Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Trente-six


— Il ne se passe absolument rien, Madeleine, dit-il ce dernier mot avec fermeté.

— Je ne suis pas idiote, Philippe. Je vous ai très bien entendu crier et j'ai également très bien vu ce que tu étais sur le point de faire. T'as intérêt à tout de suite dégager si tu ne veux pas que je te foute une raclée.

Philippe lâche un petit rire bien sarcastique avant de s'éloigner de moi et d'avancer vers l'escalier. En passant près de Madaleine, il s'arrête un instant et la toise du regard, puis il disparaît, à mon plus grand soulagement. Durant ce laps de temps entre l'apparition de Madeleine et le départ de Philippe, c'est comme si j'avais arrêté de respirer. Je me suis mise en mode pause, mais maintenant que le danger a été écarté, je m'écroule. Je suis accablée par toute cette haine et ce ressentiment. Je suis épuisée par cette situation, par tous les obstacles que j'ai réussi à franchir ces derniers mois. Que je pensais avoir réussi à franchir. Mais avec Philippe, avec ses mots, tout mon mal-être revient à la surface. Il fait tout ressortir. Les mauvais souvenirs, les traumatismes, les émotions négatives.

Madeleine est à mes côtés, l'une de ses mains sur mon dos, l'autre écartant les mèches de cheveux qui sont en train de se coller à mon visage à cause de mes larmes. C'est comme ça que je me rends compte que je suis en train de pleurer. À grosses larmes et avec une respiration saccadée.

— Je vais chercher tes parents, m'annonce-t-elle.

Sa voix est pleine de fureur, mais aussi de tristesse. Comme tout le monde, elle se sent impuissante face à la tempête qu'est son cousin.

J'attrape sa main avant qu'elle n'ait pu s'éloigner. Je lève ensuite ma tête, capte son regard et lui fais non de la tête. Madeleine fronce des sourcils avant d'extirper sa main de la mienne.

— Je m'en fous, Dela. J'en ai plus que marre de la façon dont il te traite. Marre que tu évites le plus possible d'en parler à tes parents. Si tu ne veux pas le faire, très bien, mais moi je ne vais pas m'en priver !

Avant de retrouver mon souffle pour l'arrêter, Maddie a déjà disparu. Seule Duchesse est toujours là, assise calmement à mes côtés. J'aimerais pouvoir l'être aussi, mais j'angoisse à l'idée de devoir discuter avec mes parents et qu'ils aillent ensuite voir leur fils. J'aimerais que tout ça disparaisse... Mais comme je sais que ça n'arrivera pas, je me redresse avec une idée en tête : de trouver un coin où je puisse rester seule, au moins l'espace de quelques minutes, avant de devoir réaffronter la réalité. Le palais est assez grand pour jouer une partie de cache-cache interminable, mais j'étouffe ici alors je prends la direction du jardin où je comptais de toute façon me rendre. J'accélère le pas jusqu'à me mettre à courir. Je passe devant deux ou trois employés de maison avant de me retrouver à l'extérieur. Duchesse me suit à la trace, sans pour autant me distancer : elle le pourrait pourtant, il ne fait aucun doute qu'elle est plus rapide que moi à la course.

Nous descendons les quelques escaliers avant de fouler la pelouse fraîchement coupée. Le « jardin » fait plusieurs centaines de mètres de longueur et tout autant en largeur. On a de quoi se promener toute la journée sans se sentir à l'étroit ou d'avoir l'impression de tourner en rond. Il y a également une bonne centaine d'arbres où l'on peut se poser. Où l'on peut se cacher. Je ne veux pas les effrayer, mais je n'ai pas non plus envie qu'on me retrouve trop vite. Je marche donc plusieurs minutes avant d'arriver près d'un arbre au tronc très épais et m'y adosse, le palais dans mon dos. Duchesse vient s'asseoir à mes côtés avant de déposer son museau sur mes jambes étalées.

