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Addison Carter

- Addison ? répéta machinalement Mathys le regard au loin.

Néanmoins, ses mâchoires étaient crispées. Il baissa la tête et Nina put observer l'expression de ses yeux : de la gêne. Elle en était quasi certaine. Il la connaissait !

- Oui, Addison, chuchota de nouveau la jeune file un sourire aux lèvres.

- Hum... oui, je crois... c'est une fille de classe K non ?

Classe K..., dix-sept ans, calcula Nina.

- Je ne sais pas, si je te demande. Tu la reconnaitrais ?

- Oui pourquoi ? répondit prudemment Mathys, à présent méfiant, qu'est-ce que tu lui veux ?

O.K., sujet sensible.

- Longue histoire... je t'expliquerais. Tu voudras bien me la présenter ?

- Je suppose que je ne peux refuser, sa classe est juste en face aux intercours..., marmotta le jeune homme.

Jubilante, Nina sourit intérieurement et se concentra sur le cours ennuyeux. Plus rien ne la fit dévier de son objectif. Y avait-il un quelconque lien entre Addie et Mathys ? Sûrement, pour qu'il ait eu l'air aussi gêné...

La cloche sonna. Nina n'avait jamais été aussi heureuse de l'entendre. Elle prit Mathys par le bras et fonça hors de la salle devant les regards étonnés de Kate et ceux, noirs d'amertume, de Shirley. Le duo se retrouva en premier dehors. Nina se posta devant la salle de la classe K. Mathys semblait nerveux, il resta derrière elle à l'écart.

Enfin, les élèves de dix-sept ans sortirent en discutant bruyamment, tandis que Nina, aux aguets, les analysaient.

- Là ! s'exclama Mathys. La fille, là-bas.

Il pointa le doigt vers la droite. Il désignait une fille blonde, au visage fin et aux yeux verts émeraude étincelants. Elle souriait, dévoilant ses dents blanches. Elle portait un piercing à la narine droite.

- C'est elle, Addison ? s'étonna Nina.

- Hum, répondit Mathys.

Son regard s'était durci, comme pour se protéger. Sans le questionner d'avantage, Nina marcha d'un pas assuré en direction de la jolie rebelle blonde, s'attirant les regards et chuchotements sur son passage. Enfin, Addison la remarqua et fronça les sourcils. Nina ouvrit la bouche pour se présenter, mais la jeune fille la devança :

- Nina ?

Bouche bée, celle-ci hocha de la tête. Les amies d'Addison s'échangèrent des regards étonnés.

Comment a-t-elle pu me reconnaître ? Nous étions dans le noir...

- Je... oui. Addison ?

- Addie, corrigea de nouveau la rebelle avec un grand sourire. Qu'est-ce que je peux pour toi ?

Grand silence. Nina se rendit compte que toutes les filles de première la fixaient étrangement, comme si elles cherchaient à l'évaluer. Les yeux maquillés à la perfection d'un trait fin d'eye-liner d'Addie lui firent perdre ses quelques moyens. Perplexe, Nina secoua la tête et répondit :

- Oh, euh... rien. Tout va bien, assura-t-elle avec un sourire qui sonnait faux. Je voulais juste...

Imperceptiblement, Addie hocha de la tête comme pour l'enjoindre à ne pas révéler qu'elle l'avait surprise la nuit dans les couloirs. Etonnée, Nina termina sa phrase de plus en plus décontenancée : pourquoi la jeune fille ne voulait-elle pas que ça se sache ? Chasal n'était pas dans les parages, et cette « fête », elle était censée l'avoir faite avec ses amies... rien à cacher, donc.

- Euh...

- Un conseil pour ton DM de maths ? proposa justement Addie en roulant de gros yeux exaspérés derrière le dos de ses amies.

- Exactement ! c'est ça. J'ai un problème avec l'exercice deux...

La sonnerie les interrompit de nouveau. Nina poussa un soupir intérieur et quitta le groupe qui se remit à pépier dès qu'elle eut rejoint Mathys. Il était dos à elle et fixait Mme Chiron qui agitait les bras pour leur faire signe de rentrer. Il ne la regarda même pas alors qu'ils rentraient en classe, comme ailleurs. Une fois assise et la classe bourdonnant en fond sonore, elle lui donna un coup de coude dans l'épaule. Sortant de sa torpeur méditative, Mathys darda sur elle un regard inexpressif.

