.
- Eh bien... je...
- Vous n'êtes au courant de rien, de toute façon ! Vous êtes jardinier ! Il y a bien un bal ce soir ! Comment avez-vous osé importuner mon invitée ? Déguerpissez avant que je vous renvoie !
Le domestique s'éclipsa rapidement.
La future fiancée reprit d'une voix douce :
- Entrez, ma chère Gabrielle...
- Pourquoi n'y a-t-il personne ? Dit froidement Gabrielle Muguet.
- Allons, ma chère ! Nous sommes partit sur de mauvaises bases, vous et moi... Arrêtons donc de nous parler froidement et devenons amies...
- Où est George ? demanda l'artiste en ignorant la proposition de son interlocutrice.
- Il se prépare dans ces appartements, venez, entrez donc ! Il ne fait pas très chaud ! dit la maîtresse de la maison en ouvrant le portail.
Gabrielle Muguet entra, suivit discrètement des trois amies.
Tout était calme et silencieux ; voir même sinistre.
« Étrange pour un bal » pensa Cathie.
- Vous êtes la première ! Attendons les autres invités dans mon salon personnel.
Elles entrèrent donc dans la maison. Tout était désert. Les vastes couloirs étaient sombres. Aucunes bougies n'étaient allumées.
La future fiancée de M. du Beau Lac et Gabrielle Muguet entrèrent dans le salon.
Comme il faisait sombre, Cathie, Lora et Lizzie entrèrent sans être vu.
Il était tout aussi sombre que les couloirs. Il y avait juste une bougie qui était allumée. Elle était posée sur une table, en face d'un canapé.
Cathie, Lora et Lizzie se cachèrent derrière un meuble qui était près du canapé.
- Vous devez avoir soif ! dit l'hôte. Je vais chercher des verres.
- Vous ne demandez pas à vos chères domestiques, dit sèchement Gabrielle Muguet.
- Oh ! Je ne vais pas les déranger pour cela ! Je peux très bien le faire moi-même !
Elle se dirigea vers le meuble où étaient cachées Lora, Lizzie et Cathie.
Ces dernières retinrent leur respiration. Elles sentirent leur cœur battre à vive allure.
Heureusement, Henriette ne pensa pas à regarder derrière le meuble et prit deux verres à vin.
Elle les remplit de vin, en tendit un à son invitée et dit :
- Prenez ! Servez-vous !
- Où est George ? demanda une nouvelle fois Gabrielle Muguet
- Je vous l'ai dit... En train de se préparer ! Tenez ! ajouta Henriette en lui mettant dans la main le verre dans sa main.
- Pourquoi tout est silencieux ? Pourquoi n'y a-t-il personne ?
- Je déteste le bruit... !
- Il n'y a pas de bal, n'est-ce pas ? C'est vous qui m'avez demandé de venir...
- Gabrielle...
- Je vous interdis de m'appeler par mon prénom ! dit l'artiste en se levant brusquement de sa chaise. D'ailleurs, je ne sais même pas ce que je fais ici !
- Oh, alors vous préférez que je vous appelle Anna de Vertil ?
- Non ! s'écria-t-elle en se précipitant sur Henriette pour la faire taire.
Puis, elle s'affala sur le canapé et prit sans réfléchir le verre de vin que lui tendait la future fiancée de M. du Beau Lac et le bu d'un trait.
Soudain, la jeune artiste fut prise d'un étrange mal de tête.
- Qu'avez-vous ma chère ? Vous êtes toute pâle ! dit Henriette.
- J'ai... j'ai mal à la tête, bredouilla Gabrielle Muguet.
- Allongez-vous donc, dit Henriette.
- Non, je veux m'en aller, dit la peintre en se levant.
Elle fit quelques pas, puis tomba par terre.
Henriette passa une main sur le front de son invitée, prit son poul et dit d'une voix neutre :
- C'est bon. Elle est morte.