Et c'est là que je craque... à nouveau. Je trouve ça si injuste et si triste. Moi qui aie rêvé toute ma vie d'avoir une fratrie, je me retrouve avec un frère qui me déteste, qui m'exècre. Mon existence a été plus que chamboulée, j'aimerais bien, l'espace d'une semaine, qu'il n'y ait plus aucun problème, aucune tension, aucun retour en arrière. Que je puisse goûter à ce quotidien comme si je l'avais toujours vécu, sans ressentir que je fais tache dans le décor ou que je suis de trop. J'aimerais tant me sentir à ma place. Croire que je suis à la hauteur. Celle d'être une fille, une sœur, une petite-fille, une élève, une princesse. Je ne veux pas forcément exceller et je ne suis pas naïve en pensant que l'on peut être parfait. Mais pour une fois, je veux sentir que je suis bien là où je suis.

Peut-être suis-je stupide de croire que cela peut se faire après quelques mois dans cette nouvelle vie. Cependant, j'ai ce goût de perte en travers de la gorge. De toutes ces années qui nous ont été volées. Des années que j'aimerais pouvoir rattraper... Des années que je ne pourrais jamais rattraper. Je sais que je ne pourrais jamais être la personne que j'aurais pu être et que les relations que j'aurais dû avoir ne seront jamais une réalité. Je sais tout ça, mais je continue quand même à espérer d'intégrer ce que j'aurais dû être. Ce qui aurait dû être. Comme si c'était possible...

Des voix retentissent et me font sortir de mon introspection. Des voix familières qui crient un prénom qui m'est, encore parfois, étranger. Je sais très bien que si j'entendais quelqu'un dire « Lise », je me retournerais sans hésiter. Ce n'est pas en quelques mois qu'on peut balayer des gestes de la main des habitudes qu'on a eues toute sa vie, et encore moins des informations relatives à ce qu'était l'identité. J'ai arrêté de compter le nombre de fois où j'ai dû réfléchir intensément avant d'écrire le bon prénom sur la feuille d'un contrôle. Où je me suis dit, quand quelqu'un disait Adélaïde : « Adélaïde, c'est toi, tu dois répondre, tu dois te retourner ».

Je ne dois pas renier Lise. Lise, c'est moi. Je dois juste la transformer. La rendre plus forte.

Duchesse se met à aboyer alors que les voix deviennent plus fortes et donc plus proches. Je me fais trahir par mon alliée, mais je ne peux pas lui en vouloir. Je profite de ces quelques secondes avant d'être retrouvée pour frotter mes joues humides et reprendre mon souffle. Je dois me remplir de courage et espérer que ça ne tourne pas à la troisième guerre mondiale.

— Oh, enfin, te voilà ! s'exclame maman. Robert, c'est bon, je l'ai trouvée ! crie-t-elle à papa avant de se tourner à nouveau vers moi. Oh, ma chérie...

Son regard est plein de peine et elle ne met pas longtemps à poser un genou à terre, se retrouvant juste à mes côtés. Elle passe son bras autour de moi et m'attire à elle. Je me laisse faire et ferme les yeux. J'essaie de profiter de cet instant, d'en tirer ce que je peux en tirer : qu'il s'agisse d'un moment de répit, d'un peu de force ou d'une tonne d'amour.

Papa ne met que quelques secondes à nous rejoindre. C'est du moins ce que j'imagine lorsque j'entends la respiration quelque peu saccadée d'une tierce personne. Il faudrait que je lui suggère de faire un peu de sport, on pourrait même peut-être en faire à deux. J'ai qu'à caser ça entre mes cours d'anglais et d'Histoire, sans oublier ma psy... oh et je vais sûrement avoir le privilège d'avoir un professeur de danse particulier et...

« Concentre-toi sur le moment présent ».

— Je sais que nous sommes totalement contre toute violence, prend-il la parole avec colère. Mais crois-moi, Hellen, je commence à perdre patience avec notre fils. Quel petit c...

— Robert, dit-elle fermement, je ne pense pas que ce soit le moment pour ça.

— Oui, je sais, excuse-moi chérie, tu as parfaitement raison. Comment va-t-elle ?

Je sens maman hausser des épaules et je décide de me reculer avant de lui adresser un faible sourire.

— Elle, répété-je avec insistance, fait de son mieux pour ne pas commettre de meurtres.