- Hum ? demanda-t-il la voix encore au loin.

Décidément, cette expression est un tic chez lui !

- Comment tu connais Addie ?

- Mêle-toi de tes affaires, O.K. ? répliqua sèchement Mathys.

Soufflée, Nina le regarda plonger la tête vers son cahier sans broncher. Elle fixa son regard sur la jupe tailleur de sa professeure, des questions tourbillonnantes dans la tête : qu'est-ce qu'avais cette Addison de si spécial ?

A l'heure du déjeuner, Nina rejoignit Kate devant le réfectoire. Elles firent la queue en silence, puis se servirent leurs repas respectifs et s'installèrent à la dernière table de deux disponible. Nina commença à tremper distraitement sa fourchette dans sa purée de couleur verdâtre.

- Alors ? c'était comment ? demanda avidement Kate sans la quitter des yeux derrière ses lunettes rouges.

- C'était comment quoi ? répéta Nina sans comprendre.

- Avec Mathys ! je veux dire, vous venez de rompre, alors être côte à côte tous les jours en cours, ça ne va pas être simple...

- Oh ! – la jeune fille se creusa la tête, toute entière à cette nouvelle question – je t'ai dit qu'on a rompu à l'amiable. Donc pas de problèmes.

- Ce n'était même pas tendu ?

- Si, forcément, un petit peu...

Surtout après la pause, songea amèrement Nina.

- Tu connais une certaine Addison ? demanda-t-elle mine de rien en touillant une nouvelle fois son mélange purée-épinards avec une affreuse sensation de déjà vu.

- Addison... LA, Addison ? s'étonna Kate.

- Euh... oui, celle qui est en première, répliqua-t-elle.

- Ben évidemment, tout le monde au Manoir la connaît ! enfin, sauf les nouveaux, ajouta la jeune fille avec un sourire contrit, elle en fait voir de toutes les couleurs aux profs. Elle a même déjà caché des souris dans le bureau de Chasal ! elle est super populaire pour ça, mais vraiment bizarre. En fait, elle me fait froid dans le dos. Elle invente de ces blagues tordues... enfin, tu en entendras parler bien assez tôt elle ne reste jamais plus d'un mois sans faire une farce. Elle a une certaine logique dans ses dates.

Ce qui confirmait l'alibi de la jeune fille : apparemment, c'était bien son style d'aller chaparder des sandwichs à la cafétéria en pleine nuit juste devant le nez des surveillants. Nina hocha la tête et regarda l'heure sur la vieille horloge murale.

- Une heure cinq, soupira-t-elle, qu'est-ce qu'on a après ?

- Il me semble qu'on prend à quatorze heures avec histoire. Ça nous laisse largement le temps d'aller se promener dans le parc avant...

- Par ce temps ? demanda Nina en désignant les montagnes qui disparaissaient derrière les pluies diluviennes et les nuages bas.

- Hum, c'est vrai...

Elles terminèrent leur repas en bavardant gaiement, mais le cœur de Nina restait toute entière à cette Addie. Il fallait qu'elle en parle avec Ian, il pourrait peut-être lui apprendre des choses à défaut du concerné...

La cloche sonna. Il était déjà et demi, la plupart des cours reprenaient. Les derniers élèves quittèrent le self d'un même mouvement empressé, mélange d'enfants et d'adolescents. Quel étrange endroit... mais bizarrement, Nina se sentait beaucoup plus à sa place que dans son internat chic de Boston. Elle avait l'impression d'être enfin confrontée à la réalité des choses.

Kate et elle suivirent le mouvement et retournèrent chercher leurs sacs. Nina aperçut soudain une toison blonde aux yeux turquoise en tain de faire la cour à une élève de la classe J. Ian souriait devant son groupe de ferventes admiratrices, discutant de tout et de rien. Dès qu'il l'aperçut, il leva le bras dans sa direction et tout sourire lui fit signe d'approcher. Nina, le rouge aux joues, laissa Kate un instant seule dans le couloir.

