Noname
Nous entrons dans la voiture, prêts à retourner vers la civilisation.
« Et maintenant ? Lance-t-il. Que comptes-tu faire ?
Je soupire longuement.
— Tracer ma route comme je l'ai toujours fais, répondé-je d'un air timidement enthousiaste. Cette histoire m'a apporté quelques beaux souvenirs, mais surtout une sacrée leçon.
— Et qu'est ce qu'elle t'a prit ? Demande-t-il.
— Mon temps, rétorqué-je en établissant une liste. Mon énergie, mon argent, mon goût pour l'amour, ma patience, mon courage, mes espoirs, ma vision sur les relations. En vrai, elle m'a presque tout pris.
— Il est sans doute temps de te reconstruire, juge Seth en m'adressant un regard plein d'espoir.
— J'ai éprouvé de l'amour pour elle, terminé-je, puis une haine incommensurable. De l'amour à la haine, il n'y a qu'un pas, comme on dit. Aujourd'hui, je suis simplement en colère. Contre elle, bien-sûr, mais aussi contre moi-même. Mes sentiments s'en sont allés, je ne m'inquiète plus de savoir où elle est ni ce qu'elle fait. Ses apparitions dans mon environnement ne me font rien. L'indifférence prend le pas sur tout le reste, et c'est là la véritable guérison. »
Nous rentrons chez nous. Seul, assis sur le rebord de la fenêtre de mon salon, j'observe les badauds animer ma rue en contrebas. La nuit est tombée, mais la lumière persiste. Ces gens continuent à marcher dans des rues à l'épreuve de l'obscurité, sans prêter attention à la noirceur du ciel qui se tiens au dessus de leurs crânes.
Une bière dans la main, je sors d'un tiroir une feuille repliée en quatre. Me rasseyant sur le rebord de la fenêtre, je bois une gorgée de bière puis déplie ce qui s'apparente à une lettre. Des mots couchés sur la matière, lourds de sens et de signification. Un brouillon de la véritable lettre d'adieu expédiée à celle qui su faire battre mon cœur comme personne avant de le briser en éclats.
***
Chère Clélia,
J'aurais voulu que les choses se passent différemment, mais le destin a voulu que cela se passe ainsi. Je t'écris cette lettre car aucune occasion ne s'est présentée pour mettre un terme à tout cela en bonnes et dues formes.
Cette histoire aura eu bien des rebondissements. Pour autant, de l'instant où nous nous sommes mis ensemble au sommet de ces falaises, à l'aube d'un certain jour d'avril, jusqu'à maintenant, je n'ai jamais cessé de t'aimer. Je t'ai toujours pardonné ton malmenage, j'ai toujours cru en toi et au meilleur qui était en nous. Nous avons passé des moments inoubliables et je me tue à réaliser qu'ils sont derrière nous. J'ai toujours tout fait dans la mesure du possible pour que tu sois bien, pour ton bonheur, pour ton confort. Je me suis mis à dos des gens, perdu des amis car je préférais te croire toi plutôt qu'eux.
Aujourd'hui, avec toute la souffrance que tu m'as procuré et les séquelles que cette relation me procurent encore, je me rend compte qu'ils avaient tous raison. A quoi bon me battre pour quelqu'un qui n'en a rien à faire et joue avec mes sentiments, mes nerfs ? Ma seule tranquillité est de savoir que j'ai tout fais pour toi, du début à la fin, de n'avoir jamais cherché à te faire du mal ni être irrespectueux. Si écart il y a eu, je le dois à ton comportement désastreux qui m'a repoussé dans mes derniers retranchements. Je me rassure aussi d'être resté intègre envers toi, ce qui n'a pas été ton cas.
Nos premières semaines étaient magnifiques, sûrement la meilleure période. Malgré tout, depuis, il y en as eu d'autres. Ces autres-là, je ne les oublies pas non plus. Ce sont des souvenirs douloureux qui vont sans doute me hanter pendant un bon moment, ceux d'une Clélia qui se comportait bien et qui sonnent maintenant comme un rêve.
Je suis anéanti. Ce que tu m'as fait m'a détruit. J'ai épuisé tout mon temps et mon énergie jusqu'à la rédaction de cette lettre que j'effectue avec la plus grande tristesse. Tu disais te soucier de moi, avoir peur de ce que je pourrais faire, mais tes derniers actes en ont prouvé le contraire. Aujourd'hui, je vois que tu contemple ton oeuvre et t'enfuis face à ses répercussions.
Dès l'instant ou cette lettre sera postée, je disparaîtrais de ta vie, je présume dans ton indifférence la plus totale. Revenir vers toi, lorsque tu me faisais la démonstration de ton sentimentalisme exacerbé, il y a de cela deux misérables mois, fut la pire décision prise cette année, tout comme celle de donner mes coordonnées à Méline pour permettre notre rencontre. Tout les bons souvenirs que j'ai avec toi ne surpassent pas toute la souffrance que tu as engendré avec ton égoïsme, ton indécision et ton comportement volatile.
Je ne te pardonnerais jamais de m'avoir fait tant de mal, de m'avoir tant malmené et pris pour un con. Je crois n'avoir jamais mérité une telle chose. Tout ce que je voulais, c'était t'aimer et qu'on sois heureux. C'est ce qu'on s'était dis.
Ma dernière image de toi restera donc celle de ce matin-là, sur le campus universitaire de Strasbourg, te voyant marcher au loin vers ton école avec l'intuition qu'il s'agissait de la dernière fois que je te verrais. C'était le cas. Adieu nos projets, nos promesses, et surtout celles que tu m'avais faites.
A bout de force, j'arrête de me battre et je baisse les bras. Merci pour ces moments, ces espoirs, ce bonheur et cette complicité. Merci de m'avoir fait tant de mal, engendré tant de souffrances. Tu auras au moins eu la délicatesse de m'achever sans nous donner l'opportunité de mettre les choses carte sur table pour me permettre d'avancer après ton passage désastreux. Ainsi, seuls subsistent l'amertume, les regrets et le supplice qu'une telle relation a pu avoir sur moi. Je ne sais pas ce que je vais faire pour me relever de cela, mais une chose est certaine : on ne m'y prendra plus.
Adieu, Clélia.
Jonas
J'allume mon briquet sous l'un des coins du bas de page. Le papier se consume jusqu'à finir en cendres, à l'instar de notre relation.
***
Quelques mois plus tard
Le soleil envahit la boutique malgré les quelques bandes de tissus tirés dans la décoration de la vitrine. A l'aube de l'été, une décoration plus caliente est à l'ordre du jour. Je m'active pour terminer d'installer nos nouveaux modèles d'exposition alors que la boutique connait un essor de clientèle. Concentré dans mes tâches, je sors néanmoins de ma bulle le temps de quelques secondes pour admirer, à travers la vitre, l'astre illuminant le ciel.
Sa brillance semblait jusque là être la seule chose capable de m'interpeller. Puis, soudainement, une main viens tapoter mon épaule, me sortant ainsi de mon admiration pour le beau temps. En me retournant, j'analyse de la tête aux pieds la personne venue m'interpeller.
Une jeune femme d'environ un mètre soixante dix, taille dopée par une paire de talons, se tient fébrilement devant moi. Vêtue d'une petite robe rouge bien taillée, elle arborait une longue chevelure blonde sublimée par un joli visage hésitant, d'une grande timidité.
« Bonjour, lancé-je naturellement. Est-ce que je peux vous aider ? Vous recherchez un stage ?
La jeune femme hésite en contemplant mon visage. Puis, gênée, se lance.
— Non pas du tout, dit-elle en riant nerveusement. C'est super gênant, mais.. Mais je vous observe dans votre vitrine à chaque fois que je passe devant et.. je vous trouve très mignon, en fait. »
Après quelques secondes figé face à elle, je me met nerveusement à rire. Nous y revoilà.
FIN
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