Je me tourne ensuite vers papa. Si maman représente la tristesse, papa transpire la rage. Il lui faut plusieurs secondes pour que ses traits se détendent et pour qu'il nous rejoigne en s'asseyant dans l'herbe. Ses premières paroles sont des excuses. Pour moi, ça n'a aucun sens, je ne comprends pas pourquoi il devrait dire pardon d'être en colère. Il a toutes les raisons du monde de l'être. À croire que c'est la mission de Philippe de mettre, à tour de rôle, les membres de la famille dans un tel état. A-t-il un quota à respecter chaque semaine ? Qui sera sa prochaine victime ? Notre grand-mère, la Reine-Mère ? J'espère sincèrement qu'elle ne va pas se pointer aujourd'hui, ce n'est vraiment pas le moment.

— Crois-tu pouvoir tenir jusqu'aux vacances d'été ? me questionne-t-il.

— Les vacances d'été ? Pourquoi ? Il va se passer quelque chose ?

— Philippe a plusieurs engagements à tenir et plusieurs week-ends organisés dans la famille et les amis. Il sera très peu au palais durant cette période. Je crois que ça pourra vous faire du bien à tous les deux d'être séparés.

— Oh ça, c'est certain, il aura l'impression que je n'existe pas, lâché-je avec énervement. Et vu que c'est ça qu'il souhaite. Mais pour répondre à ta question, oui je peux tenir jusqu'à juillet. Mais après ? Quand il va revenir ? Si c'est toujours le même petit con ? Je fais quoi ? Vous êtes sûrs que vous ne voulez pas que je signe ce décret ? Pas que pour Philippe, je veux...

— Adelaïde, reprend maman, nous en avons déjà parlé. Cela ne...

— Non, la coupé-je, on n'en parle pas vraiment. Et quand on en parle, c'est par rapport à Philippe. Moi, je veux savoir si vous me pensez capable de ça. Si vous voulez que je le signe ou pas. Si vous avez un avis sur la question. Sur moi. Pas sur la situation, pas sur les capacités ou l'avenir de Philippe, mais sur moi. Est-ce que quelqu'un dans cette famille a une opinion sur le sujet ? Est-ce que grand-mère a déjà dit quelque chose ? A-t-elle demandé à ce que je le signe ?

— Quoi ? Bien sûr que non ! s'exclame maman. Ma mère ne m'a jamais dit une telle chose, je peux te l'affirmer.

— Je ne parle pas de ta mère, la contredis-je avant de me tourner vers mon père, je parle de la tienne. De ma grand-mère paternelle. Elle veut que je signe ce foutu papier hein ? Elle pense que je ne suis pas à la hauteur n'est-ce pas ? Je sais très bien qu'elle ne m'aime pas.

Je viens de les prendre au dépourvu. En particulier papa. Aucun d'eux ne s'attendait à ce que je rebondisse sur elle. Moi non plus d'ailleurs ! Mais toutes mes pensées sont si désordonnées et nombreuses en ce moment, que j'ignore bien ce qui va se passer dans ma tête dans trente secondes. Je pourrais très bien passer du coq à l'âne et rebondir sur un sujet moins délicat... En attendant, j'ai mis les pieds dans le plat et je ne compte pas changer de direction. J'ai gardé ce ressenti pour moi ces derniers mois, mais là c'est trop : il faut que je sache, j'ai besoin qu'on m'arrache le pansement d'un coup.

— Allez-y, soyez francs, je refuse de vivre dans une vie où je dois constamment marcher sur des œufs, éviter certains sujets par peur qu'on me mente ou que ça explose. Je les ai évités ces derniers mois parce que j'avais déjà beaucoup de choses à gérer, mais là ça suffit, j'en ai mes claques de toutes ces conneries !

— Adélaïde, calme-toi, me demande-t-il d'une voix brisée.

Je me redresse, la colère envahissant chaque centimètre carré de mon corps. Je sais que je ne dois pas m'énerve contre eux, qu'ils essaient de m'aider du mieux qu'ils le peuvent, mais je suis à bout de toute cette situation, de ces mesquineries, de ces non-dits. Je veux savoir. Je veux tout savoir. Je reprends mon souffle et leur fais face.

— Dites-moi tout, dis-je d'une voix ferme.