Lora poussa tout bas un juron, Cathie étouffa un cri et Lizzie faillit s'évanouir.
Mais, les trois jeunes filles n'étaient pas au bout de leurs surprises, elles entendirent une voix qui ne leur était pas étrangère. C'était la femme de chambre de Louise, celle qui leur avaient données le breuvage qui endormait ; tout le monde sauf Cathie l'avait bu et s'était endormit la seconde d'après.
- Je vous avais bien dit que mon petit mélange fonctionnerait, dit-elle à la future fiancée de M. du Beau Lac.
- Débarrassez-moi du corps, ordonna cette dernière.
- Et l'argent ? Vous m'avez promis vingt mille francs si je tuais cette femme...
- Plus tard, plus tard... Faites ce que je vous ai demandé... Allez chercher un drap pour transporter le corps ; ça paraîtra moins suspect...
- Et je le mets où, ensuite ?
- Brûlez-le où noyez-le... Comme vous voulez... Du moment qu'on ne le trouve pas !
Elles sortirent.
- Alors c'était ça, le truc que tu voulais voir ? Gabrielle Muguet se faire tuer, fit Cathie les yeux remplis de larmes.
Lizzie avait le regard absent.
- Hé ! Je te parles ! Ca ne te fais rien de voir quelqu'un qui est mort sous tes yeux ? fit Cathie.
- Si, c'est ce que je voulais savoir en venant ici... Je voulais savoir si Mme de Lamanche allait tuer Mme du Beau Lac...
- Hein ? s'écria Lora. Pourquoi tu me parles de Mme de Lamanche là ? Et c'est Mme du Beau Lac qui est la meurtrière...
- La mère de Camille est Gabrielle Muguet..., expliqua Cathie. Enfin, elle était, car elle a finit par épouser M. du Beau Lac et a abandonné le dessin et la peinture.
- Pourquoi ?
- Sais pas. Peut-être qu'elle n'avait plus envie... Et qu'elle n'ose pas le lui dire ; tu sais, à cette époque, les femmes qui deviennent peintre ne sont pas très bien vues...
- Et Mme de Lamanche ?
- Elle était la future fiancée de M. du Beau Lac... Jusqu'à ce qu'Anna- ou si tu préfères : Gabrielle Muguet- débarque et se mette avec M. du Beau Lac, qui, celui-çi rejette sa première fiancée... Cette dernière s'est mariée avec quelqu'un nommé portant le nom de Lamanche et s'est comme ça qu'elle est devenu Mme de Lamanche... Mais, elle a toujours dû en vouloir à Anna d'avoir prit sa place dans le cœur de M. du Beau Lac... Et c'est pour ça qu'elle veut tuer les du Beau Lac...
- Allons bon ! maugréa Lora. Voilà une histoire digne d'un de ces romans à l'eau idiot ou de ces stupides séries que regardent la plupart des filles du lycée...
Soudain, elles entendirent quelqu'un approché.
- Vite ! Il faut partir avant qu'Henriette ne nous inflige je-ne-sais quoi ! dit Lizzie.
- Et où veux-tu qu'on aille ? interrogea Lora.
- On doit retourner quelques heures plus tôt pour empêcher Gabrielle d'aller à ce soi-disant bal.
Et, sur ces mots elle demanda à Cathie la boule dorée.
Celle-ci la lui tendit et, dix secondes plus tard, elles se retrouvèrent assises sur un canapé. Gabrielle Muguet était à leurs côtés et avait une lettre dans ses mains.
- Mon Dieu ! Que faire ? s'exclama-t-elle. George m'invite à ses fiançailles ! Le problème est que je déteste la future Mme du Beau Lac !
- N'y allez pas ! s'écrièrent en cœur les trois jeunes filles.
La jeune peintre les regarda tout étonnée.
- Et pourquoi donc ?
