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1. Adad


L'Empire ne connaît pas de bien, ni de mal. Il ne veut qu'une seule chose : soumettre tous ceux qui entrent en contact avec lui. Ceux qui ne se soumettent pas seront oblitérés. C'est pourquoi, après un long sillage de guerres éprouvantes, l'Empire, faute d'avoir soumis son ultime adversaire, finit par rendre les armes ; et c'est pourquoi les empereurs attendent toujours avec angoisse la venue de l'ange qui mettra fin à leur règne.

Nous sommes si familiers des empires que nous en oublions leur mystère : pourquoi reviennent-ils toujours ? Pourquoi se reforment-ils sans cesse ? L'Empire est-il en germe dans chacun de nous ? Sommes-nous tous des tyrans en puissance qui, une fois dotés du pouvoir, reproduisons le même schéma d'expansion et d'effondrement ?

Le retour éternel d'Aléane, l'ange de la destruction, celle qui dépose les rois, est, pour le règne des conscients, pour tous les peuples de la Création, un aveu d'échec.

Caelus, Notes


La boule jaunâtre de Sol avait disparu à l'horizon lorsque le commandant Adad traversa les jardins royaux. Une infime pellicule orangée persistait encore sur les palmiers affaiblis par la sécheresse. Les bassins, presque à sec, se réduisaient en minces filets huileux. Le sol craquait sous ses sandales ; une vague de sueur descendait sur ses tempes, dans sa nuque. Il ne se sentait pas présentable, mais il était impossible de faire autrement.

L'été, dans la cité de Nela, durait une bonne moitié de l'année, mais jamais il ne s'était abattu avec une telle force. Les prédicateurs des Mille-Noms étaient tous ressortis de leurs trous, comme ces insectes charognards qui surgissent du sol à la moindre opportunité, car ils sont semblables parasites, qui profitent de la faiblesse des peuples, de leurs doutes et de leur inquiétude de l'avenir. Sur son chemin, Adad en avait fait arrêter un bon nombre. Mais les sergents en charge des autres quartiers de Nela ne lui avaient pas semblé pressés de remettre de l'ordre dans la cité royale. Abrutis par la chaleur, ils se tenaient contre les murs de brique rouge, à l'ombre d'une corniche, à l'abri de la poussière soulevée par le martèlement des passants. Appuyés sur leurs lances de bronze, le regard éteint, ils s'étaient figés tels des lézards en attendant de meilleurs jours. Les vols à l'arrachée, les agressions se déroulaient sous leurs yeux alanguis ; même en sandales et en tunique de lin, le moindre mouvement leur paraissait insurmontable.

Cette paresse infranchissable, ils ne l'avaient pas inventée tous seuls. Elle était descendue sur toute la ville comme un nouvel art de vivre. La clef de voûte de ce royaume, l'homme aux habits d'or, le souverain-à-venir-de-tous-les-mondes, le grand Ozymandias, en portait toute la responsabilité.

Ou plutôt, Ozymandias ne portait aucune responsabilité avec lui, car sitôt ce poids mis dans ses mains, il le laissait tomber à ses pieds et attendait que quelqu'un d'autre, Adad par exemple, s'en saisisse.

« Intendant ! » appela le commandant.

Ce dernier, un homme en robe chauve, les bras repliés, la tête penchée, semblait toujours cacher quelque chose, ou se cacher lui-même. Il glissait parmi les fleurs asséchées du jardin en essayant de passer inaperçu, chose impossible face aux yeux perçants du seigneur de guerre, dont le rôle était de tout voir, de tout entendre, et de protéger Nela contre tous les ennemis du ciel et de la terre – selon les Préceptes Primordiaux.

« Intendant ! » répéta Adad pour montrer à l'homme qu'il avait bien été vu, car ce dernier s'était arrêté et tournait la tête de droite à gauche, comme un animal qui hésite à fuir.

Le seigneur écarta des fougères mal entretenues qui débordaient de leurs pots et manqua de trébucher contre la main aguicheuse d'une naïade de calcaire, qui l'invitait dans un des bassins vides, accoudée sur le rebord. Ces statues abandonnées n'avaient pas perdu leur sourire, ni leur charme ; elles ressemblaient aux derniers chants d'un monde sur le point de s'éteindre.

