Chapitre 9

Il adressa un sourire à ses élèves, mais quand Norbert croisa son regard, il comprit que cette expression joyeuse lui était en quelque sorte réservée.

Ce qu'ils avaient vécu l'an passé n'était pas anodin. Le jeune Poufsouffle se demandait s'il se comporterait différemment avec Leta et lui en dehors des cours. Serait-il toujours aussi coulant avec leur tendance à ne pas respecter les règles ? Norbert l'espérait, car il avait bien l'intention d'aller voir Méridia ce soir et faire un petit tour dans la forêt ce week-end pour rendre visite à la famille de Cynospectres.

– L'an passé, commença le professeur, je vous ai expliqué que ma matière n'était pas la plus aisée, et je pense que vous l'avez compris. Pour jeter des sorts de métamorphoses, il faut sentir au plus profond de votre être ce que vous souhaitez réaliser. Il faut visualiser une image mentale aussi nette que précise. Vous devez voir avant même de lancer votre sort. Votre concentration, vos connaissances et votre rigueur doivent être à toute épreuve. Vous souvenez-vous de ce que nous avons fait l'an passé ? demanda-t-il.

– Nous avons transformé une allumette en aiguille, répondit Mable Lufkin quand Dumbledore lui donna la parole.

– Nous avons transformé un oiseau en papier en véritable oiseau, ajouta James Rosier.

Sur les quatorze élèves Poufsouffle et les treize élèves Serpentard, plusieurs prirent volontiers la parole. Leta et Norbert ne faisaient pas partie du lot. La jeune fille ne voulait pas divulguer ses talents, tandis que le garçon ne souhaitait pas avoir le regard de ses camarades tourné vers lui.

– On a également commencé à travailler la théorie du sortilège de Transfert, termina France de Lacour avec son air hautain de petite pimbêche qui faisait la grâce de répondre.

– Très bien, je vois que vous avez bien retenu vos leçons. Maintenant, nous allons voir si vous savez toujours jeter ces sorts après deux mois de pause.

Dumbledore agita sa baguette d'un geste délicat et des dizaines de petits objets volèrent jusqu'aux tables des élèves. La plupart étaient ravies de se lancer aussi vite dans la pratique, même s'ils devaient répéter des gestes exécutés des centaines de fois l'an passé.

Les quatre heures filèrent à toute allure. Leta n'avait pas perdu la main, elle réussit sans mal à refaire chaque métamorphose tandis que Norbert avait un peu plus de difficultés. Mais ses résultats étaient tout à fait honorables.

L'après-midi fut nettement moins amusante. Les élèves retrouvèrent la directrice de la maison de Serdaigle pour leur cours de Potions. Madame Rondepierre n'avait pas changé si ce n'est quelques mèches blanches qui commençaient à sillonner ses cheveux noirs. Derrière ses lunettes en triangles se cachaient deux yeux vifs et mordorés qui regardaient un à un chaque élève. Elle n'était pas bien grande, mais en imposait par son charisme et sa passion pour sa matière. Malheureusement, les élèves n'avaient pas encore repris le rythme scolaire et passé une heure de concentration, elle eut du mal à les tenir.

Norbert se demanda si Dumbledore s'était douté de cette réaction. C'était peut-être pour cela qu'il avait laissé ses élèves se défouler sur des sorts toute la matinée pour éviter de parler dans le vide en attaquant directement dans le vif du sujet. Pourtant la théorie de la potion à hérisser les cheveux n'était pas inintéressante.

– Je ne peux pas vous forcer à écouter, déclara Ingrid Rondepierre visiblement à bout, mais je peux vous forcer à vous taire. Cinq points de moins pour chacune de vos maisons !

Cette annonce fut comme une douche froide, et les élèves se calmèrent aussitôt.

– J'aurais dû commencer par ça, se morigéna la professeure. Allez, on reprend. Sortez vos plumes et notez ce que je vais vous dicter, même si apparemment, vous n'avez pas besoin de potion pour me faire hérisser les cheveux !

Elle retourna derrière son large bureau, consciente que cette technique de points était plus efficace que les punitions corporelles quand il s'agissait de punir toute la classe.

– Quelle vieille crotte de Chouing, celle-là ! grommela Leta en se dirigeant après les cours vers l'alcôve qui leur servait de QG.

– Elle a fait ce qu'il faut pour être écoutée, déclara simplement Norbert.

– Si son cours était intéressant, elle n'aurait pas eu besoin de nous enlever des points.

– Tu es de mauvaise foi. Il y avait un capharnaüm monstre dans la salle, je n'en pouvais plus, avoua le Poufsouffle, particulièrement sensible aux bruits parasites.

– Moui.

– Je vais rendre visite à Méridia. Tu viens avec moi ? proposa Norbert en espérant que cela redonne le sourire à son amie.

– Avant le repas ?

– Déjà en train de faire des bêtises ? susurra une voix criarde à leurs oreilles.

D'un bond, les deux élèves se retournèrent. Devant eux se retrouvait Peeves, complètement hilare.

– Je vous ai connus moins peureux, se moqua l'esprit frappeur de Poudlard.

– Peeves, tu m'as manqué ! s'exclama Leta sans la moindre trace d'ironie.

La grande bouche de l'esprit frappeur se tordit dans un rictus qui faisait peur à voir. Norbert imagina que ce devait être sa façon de sourire quand il était gêné.

– Vous venez avec moi faire des plis dans les tapis pour faire tomber les élèves qui ont le nez en l'air ? proposa joyeusement le fauteur de trouble.

– Pas maintenant, mais je te rejoindrai avec plaisir après le repas pour en faire devant le portrait de la grosse dame.

– Devant la maison des Gryffondor ? Parfait, je dois me venger d'une deuxième année qui croit qu'elle peut me concurrencer dans mes blagues, gronda Peeves, furieux.

– Qui ça ? s'étonna le Poufsouffle.

– Mina Lima, cracha-t-il.

– La rousse ? Elle ne me semblait pas particulièrement turbulente l'an passé, raconta Norbert.

– Eh bien elle a changé. Car on m'a accusé à tort ce matin d'une farce que je n'avais pas faite ! Et je n'aime pas ça. Le roi de la farce, c'est moi.

– En parlant de farces, tu veux bien en faire une maintenant pour qu'on puisse discrètement entrer dans la caverne qui mène au lac ? demanda Leta.

– Avec plaisir, j'en ai une bien bonne sous le coude.

Sans attendre, Peeves fonça dans le hall pour prendre possession d'une armure. Dans un fracas monstre, il la mit en mouvement et commença à chanter gaiment l'hymne de l'école.

– Poudlard, Poudlard, Pou du Lard du Poudlard,

Apprends-nous ce qu'il faut savoir,

Que l'on soit jeune ou vieux ou chauve,

Ou qu'on ait les jambes en guimauve...

Toutes les personnes se trouvant à proximité se retournèrent vers l'amure chantante qui faisait des acrobaties.

À pas de loup, Leta et Norbert se dirigèrent jusqu'à la petite porte menant à la grotte. Une fois sûrs que personne ne regardait, ils entrèrent et dévalèrent les escaliers jusqu'à se retrouver face au lac Noir.  

Illustration prise sur le site : http://fr.sorcellerieinfo.wikia.com/wiki/Potions?file=PM-B1C8M2-1.jpg