Chapitre 20
- Quand faut y aller, faut y aller, marmonna Ye Ji en passant pour la dernière fois la porte de la maison de ses parents. Elle serrait les lanières de son sac, comme une écolière stressée de son première jour d'école. Elle était la dernière à sortir, et le petit groupe avait comprit qu'ils devaient lui laisser quelques instants avant de quitter ce dernier refuge.
D'après leurs calculs, la distance pour aller de Daegu jusqu'à Daejeon, l'endroit où les parents de Ye Ji et Da Reum étaient censés être, était de 150 kilomètres. Dans l'idéal, ils auraient trouvé une voiture ou deux, et le petit groupe aurait roulé tranquillement. Mais dans l'idéal, les routes n'étaient pas bouchées par des voitures abandonnées ou envahies par la verdure, les animaux géants et mutants ne les attaqueraient pas, et chacun d'eux seraient en pleine forme. Le trio avait alors établi un plan précaire : marcher jusqu'aux abords de la ville, et ensuite trouver un véhicule capable de parcourir une longue distance rapidement.
- Bon, c'est parti mon kiki, fit DaeHyun en souriant. Da Reum lui lança un regard en coin, comme si son ami était un aliéné.
Jackson tenait la main de Kameko, et derrière eux, Ji Eun marchait en observant les alentours. Comme le blond gardait un oeil sur la petite, elle se devait de surveiller pour deux. Ye Ji fermait la marche, les yeux fixant le vide. Elle n'avait que très peu dormi. Les deux garçons s'étaient installés sur le canapé, sur son ordre, et elle avait dormi, assise sur une chaise. Son cou et son dos étaient raides, et même sans se voir dans un miroir, elle savait que des marques sombres cernaient ses yeux noirs. Le peu d'heure que ses cauchemars incessants avaient interrompu ne lui avait pas permi de se reposer suffisamment. Mais elle ferait avec. Après une vingtaine de minutes de marche, Kameko se mit à parler.
- Oni-san, j'ai envie de faire pipi, dit la petite fille en tirant sur la main du chinois. Le garçon, légèrement gêné, lui sourit, et hela ses compagnons. Il les prévient donc des mots de la petite, et Ji Eun se porta volontaire pour accompagner la fillette.
Le petit groupe s'arrêta alors quelques minutes, profitant de ce court arrêt pour s'étirer la colonne vertébrale ou les bras. Ji Eun disparut derrière la porte de l'une des nombreuses habitations qui bordaient la rue, suivie de Kameko. DaeHyun en profita pour refaire le lacet de sa chaussure, tandis que Ye Ji resserrait bien la lanière du cuir qui entourait sa cuisse. Dans le sac rempli d'armes, elle avait trouvé un couteau cranté, comme les couteaux de militaires que l'on voyait dans les films.
Le soleil éclairait le ciel depuis à peine une heure, mais ils sentaient déjà la chaleur étouffante envahir les rues. JunMyeon attrapa la gourde qu'il avait rempli d'eau et bu deux gorgées, histoire de se rafraichir. Le sniper qu'il avait choisit était attaché dans son dos, et pesait sur ses épaules. Mais sentir ce poids le rassurait. Il jeta un coup d'œil à MinSeok, qui lui, semblait chercher quelque chose du regard. Pendant ce temps, Jackson s'était assis contre un muret, et avait fermé les yeux. Cette pause avait le mérite de lui laisser du temps pour réfléchir à tout ce qu'il s'était passé. Il y a deux semaines, Ji Eun et lui avaient atterrit à Séoul, accompagné de son entraineur et manager. Ils y avaient passé quelques jours, l'un de combat du tournoi se déroulant dans la capitale. Ils en avaient profité pour aller voir les parents de Ji Eun. Puis ils avaient directement été à Busan, pendant une durée de deux jours, seuls. Ils auraient du retrouver le manager à Daegu après ça. Mais malheureusement, cela ne s'était pas passé comme ça.
- Ca va Jackson ? demanda soudainement Ye Ji en se baissant devant lui, une main posée sur son genou.
- Hein ? Ah oui, pourquoi ?
- Tu pleures, fit-elle en lui tendant un morceau de tissu.
Le blond s'en empara d'un geste brusque avant de marmonner un bref remerciement, et il essuya les larmes qui s'étaient échappées de ses yeux contre son gré. Ye Ji lui sourit doucement.
- Je suppose qu'on passe tous un moment difficile, murmura la jeune femme en se levant. Elle tourna la tête pour regarder les autres garçons. Elle haussa les épaules et tendit sa main vers le chinois, qui l'attrapa. Elle le remit debout, et tapota son épaule. Si tu veux parler, fais moi signe.
Le chinois devait sûrement se demander pourquoi elle lui disait de partager ses souffrances avec elle, alors qu'elle-même avait déjà de quoi faire. Ye Ji se disait simplement qu'entendre autre chose que ses propres pensées lui ferait sûrement oublié, même un court moment, et lui ferait du bien.
