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"Il faut deux cœurs pour aimer"

~ par ~


Il y a déjà quelques jours à présent, Kim Namjoon est venu habiter chez son fils. Une mauvaise chute qui l'a conduit à des journées passées à l'hôpital suite à quelques points de suture et le voilà infantilisé à nouveau sous les regards inquiets de sa famille.

Mais Kim Namjoon va très bien au fond, alors oui il n'a plus toute sa jeunesse et ses jambes d'ancien professeur d'université déjà peu fortes le lui rappellent sans cesse comme elles l'ont fait la semaine précédente alors qu'il apportait des bocaux de tomate à la cave et qu'elles ont décidé de glisser dans les escaliers. Ça arrive à tout le monde mais quand on approche des quatre-vingts ans ce n'est jamais à prendre à la légère, surtout qu'il a eu la bonne idée de s'évanouir quelques instants à la suite de sa chute.

Et vient le moment où il n'est plus qu'un objet fragile, une porcelaine à conserver à tout prix aux yeux de sa famille : le genre de porcelaine qu'on aime car c'est un objet de famille ou un cadeau de mariage. Arrivent alors les conversations sérieuses dans son dos, auxquelles il n'a plus le droit de prendre part en tant que sujet mais dont il est l'objet principal. Fusent ensuite les « ça pourrait à nouveau t'arriver », « le médecin a dit que ce serait plus prudent », « tu n'as plus vingts ans », « ça te permettrait de profiter de tes petits enfants ».

La maison de son fils cadet – celui ayant écopé de sa garde – est grande, si bien qu'il en habite une immense chambre d'ami équipée d'une kitchenette et d'une petite salle d'eau fermée dans un placard, la chambre voisine de celle de son petit-fils, les parents étant à l'étage.

Il y passe ses journées quasiment enfermé, ne sortant que par la petite baie vitrée donnant directement sur un coin à l'ombre du petit jardin qui encadre la maison. En quelques jours il a déjà pris l'habitude de faire un petit tour : les jours froids arrivent, autant en profiter. Puis un infirmier vient lui délivrer des soins, et à midi c'est une aide à domicile qui vient lui faire à manger et le ménage, trois fois par semaine au moins, enfin, ça fait quelques jours et il l'a déjà vu trois fois. Le soir il mange à table avec son fils et sa belle-fille, et ses petits-enfants plus si petits que ça. L'aînée aura bientôt dix-huit ans. Elle aime ses parents au fond, mais elle a aussi envie de découvrir des choses et dans quelques mois elle partira de la maison. Namjoon se rappelle le vide que le départ de sa fille avait laissé, avant que son fils cadet parte à son tour et qu'ils se retrouvent avec le petit dernier, plus jeune, puis seul avec son épouse. Ç'avait été un bouleversement ce premier départ, pour les deux cadets, et pour les parents aussi mais c'est dans l'ordre des choses, n'est-ce pas ? Taehyung, le deuxième enfant de cette maison – si tant soit peu il mérite encore d'être traité comme un enfant, il allait vers ses seize ans tout de même ! – n'était pas aussi proche de sa sœur que ses deux fils à lui l'avaient été de sa fille et, aux vues des piques qu'ils se lançaient à longueur de temps et des remarques à peine moqueuses que sa sœur lui adressait, il ne verrait donc pas sa vie changer pour le pire. En effet, il était peut-être temps que Minha s'en aille et que Taehyung grandisse encore un peu sans être sous le joug de sa sœur aînée.

Ce soir le dîner était tendu. Les premiers soirs peut-être, tout le monde avait fait un effort pour accueillir le nouveau locataire mais ce n'était vraisemblablement pas l'humeur qui régnait habituellement aux dîners quotidiens en famille.

- Alors Taehyung, le tisait Minha, comment va Jungkook aujourd'hui ?

- Sunhi, appelait Seokjin depuis la cuisine, je ne sais pas où tu as mis la salade.

Les voix s'élevaient autour de Namjoon qui, devenant un peu sourd – il le remarquait notamment lorsqu'il y avait plus d'une personne parlant autour de lui – ne parvenait pas à suivre toutes les conversations à la fois.

