Vingt-quatre.
Le bonheur avait un goût de steak juteux et fondant. Ceux dont la simple bouchée donnait un aperçu du Paradis. Maman savait en préparer, j'étais sûr que c'était ça le goût du bonheur. Le bonheur avait aussi le visage et l'odeur de Yanaëlle. Le bonheur était donc quelque chose de génial et extraordinaire. Je l'aimais, et j'aimais être heureux.
Un vent frais a fouetté mon visage, et mes cheveux qui aujourd'hui étaient plus bruns que roux. J'ai levé la tête vers le soleil. Il faisait relativement frais, assez pour que je supporte de porter mes énormes pulls sans transpirer comme une éponge. La clairière où nous étions était jolie avec beaucoup de fleurs et d'insectes, elle ressemblait un peu à celle dans laquelle j'avais dansé avec Yanaëlle au clair de lune. Il n'y avait pas le chant des criquets, seulement les cris, les discussions des campeurs, et le bruit des matériaux. L'activité journalière était de fabriquer une cabane en bois par équipe de deux et qui serait jugée par Yanaëlle et Debby. En temps normal, tout le monde devait recevoir un prix, même si ta cabane était affreusement laide ou à l'instar de celle que j'avais fait avec Rufus : invisible. Nous n'avions touché à rien, préférant vaquer à nos occupations favorites : lire pour lui, me perdre dans mes pensées pour moi.
J'ai délaissé la contemplation du soleil pour un sujet moins lumineux, mais tout aussi incroyable et indispensable : Yanaëlle. Debby lui avait fait une couronne de fleurs qui reposait sur le haut de son crâne. Ses cheveux noirs semblables au plumage d'un corbeau flottaient comme des ailes de papillons. Lentement, doucement et avec grâce. L'eau aussi se mouvait de cette façon élégante. Yanaëlle avait des cheveux faits d'eau. Ils se comportaient de la même manière qu'un voile qui recouvrait des secrets. Dans sa jolie robe jaune, Yanaëlle était une princesse. Une princesse qui n'avait pas besoin d'un prince. Une princesse qui a intercepté mon regard et m'a souri en battant des cils, pour m'amuser. Et ça a marché ! J'ai ri doucement, émerveillé par elle. Elle avait beau prétendre être mauvaise, ça ne changeait pas le ras de marée d'émotions qu'elle déclenchait en moi. Elle a roulé des yeux en me faisant un clin d'oeil avant de rapidement se reconcentrer sur la cabane qu'elle jugeait. J'avais envie de la tirer jusqu'à moi, elle aurait mis ses mains et son nez dans mes cheveux, moi j'aurais frotté le mien dans le creux de son cou où son parfum floral résidait. J'aurais pris une grosse inspiration en imaginant dessiner son odeur unique et...
— Thimoé ?
J'ai froncé les sourcils. Une voix qui n'était pas celle des voix habituelles a résonné.
— Thimoé, mais tu penses à quoi ?
Ah ! J'ai regardé Rufus qui avait détourné son attention de son téléphone sur moi.
— À Yanaëlle, pourquoi ?
Il a soufflé.
— Je te parlais.
— Désolé. Tu parlais de quoi ?
— De Yanaëlle, justement. Ça y est ? Vous vous êtes embrassés hier soir ?
— Hein ? Q-quoi ?! Non, bien sûr que non ! Pourquoi ?!
— Ah oui ? Dommage, j'ai fait un pari avec Debby et je veux gagner. Pourquoi vous ne vous êtes pas embrassés ? Tu ne veux pas ?
Si je ne voulais pas ? J'en rêvais presque. Je fantasmais depuis super longtemps sur les lèvres de Yanaëlle et les miennes, ensemble. J'avais fait des dizaines de dessins dans divers endroits. J'en mourrais d'envie. Et hier... et hier j'avais frôlé l'objet de tous mes désirs. À ce souvenir, j'ai senti mes joues se chauffer et tout mon être se tendre et se couvrir de chair de poule. Le souffle glacé de Yanaëlle contre le mien, son pouls qui semblait battre à mille allure en dessous de sa mâchoire et bon sang sa bouche ! Qu'est-ce que j'aurais pas donné pour l'embrasser.
— Okay, on dirait que tu tournes un film X dans ta tête, c'est compris, tu veux l'embrasser, a ricané mon meilleur pote. Pourquoi tu l'as pas fait ?
— Bah, j'en sais rien, ai-je marmonné en sentant la chaleur sur mes joues. Tu crois qu'elle en a aussi envie ?
