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38. Le plus grand des lâches


Le visage soucieux de l'officier vampire apparut sur l'écran de la passerelle. Alors que l'Armada se trouvait encore à deux semaines de navigation de Rems, les vaisseaux se dépeuplaient, les équipages passant la majeure partie de leur temps à dormir afin d'économiser le dioxygène. Hormis Ek'tan, la salle de commande de l'Indra ne comportait plus que trois officiers à temps plein. Ils n'avaient rien à faire ; la trajectoire était déjà arrêtée, calculée à partir des informations fournies par Mjöllnir, qui avait éclairé leur chemin.

« Nous venons de recevoir une communication de Mjöllnir. Le vaisseau a atteint Stella Rems et a réussi à entrer en contact avec l'Entente de Rems. Des vaisseaux de secours ont quitté l'orbite il y a quelques heures. »

Le vampire se mit à toussoter. Cette nouvelle était peut-être plus cruelle encore que s'ils avaient été abandonnés dans l'espace. Car les vaisseaux remsiens en chemin n'arriveraient jamais à temps.

« Il est temps de faire des choix » dit l'officier.

Il était plus pâle que d'ordinaire. Les vaisseaux ne pouvaient déjà plus renouveler leur air, et le taux de dioxygène avait baissé de vingt à dix-huit pour cent. Ce ne serait pas une asphyxie brutale, mais une descente progressive, qui les endormirait avant de les abattre en silence, comme une ombre venue moissonner leurs âmes dans leurs rêves.

« Je vous interdis de tuer certains d'entre vous pour survivre.

— Oh, j'ai bien compris. De toute façon, ceux qui auraient pu le faire craignaient d'être jugés dès leur arrivée sur Rems, et personne n'a pu prendre cette décision. Non, je veux parler de placer votre équipage en sommeil profond.

— Nous avons déjà endormi une dizaine de soldats qui présentaient des symptômes de stress aigus. Mais notre infirmerie est au maximum de sa capacité.

— Sanglez-les dans leurs cabines avec une sonde d'hydratation. Il suffit qu'un seul gardien passe les voir, vérifie qu'ils respirent encore. Il suffit d'un seul gardien de phare pour chaque vaisseau fantôme. »

Ek'tan plissa des yeux pour mieux voir ; le fond de l'image était flou.

« Dites-moi, officier, êtes-vous seul ?

— Je suis seul, confirma le vampire. Moi et le pilote de l'Interface Mentale sommes les deux derniers êtres éveillés à bord de ce vaisseau.

— Vous avez un grand courage.

— Peut-être. Ou alors, je suis le plus grand des lâches. »

Ek'tan soupira. Depuis quelques temps, une chape de plomb pesait sur leurs épaules ; à chaque inspiration, elle sentait vaciller les dernières étincelles de vie de l'Indra.

« Parler nous coûte de l'air, déclara le vampire d'un ton abrupt. Ceci sera mon dernier message.

— Une dernière chose, intervint Ek'tan alors qu'il s'apprêtait à couper l'image et le son. Vous qui êtes le gardien de leur sommeil, durant ces jours de solitude, ne faiblissez pas. La tentation sera forte d'en assassiner quelques-uns dans leurs songes, de décider qui doit vivre et qui doit mourir. Or ce n'est pas votre rôle. Ce n'est pas le mien.

— Vous doutez de ma résolution ?

— Non, bien au contraire. J'imagine à peine la dureté de votre combat contre les monstres de la solitude, ceux qui encerclent déjà votre vaisseau. S'il vous prend de douter, rappelez-moi. Je resterai éveillée, moi aussi. Je pense même que je ne quitterai pas cette salle.

— Entendu » dit le vampire avant de couper l'écran.

Un bruit de pas l'avertit que quelqu'un venait la quérir ; cette salle était devenue son domaine exclusif, son repaire ou son ermitage.

« Ah, monsieur Garrison.

— Nous allons prendre un repas, amirale. Voulez-vous vous joindre à nous ? »

Elle remarqua le sachet de thé suspendu à son cou, mais il ne lui appartenait pas d'y réagir. L'amirale salua les pilotes et lui emboîta le pas.

« Avez-vous reçu d'autres nouvelles de la Terre ? »

Elle parlait à voix basse, manière futile d'économiser l'air. Les couloirs de l'Indra semblaient peuplés de conspirateurs, ou peut-être déjà de fantômes.