Il alla pour se lever et aider son fils à la cuisine quand sa belle-fille l'interpella :

- Restez assis Appa-nim, il va se souvenir qu'il a lui-même fait les courses hier dans quelques instants et qu'il ne range pas la salade à la même place que moi, mais qu'il a l'habitude de la chercher là où moi je la range.

Sa belle-fille était la pire à comprendre : elle parlait vite, avalait ses mots et avait toujours ce ton professionnel qui faisait frémir Namjoon au plus haut point. Lui était un homme cultivé mais il était toujours resté très simple, très humble. Il enseignait le hanja et le chinois, il avait beaucoup voyagé en Asie, lu beaucoup de livres, étudié la linguistique et beaucoup d'autres choses. Il était ce qu'on pouvait appeler un intellectuel. Son fils avait choisi une voix complètement différente : le commerce, sûrement un peu par opposition à son père qu'il n'estimait pas beaucoup dans sa jeunesse, le trouvant au comble de la ringardise. Il avait donc épousé Sunhi, une comptable de l'entreprise où il travaillait avec qui il avait eu deux enfants après plusieurs fausses-couches.

Pour autant ni Seokjin, ni Sunhi ne chérissaient leurs enfants outre-mesure. Ils remplissaient leurs devoirs de parents au format minimum : éducation, soins et besoins primaires ; ils n'étaient pas très affectifs avec Minha et Taehyung. Encore une réaction à la propre éducation qu'il avait fourni avec sa femme à ses enfants, pensa Namjoon un peu tristement en regardant son petit-fils baisser les yeux devant sa sœur et tripoter ses mains sous la table : mais que pouvait-il y faire aujourd'hui ? Il n'était que spectateur de ce que devenait sa descendance.

- Les enfants, qui va chercher le sel que Appa a oublié de prendre ? demanda Sunhi.

Tout dans sa voix sonnait en reproche. Seokjin ne releva pas, regardant ses enfants.

- C'est assez salé pour moi, les informa Minha pour signifier qu'elle ne se lèverait pas pour rendre un service.

Ce fut alors Taehyung, le seul avec Namjoon à ne pas avoir prononcé un mot ce soir, qui se leva et qui revint traînant des pieds avec le sel.

Taehyung était tristounet. Namjoon avait beaucoup côtoyé le petit garçonnet rêveur et joyeux, rieur et blagueur, de longues journées durant pendant un bon mois tous les étés avant le décès de sa femme : il avait donc du mal à se faire à cette image morose de son petit-fils qu'il n'avait pas vu grandir.

Le temps était passé vite depuis la mort de leur grand-mère. Seokjin avait pris des rides, les enfants avaient grandi et Namjoon avait pris un gros coup de vieux. Aujourd'hui Taehyung était un adolescent maussade et Namjoon aurait beaucoup aimé le voir heureux et insouciant à nouveau.

- Appa, eomma ! les apostropha Minha un sourire moqueur sur le visage fixant du coin de l'œil son frère qui se raidit alors qu'ils étaient en train d'avoir une conversation entre eux à voix basse que Namjoon depuis l'autre coté de la table n'avait pas le moins du monde suivi.

Namjoon assistait, silencieux, au spectacle tendu qui se jouait devant lui. Les parents se retournèrent vers leur fille, Sunhi haussant les sourcils et Seokjin distraitement.

- Hmm ? fit ce dernier.

- Taehyung il...

- Arrête ! hurla alors Taehyung en se redressant, manquant de renverser sa chaise qui crissa sur les carreaux de la salle à manger et faisant sursauter toute la tablée.

Il partit en courant vers sa chambre criant à nouveau un « Je te déteste » à l'intention de sa sœur qui leva les yeux au ciel.

- Ça va, essaya-t-elle pour calmer le jeu voyant pourtant qu'elle était peut-être allée un peu loin. Y a pas mort d'humain !

- Je peux savoir ce qu'il se passe ? gronda Sunhi. Taehyung revient immédiatement, on ne quitte pas la table comme ça !

Mais Taehyung était déjà loin dans la maison et on entendit la porte de sa chambre claquer. Un nouveau sursaut pour Namjoon qui était au comble de la gêne et dont les mains tenant ses couverts tremblaient plus qu'à l'accoutumée.

- Seokjin, dis quelque chose, tu ne peux pas laisser ton fils agir de la sorte ! se retourna Sunhi.