- J'arrive, dit-elle entre ses dents.

Elle s'approcha du groupe de jeunes filles qui la dévisagèrent d'un coup d'œil peu amène. Ian ne la quittait pas du regard.

- Tu voulais me parler ? demanda-t-elle au cœur de la foule féminine qui minaudait.

- Oui. En tête à tête, ajouta-t-il de sa voix grave et la plus sexy.

Comme une volée de moineaux, les secondes se dispersèrent aux alentours. Nina et Ian se mirent à marcher tranquillement jusqu'à se trouver un coin tranquille. Nina fixait ses chaussures mais Ian la dévorait du regard. Elle remarqua la veine de sa tempe qui battait doucement. Il était tendu.

- Alors ? demanda Nina en lui envoyant un coup d'œil qu'elle espérait froid.

- Alors quoi ? répéta nonchalamment Ian.

Il sourit et se pencha jusqu'à s'appuyer contre la porte de service vers laquelle ils étaient. Il n'y avait pas beaucoup d'élèves dans le couloir, Nina se sentait mal à l'aise de s'afficher ainsi avec le beau jeune homme. Il était terriblement mignon dans son uniforme du Manoir, son sac blanc clouté juché sur son épaule droite.

- Tu voulais me dire quoi ?

- Rien. Juste avoir le fabuleux plaisir de ta compagnie, railla le jeune homme.

Exaspérée, Nina leva les yeux au ciel, la moue aux bords des lèvres. Quel insupportable celui-là ! Toujours à tourner autour du pot... elle tourna les talons et commença à s'éloigner en lançant :

- Bon, ben dans ce cas...

Aussitôt une main ferme agrippa son bras et serra si fort que Nina se retourna et foudroya du regard Ian, qui la fixait d'un regard glacé. Le temps sembla s'arrêter et Ian suspendit son geste, avant de lui relâcher doucement le poignet sans mot dire, comme s'il avait peur qu'elle s'enfuie en courant. Il l'observa un instant puis déclara :

- En fait... je voulais te remercier pour hier. Je ne sais pas ce que je serais devenu sans toi et Mathys.

Nina en resta sans voix. Elle se contenta de le dévisager : ses pommettes hautes, parfaitement ciselées, son teint aussi blanc que la neige faisant ressortir ses lèvres roses, l'intensité de son regard turquoise, ses lèvres pleines, ses lèvres... à se damner. C'était la première fois qu'elle parvenait à entrevoir quelque chose qui ressemblait à de l'humanité à la fois dans son regard et dans ses mots. Il paraissait sincère, et attendre une réponse. Les mâchoires serrées, il patienta calmement.

Dis quelque chose !, se sermonna Nina sans pouvoir détourner les yeux, comme hypnotisée.

- Je... de rien. Ce... c'était naturel, parvint-elle à articuler difficilement.

C'était comme si sa bouche s'était mutée en fiches de carton pâte. Un mélange difficile à avaler, comme une pièce de viande trop cuite. Puis le visage d'Addie s'imposa brutalement dans son esprit, comme par magie et Nina reprit le fil de ses pensées. Elle cessa d'être sentimentale et interrompit cet instant de magie :

- Tu me dois une faveur, alors, déclara-t-elle sur un ton taquin.

- Une faveur ? tu me demandes une faveur à moi, le dieu du Manoir ? Loup-garou averti ? susurra Ian et chuchotant ces derniers mots.

- Possible, répliqua Nina.

Ian se redressa, semblant se prendre au jeu. Leur échange émotif était clos, passait maintenant l'heure des aveux.

- Alors voilà, dit la jeune fille avec un aplomb dont elle ne se serait pas crue capable, il faut que je te pose une question. A propos d'une fille.

- Vas-y, la pressa Ian, un sourire terriblement... carnivore scotché sur ses lèvres parfaites.

- Tu connais une certaine Addison ? en première. J'aimerais savoir quel est le problème avec elle et Mathys.

Visiblement surpris par cette question incongrue, Ian leva les sourcils et se permit un petit rire désinvolte qui agaça fortement Nina.