« D'après le directeur Denrey, depuis que le projet Rhadamanthe a été adopté par le Conseil de Sécurité, il est bloqué pour des raisons politiques. La Chine souhaitait participer au budget à hauteur de trente pour cent, mais les États-Unis ont refusé, car ils craignent qu'elle en profite pour acquérir des technologies spatiales, qui lui profiteraient au long terme.

— La division entre les mondes, nota l'amirale.

— Et à l'intérieur des mondes. »

Ils croisèrent deux visages mutiques. Rien ne permettait de lutter contre ces airs lugubres, comme si le vide de l'espace avait entièrement dévoré leurs cœurs. Ils avaient lutté, mais ils se savaient perdus, et malgré la promesse de Rems, rien ne pouvait plus briser leur solitude.

« L'amirale Flaminia a approuvé le plan de bataille de Fréya, ajouta Ek'tan, incidemment, comme une remarque sur la pluie et le beau temps, car elle pressentait que cela ne les concernait déjà plus. L'Armada se réunira autour de Sol Perago et y affrontera Hélios.

— Pensez-vous qu'ils pourront réussir ?

— Je l'espère. »

Garrison se tut. Les membres de cette flotte estropiée connaissaient la juste valeur de l'espoir.

Ils entrèrent dans le réfectoire déjà clairsemé. La luminosité à bord de l'Indra avait été réduite en une nuit perpétuelle, car l'équipage dormait la plupart du temps, comme une régression à l'âge de la petite enfance. Tous les somnifères de l'infirmerie avaient été distribués, mais on les gardait précieusement pour s'assurer un sommeil sans rêve dans les derniers jours, lorsque la concentration en dioxygène tomberait en-dessous de dix, puis de cinq pour cent.

À la table des officiers, le Grand Ivan et le docteur Jin avaient offert les places vides à de simples soldats, avec qui ils échangeaient des banalités. Ivan parlait de sa planète natale ; le docteur Jin racontait la Terre comme s'il y avait passé ses dernières vacances. Il fut le premier à saluer Ek'tan et Garrison à leur arrivée ; puis il constata ce qu'il devait constater. Gonflant la poitrine comme s'il s'apprêtait à exploser, au risque de gaspiller un peu plus d'air, Jin tira la langue, saisit un couteau de cuisine en plastique et le jeta à terre. Ensuite, il ôta sa veste, la jeta derrière lui, fit rouler ses épaules en arrière. La transformation du paisible scientifique en gorille était l'un des événements les plus surprenants auxquels assista Garrison sur l'Indra, en dehors, bien sûr, de tout ce qui concernait Adrian von Zögarn. Il y répondit sans doute de la meilleure manière, en restant campé devant lui, mains sur les hanches, tel Gavroche sur la barricade.

« Qu'on l'amène ! » lança alors le docteur Jin, d'une voix qui se voulait effrayante.

Un soldat se précipita hors du réfectoire. Durant plusieurs minutes, Jin et Garrison se toisèrent sans frémir. Le public attendait bien sagement. Quand l'ingénieure-major Sahir arriva, elle parut désemparée.

« Il accepte ! hurla Jin avec colère et douleur, comme si on lui arrachait le cœur.

— Calmez-vous, docteur, murmura l'amirale Ek'tan avec un sourire de connivence.

— Me calmer ? C'est impensable ! Nous ne pouvons pas accepter cet homme parmi nous. Regardez-le ! Il ne vaut rien. Il n'a que la peau sur les os, son tronc est celui d'un roseau, ses bras sont des clous. »

Il se tourna vers le public éclairci, appelant à son soutien.

« Voyez ! Si un tel homme rejoint notre grande famille, que deviendra-t-elle ? Que deviendrons-nous ? Je vous le demande !

— Les grandes familles évoluent, cala Ek'tan entre ses deux phrases.

— C'est pourquoi je le défie ! Je vous promets de m'asseoir sur son gros ventre de... euh... de drom, en moins de temps qu'il n'en faut pour... au harpon qui traverse le poisson-lune !

— Laisse-le au moins parler » dit Ek'tan.

Garrison sentit qu'on attendait quelque chose de lui, une sentence ou une formule pour clore la scène de l'esclandre. Pour ridicule qu'il fût, ce théâtre social avait peut-être le mérite de leur faire oublier leur situation précaire.

« Je n'ai rien à dire, mais ne vous trompez pas. Je ne parviens même pas à me sentir insulté. Je suis consterné. »

Ivan eut un hochement de tête approbatif ; Jin surjoua l'apoplexie, et tout ce beau monde fut poussé en direction d'une des salles d'entraînement.

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