Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Chapitre Onze


Je suis assise là, le regard perdu sur le paysage rural qui défile par delà la vitre du wagon. Nous avons démarré il y a de cela dix minutes et je n'ai qu'une hâte : que le décor que j'admire se tapisse de verts et de bleus. J'ai toujours beaucoup aimé la nature et, bien que le palais soit doté d'un grand espace vert, ce n'était pas si satisfaisant que ça. Les hauts murs en briques blanches étaient constamment là pour me rappeler que je n'avais pas le droit de sortir du palais sans assistance, sans protection. À travers cette tournée, j'aspire aussi à avoir quelques moments à moi, seule, dans le monde. Cela paraît impossible, je sais. Il y aura toujours au moins un garde du corps à quelques mètres de moi, mais sait-on jamais. Peut-être réussirais-je à concilier mes envies et les besoins de sécurité liés à la couronne.

— Votre Altesse Royale ?

Mes douces rêveries s'effacent aussi vite que le décor tandis que je tourne la tête vers mon interlocutrice. Anya est debout, m'adressant un sourire assez... inquiétant.

— Oui ?

— On m'a demandé de vous donner ceci quand vous serez installée dans le train, mademoiselle.

Sans attendre, elle me tend une enveloppe. Assez fine pour ne contenir que quelques feuilles de papier. Probablement une lettre, mais de qui ? Je m'apprête à poser la question à mon assistante personnelle, mais pour une raison que j'ignore, les mots restent bloqués dans ma gorge. Une étrange sensation me parcourt l'échine, sans que je parvienne à en saisir le sens. Je commence à me faire des hypothèses quant au contenu et à l'émetteur de cette lettre. Maman, papa et grand-mère me paraissent les plus plausibles. Si tel est le cas, les larmes risquent de faire leur apparition. Je préférerais être seule pour la lire, cependant je suis beaucoup trop curieuse pour attendre ce soir, pour qu'un tel moment se produise. Alors je l'ouvre, bien déterminée à répondre à mes deux questions : qui et pour quoi ?

« Adélaïde »

C'est le premier mot qui est écrit et qui réduit à néant les chances que ce soit l'une des trois personnes citées plus haut. Tous auraient débuté avec un surnom affectueux. « Dela » pour grand-mère et « ma chère » pour papa et maman.

« C'est plutôt froid » murmure une voix dans ma tête alors que je reprends ma lecture.

« Adélaïde,

Ma thérapeute m'a suggéré de mettre par écrit ce que je ressens, ce que je pense. Il semblerait que cela a un effet libérateur sur l'esprit et les émotions. Je n'ai pas encore d'avis à te donner sur ce point.

Elle m'a également suggéré d'écrire des lettres destinées aux personnes avec qui j'ai une relation difficile. Aussi étonnant que cela puisse paraître, la liste est plutôt longue.

Normalement, je ne devrais pas les remettre aux personnes en question. Elle m'a dit de les brûler, de les ranger dans un coin. C'était, encore une fois, pour me libérer. Néanmoins, après en avoir écrit plusieurs, j'ai trouvé son idée complètement stupide. Alors voilà pourquoi tu lis ces lignes.

Je n'ai pas encore décidé de la tournure que prendra cette lettre, ni même sa longueur. J'essaie de ne pas sombrer dans la colère, comme à chaque fois que je pense à toi.

Je sais, ce n'est certainement pas ce que tu souhaites lire, mais au moins je ne suis pas un hypocrite. Ce n'est pas une excuse quant à mon comportement, j'en ai bien conscience. Un comportement que je regrette à certains moments, quand la colère arrive quelque peu à se dissiper.

Tout le monde, y compris toi, doit penser que je fais une crise d'adolescence à la suite d'un bouleversement familial et d'une dose de jalousie. J'imagine qu'il y a de cela. Il faudrait demander le diagnostic à ma psy, parce qu'elle refuse de me le donner.