- Je ne vois pas ce qu'il y a de si drôle, ajouta-t-elle, vexée.

- Eh ! Ne fais pas la tête ! s'amusa Ian. C'est qu'avec Addie, c'est une longue histoire. Ils ont été deux ans ensembles pus du jour au lendemain, elle l'a plaqué. Sans explications. Et le pauvre, il ne s'en est pas remis...

- C'est sûr que toi tu ne connais pas ça, grinça Nina en repensant à Gavin sans savoir pourquoi. Ouah, je ne le vois pas du tout avec une fille aussi...

- Téméraire ? Rebelle ? ça a toujours été un grand mystère cette relation.

Au fut et à mesure qu'ils parlaient, Ian semblait se dérider petit à petit. Nina s'en auto-félicita mentalement. Il n'était pas si terrifiant que ça, après tout. Enfin, quand il ne la draguait pas, ne faisait pas de terribles crises, ne se faisait pas à moitié dévorer par un loup-mordu...

- Je vois. Elle a quand même un côté bizarre cette fille.

- Pas étonnant, dit Ian sans réfléchir.

- Pourquoi ? s'exclama Nina.

Ian se mordit la lèvre et détourna le regard. Sans réfléchir, Nina lui prit la manche et le secoua doucement :

- Ecoute, j'aimerais savoir..., supplia-t-elle.

- Tu as vu ses yeux ? répliqua Ian.

- Euh... oui ? ils sont verts, non ?

- Verts comment ?

Nina fronça les sourcils.

- C'est quoi cet interrogatoire ?

- Quelle couleur ? insista Ian.

- Verts émeraude... ?

- Exactement ! s'exclama Ian avec un sourire. Et les miens ?

Nina obtempéra et plongea son regard dans les yeux turquoise profond de son interlocuteur. Cette couleur la fascinait littéralement. Elle resta un instant sans voix, le temps de se reprendre.

- Bleus, dit-elle.

- Turquoise, s'offusqua Ian. Ceux de Mathys ?

- Je..., s'énerva Nina.

Mathys et Ian... et Addie. Bon sang, comment j'ai fait pour ne pas me rendre compte avant ?

Nina leva les yeux, bouche bée, le cerveau tournant comme au ralenti. Ian étira encore un peu son sourire de canaille qui la faisait fondre et hocha la tête.

- C'est une louve..., balbutia Nina, ébahie.

Quelle idiote, songea-t-elle, en colère contre elle-même. Maths lui avait bien expliqué que tous les élèves de ce Manoir étaient déjà des loups-garous métamorphosés, ou des loups ignorant encore leur véritable nature profonde.
Y compris elle, ce qui ne s'expliquait pas, puisqu'a priori, aucun de ses parents ne possédait d'origines magiques.

Y compris Ai, Chloé, et toutes les autres ames innocentes. Le sang de Nina se figea dans ses veines, imaginant la lueur carnassière qu'elle pourrait lire dans leurs yeux le jour où elles se transformeraient pour la première fois.

Nina se promit de se renseigner sur ce processus.

Ian l'interrompit d'un froncement de sourcils en observant sa montre :

- Il est quatorze heures. On ferait mieux d'y aller avant de se faire incendier par Coleman.

Nina approuva.

Ils arrivèrent devant la porte du couloir des cours essoufflés – enfin Nina, parce qu'Ian l'attendait déjà appuyé contre le panneau de bois, un sourire éclairant son beau visage. Tout le monde était déjà en cours, et ils étaient deux à attendre sur le pas de la porte. Le couloir était étrangement vide, sans les chuchotis empressés des élèves. Nina frissonna – et pas que de froid –, et fit un signe de tête au loup-garou. Il attendit qu'elle l'ait rejointe, le sac sur l'épaule, les joues rouges. Il ne fit aucun commentaire mais dans ses yeux brillaient tout l'amusement du monde. De plus en plus rose, Nina frappa trois coups à la porte et attendit le traditionnel : « Entreeeez ! ».

