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57. Le directeur


Dans un métier comme celui de Jim Denrey, à savoir diriger une organisation planétaire placée sous l'égide de l'ONU, et officiant secrètement dans tous les pays ayant ratifié son accord de création, le succès d'une opération se comptait en coups de téléphone.

Un succès franc engendrait trois coups de téléphone. Monsieur le directeur, l'opération est un succès, les bandits sont sous les verrous et le laboratoire de virologie clandestin a été démantelé. Chers agents, en tant que directeur, je vous félicite pour votre engagement, vous recevrez une prime, un sucre d'orge, un bon de réduction sur votre marque de lessive préférée, etc. Monsieur le directeur, en tant que président, je vous félicite pour l'efficacité et le professionnalisme de vos agents, et vous me voyez très satisfait de l'action du BIS dans mon pays, aussi j'ai le plaisir de vous annoncer que je prends la décision de ne pas couper tous vos crédits, comme l'avait prévu mon ministre des finances publiques. Monsieur le président, c'est trop d'honneur, etc, etc.

Un succès modeste se traduisait par deux coups de téléphone. Monsieur le directeur, nous avons récupéré le manuscrit interdit des cent vingt-sept démons de Zou'l Stamoch, mais au cours de l'opération, il est tombé dans une cuve d'acide fluorhydrique, et nous n'avons pu sauver que la préface, plus exactement la page dans laquelle Zou'l Stamoch fait une blague impliquant une vache qui pète. Chers agents, en tant que directeur, je vous remercie néanmoins pour la bonne conduite de cette opération ; l'essentiel est que personne ne soit mort, etc, etc.

Un échec pouvait engendrer un nombre infini d'appels, une sorte de réaction en chaîne remontant toute une série d'échelons administratifs, redescendant aussi vite, remontant aussitôt comme un manège hors de contrôle. Dans un sens, le ton était modéré, empesé de détails inutiles ou inventés, alourdis d'euphémismes et de silences évocateurs ; dans l'autre, le souffle était court, la voix grondante ou tonnante comme une tempête de montagne.

La veille au soir, et jusque tard dans la nuit, Jim Denrey avait vécu une succession d'appels, de messages, de courriels qui resterait dans ses souvenirs comme le pire échec de sa carrière. Le BIS, lâché dans la cour des grands, venait de récolter une dérouillée monumentale. Faces aux puissantes agences gouvernementales américaines, le petit Bureau avec ses agents sous-payés, ses statuts fumeux, son matériel de fonds de tiroir, ses armoires de dossiers qui prenaient l'eau, avait vainement essayé de gonfler les muscles, tandis que le FBI sabordait la SPEX dans une avalanche de perquisitions, de mandats, de cellules d'enquête spéciales se donnant tous les pouvoirs.

À quatre heures du matin, alors que la situation semblait se tasser, Jim avait ouvert la lettre d'un procureur l'informant de la situation, comme Brutus retournant le couteau dans le dos de César pour s'assurer qu'il ne se relèverait pas. Puis il avait parlé avec Anastasia Romanovna, la directrice de la SPEX, que le Bureau Fédéral avait placé sous mandat d'arrêt, et qui était considérée comme fugitive. Depuis vingt heures, depuis le moment où les agents étaient entrés dans les bureaux de la SPEX à Atlanta pour arrêter tout ce qu'ils y trouvaient, Jim Denrey savait que tous ses moyens de communication étaient espionnés. En touchant son clavier ou son téléphone, il avait l'impression de se brûler les doigts.

« Bonsoir, Jim.

— Anastasia, cette ligne est sur écoute !

— Pas celle-ci, non. Votre téléphone rouge est aussi sécurisé que celui qui reliait le kremlin et la Maison-Blanche. Cela dit, fermez tous vos rideaux si vous en avez. »

Jim avait rejeté la tête en arrière. Il avait l'impression d'être pris dans un étau ; un énorme poids comprimait sa poitrine. Avons-nous poursuivi des intérêts contraires au gouvernement ? Avait-il envie de demander. Après ce marathon de huit heures, il était prêt à douter de sa propre probité, de son propre engagement. De sa propre morale !