- Ben..., fit Cathie. Vous risquez de ne pas connaître grand monde... Et puis, il me semble que vous ne vous entendez pas trop avec la future fiancée de M. du Beau Lac...
Gabrielle Muguet resta silencieuse un instant, puis répondit :
- Certes... Vous avez raison. Et puis, je suis bien fatiguée... Je vais de sitôt décliner...
Elle alla dans la pièce d'à côté rédiger une réponse.
Les trois jeunes filles poussèrent un soupir de soulagement.
- Ouf ! fit Lizzie. C'est bon ! Elle ne mourra pas maintenant ! Je n'ose pas imaginer que cette débile d'Henriette soit mariée avec M. du Beau Lac... Ca me répugne !
- Je suis d'accord avec toi..., dit Lora. Et Cathie, à une fois de plus, mit sa famille et sa vie en danger... Car si M. du Beau Lac épouse Henriette, Camille et sa descendance n'existera pas.
- Oui, répondit Cathie. Mais, ça n'est pas arrivé heureusement. Je ne veux pas être rabat-joie mais, demain, il faudra retourner en 1865 car comme nous savons tout, à présent, et que nous avons des preuves qui prouve que Mme de Lamanche veut bien tuer les du Beau Lac...
- Quelles preuves ? demanda Lizzie.
- Le carnet de Gabrielle Muguet, répondit Cathie. Elle note tout dedans... Je sais que ce n'étais pas très sympa de l'avoir volé mais c'est comme ça que j'ai su qu'elle s'appelait en fait Anna de Vertil, qu'elle était très amoureuse de M. du Beau Lac... Si bien que, sur la dernière page, elle explique qu'elle ferme sa galerie et qu'elle redevient Anna de Vertil pour l'épouser... A partir de la, j'ai compris qu'elle était la mère de Camille, la « vrai » Mme du Beau Lac.
- On dirait un scénario pour ces feuilletons stupides que regarde..., commença Lora avant que Lizzie l'interrompe :
- Mais, ça ne nous dit pas que Mme de Lamanche veut tuer les du Beau Lac...
- Dans son cahier, Gabrielle Muguet raconte qu'elle à souffert des insultes qu'Henriette lui infligeait...
- Je ne pense pas que ça suffira à mettre Mme de Lamanche en prison...
- Ben si, ça tient debout ; Gabrielle Muguet plaque tout, elle redevient Anna de Vertil, elle part épouser M. du Beau Lac, qui, lui, rompt avec Henriette... Celle-ci épouse un autre gars, mais, rongée par la jalousie veut tuer la femme qui lui a volé la place dans le le cœur de M. du Beau Lac, et, par la même occasion, l'homme qui lui a brisé le cœur et leur enfant.
- Là, fit Lora, ça devient plutôt un scénario de ces téléfilms qui passe le samedi après-midi ou le jour de la St Valentin et que les gens regardent quand ils s'ennuient...
- Il faut plus de preuves... Sinon, on ne croira jamais ! s'exclama Lizzie.
Un silence suivit.
Lora allait parler mais Lizzie intervint :
- Si c'est pour une de tes remarques idiotes...
- Moi, j'en ai des preuves, coupa Lora.
Elle sortit de sa poche deux papiers. L'un était un article de journal et l'autre une lettre.
- Quand on s'est changé dans la loge de Gabrielle Muguet, je suis tombée sur un journal tout chiffonné. Intrigué, je l'ai discrètement déplié et j'ai vu qu'il parlait d'Henriette. Je ne vous en pas parlé car je craignais qu'il ne fasse rien avancé... Mais malgré ça, je l'ai gardé précieusement sur moi, et, après notre agression, quand toi, Lizzie, tu étais encore évanouit et que, toi, Cathie tu avais la tête ailleurs, je l'ai étudié, et j'ai fait bien des découvertes... Henriette est une tueuse en série ! Bien pire que dans les films d'horreur ! Elle a kidnappé plusieurs enfants et envoyer des lettres de menaces aux parents ; si ils ne lui donnaient pas une somme d'agent élevé, elle tuait l'enfant !