Ian poussa le battant et ils se retrouvèrent tous les deux debout, dans l'embrasement, le regard des autres élèves de la classe J rivés sur eux. Subitement écarlate, Nina se concentra sur Mr Coleman qui les regardait, les sourcils aussi rejoints que s'ils ne formaient qu'un. Nina surprit le regard pétillant de Kate et celui, noir de rage, de Shirley. Elle se fixa sur ses chaussures et laissa Ian régler les détails techniques de leur retard avec le prof.

- Allez vous asseoir, soupira Coleman en appuyant ses deux mains sur la table. Vous resterez cinq minutes à la fin du cours.

Nina s'empressa de rejoindre sa chaise froide aux côté de Mathys – son superbe regard ambré masqué par ses cheveux parfaitement lissés.

- Elle en a déjà un, il lui en fallait un deuxième, grinça méchamment la diva des secondes quand Nina passa à sa hauteur.

Son groupe d'admiratrices explosa d'un rire mesquin et Nina baissa encore plus la tête dans ses cahiers. Mathys lui adressa un coup d'œil visiblement peiné. Nina ne pensait plus du tout à Addie ni à ses histoires, elle resta focalisée sur les cheveux bouclés de Shirley. Celle-ci tourna la tête, croisa son regard, et eut un sourire de façade, un sourire moqueur. Nina rétorqua par un regard noir.

Coleman réussit à la captiver pendant une heure et demie, puis le cours de français sonna. Les élèves sortirent un instant de la salle pour prendre l'air le temps que Mme Bakshi. La jeune indienne arriva et leur fit signe de rentrer de nouveau. Nina resta légèrement en arrière avec Kate, marmottant :

- Je ne sais pas pour qui elle se prend celle-là...

- T'inquiète pas pour elle, Shirley est une vraie plaie. Elle est juste jalouse, la rassura amicalement son amie.

Elles se séparèrent pour rejoindre leurs pièces respectives. La professeure, habillée d'une tenue traditionnelle, chaussa ses lunettes à monture noire et dévisagea les élèves tour à tour :

- Bien ! aujourd'hui, nous allons commencer l'étude des poèmes d'auteurs. Prenez-une nouvelle page et inscrivez : séquence 2, les poèmes d'amour.

Nina se figea. Son cœur s'accéléra brutalement en pensant à la personne qui était à ses côtés. Visiblement, Mathys aussi, car il se trémoussa discrètement sur sa chaise avant d'inscrire le titre en haut de sa feuille à carreaux. Nina observa son écriture ronde et sinueuse, qui formait les o bien ronds et qui liait les lettres entre elles.

Le bruit des stylos envahit la salle.

La professeurs brisa les pensées de la jeune file en l'observant derrière ses verres grossissants et posa une question :

- Quelqu'un peut-il me citer un poème d'amour ?

Nina se sentit rougir. Quelques mains se levèrent, d'abord timidement puis plus assurément. Sans surprise, Kate agitait le bras avec ferveur.

- Melle Parret ? questionna Mme Bakshi.

- Mon rêve familier, de Paul Verlaine.

- Bien ! quelqu'un d'autre... ?

Ce fut une voix grave qui répondit. Nina mit quelques instants à comprendre d'où elle venait.

- A une passante. Baudelaire.

- Bravo Mathys ! le félicita la prof.

Nina lui jeta un coup d'œil discret en coin, interloqué. Il n'était pas vraiment du style à être fan de poésie... si ? Mais lui ne la remarqua même pas, plongé dans ses pensées.

- Bon, je vais maintenant vous dire lequel j'ai choisi pour que nous l'étudiions. Le vainqueur est... Baudelaire !

Aucune réaction de la part de Mathys. Le regard fixe, il ne semblait même plus présent. Pourtant, quand la Bakshi demanda un volontaire pour la lecture, il leva spontanément la main. De plus en plus intriguée, comme le reste de la classe – dont Ian... - il se mit à réciter d'une voix à la fois grave et passionnée :

- La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair... puis la nuit! – Fugitive beauté

Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité?

Ailleurs, bien loin d'ici! Trop tard! Jamais peut-être!
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais!

Un grand silence emplit la pièce, assourdissant. Après cette lecture profonde, personne n'osait bouger ni même commenter. La plupart des filles présentes observaient Mathys, des étoiles dans les yeux, mais il ne semblait même pas le remarquer. Les yeux baissés sur son livre de Français, il resta muet. Nina, subjuguée, se surprit à se noyer dans la profondeur de son regard ambré. Un froid soleil.