Seokjin se pinça l'arrête nasale. « Plus tard Appa, j'ai la migraine » n'avait-il cessé de répondre à son père chaque fois que Namjoon lançait la conversation.

Il ne dit pourtant rien de tel à sa femme, essayant plutôt de calmer le jeu.

- Laisse-le se calmer seul, dit-il seulement. Et Minha arrête d'embêter ton frère.

De grandes paroles en l'air que Namjoon n'avait jamais eu à prononcer avec ses propres enfants. Taehyung était triste et ses propres parents ne le voyaient pas, ça rendait le grand-père malheureux.

- Mais..., essayait de répondre Minha avant d'être coupée par son père.

- Pardon Appa, ajouta-t-il, on est tous très fatigués ces temps-ci. Et les enfants se disputent beaucoup. C'est l'âge.

Namjoon n'osa pas dire que Seokjin et son frère et sa sœur se disputaient très rarement et que ça avait même presque disparu à l'adolescence et que ce n'était donc pas une question d'âge : il y avait déjà assez de débats ouverts pour ce soir.

Le dîner se termina dans un silence de plomb, la table fut vite débarrassée, si vite que Namjoon qui voulait pourtant aider n'arriva pas à suivre le mouvement et se retrouva très rapidement seul dans le salon-salle-à-manger.

Il avait l'impression de ne plus avoir la main sur sa vie et de n'être devenu qu'un sujet inutile du monde. Il avait l'impression d'être à nouveau un enfant découvrant la réalité ou un étranger dans sa propre famille. Il décida de rejoindre lui aussi sa chambre, comme tous les autres.

C'est alors qu'il l'entendit, pleurer doucement, un peu comme tous les autres soirs dans sa chambre, quand tout le monde partait se coucher. Namjoon l'avait déjà entendu, tous les soirs depuis qu'il avait emménagé dans le foyer éclaté.

Ça lui brisait le cœur mais jusqu'à présent il n'avait pas eu le courage d'aller parler à son petit-fils. Il était bien trop vieux, il n'allait rien y comprendre. Mais ce soir il se rendit bien compte qu'importe les maladresses qu'il allait pouvoir lui adresser, il fallait qu'il fasse quelque chose.

- Taehyung, c'est halabeoji, je peux entrer ?

Seules des larmes et des sanglots lui répondirent. Namjoon poussa la porte.

Taehyung avait enfoui la tête dans son oreiller et il pleurait. Doucement, silencieusement mais parfois plus fort car son cœur avait mal et qu'il ne savait pas quoi faire. Namjoon avait bien compris qu'il n'était pas comme les autres garçons, qu'il était son petit Taehyung à lui.

Le grand-père s'avança dans la chambre de son petit-fils et s'assit au pied du lit sur lequel l'adolescent s'était probablement jeté.

- Tu veux me parler Taehyung ?

L'adolescent secoua la tête qu'il n'avait toujours pas sortie de son oreiller, sa respiration était hachée.

- Alors est-ce que je peux te raconter une histoire ?

Le jeune homme secoua la tête à nouveau. Plus timidement.

- Ce n'est pas une histoire de quand vous étiez petits où nous faisions les voix avec halmeoni, c'est une histoire que je n'ai jamais racontée à personne mais que j'ai envie de te raconter à toi.

Le garçon s'arrêta de pleurer mais resta étalé sur son lit, tournant un peu la tête sur le coté, sans pour autant regarder son grand-père. Des sursauts agitaient encore son corps et son visage était dévasté par des larmes que l'oreiller n'avait pas pu absorber mais il était curieux.

Alors Namjoon commença :

« À mon époque Taehyung, il fallait avoir deux cœurs. Je connais pleins de personnes qui avaient deux cœurs. Moi-même j'ai eu un deuxième cœur. Et tu vois, il va se remettre à battre avec les souvenirs.