Il a roulé des yeux et a indexé quelqu'un dans mon dos, je me suis retourné. Elle était là, souriante et un peu essoufflée. Elle a regardé dans ma direction et ce truc dans mon estomac a remué. J'avais l'impression que des bulles étaient entrain d'éclater dans mon ventre. Je planais car elle me regardait. J'ai essayé de sourire, elle a pouffé. Et j'ai soupiré d'aise.
— Ça suffit maintenant, a dit Ruf. Bref, elle veut aussi t'embrasser.
— Comment tu le sais ?
— Il y a peine trois secondes vous vous bouffiez des yeux. Crois moi, je sais reconnaître le désir quand je le vois.
— Elle me désire ?! me suis-je étonné.
— Bah oui. Et elle te plaît, non ?
J'ai froncé les sourcils. Est-ce que Yanaëlle me plaisait ? J'en savais rien. Tout ce que je voulais était qu'elle soit à moi. L'embrasser et la prendre dans mes bras quand je le voulais. Connaître tout d'elle. Passer le plus de temps possible en sa compagnie. Est-ce qu'elle me plaisait ? Je ne croyais pas...
— Qui plaît à Timothé ?
Nous avons simultanément tourné nos yeux sur le mec artistique qui venait d'arriver avec ses cheveux blonds remplis de gel et son faux sourire. Il n'avait clairement pas la tête de quelqu'un de gentil.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? ai-je demandé, méfiant.
— Je me promenais et là j'ai entendu Raphaël dire qu'une fille te plaisait... à moins que tu sois réellement... homo.
Le dernier mot a été dit avec un peu de réticence, ce qui était un peu bizarre. Et puis, qui étaient Timothé et Raphaël ?
— Écoute mec, sur cette table et dans tout ce camp, personne ne s'appelle Timothé et Raphaël. Tu te rappelles très bien nos prénoms, si tu cherches des ennuis, sache que je ne suis toujours pas satisfait de la raclée que je t'ai mise.
Rufus a élevé le ton, le regard noir, les narines frémissantes de fureur. Le mec artistique a dégluti en essayant de sourire, c'était vain, on voyait sa peur comme une tâche d'avocat sur un t-shirt blanc.
— D'accord, Rufus. Je viens pas chercher la bagarre, du calme ! Je veux juste aider Thimoé pour qu'il séduise la fille qui lui plaît.
— J'ai pas besoin d'aide.
Je ne l'aimais pas. Pas du tout.
— Bien sûr que si ! Je m'y connais en fille. Elles sont toutes les mêmes, essaye de te la jouer mystérieux et séducteur, et elles feront rouler leurs culottes ! C'est mathématique.
— Dis pas ça. Elles sont environ la moitié de la planète, impossible qu'elles soient toutes les mêmes.
Il a roulé des yeux.
— Tu es naïf, dis-lui Rufus.
Ce dernier a soupiré.
— Tu as tort, mec, les gens sont différents, personne n'est pareil dans ce monde. Bref, Thim n'a pas besoin de toi, va-t-en.
— Et qui est l'heureuse élue ? Debby je parie ! Ça se voit que vous êtes amoureux, tous les deux.
— Vraiment ?! je me suis exclamé tandis que Ruf a ricané.
— Ouais, vraiment. C'est un très bon choix, elle est vachement canon... pas autant que Yanaëlle, mais ça va.
Je n'aimais pas le prénom de Yanaëlle sur sa langue.
— Mais pourquoi tu ne sors pas avec Yanaëlle si tes techniques de séduction marchent si bien ? a rigolé mon meilleur frère.
Le visage de Arte s'est soudainement fermé.
— C'est à cause de Zayne Storm.
— Zayne ? avons-nous répété.
— Ouais, l'ex petit ami de Yanaëlle ! Elle est toujours éperdument amoureuse de lui. Depuis leur rupture, c'est à peine si elle rencontre d'autres mecs. Le premier amour ça s'oublie pas, surtout si ce dernier s'appelle Zayne Storm.
Ah. Yanaëlle avait déjà eu un petit ami. Évidemment. Le contraire aurait été étonnant. C'était normal après tout. Les adolescents normaux avaient déjà eu des copains, ils connaissaient l'amour autre que celui de la famille. Il y avait ce cercle où tout le monde était... sauf moi. J'étais dehors et je les regardais. Yanaëlle avait un déjà eu copain. Elle l'avait embrassé. Il connaissait le goût de ses lèvres, le sourire qu'elle faisait quand elle était heureuse. Il la connaissait intimement ce Zayne Storm et pas moi. Moi j'étais juste son jouet. Un gars minable, schizophrène qui s'accrochait à ses chevilles. Une image très nette de Yanaëlle, grande, majestueuse entrain de m'écraser, moi, misérable est apparue. J'avais le tournis. Enfin, j'ai cru avoir le tournis et un mélange de nausée. Une irritation a gratté mon cœur, il s'est effrité doucement et si lentement que la douleur a décuplé. J'étais jaloux. Jaloux de quoi ? D'un mec qui n'était même plus avec elle !