Avant nous, il y eut un autre royaume, et après nous, il y aura un autre royaume, et ceci ne s'arrêtera pas. Pas tant que nous n'aurons pas bâti l'empire qui joindra le ciel et la terre.

« Comment va-t-il ? » demanda Adad à l'intendant.

Ce dernier s'exprimait par bribes de phrases, comme si les mots ne rendaient qu'une approximation de sa pensée, ainsi que les dessins à quatre sous faits en quelques traits par un artiste de rue. Adad afficha un air ennuyé ; il passa une main sur son front moite, renoua ses cheveux noirs, gratta du bout de l'ongle le maquillage autour de ses yeux, qui avait coulé et séché de nouveau sur sa peau fumante. Je ne suis pas présentable, songea-t-il, écoutant à peine ce que lui répondait l'intendant.

« Le souverain-à-venir... du ciel et de la terre... il ne nous écoute plus... il divague... mais la vie doit se poursuivre... Nela doit vivre, et peut encore vivre, oui...

— Jusqu'à ce que l'armée de Babylone arrive à nos portes » asséna Adad en fronçant les sourcils.

À cette annonce, l'intendant eut un instant de panique, un mouvement de recul, comme si en mentionnant le danger qui encerclait Nela, le commandant de la garde s'en faisait le porte-parole exclusif, l'incarnation funeste. Du reste, si Adad n'avait été qu'une Cassandre de pacotille, on l'aurait promptement réduit au silence, car les peuples et leurs rois, quand plus rien ne peut les sauver, ont pour dernière intuition de se retourner contre les prophètes du malheur. Mais Adad était un homme puissant ; il avait survécu à toutes les tentatives d'assassinat de la semaine passée. Son goûteur était mort empoisonné. Son propre garde du corps avait été tué dans son sommeil. Sa coiffeuse avait été enlevée ; son cuisinier, torturé et jeté dans une ruelle. En ce jour même, un tueur professionnel, un anonyme sans nom et sans mémoire de la secte des Écarteurs, avait surgi de la foule alors que la garde dispersait un prêche interdit. Il avait saisi une sorte de clou qui semblait dépasser du dos de sa main ; Adad y avait reconnu la pointe des lames que les Écarteurs font glisser sous leur peau pour les cacher. Croisant à peine le regard injecté de sang de ce fou drogué, il l'avait cloué contre un mur de brique d'un coup de lance.

Nela était en ébullition. La mort rôdait dans ses rues ; mais chaque fois qu'elle échouait à emporter Adad, il se sentait plus fort, plus résolu, déterminé à protéger la ville contre l'envahisseur babylonien, à repousser l'armée d'invasion de ses propres mains, à jeter les échelles au bas des murailles et à déverser sur leurs crânes casqués des marées de briques et de poix brûlante.

Toutefois, l'issue ne faisait aucun doute. Nela serait prise et l'empire qui joindrait le ciel et la terre, promis par les Préceptes Primordiaux, n'échoirait pas à la lignée d'Ozymandias. D'ailleurs, il n'y aurait pas de lignée. Trop passif pour investir dans un mariage, le roi avait laissé passer sa chance de conforter sa position face aux ardeurs conquérantes de Babylone.

« Allons, dit le commandant, en écartant la main d'un geste magnanime, pour inviter l'intendant à quitter les lieux. Cette nuit sera peut-être notre dernière nuit de paix, je vous invite à en profiter autant que ce peuple insouciant que j'ai vu dans les rues, sur mon chemin. Demain, sans doute, les préparatifs commenceront ; notre ville sera assiégée, nous rationnerons les vivres et l'eau, la faim tenaillera nos entrailles. Nous perdrons sans doute, ou nous mourrons de soif, mais il n'y a rien à faire.

— Le roi... le roi... tenta l'intendant, d'une voix hésitante.

— Je vais le voir à l'instant, conclut Adad en passant devant lui.

— Le roi souhaite que la ville... que nos portes restent ouvertes...

— Vous vous méprenez, dit le commandant en serrant les dents. Hors de ma vue ! »

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