» J'étais un peu plus vieux que toi je pense. Je n'étais pas encore professeur, c'était lors de ma dernière année je crois. Je l'ai vu pour la première fois en cours de calligraphie chinoise. Le premier cours de l'année scolaire 1961. C'était ma dernière année et je ne l'avais jamais vu avant mais j'aurai été incapable de le manquer. Donc j'en ai déduit que c'était un nouvel élève. Il faut dire que je n'étais pas très doué en calligraphie donc j'étais encore avec les débutants. J'avais pour directive de progresser vite ou ça aurait pu m'entraver dans l'obtention de mon diplôme. Mais tu me connais, je suis très maladroit et j'ai l'écriture d'un enfant de quatre ans. Ta grand-mère d'ailleurs disait que tu écrivais mieux que moi alors que tu n'avais pas encore huit ans, tu te souviens comme elle se moquait de moi ? »

Taehyung hocha la tête et sourit un peu, profitant de la voix posée de son grand-père. Il ne comprenait pas tout mais il avait toujours aimé écouter les histoires de Namjoon.

« J'étais moindre, donc cette année-là j'avais décidé de me rendre à tous les cours de calligraphie. Lui il était vraiment très doué, il peignait comme un maître. Et moi qui avait toujours considéré la calligraphie comme une perte de temps, comme quelque chose d'inutile et qui était très en colère car de simples traits de pinceaux menaçaient de mettre en échec de longues années d'études, et bien j'ai complètement changé d'avis quand je l'ai vu faire.

- Lui ? nota finalement Taehyung.

- Oui, lui Taehyung. À mon époque il fallait avoir deux cœur pour ça, l'informa délicatement Namjoon.

- Halabeoji mais... »

Taehyung se retourna pour observer son grand-père. Un sourire un peu triste ornait ses lèvres.

« J'ai aimé ta grand-mère Taehyung, de tout mon cœur. Je l'aime encore. J'ai été un homme comblé, heureux. J'ai eu trois enfants, des petits-enfants qui sont tous magnifiques et grandissent bien et en bonne santé et que j'aimerai toujours quoi qu'ils fassent, comme j'ai continué à aimer ton oncle malgré ce qu'il a fait. »

Namjoon voulait par là spécifier à Taehyung qu'il serait toujours là.

« Et j'ai élevé ton père, tu sais. Nous ne nous sommes pas toujours entendu mais lui aussi a toujours été là pour sa famille. Et il t'aime Taehyung je te le promets, il est juste un peu maladroit, il doit tenir de moi. Mais il a le cœur de ta grand-mère. Et toi aussi. »

Taehyung resta silencieux. Ses larmes avaient séché. Son grand-père avait si bien lu en lui : comment avait-il deviné ? Était-ce Minha ? Pourquoi Minha serait-elle allée parler à son grand-père ? Ce dernier était beaucoup plus proche de lui que de sa petite-fille.

« Halabeoji, tu peux me raconter encore s'il-te-plaît ? »

Namjoon était perdu dans ses souvenirs, un sourire gravé sur le visage.

« Halabeoji, il s'appelait comment ? »

Alors Namjoon se réveilla de son instant d'absence et déplaça son regard bienveillant vers le petit brun bouclé qui s'était redressé et attendait, en tailleur sur ses couvertures, la suite de son histoire.

« Continue s'il-te-plaît, halabeoji ! » le pria le jeune garçon.

Namjoon reprit.

« Il s'appelait Jimin. C'était un artiste. Il ne suivait pas le cursus de langue comme je l'ai pensé au début. Il était danseur et il faisait de la calligraphie pour un rôle dans une œuvre moderne de ballet européano-asiatique où il incarnerait un pinceau. »

Taehyung éclata de rire.

« Tu blagues halabeoji ! C'est quoi ça ? » fit-il d'une petite voix encore faible à cause de son gros chagrin.

Namjoon sourit, les yeux dans le vide, n'ayant pas du tout l'air de blaguer.

« Quand il m'a dit ça si naturellement je t'avoue que moi aussi j'ai eu envie de rire. Mais j'étais perdu dans ses yeux et par sa voix. Il m'a avoué qu'il avait fait de l'opéra aussi. Il était un peu plus vieux que moi, d'à peine quelques années. Il faisait beaucoup plus jeune pourtant. Il avait un visage très poupon, des yeux rieurs et une bouche aux lèvres exquises comme aucune femme n'en a jamais eu naturellement. Il m'a expliqué qu'il avait abandonné l'opéra car il ne trouvait pas assez de rôles : on lui reprochait d'avoir une voix trop aiguë, d'être trop petit et trop féminin. On l'avait découragé mais il avait d'autres talents, comme la danse, où sa féminité ne lui avait pas été reprochée. Il était beau, très beau. Au départ je pensais que c'était son coté féminin qui m'attirait chez lui, ses petites manies, sa voix douce. Et pourtant ce n'était pas ce qui m'attirait chez une femme. »

Taehyung rougit un peu, gêné des confessions de son grand-père mais il le laissa poursuivre sa magnifique histoire qui le réconfortait plus que ce qu'il en aurait attendu.

