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39. L'incertitude


Huit cent ans après Descartes, le commandant Statim Kervacs redécouvrit le principe du cogito : je pense, donc je suis.

Contrairement à Descartes, qui avait l'air de trouver cela tout à fait normal, cette nouveauté le plongea dans une grande perplexité.

Il était vêtu d'une sorte de chemise d'hôpital, ou de tout autre vêtement issu de la flamboyante imagination almaine dont l'apparence hideuse invite à réviser le concept de pudeur. Il était assis, car on attend toujours mieux assis, et sur une petite table grise à côté de lui, quelqu'un avait déposé un verre d'eau. À moins que le verre d'eau ait été là depuis le commencement des temps, qu'il ait traversé les siècles parmi les fossiles des dinosaures et qu'il vienne tout juste d'être révélé intact, sur sa table, par l'érosion.

Dans le doute, Statim ne toucha pas à ce verre d'eau.

Il n'avait pas soif, mais une sensation de brûlure persistante couvrait toute sa peau, du bout des doigts au sommet de son crâne. Dans les tréfonds de son esprit, un instinct impérieux lui commandait de fuir, de s'agiter pour chasser le mal, mais ses yeux lui disaient qu'il n'avait rien, et ces deux conseillers aux vues contraires se livraient une lutte sans merci pour gagner son assentiment.

« J'ai mal, dit-il à haute voix.

— C'est en train d'être corrigé, commandant Kervacs-sen. »

L'apparition de l'amiral Bertram le laissa de marbre, car il reconnaissait les contours simplistes de cette pièce grise. Pour avoir fait de nombreux allers-retours entre le monde physique et le monde virtuel du Réseau, via la sphère de son nanoscope, Statim savait ce qu'était l'Antichambre de la simulation. S'il existait un enfer, il devait ressembler à cette salle d'interrogatoire austère, dans laquelle on le laisserait seul mille ans, avec pour toute compagnie un verre d'eau et l'amiral aux sourcils froncés, encore abasourdi par sa trahison de la Division 1, et qui revisiterait l'histoire avec force reproches.

« Je n'ai jamais demandé à rester en vie.

— Dites cela aux quarante-sept almains de votre équipage que nous n'avons pas réussi à sauver. »

Ça y est, se dit Statim. Début du procès. Il a tout son temps ; serais-je un caillou que la culpabilité ferait tout de même son chemin dans mon esprit étriqué, s'y installerait comme un parasite vorace, et me rongerait de l'intérieur pour autant de temps qu'il en faudra aux blanches falaises de Neredia pour être englouties par les eaux.

« Que s'est-il passé ? Pourquoi suis-je ici ?

— Si vous le permettez, je vais commencer par le « comment ». Peu avant la destruction du Kzran, nous avons pénétré son réseau local à l'aide de notre logiciel de piratage. Les nanoscopes encore actifs étaient connectés à ce réseau. Nous avons donc eu l'opportunité de lancer le programme de capture d'empreinte.

— Je sais comment cela fonctionne » se hâta de dire Statim, bien que tout cela n'eût été jusqu'à présent que théorie pour lui.

Le nanoscope était entré dans son cerveau comme une vague, il avait traversé toutes les connexions de ses neurones, cartographié ses cellules gliales et compressé cette information sous la forme d'un unique fichier, le souvenir d'un cerveau humain qui avait ensuite traversé l'espace sur le réseau local. Qu'il y manquât le moindre fragment, et Statim n'aurait jamais été réveillé – telle était la procédure. Tout comme les dommages cérébraux physiques, les atteintes au fichier de connectome pouvaient lui ôter la capacité de voir, ou d'entendre, ou de reconnaître les visages, ou encore, faire de lui un psychopathe.

Mais son empreinte de connectome était intacte et Statim avait pu être introduit dans le Réseau Aleph. En ce moment même, un support physique situé sur la frégate Carlsson reproduisait le fonctionnement de ce cerveau et lui permettait de penser.

« Vous savez maintenant ce qu'il va se passer.

— En théorie, oui, mais en ce moment, la Division 1 a tendance à jeter au feu toutes ses procédures.

— Parlez pour vous. Il y en a qui respectent encore la chaîne de commandement et le protocole. »

Si le réveil de Statim, qui s'imaginait mort, avait été un choc, l'amiral Bertram avait l'air sincèrement secoué lui aussi. Sans doute trempait-il désormais dans les secrets inavouables de la Division 1, et à en juger par son attitude, Statim avait été ramené des morts pour recevoir sa part.

