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18. Le choix est indéniable


Sur Rems, on dit qu'il n'y a pas de bon mariage sans bon défi, voire même, qu'un mariage sans bon défi ne réussit jamais. J'aurais adoré être celui qui défie. Je suis sûr que j'avais toutes les qualités requises pour ce rôle. Ce mélange de charisme et de moustache que l'on pourrait nommer le « charimoustache ».

Adrian von Zögarn, Histoire de mes voyages


« J'ai besoin que quelqu'un m'explique » dit l'ambassadeur, triste comme un enfant à qui ses meilleurs amis auraient joué un mauvais tour.

L'amirale Ek'tan, sembla-t-il, le prit en pitié. Elle tendit le bras et désigna tour à tour les cheveux de Sahir et le couteau de Jin.

« Ça, c'est une demande en mariage. Ça, c'est un défi. »

Il s'apprêta à poser une question, mais elle l'arrêta d'un geste de la main.

« On ne discute pas de cela en public. Jin viendra vous voir. Il vous racontera tout. Gardez les cheveux, à moins que cela ne vous intéresse vraiment pas. »

Elle se leva de table, ce que ses troupes interprétèrent comme un signal ; en un instant, la pièce se vida. Les deux commis qui d'ordinaire procédaient au rangement partirent faire un tour, le laissant seul avec son choix. Avec un geste délicat, Garrison referma sa main sur les cheveux et les mit dans une poche de sa veste.

Il ne revit pas l'ingénieure-major de la journée ; ce qui dans un monde clos comme l'Indra, signifiait qu'elle l'évitait à dessein. Garrison avait les nerfs à fleur de peau, lui qui incarnait jusqu'à présent la maîtrise de soi, au point d'avoir donné naissance au mythe du « flegme terrien ». Après deux heures passées à plancher sur la stratégie de l'Armada, Ek'tan lui donna brutalement congé. Vous devez être fatigué, déclara-t-elle d'un ton impératif, prenez du repos.

Le diplomate à tout faire traîna des pieds jusqu'à sa cabine personnelle. C'était un espace de quelques mètres cube de volume, comportant un lit à sangles modulable, qui se repliait contre le mur pour changer sa chambre en bureau. Deux interrupteurs à levier permettaient de faire varier la luminance, la couleur et la saturation des murs. Ils se réglaient par défaut en fonction de l'heure du vaisseau. Quand Garrison s'assit sur son lit, il fit face à un défilement de franges rouges et orangées, de plus en plus sombres. Ce coucher de soleil artificiel ne l'apaisa pas et il agita nerveusement son crayon en cherchant les termes de son prochain rapport.

« Monsieur Garrison ? Je peux rentrer ? »

Jin n'attendit pas sa réponse. Il jeta un regard derrière lui, tel l'assassin qui craint d'être aperçu, referma la porte et en verrouilla la serrure manuelle. Il avait à peine assez d'espace pour tenir debout, et sans demander la permission, le docteur s'assit à côté de Garrison.

« Vous devez avoir quelques questions.

— Qu'est-ce que je suis censé faire de ses cheveux ?

— Hum, je vais y venir, mais il faut d'abord que je vous explique ce qu'est un mariage. Voyez-vous, lorsque deux personnes...

— Je sais, merci.

— Oh, vous vous mariez aussi sur Terre ? Tant mieux, ce sera beaucoup plus simple. Donc, le mariage, ce n'est pas tout à fait la même chose sur l'archipel austral, l'archipel boréal, ou sur les terres noires. Par exemple, sur l'archipel austral, on a plutôt tendance à faire une cérémonie et à boire une liqueur de foie de serpent. Ça vous dissuade de vous remarier. Sur l'archipel boréal, je crois que c'est plutôt une sorte de déclaration de couple, sans formalité. Aucun papier à signer. Ça peut durer un an ou toute la vie, selon les gens... »

Il desserra le col de sa veste, attrapa une petite corde de chanvre, presque invisible sur la peau de son cou, dont elle avait la même couleur. Un sachet de tissu y était accroché.

« C'est mon deuxième mariage, expliqua-t-il. Ça se passe plutôt bien. Et vous, chez vous, ça se passe comment ?

— Là n'est pas la question, s'énerva Garrison, qui ne tenait pas à ce que Jin le questionne encore des heures sur les us et coutumes « terriens ».

— Je vous sens un peu à cran, constata le docteur. C'est le stress. Vous n'êtes pas habitué.

— J'ai fait cinq postes différents en ambassade et à l'ONU. Puis j'ai traversé comme vous la bataille de Stella Realis. Je sais ce qu'est le stress.

— Oui, mais personne ne vous a encore demandé en mariage. »

Le terrien sentit le sang lui monter au visage. Il se sentait comme pris au piège, or il était quelqu'un de prévoyant et d'analytique, et rien ne pouvait plus l'incommoder qu'un imprévu capable de chambouler tous ses plans. Certes, il aurait pu envoyer paître sa soupirante d'un revers de la main. Mais cette possibilité ne lui avait même pas traversé l'esprit. Il ne se voyait refuser qu'avec grand sérieux, prétextant une raison d'État, une nécessité impérieuse de ne pas confondre la vie privée et le travail, un ordre du Bureau Transnational de Sécurité...

« Voici ce qui s'est passé tout à l'heure, reprit Jin. Elle vous a fait une proposition. C'est un moment très important. Vous avez très bien réagi.

— Je n'ai rien fait du tout.

— Oui, c'est normal. Il ne faut rien faire. Ensuite, si vous acceptez, vous gardez la mèche de cheveux et vous faites comme moi, vous la portez autour du cou. Vous la mettez en évidence, par-dessus l'uniforme. Si vous refusez, vous ne faites rien. J'ai un oncle qui a attendu dix ans avant d'accepter. Entre-temps, l'homme de sa vie avait changé d'île et s'était marié ailleurs. Donc n'oubliez pas : ne pas trop attendre.

— De toute manière, nous serons peut-être tous morts d'asphyxie dans trente jours.

— C'est vrai. Je n'y avais pas pensé. »

Garrison, lui, y avait pensé ! Car comme il l'avait remarqué dès ses premières semaines sur l'Indra, l'incertitude permanente rend la société volatile. Puisque demain est un jour incertain, le vrai risque n'existe pas, on ne s'engage toujours qu'à moitié.

« Mais reprenons, dit Jin, incapable de se départir d'un ton de professeur, tel le commentaire d'un reportage sur les dinosaures diffusé à vingt-trois heures sur une chaîne de la télévision numérique. Aucune île sur Rems n'est totalement isolée. On a toujours des contacts avec ses voisins, entre deux tempêtes, et en particulier, il s'en trouve toujours qui se marient entre deux tribus. Et c'est primordial ! Sinon, on aurait perdu toute notre diversité génétique en dix mille ans. Or, dans l'histoire, quand ce genre d'événement arrivait, il y avait toujours quelqu'un pour protester, pour dire que cet étranger, peut-être que c'est un clou rouillé, qu'il faut d'abord donner un bon coup de marteau pour tester sa solidité.

— Je n'aime pas du tout votre métaphore.

— Sur l'Indra, nous formons une petite tribu. Sans vouloir vous offenser, vous êtes un étranger à la tribu. Il faut donc qu'on vous teste. Quelqu'un s'est désigné, moi-même donc, pour faire ce test. Donc si vous acceptez la demande de l'ingénieure-major, nous devrons nous retrouver pour un combat public. »

Garrison croisa les bras. Il se voulait inflexible, mais ses pensées bataillaient autour d'une évidence : l'incertitude de l'avenir avait tout rendu caduque, à la fois la demande et sa réponse. Ils seraient tous les deux comme des acheteurs compulsifs se jetant sur les démarques parce qu'ils craignent de les voir disparaître. Ils se mentaient peut-être, et n'avaient aucun moyen de distinguer le mensonge de la vérité.

« Je ne sais pas me battre, déclara-t-il.

— Oh, ce n'est pas un problème. Je vous apprendrai quelques coups classiques. Vous voyez, monsieur Garrison, cela fait longtemps que le défi est en toc. Tout le monde le sait, c'est la tradition. Il faut juste qu'on puisse dire de nous : ils se sont bien battus ; qu'on puisse dire de vous : il l'a bien mérité, qu'on dise de moi : il a bien défendu notre honneur. Le défi permet à tout le monde de trouver son compte. C'est une formalité à valeur psychologique. D'ailleurs, en tant qu'antagoniste, j'ai un autre rôle : vous aider à vous intégrer dans la tribu. Je vous parraine, en quelque sorte.

— Si j'accepte.

— Si vous acceptez. Ah, je me rappelle, il fallait aussi que je vous explique comment on fait des bébés. Ou comment on n'en fait pas. Je vous rappelle qu'on n'a pas le droit de faire des enfants sur l'Indra, pour des raisons de logistique et de sécurité. Donc c'est assez simple. Imaginez qu'une femme et un homme, qui s'aiment très fort...

— Je me demande quelle est votre vision exacte de la Terre, docteur Jin. Quelquefois, j'aimerais entrer dans votre esprit pour voir ce que vous avez concocté.

— Vous êtes presque sept milliards, se défendit le docteur. Il n'y a pas besoin d'être allé à l'université pour en déduire que certains d'entre vous ont manqué de mesure, dans, hum, certains domaines.

— On nous a dit « croissez et multipliez-vous ».

— Je ne sais pas qui vous a dit ça, mais il ne s'attendait certainement pas à ce que ça fonctionne aussi bien. »

Estimant que la discussion avait atteint son but, Jin bondit comme Cendrillon aux premiers coups de minuit. Il franchit la porte à reculons, le visage toujours penché vers Garrison, il prêt à dispenser la litanie des conseils périmés dont les grands-oncles éloignés abreuvent toujours leurs petits-neveux « en âge ».

« Surtout, gardez la mèche, et réfléchissez bien. Vous avez le choix.

— En êtes-vous sûr ?

— Euh, je crois, oui. »

Mais Jin était un homme trop terre-à-terre pour saisir la nature des questions qui enferraient l'ambassadeur terrien.

« Est-ce que je peux lui parler ?

— Sahir ? Bien sûr. Nous pouvons organiser un rendez-vous. Il faut que je sois là, c'est obligatoire. Mais je ne dirai rien et je n'écouterai rien non plus. »

Nous n'aurons peut-être rien à dire, songea Garrison. Voilà un événement d'une clarté inhabituelle. Tout se réduit à un choix. Toutes les raisons de ce choix seront peut-être faussées, mais le choix est indéniable.

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