« Mais, et halmeoni ? remarqua Taehyung.

- Je connaissais déjà ta grand-mère à cette époque. Mais tu sais elle n'était pas du tout amoureuse de moi comme je l'étais d'elle : c'était une femme indépendante, tout l'opposé de ce qu'on attendait d'une jeune fille pour qu'elle soit une bonne épouse. Pour elle nous étions de grands amis. Moi j'étais fou amoureux. J'étais déjà amoureux quand j'ai fait la connaissance de Jimin. Je l'étais quand je passais du temps avec lui et je l'étais encore après. »

Taehyung hocha la tête, ne demandant pas plus d'explications.

« Mais j'étais aussi très amoureux de Jimin. Et j'ai découvert qu'il me fallait pour ça avoir un deuxième cœur. Alors mon cœur s'est scindé en deux et chaque partie a crû en l'amour de son coté, indépendamment de l'autre et jamais plus elles n'ont fait un. »

Namjoon posa la main sur sa poitrine, un peu plus à droite de l'emplacement où aurait du se trouver son véritable cœur.

« Je comprends pas ton histoire de double cœur halabeoji..., avoua Taehyung.

- C'est que je ne pouvais pas aimer plusieurs personnes avec un seul cœur Taehyung ! Et je n'aurais jamais pu aimer que Jimin. Alors mon cœur a trouvé la solution tout seul.

- C'est parce que Jimin était un homme ? demanda timidement Taehyung.

- Oui, répondit Namjoon. Et je ne sais pas ce qu'il en est aujourd'hui, peut-être tu pourras me mettre au courant, mais à mon époque c'était impossible.

- Mais toi tu aimais Jimin pas vrai ? Tu n'as jamais voulu ne plus l'aimer si ?

- Si Taehyung. J'ai vraiment souhaité arrêter de l'aimer, je me suis accroché à l'amour que je portais à ta grand-mère malgré ses rejets car Jimin commençait à prendre trop de place dans ce cœur encore unique que je possédais. Je voulais le détester mais mon cœur ne voulait pas, il ne pouvait pas. Alors il a trouvé la solution tout seul : il s'est séparé pour être deux. Et ne va pas croire que j'aimais à moitié Jimin et à moitié ta grand-mère, non : ils avaient chacun tout l'amour qu'un cœur puisse donner.

- Dis halabeoji, tu l'as su comment que tu aimais Jimin ? »

Namjoon était heureux de voir le visage de son petit-fils gommer les traits tristes qu'il portait depuis des jours et sûrement des semaines avant qu'il n'arrive.

« Nous avons commencé à passer beaucoup de temps ensemble avec Jimin. Il me donnait des cours de calligraphie et avec lui, cette matière j'ai vraiment commencé à la considérer comme un art. Il n'y avait aucune pression, lui faisait ça par découverte, il me montrait les mouvements, il les dansait parfois. Et moi je lui expliquait l'histoire des caractères, je faisais des poèmes avec.

- Des poèmes ? s'étouffa Taehyung. C'est si romantique halabeoji ! Je ne te pensais pas comme ça.

- Nous faisons des choses pas toujours très raisonnables quand on est amoureux, avoua Namjoon.

- J'ai embrassé mon meilleur ami sur la bouche. »

Les paroles précipités de Taehyung étaient un aveux qui trouva le silence. Mais pas un silence pesant, plus un silence apaisant. Il l'avait dit. Et c'était venu de sa bouche à lui et pas de celle de sa sœur ou de quelqu'un d'autre. Il était... soulagé ?

Namjoon ouvrit ses bras et le jeune homme vint se glisser contre la poitrine autrefois large et forte de son grand-père. Il avait adoré ces bras encore forts malgré l'âge quand il était plus jeune, il n'aurait pourtant jamais cru trouver en son grand-père un tel complice à présent.