Mais pas dans son cœur !
Oh non, pas vous !
— Ah, ai-je répondu d'une voix rauque.
— Et alors ? C'est son ex, et sincèrement je ne crois pas qu'elle l'aime encore, a ajouté Rufus en me regardant.
Le mec artistique a ricané d'un air mauvais.
— Vous ne le connaissez pas ! Zayne est inoubliable comme mec. Il est canon, intelligent, gentil sans trop l'être, confiant, cultivé... c'est le gars parfait quoi !
Parfait.
Parfait.
Parfait...
Cet écho a résonné en moi. Évidemment qu'il était parfait. Parfait. Parfait. Et moi dans toute cette histoire ? Je n'étais même pas normal, comment être une personne idéale ? J'étais une montre cassée. Yanaëlle aussi n'était pas parfaite même si elle faisait semblant, mais pourquoi ça faisait si mal de savoir que son premier amour était tout ce que je ne serais jamais ? Est-ce qu'il savait pour elle ? Une douleur inconnue mélangeant jalousie et rancoeur m'a soulevé l'estomac. Elle était forte, comme une entaille au bras, une blessure qui allait laisser une marque. Une blessure qui m'a ramené à la réalité : Yanaëlle et moi étions deux planètes d'un système solaire différent, nous n'auront jamais la chance de nous croiser un jour, ou d'écrire notre histoire.
— La perfection n'existe pas. Puis, rien ne prouve qu'elle ne l'a pas oublié, a dit Ruf, toujours en me surveillant.
Le mec artistique a claqué sa langue.
— Tu es idiot ou tu fais exprès ? Le seul moyen pour une fille de passer à autre chose avec son premier amour est de trouver mieux que lui ! Ce qui est vraiment très compliqué sachant comment Zayne était. Nous ne sommes pas à sa hauteur, a-t-il complété en plantant son regard dans le mien.
C'était un conseil. On aurait dit qu'il savait. Qu'il savait que Yanaëlle devenait petit à petit mon eau.
— Ah, ai-je chuchoté.
J'ai essayé de m'attacher à la soirée d'hier, à notre danse. Essayer de me dire que je comptais pour elle... mais je ne serais jamais à la hauteur.
— Exactement.
Il m'a défié du regard. Je crois qu'il s'était pris pour un prince charmant, j'ai compris que Yanaëlle n'était pas la princesse à sauver. Elle était plutôt la méchante du conte.
— Oula, qu'est-ce qui se passe ici ?
Et elle venait d'arriver, comme si elle lisait dans mes pensées. Elle avait son sourire Thimoé — le sourire qu'elle ne faisait qu'à moi— et toute sa splendeur. Elle brillait si fort, avec une joie si vive, j'ai senti mon cœur s'incliner devant elle. Il avait peur. Je me suis rappelé que je pouvais être une de ses marionnettes.
— Il nous parlait de Zayne Storm, ton ex, a répondu mon meilleur frère car le mec artistique et moi étions entrain de la vénérer en silence.
Elle a pâli, genre vraiment. Ses sourcils se sont aussitôt froncés avant qu'elle ne braque ses yeux sur le mec artistique. C'était à son tour de pâlir. C'était un peu drôle à voir.
— Zayne ? Tu leur as parlé de Zayne ? Pourquoi ? En quoi ça te regarde, Arte ?
— Rien, mais juste...
— Non, ça suffit. Tu as répondu à ma question, je n'ai pas demandé de justification. À quoi tu pensais ?! Vie privée, tu connais ?
Elle était en colère. J'ai pu sentir de la lave en ébullition dans son sang. Elle a enlevé la couronne de fleurs en passant une main dans ses cheveux tout en toisant Arte— comment on pouvait s'appeler comme ça ? C'était une surprise pour tout le monde car personne ne l'avait vu ainsi... mais elle était belle. La Yanaëlle furax avait quelque chose d'aussi beau que les étoiles qui donnaient de l'espoir mais pas tant que ça. Elle n'était plus mon eau paisible, elle était ma mer déchaînée. J'ai dégluti quand un sentiment inconnu a comprimé mon cœur.
— Je suis désolé, s'est excusé le coupable.
Elle a plissé les yeux.
— Tu as raison de l'être ! Comment vous en êtes arrivés à parler de lui ? Et vous n'étiez pas censés vous détester ?
— Il est venu donner des conseils à Thimoé pour qu'il séduise Debby. Tu sais la routine, les mecs parlent trop.
