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54. Tyrfing


Ne sous-estimez pas l'ascendant que vous confère un chapeau bien mis.

Adrian von Zögarn, Traité d'héroïsme, Annexe II : conseils divers


Adrian rangea ses lunettes et sa montre à gousset dans sa veste de costume, pour ne pas les abîmer, et sauta par-dessus les sièges. Il descendit l'allée d'un pas guilleret, saluant les vampires restés auprès d'Alma Treskoff de grands gestes amicaux, tel un homme politique en campagne.

« Tout d'abord, permettez que je me présente. Adrian von Zögarn, alchimiste notoire, philosophe reconnu, poète discutable. J'ai introduit la conchyliculture sur Neredia et je suis le premier homme à avoir envoyé un mouton dans l'espace.

— Pourquoi êtes-vous ici, monsieur von Zögarn ? »

Marcion ayant laissé son chapeau derrière lui, Adrian le remodela de quelques gestes de la main et l'enfonça sur son crâne avec la satisfaction légitime d'un artiste ayant enfin mis la dernière touche à son œuvre suprême.

« Je fais aussi d'excellentes blagues, ajouta-t-il. Mais je vais aller droit au but : je pense que vous avez un Stathme en votre possession et qu'il vous manipule. D'où le désir de pouvoir et tout le délire autour de l'Impératrice rouge, un grand classique. Je vous propose de me le confier et d'aller prendre une camomille.

— Je ne crois pas, monsieur von Zögarn. »

Adrian soupira. Deux hommes venaient de verrouiller la porte et descendaient l'allée derrière lui d'un pas calme. Ce n'étaient pas des agents de sécurité habituels. Pâles et maigres, ils portaient des costumes noirs brillants, des chemises de lin et des pantalons amples, avec une sorte de large poche au côté droit. L'alchimiste devina qu'ils y cachaient des lames courtes, des dagues plates à mi-chemin entre l'épée et le poignard. Il s'agissait donc de la garde rapprochée d'Alma Treskoff, parfaitement équipée pour les cas comme lui.

« Excusez-moi, dit-il en écartant les bras. Puis-je m'enquérir de la manière dont vous avez appris mon nom et mon identité ? C'est une fierté d'être aussi célèbre auprès des personnes se réclamant la réincarnation de dictatrices psychopathes légendaires.

— Vous faites partie des personnes susceptibles d'entraver nos plans.

— C'est amusant, je n'avais même pas entendu parler des Convertis il y a deux jours. Je vieillis ! Heureusement que d'autres personnes se chargent de protéger le monde à ma place.

— Le Bureau International de Surveillance sera démantelé dans les prochaines semaines.

— Foutaises. Hélas, madame, contrairement au grand Socrate en son temps, je suis pressé. J'ai promis d'emmener Astyane au cinéma juste après, et nous risquons de manquer la séance de vingt-trois heures. Le Stathme, je vous prie. »

Alma Treskoff fit un geste en direction d'une vampire derrière elle, qui s'avança en lui présentant un attaché-case en cuir. L'Impératrice entra un code ; il y eut un déclic ; elle posa ses deux mains sur l'objet que contenait la mallette. On aurait dit un antiquaire qui ménageait son effet, pour présenter le clou de sa collection, juste avant d'en annoncer le prix exorbitant.

« J'ai entendu dire que vous seriez familier de cet objet, von Zögarn. »

Son assistante reprit la mallette et la referma promptement. Ni Adrian, ni l'instinct de son for intérieur ne s'attendaient à ce qu'ils virent, et il se morigéna de ne pas l'avoir senti, car une puissance singulière et reconnaissable émanait de cette chose. Pour autant, Alma Treskoff sembla ne retirer aucune satisfaction d'avoir arraché cette expression de surprise au visage d'Adrian, et d'avoir fait tressauter sa moustache impavide.

Elle tint le cimeterre d'une main, à bout de bras, comme pour chercher le moindre reflet de lumière sur sa lame noire opaque.

« Voici Tyrfing, l'arme avec laquelle Almena a tué le roi Zor. »

Cette épée séculaire aurait due être perdue cent fois ; elle aurait dû couler au fond d'un océan et se dissoudre en rouille ; elle aurait dû rouler dans une crevasse du sol et retourner aux forges du magma terrestre. Mais cette épée était un objet de pouvoir, comme l'anneau du dieu Vern ; des rois, des aventuriers, des alchimistes l'avaient poursuivie durant de longues années, retournant chaque pierre de l'Omnimonde à sa recherche. Et l'épée ne voulait pas disparaître. Toutes les personnes qui l'avaient portée, toutes les vies qu'elle avait prise, s'étaient mêlés avec son métal ; le bain des sentiments humains, des plus hideux aux plus nobles, avait renforcé sa lame et accru son pouvoir. Pour l'œil humain, ce n'était qu'une lame tordue de couleur charbon, au pommeau incrusté d'une énorme émeraude ; pour Adrian, elle brillait d'un désir insatiable de conquête.

Ou, plus exactement, de bataille. Car Tyrfing était une épée maudite, dépourvue de loyauté. Elle se moquait bien du bras qui la portait, du moment qu'il lui offre le sang et la gloire – sa propre gloire, et non celle du héros temporaire qui se croirait son maître.

« C'est bien Tyrfing, je la reconnais, mais vous faites une erreur commune. Almena n'a pas tué Zor avec cette arme.

— Elle me l'a dit.

— Tyrfing est une menteuse. Elle vous dirait n'importe quoi pour se faire mousser. »

Si elle n'avait été autrefois qu'un esprit en sommeil, Tyrfing était devenue un Stathme. La pierre incrustée à son pommeau, d'un puissant vert chlorophyllien, n'était pas une émeraude, mais un cristal non-standard. Un os de Dragon comme Adrian en utilisait autrefois dans ses expériences.