« Taehyung, si moi mon cœur s'est séparé ça ne veut pas dire que le tien doit se séparer aussi d'accord ? Je ne voulais pas te raconter cette histoire pour que tu penses que tu n'as pas la possibilité d'aimer qui tu veux pleinement. C'est un peu différent aujourd'hui n'est-ce pas ? Je les vois à la télévision tous ces jeunes avec leurs multiples couleurs, ils sont rayonnants, ils me font penser à Jimin qui adorait tout ce qui brillait et était coloré. »

Toujours blottit entre les bras de son grand-père dont le souffle s'échouait dans ses cheveux emmêlés, Taehyung voulait pleurer, mais de joie, et de soulagement cette fois. Il serrait si fort contre lui ce grand-père à l'odeur de personne âgée dont il aurait pu briser ses vieux os facilement s'il n'avait pas porté de nombreuses couches de tissus et de laine. Taehyung se sentait en sécurité à ses cotés, dans ses bras. Il avait à nouveau envie de sourire, il savait qu'il avait au moins un allié dans ce monde.

« Tu veux me parler de ton ami ? demanda Namjoon ne relâchant pas la pression sur le corps de son petit-fils. Jungkook c'est ça ? C'est lui ? »

Taehyung hocha la tête.

« Oui c'est lui. »

Namjoon sourit.

« J'ai déjà croisé un Jungkook quand tu étais petit à un de tes anniversaires non ? »

Taehyung afficha un grand sourire carré.

« Il est à tous mes anniversaires depuis la petite école. »

Puis il ajouta une demande en se décollant enfin de son grand-père :

« Tu le trouves comment ? »

Namjoon rit, heureux de cette connexion qu'il avait réussi à établir avec ce petit être cher à son cœur en pleine découverte de la vie, si jeune encore. Il était heureux de parler la même langue que lui malgré les temps qui séparaient leurs deux jeunesses.

« Dans mon souvenir c'était un très mignon petit garçon, un peu timide non ? »

Le jeune homme hocha timidement la tête, un air joyeux sur un visage un peu rougissant, les yeux papillonnant.

« Il est très beau maintenant, halabeoji, il aime beaucoup le sport et les jeux-vidéos, on joue ensemble parfois. Il fait de la boxe, il n'a peur de rien. »

Namjoon passa une main délicate dans les cheveux de son petit-fils tout en l'écoutant.

« Mais si tu avais pu vivre avec Jimin, halabeoji, tu l'aurais fait ? »

Le vieil homme se replongea dans ses souvenirs. Dans ces souvenirs Jimin était toujours jeune comme lors de leur dernière rencontre. Il était magnifique dans son grand manteau vert sapin boutonné jusqu'en haut qui recouvrait son corps jusqu'à ses mollets bottés. Il avait les cheveux soignés, peut-être un peu de maquillage. Il disait qu'il aimait le monde du spectacle pour le maquillage. Qu'il pouvait être beau sur scène, qu'il pouvait être lui-même et qu'il n'avait pas honte. Parfois il sortait vêtu de manière extravagante, parfois un peu maquillée, mais il avait avoué à Namjoon qu'il aurait aimé pouvoir se montrer tel qu'il était mais qu'il n'osait pas. « Un peu comme tu n'oses pas m'aimer » avait-il ajouté à ce moment-là.

« Non, dit-il.

- Pourquoi ? demanda alors Taehyung surpris par la réponse de son confident.

- Parce qu'il fallait deux cœurs à cette époque, et qu'un des deux était voué à rester caché et à ne pas empiéter sur le premier. Jimin refusait d'avoir deux cœurs, il disait que ça diviserait aussi son amour pour moi, il voulait m'aimer complètement. Et moi je ne voulais pas me cacher toute ma vie. Je voulais être professeur, avoir des enfants, vivre une vie tranquille. Jimin était trop coloré pour moi, il attirait trop les regards. »

Taehyung baissa la tête, peut-être un peu déçu.

« Tu ne l'aimais pas assez alors ? »

Un des deux cœur de Namjoon se serra.

« Tu sais Taehyung, je ne crois pas qu'il ait été question de l'intensité de l'amour que je lui portais. Mes deux cœurs pouvaient aimer plus qu'un seul cœur ne peut le faire. Et j'aimais Jimin avec l'un d'entre eux tout entier. Mais si j'avais cherché à séparer cet amour du reste pour ne pas souffrir et le faire souffrir, c'était parce que la situation de l'époque était bien différente : avec deux cœurs je pouvais aimer Jimin correctement sans que nous ne risquions notre vie. »

Taehyung hocha la tête, peut-être un peu convaincu. La situation n'était pas à son avantage aujourd'hui non plus.

