Là-bas
Ayoros ouvrit les yeux. Il était allongé sur le dos, apparemment, mais il faisait si sombre. Ce n'était pas la nuit, c'était comme si l'obscurité avait une consistance. Il se redressa et appela ses amis, seulement personne ne lui répondit. Il aperçut une lueur au loin. Il se dirigea vers elle mais quelque chose lui saisit fortement le bras. Il tenta de se dégager.
- Du calme, ce n'est que moi.
Ayoros essaya de discerner un visage mais il aperçut à peine une ombre dans l'obscurité intense. Il connaissait la voix, il en était certain mais pas la tonalité.
- Ne te fie pas à ta vue, Ayoros. Mais plutôt à ce que tu ressens.
L'ombre dirigea la main d'Ayoros. Celui-ci sentit son cœur exploser dans sa poitrine puis, se calmer doucement. Ce parfum, cette présence, il les connaissait.
- Aphrodite ! s'exclama-t-il. Je croyais que tu ne voulais pas venir !
Il ne répondit rien et lentement le visage du chevalier des Poissons se détacha de l'obscurité : c'était bien Aphrodite. Il pouvait le voir clairement maintenant. Mais il ne reconnaissait pas l'expression sur son visage, dans sa voix. Il était en colère et il le faisait bien sentir. Ayoros constata que son ami avait dirigé sa main jusqu'à sa joue. Et elle était si froide.
- Où sont les autres, lui demanda-t-il en retirant sa main de celle d'Aphrodite.
- Shaka est là-bas, répondit froidement le chevalier des Poissons. Les autres, je ne sais pas.
Ayoros regarda la lumière.
- On devait rester discret.
- Va expliquer ça à l'homme le plus proche de dieu, répondit Aphrodite en s'éloignant à l'opposé.
- Mouais, il n'a pas réussi à « la mettre en veilleuse ». Eh, on ne le rejoint pas !
- Tu l'as dit : il faut être discret, lui répondit Aphrodite en tournant à peine la tête vers lui. Ce n'est pas en le rejoignant qu'on le sera.
Ayoros hésita. Il détailla Aphrodite pendant un moment. Quelque chose n'était pas du tout comme d'habitude. Était-ce le fait de se trouver ici ? Était-ce pour cela qu'il était en colère et pourquoi Masque de Mort leur avait-il dit qu'il ne viendrait pas ? Il se décida à le suivre.
- Où est-on ?
- Aucune idée, mais je n'ai pas l'intention de moisir ici.
- Je croyais que tu ne voulais pas venir, lui demanda Ayoros en lui saisissant le bras pour l'obliger à s'arrêter.
Aphrodite se tourna vers lui pour le fixer droit dans les yeux. Il dégagea son bras et reprit son chemin. Ayoros le regarda pendant une ou deux secondes, puis il chercha des yeux la lueur de Shaka. Il se décida à suivre son compagnon d'arme. Il ne voyait rien autour de lui, aucun paysage. Il ne semblait pas y en avoir et pourtant Aphrodite avançait sans hésiter. Ses pas à lui étaient plus hésitant, il craignait de se cogner dans quelque obstacle qu'il ne pouvait pas voir. Aphrodite l'entraîna d'un seul coup dans une autre direction. Ils y retrouvèrent Aldébaran et Shura.
Ils parvenaient difficilement à progresser. Les ombres s'agglutinaient autour de Shaka.
- Masque de Mort t'avait dit de la mettre en veilleuse ! lui rappela Milo d'un ton sec.
- Je suis au minimum, je ne peux pas faire moins.
- Et on n'a pas de pouvoir, en plus.
- T'oublie qu'on y voit rien.
- J'y vois très bien.
Ayor et Milo regardèrent d'un air dégoûté le chevalier de la Vierge. Dohko leur expliqua que Shaka avait accédé à une conscience supérieure, par rapport au commun des mortels.
- Ne soyez pas vexés, les gars, intervint Saga, de faire partie du commun des mortels.
- Bienvenu au club, lui rétorqua Camus d'une voix neutre.
Saga le fusilla du regard.
- Oh « l'éveillé », interpela Milo, si tu nous ouvrais le chemin au milieu de ces ombres.
- Il y a une grande bâtisse par là-bas, une sorte de temple, se contenta de répondre Shaka. Allez-y, je vais attirer les ombres loin de vous.
- N'oublie pas de nous rejoindre, lui dit Camus.
- Ne t'inquiète pas, je vous rejoins.
Shaka s'éloigna de ses amis. L'obscurité se fit peu à peu moins dense.
- Bon, on va par là alors.
Il tenta de distinguer quelque chose, mais tout était sombre. Il essaya de bouger pour soulager la douleur de ses épaules. Il avait les poignets entravés et tout le poids de son corps se faisait douloureusement sentir sur ses épaules. Mais il ne parvenait plus à se tenir debout. Il n'en avait plus force. Il ne comprenait pas pourquoi il ne pouvait pas utiliser ses pouvoirs, ni ce qu'il faisait ici.