Oui, y a peut-être de ça... Mais je ne suis pas sûr que j'aurais réagi différemment à ton retour si j'avais eu dix ou vingt ans de plus. Certes, peut-être pas aussi froidement ou violemment, je te le concède.

Ce n'est pas une lettre d'excuses, je ne suis pas prêt pour ça et j'ignore même si je le serai un jour. Non, c'est une lettre d'explication. Pour que, je l'espère, tu puisses comprendre pourquoi j'ai mal, pourquoi je suis en colère. Pourquoi je t'en veux.

C'est difficile à dire. À écrire. À exprimer. Je n'ai pas les mots parfaits pour ça alors, par avance, je m'excuse si mes termes et ma comparaison te sont brutales, voir même te blesse. Mais il faut que ça sorte, j'en ai besoin.

Je ne nierai pas toutes les épreuves que tu as dû endurer depuis ton retour ni les douleurs que cela a dû te causer. Je ne nie rien.

Mais, voilà... mon esprit t'a identifiée comme une menace pratiquement tout de suite. Une menace à mon futur. Celui pour lequel j'avais été éduqué. J'ai rapidement compris que tu reprendrais ta place. Dans la famille, dans la monarchie.

Si ton retour était un miracle pour tout le monde, pour moi, tu étais un trou noir qui a tout emporté. Tu as pris ce pour quoi j'étais né... et je me demande si tu te rends compte que tu m'as ôté mon futur... »

La lettre s'arrête là. Il y a quelques mots raturés juste après, mais c'est tout. Il n'a même pas apposé une signature, à croire qu'il manque des paragraphes. Que comptait-il dire de plus ? Je crois que l'essentiel est là. Mon cœur n'aurait d'ailleurs pas pu en supporter davantage.

Et voilà que je me retrouve dans ce wagon, entourée de sept autres personnes alors que je contiens mes larmes en me mordant l'intérieur de ma joue gauche. En me levant ce matin, j'ai su que j'allais finir par pleurer. Je n'avais juste pas imaginé que ce serait à cause de lui, encore une fois.

Je me lève, bien déterminée à trouver un endroit où je pourrai être seule afin de déverser mes larmes. Hors de question que je sombre devant tout le monde. Je m'adresse à la première personne dans mon champ vision, mon assistante personnelle, et lui demande vivement où sont les toilettes. Après avoir obtenu la réponse, je traverse le reste du wagon en quelques enjambées. Avant d'ouvrir la porte, mon regard croise celui de Toby, assis sur le siège le plus en retrait du mien. Cela n'a duré qu'une seconde, mais c'était la seconde de trop qui a permis à une première larme de s'échapper.

J'ignore si Toby a remarqué quelque chose, qu'il s'agisse de la larme, de mes yeux brillants ou de toute la détresse que j'ai tenté de cacher durant ma traversée.

Je trouve refuge dans les toilettes de la première classe, assez large pour que je puisse me laisser tomber contre l'un des murs et finir par terre. Les genoux repliés contre moi, j'y enfouis ma tête et je laisse tout sortir. Durant quelques secondes, le déferlement de larmes, à la fois de tristesse et de rage, est le seul son qui envahit la cabine. Je me suis enfermée ici, prisonnière d'une situation que j'ai moi-même créée.

Aussi douloureux que cela puisse être. Aussi tranchants soient ses mots, une part de vérité y vit. Je lui ai pris ce qu'il avait, comme cela m'est arrivé. La manière est différente, tout comme les intentions derrière, mais la finalité reste la même : j'ai ôté à mon frère sa place dans la monarchie, dans la famille. Je lui ai enlevé son avenir. Je lui ai fait ce que mes kidnappeurs ont fait, en somme... moins le kidnapping.