« Il est toujours là, ce cœur qui aimait Jimin. Quelque part il l'aime toujours... comme l'autre aime toujours ta grand-mère.

- Halabeoji, tu crois que Jungkook aussi a deux cœurs ? Tu crois qu'il m'aime aussi fort que tu aimes Jimin avec son deuxième cœur ? Et Jimin, tu crois qu'il t'aime avec un deuxième cœur, enfin, aujourd'hui ? Il est où Jimin aujourd'hui ? »

Le vieil homme ne s'attendait pas à être ainsi noyé sous les questions. Mais il ferait de son mieux pour répondre à son petit-fils.

« Je ne sais pas combien de cœur a Jungkook, Taehyung. Je te souhaite pourtant de trouver quelqu'un qui n'ait un cœur que pour toi si toi tu lui offres tout le tien.

- Tu as dit que ça ne changeait rien à ton amour pourtant...

- Non, ça ne change rien à mon amour. Mais ça change beaucoup à la vie.

- Il est où Jimin ? réitéra Taehyung.

- Jimin il est parti dans un pays où on pouvait aimer avec un seul cœur qui on voulait. Dans un pays où il n'avait pas besoin de séparer son cœur pour aimer un homme.

- Et pourquoi tu n'es pas allé avec lui halabeoji ?

- Parce que moi j'avais déjà deux cœurs distincts et que l'autre voulait autre chose que mon pays pouvait me donner. J'ai choisi la facilité.

- Et si ton pays avait accepté Jimin ? »

Namjoon secoua la tête. C'était absolument impensable. Il n'aurait pu rendre Jimin heureux.

« C'était impossible Taehyung. Soit tu séparais ton cœur, soit tu partais, soit tu étais malheureux toute ta vie. Et Jimin ne pouvait pas séparer son cœur.

- Alors Jimin t'as laissé ? »

Namjoon hocha la tête, tristement.

« Et toi tu l'aimes toujours ?

- Peut-être Taehyung, qui sait. Mon deuxième cœur lui l'a toujours aimé mais il n'aurait pas pu l'aimer comme il le méritait. »

Car Namjoon n'en avait jamais voulu à Jimin d'être parti en Europe. Car Namjoon s'en serait voulu par contre de le garder près de lui et de l'aimer caché avec un cœur et de vivre avec le deuxième alors que son amant aurait risqué sa vie et son cœur unique pour lui.

« Mais ce n'est plus l'important à présent. L'important Taehyung, c'est que toi tu gardes ton cœur intact et que tu n'aies pas peur d'être qui tu es d'accord ? »

Le jeune garçon baissa les yeux et se mit à tripoter le bout de ses chaussettes cette fois.

« Que ce soit Jungkook, un autre homme, une femme peut-être un jour ? plaisanta le grand-père s'amusant à retourner ses propres codes. D'accord Taehyung ? »

Timidement finalement, l'adolescent hocha la tête. Namjoon sourit et sur son visage ridé parurent les deux fossettes qui autrefois avaient fait tomber Jimin de toute sa hauteur, lui faisant perde ses moyens et sa confiance et avaient failli le faire rester en Asie.

« J'aurai aimé te présenter Jimin. Je suis certain qu'il aurait pu te faire rire bien mieux que moi, te réchauffer le cœur et te donner foi en l'avenir. Jimin a toujours eu le cœur tourné vers le bonheur quoi qu'il se passe, alors que moi aujourd'hui j'ai le cœur qui pleure encore son départ du haut de mon âge avancé.

- Tu es toujours romantique comme si tu avais vingts ans halabeoji ! le rassura Taehyung. »

Le grand-père pouffa presque.

« Merci Taehyung, ajouta-il en tendant sa main à son petit-fils.

- Halabeoji, j'ai peur de le dire à Appa et Eomma... »

Namjoon sera la main de son petit-fils dans la sienne, puissante mais toute fripée ; et peut-être un peu tremblante même s'il ne voulait se l'avouer quand parfois encore il peignait ou simplement recopiait des textes en caractères hanja.