Kameko reboutonna son pantalon tant bien que mal. Elle n'avait pas l'habitude de le faire. Sa maman, qui avait prit soin d'elle comme d'une poupée depuis toujours, ne l'avait pas laissé souvent s'habiller seule. Elle entendait la fille qui l'avait accompagné tapait son pied contre le sol, et cela lui rappelait lorsque son papa était impatient, et qu'il faisait la même chose avant de partir quelque part. Elle se dépêcha donc de revenir vers Ji Eun, et lui sourit.
Ji Eun lui sourit en retour, et elle entraina la petite fille dehors. Kameko ferma les yeux quelques instants, le soleil l'éblouissait. Et c'est à ce moment qu'elle entendit un miaulement. Personne ne sembla l'entendre, tellement il avait été faible. La petite fille pensa alors qu'elle avait rêvé. Mais un autre bruit se fit entendre, et elle tourna la tête. Le son étant plus fort, elle avait réussit à savoir d'où il venait. Elle jeta un regard aux adultes, et personne ne sembla faire attention à elle. Elle en profita pour s'éloigner de quelques mètres, et elle se retrouva à un croisement. Dans le coin, à sa droite, elle vit une forme sombre cachée dans l'obscurité. Kameko recula de quelques pas, et c'est à ce moment là que Jackson vit qu'elle était loin d'eux. Trop loin.
- Kameko ! Qu'est-ce que tu...
Il s'interrompit lorsqu'il vit à son tour la masse noir sortir de sa cachette.
- Oh merde.
Un pelage gris, des yeux jaunes. Il avait l'impression de l'avoir déjà vu auparavant.
Kameko, qui avait reculé, s'arrêta soudainement. Cette bestiole, elle la connaissait. Elle ressemblait au chat qui l'avait accompagné partout depuis quelques jours. A la différence que le chat qui se trouvait en face d'elle avait grandi. Beaucoup trop même, pour que ça soit naturel. Elle devait levé la tête pour le regarder dans les yeux. Ses yeux jaunes, dont la pupille verticale le fixait.
Ye Ji regardait la scène qui se passait devant elle. C'était comme une scène de ralenti dans un film. Kameko tendit sa main vers le chat, comme pour le caresser, et Ye Ji la vit prononcer un mot. "Chat". Et en un court laps de temps, elle comprit. Ce chat, c'était le chat gris qui ne faisait que de les suivre depuis hier. C'était le chat de Kameko. Mais Ye Ji ne comprenait pas. Comment ce chat avait fini comme ça ? Et les créatures qu'ils avaient vu aux cours des derniers jours ? Etaient-elles, elles aussi, de simples animaux qui avaient muté ? Ou évolué ? Et si ce n'était pas le cas, d'où venaient-elles ? Mais Ye Ji ne put se poser plus de question.
Kameko souriait, soulagée. C'état son chat. Elle avait dormi avec lui deux nuits, le gardant dans ses bras, avec sa peluche. Sa chaleur l'avait réconforté. Elle tendit alors la main vers son nez. Ses longues moustaches blanches bougèrent, et elle le vit retroussé son naseau, comme pour renifler son odeur.
Ce n'est que quelques secondes après qu'elle ressentit une douleur intense. Elle ne savait même pas où elle avait mal.
Ye Ji assista alors à un spectacle sans nom. Ses jambes s'étaient paralysées lorsque le chat avait saisi le maigre bras de Kameko entre ses dents pointus. Et comme si cela ne devait pas suffire à faire hurler de douleur ma petite fille, la bête secoua violemment la tête de gauche à droite, comme s'il jouait simplement avec un souris en plastique.
Kameko criait de douleur et Ye Ji se pouvait pas bouger d'un poil. Soudain, le corps de la petite vola contre le mur, sans que le chat n'ait ouvert la gueule. Ji Eun hurla d'horreur, les mains devant son visage. C'était abominable.
Le chat tourna la tête vers eux. MinSeok et JunMyeon avaient les yeux écarquillés, et les lèvres tremblantes. Jackson était tombé à la renverse devant cette boucherie. Le chat tenait dans sa gueule le membre arraché de la petite fille, et du sang encore chaud continuait de s'écouler.
Kameko, affalé contre le mur de pierre, ne bougeait plus. Elle ne sentait plus rien, mais elle entendait encore. Le son du vent qui soufflait dans les branchages, les gouttes de son sang qui s'écrasaient sur l'asphalte, et les sanglots étouffés de Ji Eun et de Daehyun. Même si ses yeux étaient ouverts, tout ce qu'elle apercevait, c'était ce morceau de ciel. Et elle savait que bientôt, et rejoindrait ses parents.
- Papa, Maman, j'arrive, dit-elle dans un dernier soupir.
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