- Merci beaucoup pour cette interprétation, Mr Jonhson.

Enfin, la rumeur s'éleva du cœur féminin.

- Qui peut me dire ce que veulent dire ces vers ?

Aucune main ne se leva. Une voix grave, profonde et légèrement tendue répondit à la place de la classe :

- C'est Baudelaire qui parle d'une femme qu'il a rencontré, qu'il a aimé dès le premier regard mais qui n'a d'yeux ni pour lui ni pour personne. Elle a emporté son cœur avec elle en partant.

- Merci Ian, dit Bakshi avec un air de plus en plus surpris.

De plus en plus étrange. Quand Nina tourna la tête, elle l'aperçut qui la fixait. Elle rougit et baissa la tête, mais trop tard : le temps d'un battement de cil, et son cœur s'emballait.

Une sensation de chaleur, de plénitude, remonta dans son ventre et lui enserra le cœur. Quand elle releva le regard, Bakshi était déjà passée à la mesure des vers – des alexandrins formant un sonnet. Elle inscrivit les mots clés du tableau et tenta de se reconnecter jusqu'à la sonnerie. Ce qu'elle réussit – difficilement – à faire.

- DRIIIIIING !

Le raclement des chaises contre le sol envahirent la petite salle de classe au tableau blanchi. Enfin, la fin des cours. Nina se dépêcha pour atteindre la porte et y retrouva Kate, qui lui jeta un coup d'œil en biais. Voyant qu'elle ne disait rien, elles remontèrent toutes les deux machinalement dans leurs chambres en silence. Une fois la porte refermée, Nina se coucha sur son lit, les yeux fixés au plafond. Kate s'assit à ses côtés, toujours sans bruit.

- C'était cool, ce cours de français, dit Kate avec un petit sourire.

- Quoi ?

- Arrête ! s'exclama Kate en roulant des yeux.

Nina se redressa et s'adossa le dos au mur, en tailleur. Elle jeta à son amie un coup d'œil interrogatif, la bouche à semi-ouverte. Kate l'imita et lui donna un coup de coude complice.

- Arrêter quoi ? demanda de nouveau Nina avec son expression pertinemment choisie, le Je-Ne-Comprends-Pas.

- T'as pas remarqué ? c'était pour toi, que Mathys à choisi ce poème !

- Hein ? non, tu te fais des idées, soupira Nina.

C'était impossible que Mathys ait des sentiments pour elle, étant donné que contrairement à ce que tout le monde croyait – la nouvelle avait presque fait le tour du Manoir... - , ils n'avaient JAMAIS étés ensembles. Donc, impossible.

 - Tu rigoles ? Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair... puis la nuit! – Fugitive beauté, cita Kate avec un sourire malicieux, les yeux pétillants.

- C'était le thème imposé : les poèmes d'amour, rappela Nina. Et j'ai les yeux bruns, pas « livides ».

- Tu le fais exprès ou quoi ? il n'allait pas changer le poème...

Kate paraissait exaspérée. Elle se releva et se dirigea vers son sac rose qui l'attendait posé sur son petit bureau. Elle en sortit son agenda et le feuilleta en fronçant les sourcils, à grands renforts de soupirs.

- Vivement que les vacances arrivent, soupira Kate.

- Pourquoi ça ?

- Tu as vu ça ? s'écria la jeune fille en lui collant la page du jour sous le nez. Regarde la tonne de devoirs qu'on a !

Nina observa la page blanche couverte de gribouillis, de ratures et de flèches colorées. Il y avait un contrôle d'histoire pour le lendemain, une rédaction interminable sur trois poèmes de la page 299 du livre de français, deux exercices de maths et un devoir de physique-chimie à préparer.

- Je n'ai rien fait..., s'horrifia Nina en détaillant le tout.

S'était la première fois qu'elle avait autant de devoirs à faire. Kate sauta à bas du lit et fila chercher une pochette et une trousse.

- Qu'est-ce que tu fais ? demanda Nina.

