Chapitre 26 ➳ L'arbre sacré
Je retourne au campement, désormais silencieux, traînant ma proie derrière moi. Le jeune cerf que j'ai tué ne m'avais pas repérée, je l'avais tué aisément.
Je le dépose contre un arbre et me dirige vers Mystic, allongé quelques mètres plus loin, auprès du feu. Il dort paisiblement et je me demande alors où est Cora.
Je m'arrête soudain, répétant la fourrure noire de la louve, allongée contre un arbre, loin du campement. Et blotti contre elle se tient Jojen, endormi. Je souris face à ce spectacle. C'est bien la première fois que ma louve supporte quelqu'un d'autre que moi ! Qui plus est, quelqu'un qu'elle ne connaît pas depuis longtemps...
Je reprends ma route jusqu'à Mystic et m'allonge contre lui, sa douce fourrure me caressant le visage et me réchauffant. Là, je me sens en sécurité, comme si rien ne pouvait m'atteindre.
Et je ferme les yeux, sombrant dans le sommeil. Enfin du moins, c'est ce que je pensais. Avant qu'il ne revienne hanter mes rêves, comme il l'avait déjà fait tant de fois...
Je rouvre les yeux, découvrant un tout autre décor, bien différent de celui que je viens de quitter. Cet endroit est beaucoup plus sinistre et me donne la chair de poule...
Même les arbres semblent menaçants, leurs ombres s'étirant au sol et leurs branches semblant se tendre vers moi tandis qu'une faible lumière les éclaire.
Je tourne sur moi-même, cherchant à deviner où je me trouve et pourquoi. Je siffle doucement et étrangement, mon sifflement retentit plusieurs fois dans cette forêt étouffante tellement les arbres sont proches et menaçants.
Je fronce les sourcils. Comment cela est-il possible dans une forêt ? Même si elle est grande, cela ne peut expliquer le fait qu'un écho retentisse, comme si j'étais dans une grotte.
Le vent se lève soudain, faisant voler les branches des arbres, les entraînant dans une danse endiablée. Il fait voler mes cheveux, me cachant la vue. Étrangement, je ne parviens pas à me dégager, ils reviennent se plaquer devant mes yeux.
Je lâche un grognement de frustration et finalement, parvient à les placer en arrière. C'est alors que je remarque que des murmures indistincts se font entendre tout autour de moi. Que veulent-ils ? D'où viennent-ils ?
Je tends l'oreille, m'approchant du tronc des grands arbres qui me dominent de toute leur hauteur, comme si les murmures provenaient de cette partie de la forêt.
J'ai beau tendre l'oreille et coller mon visage contre les troncs, les murmures ne me paraissent pas plus distincts. Je me crispe, faisant grincer ma mâchoire et fermant les poings, laissant mes ongles s'enfoncer dans ma peau.
Dans un élan de rage, je tire dans un caillou et m'assois à même le sol, au centre de la forêt. À me regarder comme ça, on pourrait croire que je boude telle une enfant mécontente car elle n'aurait pas réussi à acquérir ce qu'elle désirait. Mais en fait, j'étais perdue dans mes pensées.
En sentant le rêve venir, j'avais eu l'impression d'y être entrée en même temps que Jojen. Pourtant, il n'était nulle part, et j'avais beau fouiller la forêt du regard, regardant même aux racines des grands chênes où une simple souris pourrait s'y glisser et non un humain, je ne le voyais nulle part. C'était comme s'il était présent sans vraiment l'être, et c'était une sensation très étrange.
Résignée, j'abandonnais. Cela ne me ressemblait pas du tout, mais souvent, Jojen se montrait quand je m'y attendais le moins. Alors je baissais la tête, vaincue, et soupirais.
Alors que j'allais me relever, constatant que rien ne se passait, une vive lumière m'éblouit et je dû porter mes mains en visière devant mes yeux, habitués à l'obscurité de la forêt dans laquelle j'étais jusqu'alors plongée.
Lorsque je les rouvre, je reste bouche-bée. Un immense arbre se tient majestueusement devant moi. Je crois que c'est le plus beau que je n'ai jamais vu... Ses bras droites précédent des feuilles rouges comme le feu et son tronc semble être le double de celui du plus gros chêne que l'on puisse trouver.
Mais ce qui m'intrigue le plus, c'est l'aspect sacré qui se dégage de cet arbre dont je ne connais pas le nom. Il respire la vie et s'il était humain, je l'aurais comparé à un vieil homme sage et plein de savoir dont le visage resplendirait néanmoins de jeunesse.
Je me lève et m'avance lentement jusqu'à lui, comme poussée par une force, gardant mon regard rivé sur lui. Arrivée à ses pieds, je suis intimidée, me sentant minuscule et insignifiante.
Puis, comme contrôlée, je pose ma main sur son tronc incroyablement lisse. Les branches s'agitent alors, et il me semble que cet arbre veut me parler.
- C'est le cas Luna. Tu as juste à te concentrer et croire en lui.
Je me retourne brusquement, coupant le contact avec l'arbre. Jojen se tient derrière moi, me souriant. Quant à moi, je suis gênée, me souvenant de notre altercation de tout à l'heure.
Il s'avance et en quelques pas, se retrouve à côté de moi, admirant à son tour l'arbre qui nous surplombe de toute sa hauteur. Il semble mieux le connaître que moi, comme s'il était déjà venu ici.
- Que signifie cet arbre ? je lui demande doucement.
- C'est grâce à lui que tu es ce que tu es.
Je soupire, agacée. Mais encore ? Ne peut-il pas être un peu plus explicite ? Car sa phrase m'a complètement perdue... J'étais déjà enveloppée d'une sorte de brume que l'on trouve lorsque l'on voyage en met et que ça se gate, mais là, l'opacité de cette brume a atteint son apogée.
J'ouvrais la bouche pour lui demander de quoi il parlait vraiment lorsqu'un croassement retentit, me faisant retenir mon souffle et regarder en l'air. Elle était là. La corneille à trois yeux. Celui qui hante mes rêves depuis si longtemps et m'indique des choses incompréhensibles pour moi. Celle qui a prévu des choses incroyables pour moi.
- Une grande destinée t'attend Luna. Et c'est ce que cet arbre et la corneille veulent te dire.
- Comment le sais-tu ? je lui demande, sceptique.
- Écoute, dit-il en replaçant ma main sur le tronc de l'arbre, laissant une décharge électrique parcourir ma main à l'endroit où la sienne est posée. Tu n'entends pas ? Le bruissement de ses feuilles, les vibrations de son tronc... Il communique avec toi. Il t'a choisie.
Il avait raison. Je sentais l'âme de cet arbre m'envelopper toute entière, se mêlant à mon esprit, cherchant à me faire passer un message, aussi subtil soit-il.
Et, après de longs instants de concentration qui me parurent des heures, j'arrivais enfin à déchiffrer le code, jusque là écrit en égyptien à mes yeux. Il était clair et me fit écarquiller les yeux de surprise et me reculer. Surtout lorsque deux yeux, un nez et une bouche apparurent sur le tronc, me fixant avec bienveillance.
- Tu es Luna Muponesi Bumhi. Et tu es celle qui sauvera le Nord.
Et, alors que j'étais plongée dans la plus totale incrédulité, l'envers du décor bascula, me ramenant peu à peu à la réalité.
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