Chapitre 61
Chapitre 61
La Selkie observa Norbert avec beaucoup d'affection. Cette créature sur deux jambes ne cessait de la surprendre par sa douceur et sa pureté d'âme.
La colonie de Méridia regroupait beaucoup de combattants. Son peuple était dangereux, mais on lui avait toujours enseigné que les sorciers faisaient partie des espèces les plus monstrueuses. Elle n'y avait pas cru à la base. Elle admirait secrètement ces bipèdes en se dissimulant à la surface du lac. Jusqu'à l'aube de ses cinq ans où elle s'est fait capturer et avait appris les leçons de son peuple à ses dépens. Même si ses blessures physiques avaient fini par guérir après de longs mois, ses cicatrices psychologiques ne s'étaient jamais réellement fermées. Du moins, jusqu'à sa rencontre avec le jeune sorcier qui se trouvait à présent devant elle. Il lui mettait du baume à ses valves ventriculaires à chaque fois qu'il venait lui rendre visite.
– Tu voudrais sauver ce Démon, comprit Méridia.
– Oui... Mais je ne sais pas si c'est une bonne idée.
– Peut-être pas.
– Est-ce que tu saurais me dire grâce à tes visions si mon histoire est plausible ?
– Tu penses qu'il cherchait simplement de la compagnie et qu'il n'y a rien de mauvais en lui ? récita la selkie en essayant de dissimuler son incrédulité.
– C'est plausible...
Un silence s'immisça entre eux deux. Penaud, Norbert baissait les yeux. Ses mèches auburn légèrement bouclées tombaient devant ses paupières. Méridia voulut sortir de l'eau et passer sa main écailleuse sur la peau blanche du garçon et remettre ses cheveux derrière son oreille.
– Ce n'est pas plus loufoque que d'imaginer que le démon est calculé l'implantation de Poudlard pour se servir du pouvoir des sorciers.
Méridia penchait tout de même pour cette théorie, mais elle n'en fit pas allusion devant son ami.
– Je vais consulter mes plantes pour chercher une réponse.
– Merci infiniment.
– Que feras-tu si ton hypothèse est juste ?
– Eh bien, je ne sais pas... Je pourrai peut-être convaincre le Démon de pardonner aux sorciers et de profiter de ce qui était son rêve autrefois ?
– Et si c'est la supposition de Leta qui est juste ?
– Dans ce cas, nous devrons le vaincre.
Des larmes apparurent sur les cils recourbés de Norbert. La Selkie savait que de l'eau salée pouvait couler des yeux des sorciers. A cet instant, elle voulait tendre son doigt et récupérer une de ses gouttes. C'était la deuxième fois en quelques minutes qu'elle souhaitait le toucher. Elle s'ébroua et se baissa un peu plus dans le lac. Ses épines dorsales frétillaient.
– Qu'en est-il du Feu Follet ? questionna Méridia pour changer de sujet.
Norbert lui fit le récit des derniers événements. Il avait réussi à créer un lien avec la créature unique qui était né dans les entrailles du château. Grâce aux révélations du jeune sorcier, Méridia comprit pourquoi elle n'arrivait pas à déterminer son espèce.
– Tu es devenu son ami, déclara la Selkie.
– Bien sûr ! Mais je ne sais pas encore comment l'aider. Tant qu'il infligera malgré lui les peurs les plus profondes aux personnes qu'il approche, il ne pourra pas s'intégrer.
– S'intégrer à qui ? Aux sorciers ? releva l'être de l'eau.
– Euh... Oui.
– Est-ce là le désir de celui que tu appelles Feu Follet ?
Le Poufsouffle rougit. Non, cette idée n'était pas celle de la créature. Ce désir appartenait à Norbert. Le garçon adorait les animaux fantastiques, et par-dessus tout, il voulait les garder auprès de lui... C'est ce qu'il avait fait avec Josyane, sa fidèle Acromentule naine. Plus jeune, il avait voulu faire de même avec l'Hippogriffe qu'il avait vu grandir. Il souhaitait l'enfermer, lui mettre une laisse, peut-être même couper ses ailes pour qu'il reste à tout jamais avec lui. Mais la créature hybride avait soif de liberté. Elle a réussi à s'échapper. Norbert a essayé de l'arrêter, il a même grimpé sur lui pour l'empêcher de s'envoler. Mais l'Hippogriffe avait déployé ses ailes d'aigle et avait décollé. C'est ainsi que Norbert est tombé, se blessant dangereusement. Sa mère, folle d'inquiétude, était arrivée à temps pour l'emmener à Sainte-Mangouste. Le petit dragonneau apprit ainsi une leçon douloureuse.
Cet épisode honteux frémit au fond de ses entrailles.
– Tu as laissé partir Rowena et Salazar, reprit la selkie en citant les chiots Cynospectres qu'il avait recueillis l'an passé.
– Ils avaient une famille.
– C'est vrai... Mais le Feu Follet peut créer la sienne. Malheureusement, je doute que son bonheur se fasse auprès des humains ou des sorciers.
– Peut-être qu'il n'inspirera pas de peur aux autres créatures fantastiques.
– C'est envisageable.
Norbert serra les poings et affronta le regard irisé de jaune de Méridia.
– Je le laisserai partir ! affirma-t-il.
– Je n'en doute pas une seule seconde.
La selkie se trouva fort hypocrite de le rappeler à l'ordre sur ce sujet. Après sa première rencontre avec Norbert, elle avait créé un espace dans sa tanière pour qu'il puisse vivre avec elle. Méridia le voulait comme animal de compagnie et n'avait pas l'intention de le partager. Mais avant qu'elle ne passe à l'acte et kidnappe définitivement le garçon, ses visions se firent douloureuses. Elle ne pouvait agir ainsi, pour le bien de du monde des sorciers et même de l'humanité. Norbert Dragonneau était amené à faire de très grandes choses en grandissant. Méridia ne regretta pas longtemps son choix, voir évoluer le collégien égayait ses journées. Leurs rencontres lui laissaient toujours un goût agréable, parfois doux, parfois un tantinet amer.
– Je dois quand même essayer de trouver une solution. J'ai des idées, mais aucune de réalisable, continua le Poufsouffle.
– Par exemple ?
– Il est né d'un condensé de peur, peut-être en créant un condensé de joie cela s'annulera ? Ou alors, inventer un vêtement magique qui ne laisse pas passer les ondes qu'il envoie. Ou encore, enfermer son pouvoir dans une fiole, comme on enferme la gloire en bouteille ou la mort dans un flacon ? récita Norbert en faisant les cent pas sous le sol pleureur.
– Et transférer son pouvoir ?
Le garçon s'arrêta et dévisagea son amie.
– Transférer son pouvoir ?
– Deux problèmes se posent à toi. L'un concerne un démon, l'autre le Feu Follet. Peut-être que tu peux faire d'une pierre deux coups ?
– Transférer le pouvoir de Feu Follet au Démon et vaincre ce dernier ?
– Oui.
– Je préférerais libérer Feu Follet de cette malédiction et offrir une bénédiction au Démon.
– Parfois il faut faire des choix... Je reviendrai vers toi concernant mes visions, dès que j'en sais plus.
Méridia disparut alors sous l'eau sombre du lac, laissant Norbert face à ses pensées.
– Suis-je obligé de faire un choix ?
Seul le silence lui répondit.
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