« Pourquoi ai-je encore mal ?

— Au moment de votre empreinte, les flammes ravageaient la salle de contrôle du Kzran. Votre cerveau virtuel a encore l'impression de recevoir les messages de douleur émanant de votre corps en train de brûler. Nous faisons notre possible pour les éliminer. Plusieurs alephs sont en train de fouiller votre réseau de neurones, mais cela prendra du temps. »

L'amiral avisa le verre d'eau posé sur la table et il le but d'un trait.

« Vous avez maintenant trois choix possibles, commandant Kervacs-sen.

— Je sais. Mourir, devenir un aleph, ou réintégrer un corps physique.

— Exact. Premier choix : la Division 1 créé pour vous un clone de Statim Kervacs dans une cuve de maturation artificielle, et nous procédons à une impression de connectome sur son cerveau. C'est une opération lourde, mais qui réussit sans séquelles dans cinquante pour cent des cas. Deuxième choix : nous prenons votre cerveau virtuel et y appliquons les modifications nécessaires à faire de vous un aleph du Réseau. Troisième choix : nous abandonnons tout et nous détruisons votre support physique.

— En bref, c'est la peste bubonique, le choléra ou le virus alcyon.

— Encore une fois, félicitez-vous d'avoir le choix, commandant-sen. Quarante-sept almains de votre équipage n'ont pas eu ce choix. D'autres ont un choix plus difficile encore : garder leur corps actuel, qui gît à l'infirmerie de bord, ou s'intégrer au Réseau par le biais de leurs nanoscopes.

— Qu'est-ce qui arrangerait le mieux la Division 1 ? Que je disparaisse ?

— Aussi étrange que cela puisse paraître, la Division 1 vous considère comme l'un de ses meilleurs éléments, et voudrait vous réintégrer au service. Pas au grade de commandant, mais au grade d'agent.

— Il est vrai que mes compétences en commandement de frégate laissent à désirer.

— Je n'arrive pas à comprendre votre légèreté.

— Rire de la vie et de la mort, c'est le privilège des fantômes. »

Bertram ne lui avait jamais paru aussi vieux ; il ne lui manquait plus qu'une canne et deux médailles du mérite pour devenir un amiral à la retraite.

« Lanthane est la réincarnation d'une demi-déesse nommée Aléane, lança-t-il soudain. Je ne sais pas qui l'a su en premier et à quel moment. Il est dit qu'Aléane réapparaît pour lutter contre les tyrannies. Le groupe de la Terre craint qu'elle ne s'élève contre l'influence de Diel, ce qui pourrait déclencher une guerre civile dans la Conférence. La position du groupe de Rems à ce sujet est ambiguë. Vous-même, avec 9981-Nombres, avec Mikhail-sen, vous n'avez fait que faciliter leurs plans, et nous, de notre côté, nous n'avons fait que leur fournir des preuves accablantes. Il faut que cela change. Nous avons la responsabilité, vous et moi, d'empêcher la catastrophe. »

Statim fit non de la tête.

« Vous, et vous seul. Je ne me sens plus concerné.

— Vous refusez donc que votre empreinte soit sauvegardée ?

— En effet. Je refuse. »

L'amiral émit un profond soupir.

« Ce n'est pas ce que prévoyaient les Stratèges.

— Cela arrive, amiral-sen. C'est ce qu'on nomme la liberté.

— Peut-être votre esprit a-t-il subi des altérations lors de la prise d'empreinte sur le Kzran.

— Cette conversation pourrait se poursuivre éternellement, amiral-sen. Nous n'irons nulle part.

— Bien, bien, j'accepte votre réponse. »

Bertram détourna la tête, mais il n'y avait rien d'autre à voir dans cette pièce insupportable, et il ne faisait que contempler un mur.

« Vous pensez sincèrement que Lanthane va détruire Diel ? insista Statim.

— Je n'en sais rien. Je n'en sais vraiment rien. Mais dès qu'elle aura posé le pied sur Mjöllnir, elle aura cette possibilité.

— Voilà le vrai problème, rétorqua Statim. Lanthane échappe aux Stratèges et aux simulations. Ils ne la connaissent pas, car ils ne connaissent pas son histoire. Ils ne peuvent pas la modéliser. Il en va de même pour Mjöllnir, qui est étranger à notre histoire. Et la Conférence se refuse à accepter une telle incertitude. »

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