« Maudit sois-tu, Rune, c'est de ta faute. »
Il sentit quelque chose le saisir de nouveau par les cheveux et lui relever la tête.
- Tu es têtu, se contenta de dire Mô avant que l'autre ne lui pose la moindre question.
- Toi aussi, bélier. Réponds à ma question et tes souffrances cesseront.
- Ma réponse n'a pas changé. Quand à mes douleurs, pour l'instant, je ne tiens pas à ce qu'elles cessent, elles me rappellent que je suis encore en vie.
- Comme tu voudras, bélier.
Mô tenta de se contracter dans l'attente de ce nouveau coup reçu dans l'abdomen. Mais ses efforts furent vain, il n'avait plus la force d'amortir les coups. Mais où étaient ses pouvoirs ? Comment son geôlier les avait-il neutralisés ?
- Tu sais que même ici, tu peux mourir.
- Je ne suis pas inquiet, tu ne me tueras pas.
- Et pourquoi ça ?
- Tu n'es pas satisfait de ma réponse.
- Insolent !
Mô serra les dents mais le coup attendu ne s'abattit pas. Au contraire, sa tête retomba brusquement, son bourreau avait subitement lâché prise. Il sentit des mains passer sous ses bras pour le soulever.
- Mô, tout va bien ?
- Pourquoi tu lui poses cette question ? Ça ne te paraît pas évident ?
- Oh, c'est bon, Aphrodite, lui répondit Shura. Si t'as un problème, dis-le.
- Pas avec toi, se contenta de répondre sèchement le chevalier des Poissons.
- J'ai fait un horrible cauchemar, répondit Mô à la question d'Ayoros.
- C'est fini, on va te sortir de là. Aldébaran.
- J'ai rêvé que j'avais jeté des enfants dans un lac...
- Ce n'était qu'un mauvais rêve, Mô, lui répondit Ayoros après un court silence. Tu ne peux pas avoir fait ça. Pas toi.
- C'était si réel.
Shura était venu aider Ayoros à soutenir leur ami pendant qu'Aldébaran s'occupait de briser ses chaînes. Les habits déchirés de Mô laissaient apparaître son cou et le haut de ses épaules. Shura fit un inventaire visuel des coups reçus par son ami : il avait le visage en sang, des contusions, des coupures, des écorchures, une cicatrice à l'arrière du cou, et il ne pouvait pas tout voir. Mô était bien amoché et Shura espérait que le coup porté par Aldébaran sur son bourreau l'avait tué du premier coup.
- Je n'ai pas pu utiliser mes pouvoirs.
- On ne peut pas les utiliser ici.
- Où est-on d'ailleurs ? demanda Shura en se tournant vers Aphrodite. Tu sembles plutôt à l'aise ici.
- A l'aise ? répondit celui-ci toujours aussi sèchement. Tu y vas un peu fort sur les mots, Shura. Je dirai plutôt que c'est ma troisième visite et sans vouloir jouer les rabat-joie, il faudrait mieux ne pas traîner ici.
- Aphrodite a raison, continua Aldébaran en se baissant pour prendre Mô dans ses bras.
Ils avançaient toujours dans l'obscurité. Ils se demandaient d'ailleurs s'ils avançaient vraiment. Shaka s'était éloigné d'eux, attirant les ombres avec lui. Il leur avait indiqué un temple mais ils ne voyaient rien.
- Ça va aller ? s'inquiéta Milo en voyant son ami reprendre son souffle.
Camus hocha la tête en silence.
- Tu n'aurais pas dû venir.
- Je vais bien, je t'assure.
- Un problème ? interrogea Dohko.
- Camus a perdu connaissance, un peu avant que l'on vous rejoigne à Jamir. Il m'a fait très peur, j'ai cru qu'il était mort.
- Alors tu aurais mieux fait de rester avec Aphrodite, lui lança Saga d'un ton sec.
- Hors de question que je reste en arrière à cause d'un petit malaise. On doit retrouver Mô et le temple vu par Shaka.
- Il ne peut pas l'avoir rêvé, continua Saga en hochant la tête.
- Oui, mais Shaka a une « autre perception des choses »... commenta Ayor.
- Et Masque de Mort a parlé de « conscience collective »... continua Dohko.
- Ohh, il est hors de question que j'entre dans la conscience de Masque de Mort ! s'insurgea Ayor.
- Je pensais plutôt à celle de Shaka. S'il a vu un temple, c'est qu'il y en a un.
- Un temple plutôt grand.
- Peut-être.
- Avec une grande esplanade.
- Pourquoi pas.
- Et Rune attaché à des poteaux.
Saga se retourna et il regarda dans la direction où était tourné Dohko. Peu à peu, le fameux temple apparut à leurs yeux étonné. Comment avaient-ils pu passer à côté, vu sa taille. Et sur l'esplanade, Rune était effectivement attaché à deux poteaux, il était comme exposé à la vue de tous. Mais de qui ? Il n'y avait que des ombres ici. Ils s'approchèrent pour mieux l'examiner. Il avait été roué de coup mais il était encore en vie même si sa respiration était faible.
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