« Bien, madame Treskoff, je comprends comment vous en êtes arrivée là : l'épée vous est tombée dans les mains et vous a farci le crâne avec un projet d'empire omnimondien. Vous n'êtes pas la première. Vous n'êtes pas la dernière. Donnez-moi cette arme et tout ira mieux.

— Je sais que Tyrfing est une source d'Atman, je sais qu'elle se sert de nous pour ses propres objectifs. Mais comment être contre ce projet ? Nous allons mettre sur pied un empire éternel. Nous avons ce pouvoir. Personne ne viendra nous arrêter.

— Euh, je suis là, justement.

— Vous êtes un vieil homme, von Zögarn. Vous êtes seul contre nous tous. Votre magie d'atman est insignifiante face à celle que nous confère Tyrfing.

— Certes, mais je suis mieux coiffé. »

L'alchimiste ramassa sa canne, qu'il avait déposée contre des fauteuils. Jusqu'ici, personne n'avait remarqué qu'il portait une canne. Pourtant, le bois laqué, le lourd pommeau d'obsidienne taillé en forme d'escargot ne pouvaient passer inaperçus. Mais Adrian était un prestidigitateur, et aussi faible que fût sa magie d'atman, il maîtrisait l'art de l'attention à la perfection.

L'éclat d'une lame d'acier resplendit un court instant derrière lui ; la canne s'abattit sur le poignet du premier vampire avec un craquement, puis le pommeau rencontra la partie la plus sensible de son organisme, et il se replia sur lui-même comme un cloporte démasqué.

Malgré son grand âge, près de cinq siècles tout de même, Adrian bondit sur l'estrade pour couper la retraite à Alma Treskoff. Mais l'Impératrice rouge réincarnée demeurait en place, figée, Tyrfing en main. Elle la pointa lentement dans sa direction.

« C'est un cimeterre, indiqua Adrian. Vous êtes censée frapper avec la lame, pas la pointe. Avec les deux mains. Il faut tout vous expliquer.

— C'est Tyrfing qui choisit de frapper. Pas moi. »

L'arme échappa à la main de Treskoff, à laquelle elle n'était reliée que par une corde noire, luisante, faite d'ombre. Adrian tendit sa canne à deux mains pour faire barrage au premier coup, qui aurait pu le trancher en deux. S'abattant sur le bois de l'arbre-monde de Stella Flore, le cimeterre n'y fit qu'une légère entaille, ce qui était déjà un exploit. Adrian sentit une onde de choc se propager dans ses bras endoloris.

« Donnez-moi cet objet » répéta-t-il en sautant sur l'estrade.

Les gardes du corps vampires n'étaient pas surpris de voir Alma faire usage de sa magie d'atman. Ils se tenaient à distance, dans l'ombre des projecteurs, tel le public de juges d'une prestation d'art dramatique.

« L'Empire est une nécessité de la nature, lança Alma en rajustant son masque de métal, le bras toujours tendu, main ouverte, pour manipuler Tyrfing. La liberté est insupportable aux mortels.

— La démocratie existe depuis plus de deux mille ans.

— Mais ce n'est que du consumérisme. La seule différence, c'est que l'être providentiel chargé de tous les pouvoirs et de toutes les responsabilités change tous les dix ans. Or cette instabilité génère la peur de l'avenir. Tous les peuples de ce monde ont peur de l'avenir, et seront prêts à nous donner leur liberté pour que nous leur garantissions un radieux futur.

— Je ne suis pas venu parler de philosophie politique. »

Le bouquet de cordes noires se détendit, s'arqua comme un fouet, et Tyrfing repartit en direction d'Adrian, qui l'évita d'un bond. Il se rapprochait toujours d'Alma. L'impératrice future agita le bras droit avec de grands gestes violents ; Tyrfing fendit l'air en retour. Ivre de puissance, la lame résonnait d'une envie de meurtre implacable.

Avec des gestes aussi vifs, Adrian donnait de grands coups de canne pour bloquer les assauts. Des copeaux de bois sacré volaient aux alentours, et l'escargot d'obsidienne manqua d'être décapité.

« Elle n'avait pas ce cristal, autrefois, remarqua-t-il. Qui l'a forgée ainsi ? Est-ce vous ? Où l'avez-vous trouvée ?

— On dit qu'à la mort de Justitia, sa précédente propriétaire, un démonologiste nérédien a trouvé la lame fichée dans la terre. Il a senti son potentiel, mais il fallait, pour que Tyrfing devienne l'arme d'un empire, amplifier son pouvoir.

— Tout ceci est délirant. »

Alors qu'il tenait la canne au-dessus de sa tête pour bloquer un autre choc, Alma envoya son pied dans les côtes d'Adrian. Je ne crains rien, se rassura-t-il. Mon corps est fait d'acier, il arrête les balles, etc, etc. Puis il entendit nettement un de ses os craquer, perforer son poumon ; il se plia en deux, lâcha sa canne de défense, qui roula entre eux comme le sceptre d'un roi déchu.

« Un instant, dit-il en reprenant son souffle. Un instant et je suis à vous.

— Je dois partir » dit Alma Treskoff.

Elle ramena le cimeterre dans sa main, puis le déposa dans la valise qu'on lui présentait de nouveau, et se dirigea vers la porte de sortie avec deux gardes, ordonnant aux autres d'achever l'alchimiste.

« Un instant » répéta Adrian tandis que les hommes, pâles comme des fantômes, dégainaient leurs poignards d'assassin. Lames empoisonnées, chuchota son instinct. Comme s'il n'aurait pas pu le deviner tout seul.

Un éclat de métal descendit en direction de son cou, et il tendit la main pour l'arrêter.

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