Papa et maman se jettent un regard à la fois inquiet et triste. Je savais déjà que la réponse n'allait pas me plaire, cela ne m'étonne donc pas.

— Ma mère et Philippe ont une relation particulière, finit-il par dire. Cela ne veut pas dire qu'elle ne t'aime pas. Ce n'est pas du tout ça. Comme tout le monde, elle a été dévastée lorsque tu as disparu... Et quand Philippe est arrivé, elle est... comment dire ?

— Elle est devenue envahissante, commente maman sans aucune hésitation. Extrêmement envahissante. C'est presque comme si elle habitait au palais. Elle était en colère contre tout le monde, elle ne faisait confiance à personne, elle dormait souvent dans sa chambre. Elle a engagé des gardes du corps privés aussi, ce qui a créé des discordes avec notre propre personnel et je ne pouvais que les comprendre. C'était vraiment ingérable. Ça a créé pas mal de tensions dans la famille.

— On a failli couper les ponts, ajoute papa. On était toujours dans le chagrin de t'avoir perdu et dans l'envie d'avancer, de nous occuper de notre bébé du mieux qu'on le pouvait, et ma mère n'a fait qu'empirer les choses. Elle ramenait chaque petit moment à ton kidnapping, c'était invivable. Quand Philippe a eu deux ans, on lui a interdit de venir pendant plusieurs semaines.

Il est rare que je les entende parler du passé, du moins d'une période difficile. J'ai déjà eu droit à mon lot d'anecdotes ou au récit de ma disparition, mais jamais à d'autres événements compliqués. C'est bizarre et un peu triste, mais je sens plus proche d'eux en ce moment précis. Les écouter parler a également réussi à me calmer, extérieurement en tout cas. Je m'installe à nouveau sur la pelouse, mes parents en face de moi.

— On avait besoin qu'elle se calme, reprend-il. On avait besoin de calme. Après quelques mois, on l'a réautorisée à venir tous les week-ends et, depuis, elle est très investie dans sa relation avec Philippe. Elle s'est beaucoup occupée de sa protection et de son éducation, elle l'a beaucoup couvé. Et il n'y a eu aucun changement avec l'arrivée de Lilianna. Elle et ma mère ne sont pas très proches. Pour ma mère, qui avait déjà eu des relations plus faciles avec ses fils que ses filles, il n'y a que Philippe. Elle ne voit que par lui. Elle a passé ses quinze ans à le protéger et à l'imaginer comme le futur souverain. Elle ne se soucie pas beaucoup de ses autres petits-enfants, pas autant qu'elle le devrait.

— Donc... c'n'est pas totalement de ma faute ? résumé-je avec un peu d'espoir.

— Ce n'est pas du tout de ta faute ! me corrige-t-il avec tristesse. À aucun moment. Tu n'as absolument rien fait de mal. Est-ce que tu comprends ? Je ne veux pas que tu penses ça, ne serait qu'une seule seconde. Rien qu'à l'idée que tu puisses te sentir responsable, même rien qu'un peu, de cette situation me retourne l'estomac.

— Donc ce n'est pas ma faute... mais je ne peux quand même rien faire pour arranger la situation. Hormis signer ce décret, mais vous me l'avez pratiquement interdit.

— Je ne crois pas que leur comportement changera. La relation doit se créer d'elle-même et non naître de cette façon. Mais pour en revenir à ce fameux décret, s'il n'y avait pas Philippe ou ma mère dans l'équation, qu'est-ce que tu ferais vis-à-vis de tout ça ?

— Je n'en sais vraiment rien. Je crois que je prendrais mon temps pour me décider. Pour... avoir l'avis du peuple aussi.

Mes parents se mettent doucement à sourire, s'échangeant au passage un regard et un sourire amusé. Je m'apprête à leur demander ce qui a bien se passer par la tête, mais nous sommes interrompus par l'arrivée de Maddie et Lilianna.

— Le temps est magnifique ! s'exclame la première.

— Oh ! Et si on faisait un pique-nique ? propose la seconde.

Comme toujours, je peux compter sur elles deux pour apporter un peu de joie dans un moment délicat. Je sais que ce problème ne sera pas réglé aussi vite, mais on a parfois besoin d'une bouffée d'air frais entre deux obstacles.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro