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Introduction


« Même sans espoir, la lutte est encore un espoir »

Romain Roland


– 10 décembre 2199

On nous a interdit d'écrire. Tout doucement. Nous n'étions même pas nés. Aucune loi, aucun décret, n'est venu troubler la torpeur du citoyen nouveau. Il était trop tard. L'arbre qui cachait la forêt était déjà mort. On raconte que lorsqu'il fut abattu et que les moteurs se turent, plus aucun cri ne retentit. La forêt se tenait toujours là. Elle était seulement, morte. Morte aussi s'était faite l'imprimerie. Silencieuse, demeurait la futaie depuis ce jour. Elle aurait reverdi, elle serait revenue à la vie. Et pourtant ce n'est plus qu'un simulacre. Jamais elle ne saurait plus être ce qu'elle fut. Aujourd'hui, seuls les fous et les évadés l'empruntent encore. Quant aux citoyens respectables, ils ne quittent plus la cité.

Il reste bien des livres pour nous, enfants du XXIIe siècle, ils sont scellés sous le cercueil de verre des musées. Parfois, l'on vend aux enchères, quelque vieil ouvrage, au titre parcheminé. Il échoit alors à quelque grande fortune. Le prix du papier a tellement flambé, il faut le dire, que seule une minorité de collectionneurs avertis s'arrachent encore les derniers stocks. Qui d'autres en voudrait ? La technologie a depuis longtemps fait ses preuves. Nombreuses sont les personnes à louer sa facilité d'utilisation et sa fiabilité en toute circonstance. Elle est partout où nous l'attendons et d'une proximité sans failles avec ses citoyens. Pourtant, le nuage, notre cher réseau mondial, est loin d'être d'une sûreté hors pair pour tous ceux qui auraient la critique facile ou le verbe un peu trop acéré envers notre modèle de société. Les sanctions sont lourdes et les chances d'y échapper minces pour les contrevenants. Les autorités maintiennent le nuage sous bonne garde, de peur qu'un orage imprévu ne les inonde et ne les trempe. La fange urbaine n'est-elle pas la plus grande peur qu'un haut dignitaire puisse ressentir ? Alors nous avons pris la plume, nous avons jeté l'encre sur ces pages blanches d'antiquaire. Nous avons repris le passé pour écrire l'avenir. Le nôtre, celui que nous voudrions connaître un jour.

Je suis Magdeleine. Je fais partie des meilleurs éléments de notre société, à ce qu'il paraît. J'ai su devenir une personne de confiance, défendre les valeurs que l'on nous avait transmises ; du moins je le pensais. Pourtant, ce n'est plus que jeux d'apparences et de faux semblants à mes yeux. Longtemps, j'ai été fidèle au régime. Fidèle au pouvoir en place. Hélas, depuis la mort de mon mari, je ne suis plus la même. Alors que toute mon enfance fut dévouée aux enseignements du régime, le désespoir et le dépit me l'ont fait oublier. J'ai finalement tourné le dos à sa politique. Il m'en a coûté cher. J'ai vraiment voulu croire au bien-fondé de notre société. Mais la prise n'était plus assez affermie et elle a cédé sous le poids des maux. J'ai chuté, je suis tombée. Je suis devenue opposante. Et presque malgré moi, j'ai attrapé ce stylo Soyuz, une ancienne relique familiale datant de la guerre des blocs du XXe siècle. Je l'ai caressé et je l'ai abreuvé. Il a commencé à s'activer et à danser sur le vieil ouvrage, laissant dans son sillage, une trace noire sur les pages moisies. C'était l'une de ces babioles chères et inutiles qui agrémentent un riche salon, car il faut de l'apparat. Quelle a été sa fonction et comment termina-t-il en notre possession ? Autant de questions auxquelles je ne répondrais pas. Car j'ai ouvert le livre. Je l'ai profané et je me suis damnée. J'ai ancré mes paroles indicibles et il n'y a ni retour en arrière ni pardon au bout du chemin.

Mon statut est ainsi double, je demeure à la fois complice du régime et traîtresse aux yeux de notre société. Mais comme la plupart de mes consœurs de fortune, c'est le sort qui en a décidé ainsi. Il suffit parfois de peu pour passer de l'autre côté. Déjà cinq ans que j'ai rejoint l'Atelier, une organisation rebelle exclusivement féminine visant à promouvoir le bonheur des citoyens. Bien sûr, notre existence est sur la sellette, nous risquons à tout instant l'arrestation. Le régime ne permet pas les rassemblements de protestataires. Jusqu'à maintenant, la discrétion de nos interventions et leur pacifisme nous ont garanti une certaine clémence. Nous ne représentions sans doute pas une menace assez sérieuse pour que le régime daigne s'en occuper. Ce qui pourrait bien être notre chance. Cela ne durera pas. D'autant plus que la période de non-violence semble bel et bien derrière nous. La colère gronde déjà dans les bas-fonds. Les tensions et les frustrations minent la haute sphère. Il suffira d'une étincelle et je sais où la trouver. Ce journal accompagnera notre combat. Gardé par chacune d'entre nous, à l'abri du regard profane, il sera notre témoignage et notre héritage.

Nous prendrons les armes, s'il le faut. Les belles histoires que l'on nous chuchote et que l'on nous murmure le soir pour nous endormir ont toute une fin. Vous, mes complices, vous savez comme moi que le destin chatoyant que l'on vous promet n'est plus que chimère. Nous sommes arrivées bien trop tard. Mes fidèles, je ne vous prédis aucune gloire sur votre passage. Votre avenir sera plus incertain que jamais. Mais vous aurez la conviction d'agir pour une juste cause, avec l'espoir de connaître un jour un régime nouveau. Chaque entrée de ce journal de bord sera un instantané de nos batailles et de nos souffrances. Vous y verrez nos victoires, nos joies, nos peurs comme nos pleurs, les stigmates du temps et du sang de nos consœurs.

Lecteur, âme égarée et esseulée, puisses-tu guider nos pas.

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