- Ben... je vais à la bibliothèque ! tu sais, ici, à part internet, c'est la seule ressource qu'on ait alors...

- Je vois..., marmonna Nina, j'arrive.

Elle jeta son sac sur son épaule et rejoignit son amie sur le pas de la porte. Elle se laissa guider par la jeune fille qui connaissait les lieux comme sa poche.

Elle montèrent un étage, comme pour aller jusqu'au grenier à la salle informatique, mais au dernier moment, prirent un embranchement vers la droite jusqu'à se retrouver dans un cul-de-sac, juste devant deux lourds battants de bois. Kate les poussa avec assurance.

Juste derrière d'étalait de grandes tables en bois bruns, surmontées de vieilles lampes à huiles. Ça sentait fort le cirage et la poussière. Derrière les étudiants appliqués, se dressaient d'immenses rangées de livres colorés, neufs ou anciens. Quelques vieux portoirs apparaissaient derrière le coin « café, thé, eau ». Impressionnée par l'atmosphère studieuse, ancienne, par les élèves sérieux qui lisaient et travaillaient derrière leurs lunettes, Nina poussa un petit sifflement étouffé et suivit Kate qui s'installa à une table où se trouvaient déjà trois filles. Une rousse constellée de taches de rousseurs, et deux brunes. La première brune aux cheveux lisses et aux lunettes carrées du même style que Nina leva la tête de ses notes, le front plissé par sa concentration extrême, puis sourit en reconnaissant la jeune fille aux frisotis blonds.

- Salut, Kate ! chuchota-t-elle.

- Salut June !

La rousse et la brune asiatiques levèrent elles aussi la tête.

- Kate ! s'exclama la rouquine.

Elles se tournèrent ensuite vers Nina, le regard interrogateur. Mal à l'aise, Nina regarda Kate s'asseoir et déballer ses affaires sur la table.

- Voici Nina, dit-elle enfin en désignant la jeune fille. Et voici June – la brune aux cheveux lisses -, Ai – l'asiatique – et Chloé.

Nina fronça les sourcils en dévisageant la rousse, involontairement méfiante. Rien que ce prénom allait-il toute se vie lui faire penser à cette jolie peste de Boston ? Mais la jolie rousse lui sourit de toutes ses dents et l'invita à s'asseoir. Reconnaissante, Nina obtempéra.

- Chloé est française, lui apprit June avec un sourire, elle aussi.

- Ah ? s'étonna poliment Nina.

- Oui. Et Ai, d'origine chinoise. Mais je pense que tu avais deviné, sourit encore June.

Nina laissa échapper un petit rire heureux : elle sentait que tout allait bien se passer. Elle sortit son agenda, grimaça devant les lignes noires et décida de commencer par le devoir de français.

Elle ouvrit son livre de français page 299. S'y trouvaient trois poèmes – français -, illustrés par des images aux tons pastel. Elle fronça les sourcils, et commença à lire avec attention, faisant abstraction des bruits qui l'entouraient. Autour d'elle, June révisait l'histoire pour le lendemain – elle était elle aussi en classe J... Comment Nina avait-elle pu ne pas la remarquer ? – et Ai et Chloé s'échangeaient des réponses sur le devoir maison de mathématiques avec des clins d'œil complices. Elles étaient dans la même classe qu' Addie, en première. C'était étrange, au Manoir, les classes de quasiment même niveau se mélangeaient. A Boston, chacun restait dans son coin, dans sa « catégorie ». Elle regarda Kate fermer les yeux très forts en récitant un extrait de son cours de physique pour le lendemain.

Désireuse d'obtenir une bonne note, Nina lut et relut le premier poème d'amour.

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Hello hello !

Est-ce que cette seconde partie vous a plu ? Si oui, n'hésitez pas à voter et laisser un commentaire !

est-ce que vous pensez que Mathys a réellement choisi ce poême pour Nina ? Ou pour quelqu'un d'autre ?

Et que pensez-vous de June, Chloé et Ai ? Sont-elles dignes de confiance ?

J'adore connaître vos hypothèses ;)

Vous en saurez plus demain ! (oui le chapitre huit est long...) gros bisous !

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