« Nous avons été piégés par les Convertis, c'est ma seule explication. Je pense qu'ils ont des entrées. Il suffit de pas grand-chose. Nombre d'agences attendaient avec impatience la moindre raison de nous sauter à la gorge. »

Anastasia était une femme efficace et secrète ; autant de qualités qui devaient alourdir son dossier. Comme la moitié des collaborateurs du BIS aux États-Unis, elle n'était pas de nationalité américaine ; imaginer que des non-citoyens puissent diriger des opérations, même sous mandat, sur le sol de la superpuissance incontestée de l'ère post-guerre froide, arrachait des sueurs froides à bon nombre de barrettes et d'étoiles grenouillant dans le Pentagone. Ils avaient l'intuition, au demeurant exacte, que c'était le prélude au déclassement de leur pays en puissance régionale.

« Je vais devoir vous laisser, Jim. Je vous recontacterai quand ce sera possible. Faites ce que vous pouvez avec les agents qu'il nous reste. Il est primordial que les Convertis soient stoppés le plus vite possible ; vous devez retrouver Treskoff et la mettre sous les barreaux. »

Mais Jim ne se sentait pas en capacité d'agir sur quoi que ce soit. Toutes les activités du Bureau avaient été mises entre parenthèses. D'autres agents avaient disparu dans la nature, craignant sans doute que la police fédérale ne vienne bientôt frapper à leur porte.

Et lui, viendraient-ils le chercher ?

Jim entretenait des relations cordiales avec le président, or ce dernier s'était montré étrangement silencieux. Le gouvernement craignait que la presse ne vienne s'intéresser de trop près à l'enquête en cours, donc au BIS lui-même, qui se camouflait encore sous l'apparence d'une garçonnière de technocrates onusiens. Le président n'avait été mis au courant qu'a posteriori, et attendait que la situation évolue avant de se prononcer ; que le Bureau Fédéral d'Investigation lui envoie des preuves tangibles des activités anti-gouvernementales de la SPEX.

L'Empire n'a jamais pris fin. Jim ne parvenait pas à s'ôter cette phrase de la tête ; il l'avait peut-être lue sur un des tracts anarchistes dont les boîtes aux lettres du quartier se remplissaient sans discontinuer. Cryptique en première lecture, elle lui paraissait désormais limpide au plus profond de sa somnolence. Malgré son architecture démocratique, l'État qui hébergeait la direction du BIS demeurait un empire, une entité puissante détentrice d'un pouvoir à la fois temporel et spirituel, prête à tout pour maintenir son rang, et dotée d'un instinct sans faille pour repérer les adversaires potentiels.

L'existence du Bureau International était une menace pour l'ordre établi. Et ce n'est pas par cruauté gratuite que le vieux lion dévore sa progéniture, mais par instinct de survie.

« Monsieur le directeur ? Puis-je entrer ?

— Euh, oui... »

Jim ouvrit des paupières pâteuses, se releva de son bureau en se massant le crâne.

« Bon Dieu, Christian, quelle heure est-il ?

— Sept heures, monsieur. »

Son secrétaire lui apparut comme une silhouette floue. Denrey débrancha le fil de charge de son fauteuil électrique et s'écarta de son bureau pour aller faire un tour. Christian l'observait avec une sorte de curiosité, certain que l'avenir du Bureau se jouerait en quelques jours, dont il se souviendrait comme des moments historiques. Lui-même n'avait rien à perdre dans l'affaire, sinon son travail actuel. Et avec ses diplômes, il lui suffirait de traverser la rue pour se trouver une boîte de conseil en relations internationales.

« Nous n'allons pas nous laisser faire, marmonna Denrey. Christian, donnez-moi une bonne nouvelle.

— Je vous ai apporté du café.

— C'est un bon début, passez-moi ça. Vous appellerez Frank Wassermann, ou Zhang Luo, à l'ONU. Plutôt Zhang. Il doit être déjà au courant que les américains sont en train de nous saborder, et il doit trépigner d'impatience à l'idée de contre-attaquer avec les gros sabots de la diplomatie chinoise.

— Est-ce que cela changera quelque chose à notre situation ?

— Non, mais ça les tiendra occupés pendant que nous nous chargeons du plus important : dissoudre les Convertis. »

Au passage, Jim attrapa son gobelet de café, et il allait franchir la porte de son bureau lorsque Christian l'interrompit d'un geste de la main.

« Quelqu'un est venu vous voir, monsieur. Un... un agent du FBI. »

C'est déjà l'heure ? songea-t-il, tel le condamné à mort qui voit arriver le prêtre. Mais je n'ai pas terminé ! Il faut appeler Zhang...

« Ils n'étaient que quatre, et ce monsieur souhaite vous parler en privé. Je le fais entrer ?

— Allez-y, Christian. Je m'en occupe. »

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