— Séduire Debby ? s'est-elle étonnée en se tournant vers moi. Où est votre cabane que je lui donne un prix, je ne sais même pas quoi faire de vous. Et toi, Arte, va retrouver Jacqouille et reste à ta place.
— Yana...
— Après Arte, s'il te plaît, après.
Il est parti la queue entre les jambes, la mine triste. Yanaëlle devait déteindre un peu sur moi car je n'ai pas ressenti de la compassion. Est-ce que c'était ça, être méchant ?
— Maintenant vous allez tout m'expliquer. Où est votre cabane ? Pourquoi il y a toujours toutes les planches ?
— Elle est dans notre tête, a dit Ruf. Dans notre tête c'est une sorte de villa de jeu vidéo. N'est-ce pas Thim ?
— Exactement. Elle a même des rideaux en velours. Tu connais cette matière, Yanaëlle ?
— Je ne suis même pas surprise, pas du tout. Je fais comment pour vous donner un prix ?
— Le prix du duo le plus bizarre ? ai-je proposé.
Elle m'a fait le sourire Thimoé.
— Ça ne marche pas comme ça et tu le sais. Bref, faites quelque chose.
— Il y a vraiment des gens qui fabriquent des trucs avec du bois et des clous ?
— Oui, les autres campeurs. Vous êtes sérieux ?
— C'est une question philosophique qu'on doit commenter ? s'est renseigné Rufus.
Elle a roulé des yeux, mais ils étincellaient déjà.
— Je vous laisse cinq minutes. S'il le faut, placez une pointe sur le bois, je vais faire avec.
— Tu es drôlement gentille aujourd'hui !
— On appelle ça la pitié, Thim. Je reviens... et ce soir je passe dans ta chambre Thimoé Davinson.
— Est-ce que tu veux le violer ?
— Ce n'est clairement pas ton problème LeChien.
— Je protège mon frère !
— Tu lui lis des histoires érotiques dans son sommeil, ce n'est clairement pas moi le danger pour sa pudeur et sa sexualité.
— C'est pour l'instruire.
— C'est pour m'instruire, ai-je répété.
— Je vais partir d'ici avant que votre bêtise me colle à la peau.
Elle nous a offert son faux sourire parfait, a remis sa couronne de fleur avant de s'en aller, laissant son parfum et sa marque au passage. Yanaëlle avait le don d'effacer certains de mes doutes avec sa présence. J'ai suivi le contour de ses hanches, le balancement de ses cheveux, la couleur doré de sa peau. J'ai eu envie de la couvrir de baiser le jour où j'aurais le courage de le faire... avant de me rappeler que Zayne Storm avait sûrement du déjà le faire. Est-ce qu'on pouvait détester quelqu'un qu'on ne connaissait pas ?
— Je l'aime pas ce Zayne, ai-je marmonné à Ruf.
— Moi aussi, il ressemble trop au méchant des livres.
— Tu as déjà vu les méchants des livres, toi ?
— Et si on faisait cette cabane ?
J'ai acquiescé même si j'avais la tête pleine de Yanaëlle et Zayne ensemble.
Le papier était froissé, les coups de crayons bâclés. Ce n'était pas un chef-d'oeuvre, mais maman disait qu'on dessinait ce qu'on avait sur le coeur. J'ai secrètement remercié la nuit, qui m'a permis de ne plus voir le dessin de Yanaëlle qui appartenait à un autre.
🌙 * ✵
Heeeeeeey mes orchidées bleues !
Comment ça va ?
Je suis vraiment désolée de poster de manière vraiment très irrégulière et de ce chapitre vraiment très court( oui dans ma tête 2500 mots c'est très court)
J'ai eu une sacré panne d'écriture alors sorry si le chapitre n'était pas aussi bien que les précédents.
J'espère qu'il vous a été supportable à lire🙇🏽♀️
Thimoé fait la découverte de Zayne ! Ça présage quoi d'après vous ?
Vous croyez que Yanaëlle va enfin lui parler de son ex petit ami au chapitre suivant ?
Des avis, des remarques ?
Et la question que tout le monde se pose... A quand le couple Yanaëlle/ Thimoé ?( mon petit doigt me dit qu'il arrive très vite.. 😏 )
Le chapitre est petit et pas franchement intéressant (je vais revoir ça à la réécriture) du coup j'ai plus rien à vous dire à part que je suis déterminée à finir la première partie de ce livre. Si je le fais, j'aurais franchi un grand cape.
Voici, c'est tout à très prochainement j'espère !
QUESTION POUR APPRENDRE À SE CONNAÎTRE :
Dites moi les différents surnoms que l'on vous donne !
Prenez soins de vous,
Bisous guimauves
Tendrement
Phanuelle 🚶🏽♀️❤
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