- Mon Dieu ! Quelle horreur ! s'écria Lizzie.
- Et ce n'est pas tout ; elle a tué cinq personnes dont Charles d'Ausette, vous savez, le petit garçon qu'on a retrouvé noyé dans la Seine... Le vendeur de journaux nous en a parlé la dernière fois... ... Eh bien, c'est Henriette qui l'a tué ! Bien sûr, elle à tout fait pour que l'affaire soit étouffer... Elle a du pouvoir sur la police et la presse... Et puis, elle est entourée de complices...
- Mais..., mais..., tu es sûre de ce que tu dis ? fit Cathie.
- Tout est marqué dans l'article...
- Et d'où sort-il ? interrogea Lizzie.
- Je te l'ai dis ; de la loge de Gabrielle Muguet...
- Mais, si Henriette a tout fait pour que les journaux ne la critique pas, pourquoi il y a un article qui le fait ? questionna à nouveau Lizzie.
- Peut-être qu'il n'a jamais été publié..., suggéra Cathie.
- L'article est d'un certain Fransisco Sómez, dit Lora.
- Vous croyez que Gabrielle Muguet connaît ce gars-là ? fit Lizzie.
- Sans doute... Mais, nous verrons ça après... C'est déjà bien ce que tu nous rapporte là, Lora, la félicita Cathie.
- J'avoue... Tu peux être embêtante parfois, mais quand tu veux, tu peux faire des choses épatantes ! lui dit Lizzie.
- Mais, ce n'est pas tout, j'ai aussi découvert un autre truc, annonça fièrement Lora. Il se trouve que la femme de chambre de Louise -et qui, par ailleurs, est unes des complices de Henriette- note tout. Si bien que, quand nous étions chez la future fiancée de M. du Beau Lac, la complice d'Henriette a perdu son carnet ; je l'ai ramassé, je l'ai feuilleté rapidement et j'ai une preuve qu'Henriette est bien une criminelle...
Lora ouvrit le carnet et tourna rapidement des pages jaunit, puis s'arrêta sur l'une d'entre elles et dit :
- Là ! Écoutez : « 19 janvier 1848, midi moins le quart. C'est pour ce soir. Madame Henriette a envoyé la lettre du soi-disant bal à Mlle Gabrielle Muguet. Quand celle-ci se rendra dans la chambre de Madame Henriette, je serais caché derrière un meuble. Ma maîtresse donnera le verre de vin dans lequel j'ai versé le poison à Mlle Gabrielle... Ensuite, elle le boira et « je serais débarrassée de cette femme qui m'a tout volé » m'avait dit Mme Henriette. Ma foi, elle fait bien ce qu'elle veut... Moi, tout ce qui m'intéresse, c'est les vingt mille francs que m'a promise Mme Henriette quand elle se débarrassera de Mlle Gabrielle Muguet... »
- Lora... Tu es génial ! s'exclama Cathie. C'est bien qu'on ait une preuve comme ça !
- Oui, approuva Lizzie. On ne pourra plus du tout dire que Mme de Lamanche est innocente...
- Mais, il ne faut pas oublier qu'elle a du pouvoir sur la police et la presse, dit Lora.
- T'inquiète, on devrait bien trouver un moyen d'attraper cette folle ! lui répondit Lizzie.
- Mais le plus urgent maintenant, dit Lizzie, c'est de rentrer en 1865...
- Et comment explique-t-on notre départ à Gabrielle Muguet ? questionna Lora.
- On dit que...
Elle fut interrompue par Cathie qui poussa un cri.
Elle sortit rapidement de sa poche la boule dorée en s'écriant :
- Ça brûle !
Lora s'apprêtait à répondre mais une lumière dorée envahissait la pièce, puis, la seconde qui suivit, les trois jeunes filles avaient disparu...
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