« Tu n'es pas obligé Taehyung, tu peux le faire plus tard. »

L'adolescent hocha la tête.

« Mais Minha... »

Minha était au courant, Namjoon n'avait que pu le remarquer.

« Minha le sait pas vrai ? »

Taehyung fit « oui » de la tête.

« Elle m'a vu...

- Tu sais, je pense que ta sœur est assez grande pour comprendre et elle veut juste t'embêter. Tu devrai lui dire que c'est sérieux. Et surtout, Taehyung... »

Le vieil homme laissa un silence planer dans l'air afin que son petit-fils lève les yeux vers lui.

« Ne laisse pas qui que ce soit te dire qu'il te faudrait un autre cœur caché pour aimer qui tu veux d'accord ? Un cœur jeune ça fait mal même si le temps le soigne, mais deux c'est douloureux. Deux fois plus douloureux... »

Taehyung fit la moue.

« On est d'accord ? »

Il hocha la tête.

« Je t'aime Taehyung. »

Le jeune garçon se rapprocha à nouveau de son grand-père qui le prit dans ses bras.

« Avec quel cœur halabeoji ?

- Tu n'essaierais pas de me faire dire que je ne t'aime pas complètement là quand même ? »

Taehyung rigola doucement contre la poitrine de son grand-père.

« Avec les deux Taehyung.

- Le deuxième n'est pas réservé à Jimin ? demanda encore le jeune homme.

- Non, plus maintenant. Il me permet juste de vous aimer tous encore plus. »


.FIN.


***

Quelques mots de l'auteur.e pour conclure sur sa participation à ce recueil ?

- Tu penses à quoi/ à qui quand on te parle de vieillesse ?

Pas à mes grands-parents en tout premier lieu bizarrement... et j'en ai été la première surprise ! Peut-être parce que pour moi ils sont des personnes avant d'être vieux ? Et j'aimerai que toutes les personnes âgées soient d'abord des personnes... Donc je pense à toutes les autres, celles qu'on enferme dans des appellations comme « retraités », « personnes âgées », « vieux » etc. et qui sont bien plus au fond et j'adorerai savoir quoi, qui ^^

- 3 mots qui s'associent bien avec « vieillesse » pour toi ? Tu les as utilisés pour écrire ? (Si tu n'as pas trois mots tant pis).

Délicatesse (oui, je l'ai sûrement utilisé même si ce n'est pas dans cette histoire). Sensible, nostalgie (et ceux-là aussi peut-être).

- Tu arrives à t'imaginer plus vieille.vieux ? Si oui, tu t'aimeras plus vielle.vieux ?

Alors non, pas vraiment physiquement. Mentalement peut-être un peu plus mais dans tous les cas je vois pas ce que ça changerai au point où j'en suis ^^. Et puis j'y pense pas en fait, le futur c'est pas un truc auquel j'aime penser de manière générale. Et j'espère ! J'espère que j'arriverai à m'aimer. Et je ne pense pas que ce sera plus dur que de s'aimer à n'importe quel âge... on verra bien si je parviens à m'aimer un peu plus longtemps ou pas ^^.

- Est-ce qu'écrire sur la vieillesse pour toi c'est transmettre un message en particulier ? Si oui, lequel ?

Alors oui, j'imagine vu que j'ai voulu écrire dessus, mais je sais pas quoi... Je pense que c'était un moyen pour moi de réfléchir sur ce qu'on appelle vieillesse et de me laisser porter par les personnages et ce qu'ils pouvaient en faire et en penser. En vrai j'avais envie de beaucoup de choses et j'aurai pu écrire 43 chapitres de ce recueil d'OS toute seule s'il avait fallu x) Donc j'aurai bien aimé transmettre plus de messages que ceux qui seront dans mon OS mais j'ai décidé de le laisser vivre un peu aussi, donc c'est une histoire qui n'a pas nécessairement de message en fait.

- Tu veux ajouter quelque chose ? Libre à toi ! ♥

Je suis heureuse et émue de publier tout ça ici et j'ai vraiment envie que ce soit joli. Je crois que c'est tout. Et merci aux participant.e.s et aux lecteur.trice.s futurs, simplement parce que je ne sais pas quoi dire d'autre...

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