Au final, on était entrés dans une routine. Chaque matin, avec Sam. Le reste du temps, comme avant avec mes amies. Et cela m'allait. J'aimais les routines. C'est ce que j'avais toujours vécu. Mais après ces quelques jours de folie et de nouveauté, tout me semblait fade. Cela dura un moment.

Melody rompit avec Hugo. Comme prévu, il n'avait été qu'une couverture, et je supposais donc que la belle blonde n'alla pas pleurer toute les larmes de son corps chez son amie la barmaid. La barmaid... j'avais presque fini par l'oublier, et cela me réjouissais, car elle m'avait inspiré un certain inconfort en dehors de l'admiration que j'avais eu pour elle. Puis, un soir de fin octobre, je retombai sur les vêtements qu'elle m'avait prêtée. Il allait falloir que je les lui rende... et en même temps, ils m'allaient bien, et elle avait aussi gardé les miens. N'étais ce pas un échange?Mmm... pas convaincue. Cela m'avait également rappelé ma discussion avec Jenn, où j'avais pensé à lui avouer la vérité... au point où j'en étais, je pouvais bien faire cela.

J'organisais donc un aprem chez moi entre copines, rien que nous deux, pour le week end suivant. Ma mere etait souvent absente le week end de toute façon, ce qui nous laissait l'appartement pour nous seules. Le jour J arriva, et après une courte discussion, je décidais d'en venir directement aux faits. J'avais peur. Mais en même temps, j'avais confiance en elle.

-Jenn... voilà je dois t'avouer un truc. C'est pas super facile à dire.

-Si c'est pour me dire que t'as un crush sur moi, c'est mort jte préviens.

-Non, rhaaa tagueule. J'aime les femmes voilà! Je suis lesbienne.

-Ouais. Et?

Je me figeais.

-Et... et quoi? Bah je suis lesbienne c'est tout!

-Ah mais c'était un secret?

Nouvel abasourdissement.

-Vu que... je l'avais jamais dit... euh... oui c'était secret.

Un coup de stress m'envahit.

-Tu veux dire que...

-Non, tout le monde est PAS au courant. Me coupa-t-elle. C'est juste que ça saute aux yeux pour moi.

-Ah. Oui. Ton foutu gaydar. J'avais finis par croire qu'il fonctionnait pas sur moi.

-Raté.

Je ris, un peu fébrile, alors que la tension s'évacuait.

-Mais t'as vraiment pas de crush sur moi du coup? Enchaina-t-elle.

Et je ris de plus belle, et elle aussi. C'était rare de la voir rire, surtout ces derniers temps. Je crois que l'automne lui rappelle beaucoup de souvenirs, bons ou mauvais, je ne saurais pas dire, mais elle est souvent très pensive et renfermée à cette période de l'année - encore plus que d'habitude, quoi. Je continuais en lui expliquant ce qu'il s'était passé ce fameux soir au bar Nirvana, et qui m'avait amenée à accepter de sortir avec Sam.

-Bon, résumons ma poulette.

-Ma "poulette"??? Demandais-je, incrédule.

Même Jenn semblait interdite.

-Ouais je sais pas ce qu'il m'a prit. Bref, en clair, Melody, c'est mort, jpense pas qu'elle soit lesbienne et même si elle l'était, disons qu'elle a un passé qui fait qu'elle l'assumera jamais, même moins que toi. Puis elle t'as deja donné une forme de réponse.

-Une belle baffe dans ma gueule.

-Voilà. Ensuite, Sam. Bon, libre à toi de continuer d'attendre qu'il tente un truc, mais à mon avis soit il faut que tu prenne les devants, soit faut laisser tomber. Si t'aime les meufs t'as aucun besoin de te forcer à tenter de changer ça. Et JE SAIS que tu as des choses qui t'empêchent d'assumer ton homosexualité, mais ya bien un jour où il faudra les combattre. T'auras beau te convaincre que t'es hétéro, tu seras juste en train de faire semblant. Faire semblant de vivre, c'est pas vivre.

Ces mots résonnèrent assez fort avec ceux de la barmaid.

-C'est de toi, cette citation? Demandais-je innocemment.

Elle se figea quelques instants, puis dis simplement.

-C'est une amie qui m'en a parlée.

-Une amie? Oooh tu veux dire extérieure au lycée? Du foyer?

Jenn me regarda et tenta de se retenir de rire, mais échoua. Elle éclata d'un grand rire sonore, qui redoubla en voyant mon incompréhension.

-Qu'est ce qu'il y a de drôle au juste? Demandais-je, un peu vexée.

-Rien rien c'est juste que... imaginer cette amie au milieu de nonnes... oooh c'était beaucoup trop drôle.

-T'imaginer TOI au milieu de nonne est déja un sacré tableau! Fis-je remarquer. Tu me la présenteras, cette fameuse amie?

Jenn hésita.

-Je... sais pas trop. Elle est très spéciale. Presque pas humaine, quoi.

-Ouuuh ça me donne encore plus envie de la connaître.

Mais Jenn n'avait vraiment pas l'air de rigoler. Bon, elle avait rarement l'air de rigoler, mais cette fois là encore moins. Et elle reprit son compte rendu.

-Melody, mort. Sam, mal parti. Qui reste-t-il?

-Hein?

-Notre fameuse barmaid.

-Hein? Elle? Tu déconne! Jamais je sortirais avec... ça! Et puis elle est plus âgée que moi, je suis pas majeure.

-Meuf, tais toi ou je te tais. Comme te me l'as décrite j'ai limite vu que t'étais déjà en train de mouiller. Et c'est pas l'âge qui y change quoi que ce soit. Si ça se trouve elle est du même type que Ange, mais pour les meufs.

-Mais qu'est ce que tu raconte??

-J'ai un bon pressentiment à son sujet, et mon gaydar se trompe rarement. Elle s'est quand même quasiment foutue à poil devant toi et t'as filé des vêtements alors que vous vous connaissiez pas.

-Et?

-Vieille méthode. Tu prête un truc, et c'est la certitude de se revoir, de préférence autour d'un verre, pour se le rendre. Si c'est pas toi qui y va, c'est elle qui viendra!

-Ça me semble vachement tordu comme truc.

-La drague est tordue. Vas pas chercher plus loin. Allez lève toi.

-Hein? Mais... ON Y VA MAINTENANT?

-Evidemment grognasse. Allez bouge ton gros boule. Rhaa toi au moins t'en as un.

Je jetais un rapide coup d'oeil aux jolies fesses de Jenn. Petites, mais bien fermes. J'avais dit que Jenn était parfaite? Si on pouvait donner un seul défaut à son physique, c'était qu'elle n'avait pas beaucoup de formes. Elle était assez plate, avait des hanches assez droites, et un fessier pas trop rebondi.

-Arrête de mater mon cul et dépeche toi; tu sais où c'est, on y va maintenant pendant que c'est encore l'aprem. Si on y va en soirée, elle sera partie au bar, probablement.

Et c'est ainsi que je fus entrainée par mon amie vers cette femme que je craignais tant de revoir.