Mes sanglots doublent de cadence en l'espace de quelques secondes, si bien que ma respiration en pâtit rapidement. La crise de lames se transforme, à mon plus grand regret, en crise d'angoisse. Je sens mon cœur se serrer si fort dans ma poitrine, que j'ai presque la conviction qu'il va finir par se fissurer ou exploser. La douleur est si vive, si intense, si forte, que j'en viens à espérer une telle issue. C'est le coup de l'émotion, diront certains. Un trop-plein d'émotion, un mélange de stress, de colère et de tristesse. Mais ce n'est pas ça, pas que ça. C'est une fatigue générale. Un ras-le-bol. Un désespoir. Et dans celui-ci, je ne vois aucune possibilité d'amélioration.

Comment un être avec qui vous n'avez jamais réussi à bâtir une relation peut-il vous faire souffrir à ce point ?

Une partie de moi le déteste. Une autre me déteste. C'est moi qui ai créé cette situation. J'aurais pu choisir une tout autre voie. Partir, ne pas réclamer mes droits de naissance, oublier.

Aurait-ce été le bon choix ? Qu'aurait été ma vie si je l'avais bâti à partir de rien ? Si je n'avais pas suivi la voie qu'on m'avait tracée bien avant la naissance ?

Mes questions se perdent et s'entrelacent alors que la douleur s'intensifie.

Mon cœur est sur le point d'exploser quand un bruit extérieur à la cabine me permet d'échapper un bref instant à la réalité. Mais lorsque je distingue la voix de Toby derrière la porte, la crise reprend de plus belle.

Quelles pitoyables jeune princesse et jeune femme je fais ! Je ne suis pas aussi forte que je le pensais. J'aurais tellement voulu lui montrer que j'étais à la hauteur de la tâche. Je ne voulais pas que mes pleurs soient ce qu'il retienne de moi aujourd'hui. Que tout le monde retiendra. Les membres de mon équipe, monsieur Sutton et toute la famille. Il ne manquerait plus que la presse apprenne que la princesse miraculée n'a pas tenu une seule journée dans son rôle d'héritière avant de sombrer. Quelle image affreuse je renvoie... Peut-être que Philippe, lui, serait à la hauteur de la tâche. Après tout, il a eu plus de temps pour se préparer. Ses quinze années comparées à mes neuf mois dans la famille ne font assurément pas le poids.

Toby continue à parler, mais sa voix me paraît si lointaine que je suis bien incapable de discerner le moindre mot. Il y a comme une bulle tout autour de moi. Invisible, froide, et si épaisse que cela l'empêche de m'atteindre. Il pourrait même crier que cela ne changerait rien à la situation.

Je ne sais pas combien de temps il me reste avant de sombrer. Je suis si fatiguée, si endolorie par la douleur de mon corps et de mon cœur, que je ne doute pas que l'évanouissement n'est pas très loin. Je le souhaite, je l'espère, je veux que cela se produise. Je veux que cette crise s'arrête. Je ne vois pas d'autres possibilités que le sommeil pour me réveiller, plus apaisée.

Soudain, je sens une vague de chaleur m'envahir. Elle commence par ma main gauche avant d'envahir tout le bras, jusqu'à arriver à mon cœur. En quelques secondes à peine, ma respiration plus que saccadée reprend un chemin plus régulier. Au même moment, la bulle se fissure et la voix de Toby se fait plus distincte. Plus proche. Trop proche pour n'être que derrière la porte. Je redresse la tête, à la fois soulagée que cela se calme, et horrifiée de la vision que je lui donne.

Toby est agenouillé face à moi, l'une de ses mains sur la mienne tandis que l'autre finit par se poser sur l'une de mes joues trempées. Ses yeux sont emplis d'un désarroi que je n'avais jamais vu jusque là. Il y a de la tristesse, une pointe de colère. Mais il n'y a pas une once de pitié, et cela me rassure.

— Je suis là, me dit-il en murmurant.

« Il est là » répète une voix dans ma tête.

Trois mots. Trois mots qu'ils ont suffi à stopper la douleur.

Du moins, pour le moment. 

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro