Trente-Trois
Je vous annonce officiellement que j'ai fini l'écriture de ce tome qui compte 39 chapitres au total ♥ Je voulais aussi faire une note d'auteure : précédemment j'avais dit qu'il restait une année de lycée à Adélaïde et Drew. Dans ce chapitre, vous verrez que je me contredis : pas de panique, ce n'est pas une erreur, juste un changement d'avis après avoir heurté par une meilleure idée pour le tome 3 ! L'information sera changée dans les chapitres précédents dans le courant de l'été :)
— Non, mais qu'est-ce qui te prend ? lui demandé-je dans un murmure.
— Je te salue respectueusement selon ton rang, m'explique-t-il comme si cela coulait de source.
— Oui, je vois ça, mais pourquoi ?
— Parce que là on n'est pas à l'école, c'est une soirée avec plein de gens et je me dois de respecter les us et coutumes liés à ton rang. Mais, ne t'en fais pas, je te promets de ne pas te vouvoyer ou dire « Votre Altesse Royale ». C'est juste que papa ne veut pas qu'on pense que je suis un impoli parce que je ne salue pas dignement la princesse Adélaïde.
— Argh, dis-je avec dégoût. Heureusement que c'est simplement pour me saluer. Je crois que j'en aurais vite marre des révérences sinon.
— Évite de répéter ça à mon père, d'autant que mes parents sont sur le point d'arriver dans trois, deux, un...
— Votre Altesse Royale, m'adresse une autre voix familière beaucoup plus mature.
Je fais à nouveau un demi-tour sur moi-même pour me retrouver face au Premier ministre, sa femme et leur fils cadet. Noah est une version miniature de Drew, ils partagent tous deux des traits très similaires tels que les cheveux bruns et les yeux noisette. À l'exception de la taille, mais j'imagine très bien que le frère cadet dépasser son frère dans quelques années. Quant à madame Graham, la seule blonde de la famille, elle est éblouissante dans sa longue robe rouge.
— Monsieur le Premier ministre, je suis très heureuse de vous voir ! Comment allez-vous ?
— Je vais très bien, mademoiselle. Et vous, comment allez-vous ?
— Je vais bien, merci.
— J'aimerais vous présenter ma femme, Lauren.
— Je suis enchantée d'enfin vous rencontrer !
Je tends ma main vers elle, trouvant que la bise pourrait être vue comme être déplacée. Il aurait vraiment fallu que je demande un cours à grand-mère avant de venir, ça m'aurait peut-être aidée à moins stresser à l'idée de faire une gaffe.
Lauren Graham attrape délicatement ma main tout en effectuant une légère révérence. Elle me renvoie également mes propos avant que le Premier ministre ne nous invite à prendre place. C'est à ce moment-là que Madeleine revient parmi nous, bien après la minute qu'elle avait mentionnée. Le cadeau toujours dans ma main gauche, je le tends à Drew une fois que nous sommes tous les deux assis.
— Je sais que je suis supposée le déposer sur la table des présents là-bas, mais... écoute, ouvre et tu comprendras.
Drew demande la permission à son père avant. Une fois accordée, il s'en saisit avec excitation, m'avouant que c'était le premier cadeau qu'il pouvait ouvrir de la journée, ses parents ayant refusé de lui offrir les leurs. Apparemment, voilà un autre avantage à être une princesse : pouvoir offrir des cadeaux avant l'heure. Être assis à la table du Premier ministre fait également partie de la liste.
— Oh, mon dieu ! Ouah, Adèle, c'est génial ! Où est-ce que tu as trouvé ça ?
Drew a l'air visiblement heureux du livre reçu et ça me fait chaud au cœur. Ça me retire aussi un autre stress.
— Ça vient du palais. Je me suis dit que je ne pouvais pas trouver mieux que ça.
— Du palais ? répète-t-il l'air abasourdi. Tu veux dire que c'était dans une de vos collections privées ? Rassure-moi tu as demandé la permission à tes parents avant de l'emballer ?
— Bien sûr ! Ils n'ont pas hésité un seul instant à dire oui, ça leur fait plaisir et c'est aussi de leur part, évidemment.
— Il faudra leur envoyer un mot de remerciement, intervient son père. Excellent choix de cadeau si je peux me permettre, mademoiselle.
Je remercie le Premier ministre d'un grand sourire, très heureuse d'avoir réussi cette première mission de la soirée. Drew est vraiment aux anges si on en croit son sourire et son regard qui est braqué sur le livre dont il tourne les pages. Lorsqu'il approche le livre de son visage pour en sentir l'odeur, sa mère lui demande calmement de bien vouloir reporter cette activité et d'aller accueillir ses grands-parents partenels qui viennent juste d'arriver. Drew s'exécute et nous finissons par tous nous lever une petite minute plus tard pour les saluer à notre tour. Encore une fois, j'ai droit à des révérences, des prédicats et tout le toutim.
Après les grands-parents se succède tout un tas de personnes à notre table. Il y a des hommes politiques, des membres de la famille, des amis proches ou éloignés, d'autres élèves du lycée, des amis bien évidemment, et d'autres personnes dont je n'ai pas encore déterminé le métier ou le lien d'affection. Ils saluent la famille du Premier ministre, souhaite un très joyeux anniversaire à Drew avant de me porter un peu trop d'intérêt. J'ai toujours le droit à la politesse qui m'est due en début de conversation et parfois quelques commentaires sur leurs sentiments personnels vis-à-vis de ce qui m'est arrivé. La moitié d'entre eux me parlent en anglais, mais les mots échangés sont si basiques que je ne ressens aucun problème à ce niveau-là. De temps à autre, ils me demandent comment je vais, accompagné d'un sourire embêté comme s'ils étaient en train de marcher sur des œufs. Ils me donnent l'impression d'être une petite chose fragile qui pourrait se briser ou s'effondrer à tout moment.
Vers vingt-et-une heures, tout le monde s'installe à sa table tandis que l'entrée nous est servie. Je me sens beaucoup plus à mon aise maintenant que je sais que j'ai plusieurs minutes de répit avant d'être à nouveau salué.
— Tu t'en sors très bien, me glisse Drew à l'oreille.
— Merci... En soi, je me contente de sourire en espérant que ça suffira. Je ne suis pas encore prête pour les conversations qui portent sur tout ce qui touche au pays.
— Laisse-toi du temps, Adèle. Tu as eu tellement de choses à apprendre ces derniers mois. Je suis sûre que les gens peuvent comprendre.
— J'espère qu'ils comprennent aussi bien que toi.
Je sais que je me mets une pression monstre par rapport à ça. Au peuple, au pays. Mais comment faire autrement ? Je fais partie intégrante de la famille la plus importante du pays. Ma vie ne peut pas être simple et ordinaire, encore moins mes attentes. C'est effrayant et ça l'est encore plus quand Drew et Maddie pensent que j'ai le droit de « reprendre » ma place dans l'ordre de succession. Ils sont adorables, mais je n'ai vraiment pas l'impression d'y avoir droit.
Le plat principal nous est servi assez rapidement. Le temps passe plus vite et ça me convient. Je pensais que l'anxiété aurait l'effet inverse, mais pas du tout. La musique et les conversations conviviales et animées des tables voisines ont un effet apaisant et chaleureux sur mon cœur. L'atmosphère détendue et joyeuse de la nôtre me fait presque oublier la multitude de gens qui se trouvent dans cette si grande pièce. Il y a des moments où je pourrais presque penser que nous sommes à la table de la cafétéria, riant aux éclats. Surtout les éclats de rire de Maddie.
— Maman était hystérique quand elle a appris que tu pouvais venir, m'apprend Drew entre deux bouchées. Mais surtout, ne lui dis pas, elle nierait tout en bloc.
Nous nous échangeons un sourire amusé avant que mon regard ne se porte sur elle. L'idée que je puisse provoquer ce genre de réaction me parait encore dingue. Je n'ai rien fait pour mériter ça, je suis juste... née. Mes professeurs se sont montrés si normaux à mon égard que je ne suis pas encore très habituée à ces situations où ma présence est vue comme une bénédiction. J'ai comme un sentiment d'illégitimité quelque part en moi. Un sentiment qui me pousse à en faire plus. À donner plus. À connaître, à apprendre. C'est à la fois un sentiment désagréable, mais aussi un moteur pour avancer et me surpasser. Je ne me suis jamais sentie aussi vivante qu'à cet instant alors que mon esprit est empli par les doutes et diverses envies. Tout est si contradictoire parfois.
— Comment se déroule votre année au lycée, mademoiselle ? m'interroge le Premier ministre.
Mademoiselle... Ah oui, c'est mon « prénom ». Ça aussi, ça me donne la sensation d'être super importante.
— Ça se passe très bien. Je dois avouer que c'est en grande partie grâce à Drew, il s'est montré d'une grande aide depuis mon arrivée.
— Oh, Adèle, n'exagère pas, répond le principal intéressé.
— Mais j'exagère pas du tout. C'est la vérité ! m'exclamé-je. Socialement et scolairement, je ne sais pas ce que j'aurais fait si tu n'avais pas été là. Tu veux que je te rappelle le nombre de cours que tu m'as prêté ? Le nombre d'heures qu'on a passé au téléphone parce que j'étais complètement perdue ? Et même, d'un point de vue purement personnel, tu m'as beaucoup aidée. Sincèrement, monsieur et madame Graham, ajouté-je en me tournant vers eux, vous avez un fils incroyable. Vous pouvez être fier de lui.
— Merci, mademoiselle, me dit madame Graham avec une voix douce et émue. Et nous sommes effectivement très fiers de lui.
— Je sais que c'est ma fête, reprend-il la parole, mais faudrait peut-être éviter que je parte d'ici avec la grosse tête.
Drew, sur le ton de la plaisanterie, cache surtout une difficulté à accepter les compliments. C'est une chose que j'avais déjà remarquée depuis quelques semaines. Il n'aime pas être mis en avant ou sur un piédestal. Ce qui est un peu problématique parce que je passe mon temps à le remercier ou, de manière générale, à faire des compliments. Je crois que Madeleine va finir par en avoir marre que je lui dise à quel point elle est aussi rayonnante que le soleil.
Partant du mot fierté, madame Graham me fait vite savoir que Drew a été accepté dans les trois universités les plus prestigieuses du pays. Il ne me l'avait pas encore dit, mais ça ne m'étonne pas de lui. Pendant de longues minutes, toute la table le félicite et essaie de deviner sur quelle université portera son choix final. De fil en aiguille, la grand-mère finit par me questionner sur mon propre avenir universitaire et là, c'est l'angoisse.
— Disons que, débuté-je avec la voix tremblante, on pense que ce serait mieux que je reporte ça d'un an.
Le sujet de l'université n'avait atterri qu'une ou deux fois depuis ma rentrée, en janvier. La première devait avoir eu lieu en mars et la deuxième assez récemment. Mes parents ne veulent pas me mettre la pression. Cependant, dans ce domaine, je n'ai besoin de l'aide de personne : je le fais très bien toute seule.
Ils ont passé une longue heure à me rassurer, à me faire comprendre qu'il n'y avait rien de grave si je reportais mon entrée universitaire d'une année. Qu'au vu des circonstances, ce serait peut-être trop à gérer. Et ils ont raison, d'autant que je n'ai toujours aucune idée des études que je souhaite suivre, bien que ça n'ait pas vraiment d'importance, surtout si je décide d'intégrer officiellement l'ordre de succession.
Et puis j'ai encore du retard à rattraper. Mes notes sont globalement plutôt bonnes, mais elles ne sont pas aussi excellentes que celles de Drew et, en tant que membre de la famille royale, l'excellence doit être au programme. Je me vois mal intégrer une université de seconde zone. Je n'ai pas envie de faire encore plus tache dans le décor que je ne le suis déjà.
Il y a ça, mais aussi le fait que l'université rime souvent avec vie en solo et je me vois mal vivre loin du palais. Je ne suis pas encore prête pour ça, j'ai besoin de temps avant de me lancer dans le grand bain. Pour le moment, il y a trop de « contre » dans la liste pour que je puisse penser, ne serait-ce qu'une seule seconde, d'intégrer une université en septembre. Je ne l'étais déjà pas quand je vivais France, je le suis encore moins maintenant.
J'ai de la chance que papa et maman soient de mon avis et me soutiennent à cent pour cent. Ma grand-mère maternelle aurait aimé que je poursuivre mon cursus scolaire comme n'importe lequel de mes camarades de classe, mais elle a fini par comprendre que ça aurait apporté plus de négatifs que de positifs, nous en sommes tous les trois persuadés.
Mes pensées m'ont un peu coupée de la conversation, de la réalité, si bien que je fais une mine étonnée lorsque je remarque que mon assiette a disparu et a été remplacée par une part de gâteau.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? s'inquiète Drew. Est-ce que tu es allergique à certains ingrédients ?
— Quoi ? Oh, non, c'est parfait. Désolée, j'étais un peu dans la lune. Je suis sûre que c'est délicieux et que je vais adorer ça.
Je me saisis de ma cuillère et approche un morceau de ma bouche. L'esprit encore occupé, je peine à me concentrer sur mon sens gustatif et à profiter du meilleur moment de la soirée.
— Il est vingt-deux heures trente, m'annonce-t-il avec joie. Les premiers invités vont commencer à partir et ma fête va vraiment commencer. Grand dieu que je déteste vraiment le métier de mon père parfois. Pourquoi diable a-t-il fallu qu'on invite toutes ces personnes ? ajoute-t-il d'un ton râleur. Oh pardon, Adèle, dire que ça va devenir ton quotidien. Toutes ces grandes fêtes, ces rencontres. Au moins, t'as déjà un avant-goût de ce que sera ton anniversaire.
— C'est pas hyper rassurant ça, tu sais ?
Drew m'adresse un sourire désolé en guise d'excuse avant de se lever pour aller saluer les premiers départs. Madeleine en profite pour s'asseoir à sa place, se trouvant donc à mes côtés.
— Ben tu vois, ça s'est bien passé ! Et les gens n'ont pas été aussi envahissants que je l'aurais pensé. Je pensais vraiment qu'ils se comportaient plus comme des vautours et...
— Attends, t'es en train de me comparer à une carcasse ? l'arrêté-je avec une voix faussement choquée.
— Bah maintenant que tu le dis...
Nous éclatons tous deux de rire. C'est dingue à quel point je l'aime, à quel point elle a pris une place aussi importante dans ma vie en si peu de temps. Je n'arrive pas à visualiser ma ville sans elle désormais. Sans son sourire, son franc-parler, ses blagues et ses taquineries. J'ai besoin d'elle.
Durant la demi-heure qui a suivi, nous sommes restées toutes les deux à table. Parfois, nous avons été interrompues par l'un ou l'autre invité qui tenait particulièrement à nous faire leur au revoir, par respect comme me l'a expliqué Madeleine.
« Oh ne crois pas qu'ils vont dire au revoir aux cent quatre-vingts autres invités » a-t-elle dit, « ce serait éreintant ».
Drew est réapparu peu après vingt-trois heures, lorsque la salle s'est vidée d'un bon deux tiers de ses invités. Il ne restait plus que les lycéens, la famille et quelques rares amis proches. Plus de politiques, de financiers et de connaissances avec un intérêt pour la prochaine campagne du Premier ministre. Cette fois-ci, la vraie fête pouvait commencer. Celle où on n'avait plus à faire attention à nos moindres faits et gestes, mais aussi le moment où on pouvait commencer à danser, au grand bonheur de Maddie et Drew... et à mon grand dam. Si grand-mère a déjà contacté un professeur de danse pour la partie « slow », je crois qu'il m'en faut aussi un pour les chansons de notre époque. Je n'ai vraiment pas le rythme dans la peau, c'est un fait avéré. Et voir la piste commençait à se remplir ne me donne pas l'envie de me lever. Ça a plutôt l'effet inverse : mon postérieur est en train de se coller à la chaise où je suis en train de me ratatiner. J'ai l'espoir futile que, pour cette unique fois, on oublie ma présence. Évidemment, ça ne se passe pas comme je l'aurais voulu.
— Tu sais très bien que tu vas finir par venir avec nous, me fait remarquer ma cousine avec un sourire en coin. Ça me prendra trente secondes ou trente minutes, mais le résultat sera le même.
— J'espère que ça te prendra trente minutes alors. Parce qu'au moins, ça me fera trente de minutes de mouvements ridicules en moins.
— Personne ne te jugera, il n'y a plus que les amis. On est entre nous.
— Je sais, mais... Tu me laisses quelques minutes pour me gorger de courage ? Pendant ce temps, tu devrais peut-être aller rejoindre ton petit ami. Ça fait des heures que nous sommes là et tu n'as toujours pas pu aller le voir.
— Vallait mieux pas. Tu imagines si quelqu'un avait pris une photo ? Mon père aurait fait une crise cardiaque...
— Pourquoi ? Il est au courant que tu sors avec Seth, non ?
— Oui, bien sûr... Mais il y a une différence entre être au courant et voir des photos de sa fille en train d'embrasser un garçon. Je ne veux pas faire peur à mon petit papounet.
— Ouais... tu marques un point.
Ça, c'est bien un problème dont mes parents n'ont pas à se soucier avant un long moment. La seule personne avec qui je serai susceptible de sortir, par rapport à l'âge et à la proximité, c'est Drew. Je sais que ça ferait plaisir à grand-mère et peut-être même à une bonne partie de la population, mais il n'y a vraiment aucune ambiguïté entre nous. Du moins, pas de mon côté. J'ai tout de suite ressenti une grande affection pour lui, mais c'est plus comme un meilleur ami ou un frère.
Maddie se lève et rejoint Seth qui est sur la piste de danse. Il l'accueille à bras ouverts avant de la faire tournoyer deux ou trois fois. Je les vois heureux, éclatant de rire et dansant au rythme de la musique. Ils ont l'air heureux, insouciant. J'aimerais ressentir ça, mais je suis trop sur la défensive pour le moment, je n'arriverais pas à faire entrer quelqu'un dans mon cœur. À lui donner ma confiance.
Ça viendra sûrement plus tard, comme pour la plupart des gens. Il est rare de trouver l'amour de sa vie au lycée. Encore faudrait-il que je croie à ce concept... ou en quelque chose. Il vaudrait mieux que j'évite de dire ça. Après tout, d'après les derniers sondages, nonante pour cent de la population est croyante. Je n'ai pas envie de passer de « princesse miraculée » à « princesse hérétique ». Ça fait beaucoup moins classe sur le CV.
— Tu viens danser ?
Je pensais que Maddie reviendrait plus vite à la charge, mais c'est finalement Drew qui m'invite à le rejoindre, la main tendue vers moi.
— Suis-je obligée ?
— Pas du tout, mais si tu dis non, je dois t'avouer que je comptais utiliser un rien de manipulation pour te forcer à venir.
— Ah ? Et à quoi ta tentative devait-elle ressembler ?
— À un truc du genre : « tu ne vas quand même pas refuser de faire plaisir au roi de la soirée ? »
— T'es méchant.
— Je sais... Mais est-ce que ça a fonctionné ?
Je me saisis de sa main et me redresse. De ma main libre, je vérifie que ma robe est correctement mise, qu'il n'y ait pas de faux plis comme m'a dit Madeleine. J'esquisse ensuite un sourire nerveux avant de hocher la tête d'un air résolu.
— De toute manière, Madeleine serait revenue à la charge. Alors autant que ce soit toi, ça lui permettra de s'amuser de son côté plutôt que d'avoir un œil sur moi pour le reste de la soirée.
Après avoir vérifié une nouvelle fois ma robe, seule excuse que j'ai pour retarder mon départ, nous finissons par rejoindre nos amis. D'un coup d'œil derrière moi, je repère Phoebe, droite comme un I. Elle est si proche du mur et si immobile qu'on dirait presque qu'il s'agit d'une statue ou d'un tableau incrusté. Je l'avais presque oublié ces dernières heures tant mon champ de vision avait été réduit et mon esprit occupé par les invités, ma table, mais aussi mes pensées. Je sais qu'elle ne me lâche pas du regard alors je lui souris en espérant que ce bref geste puisse lui donner un peu de joie dans une soirée à laquelle elle doit terriblement s'ennuyer.
Ensuite, j'oublie à nouveau sa présence. Au bout de vingt minutes, j'oublie la présence de tout le monde hormis celle de Drew, mon partenaire de danse, et je me mouve comme je peux. Mon corps est un peu raide, paralysé par l'idée horripilante que je suis probablement ridicule.
La sensation finit par s'estomper au bout de six ou sept chansons. Tout finit par s'estomper. Les doutes, les peurs, l'avenir, le présent. Il n'y a que la musique et moi.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro