Chapitre 15
" Nous ne faisons pas de nouvelles rencontres par accident. Elles sont destinées à croiser notre chemin pour une raison", Auteur inconnu
***~
Essoufflée je m'arrête de courir. Après avoir quittée la salle, loin de tout : des filles, du miroir, le mystérieux garçon d'hier, d'Adam, je n'ai fait que courir ici jusqu'à en perdre haleine puis j'ai repris, encore et encore.
Je regarde le ciel translucide le soleil fantôme y baignant, et de l'autre côté du terrain, la forêt qui me nargue.
Je n'arrive toujours pas à croire que je suis ici. Que font mes parents ?, Lys et Effie ? Ont-ils toujours le même temps pourri ? Vont-elles faire cette soirée surprise pour l'anniversaire d'Angela qu'on pensait organiser ? Quel sera leur déguisement cette année pour halloween ? Iront-elles dans le nouveau bistrot dont elles m'avaient parlé ?
Et Jane...
Elle n'était pas mon amie et pourtant... son regard rouge, si effrayant, si dément... lorsque j'y pense maintenant, je n'en ai parlé à personne. Est-ce que j'aurais dû ? Ou le devrais-je ? Le dire à l'un des responsables de cet endroit ? En y réfléchissant bien je n'ai pas vraiment fais grand chose pour m'opposer à ma venue dans ce monde. A part avoir fait la tête, avoir été insolente, je n'ai pas eu d'éléments concrets. J'aurais pu leur parler de Jane, ou encore de la voiture, et pourtant. Rien ...
Comme si une partie de moi avait voulu que je sois là et avait faire taire ma conscience...
****** ~
Lorsque je repasse par la salle commune, cette dernière est vide. Intriguée, je regarde à ma montre l'heure. Un hoquet de surprise m'échappe : il est 19h. Bon sang j'ai couru tout ce temps ? D'un pas rapide, je sors de la gigantesque pièce pour aboutir dans le couloir. Ca fait la deuxième fois que je me retrouve toute seule dans ce couloir en pleine soirée.
Lorsque j'arrive au niveau du miroir mon cœur bat la chamade. La raison veut que je continue mon chemin, et pourtant je reste plantée devant la glace, scrutant mon reflet illuminé par les lampes. La sueur fait énormément coller mon t-shirt à mon buste, et quelques mèches de cheveux, échappées de ma queue de cheval, à mon front.
Ma respiration s'accélère et je regarde rapidement autour de moi, comme si quelque chose allait arriver ou plutôt comme si je m'apprêtais à faire une énorme bêtise et que quelqu'un allait surgir pour me prendre en flagrant délit. Je ferme les yeux et je fais un grand pas en avant. Tout de suite l'atmosphère change. Une odeur de « vieux », s'immisce dans mes narines et j'ouvre les yeux.
Je suis passée de l'autre côté. Hier je n'avais pas rêvé. Je me tourne vers le miroir, le couloir est toujours aussi désert.
Je n'ai rien à faire ici, et pourtant j'y suis bien. C'est si calme, et ça me rappelle mes transes avant que je ne vienne ici. Cette sérénité, je la retrouve dans cet endroit. Je ne me sens plus nerveuse. L'allusion qu'avait faite Adam concernant le grand méchant loup me revient, et j'ai envie de rire.
Ce n'est sûrement pas ici qu'il me trouvera.
Me sentant tout à coup de bonne humeur, je me mets à sillonner les étagères avant de me décider à aller en haut.
Le panoramique du plafond m'impressionne toujours autant. Les tableaux d'hier sont toujours accrochés au mur et cette fois-ci le cadre dans lequel c'était arrêté le jeune homme d'hier est vide. Et à présent que je suis plus lucide, je me demande vraiment comment j'ai pu le confondre à une sculpture.
Je me poste en face du tableau où il y a les quatre jeunes filles. Ce sont les mêmes. Exactement les mêmes que Elona nous a montré ce matin.
Les ancêtres.
- Oh mon dieu, je murmure m'approchant du tableau. La jeune blonde, notre ancêtre.
Vanina.
Elle était si belle. Certes ce matin je l'avais remarqué, mais maintenant que je suis bien plus près, je l'observe. On dirait presque qu'elle est parfaite. Presque oui, car il y quelque chose sur sa main, que je ne discerne pas. Un point noir, un tatouage, une tâche ...
Je ne sais pas. C'est abstrait et ...
- Qu'est ce que tu fais là ? , une voix gronde dans mon dos, me faisant immédiatement sursauter.
Lorsque je me retourne, devant moi se tient le garçon d'hier, celui que j'avais pris pour une statue. Je me sens tout à coup nerveuse.
- Heu, salut...?, dès lors où la phrase sort de ma bouche je le regrette amèrement. Mon orgueil en prend un coup tellement elle sonne stupide ! Le garçon ne réagit pas et me regarde toujours.
- Tu n'a pas le droit d'être là, me répond-il simplement en ignorant ma débilitée. Je ne sais pas quoi dire. Je suis de plus en plus nerveuse.
- Désolée, je bafouille, je ne savais pas.
- Maintenant tu le sais.
Son ton qui est limite hautain me refroidit. Voilà le genre de comportement que je n'apprécie pas vraiment. Un certain aplomb venant de je ne sais où me vient.
- Toi non plus à mon avis, (dis-je et il arbore une expression surprise), la bibliothèque a l'air fermée.
Certes ma répartie n'a rien de cinglante, mais ce n'est que lorsque je la dis que ça me paraît comme une évidence. Lui comme moi n'avons certainement pas le droit d'être ici.
Tout comme Adam tout à l'heure, le garçon arbore alors un sourire en coin et contrairement à leur mentor, des pommettes apparaissent.
Mon souvenir de moi, hier ici, un peu éméchée, le trouvant beau et l'examinant me revient. Je me sens rougir et mes tempes palpitent. Ca ne s'arrange certainement pas, surtout lorsqu'il se rapproche de moi. Je suis incapable de bouger.
- Gabin.
Je le regarde hébétée avant de comprendre.
- Je m'appelle Gillian, je réponds toujours aussi surprise. Il a toujours ce sourire en coin, mais j'ai comme l'impression que l'atmosphère est complètement différente à présent. Plus détendue, je dirais. « Gabin », a tout coup l'air plus aimable.
- Comment ça se fait qu'une joueuse se balade toute seule comme ça en pleine soirée ? Vous n'êtes pas censées être au moins deux à chaque fois ?
Ce qu'il me dit me paralyse un moment : de un, parce que c'est vrai. Ou du moins c'est ce que nous a recommandé Rochelle. De deux, ça fait la deuxième fois que je me retrouve ici et ça peut paraître louche, même si ça ne l'est pas du tout. Et de trois, sa remarque me titille légèrement car j'ai l'impression qu'il se moque.
- Et je croyais que les garous ne se déplaçaient qu'en meute ? , je réponds d'un ton faussement léger. Il pince des lèvres.
- L'arroseur arrosé.
Sa remarque me fait sourire et j'en oublie totalement pourquoi j'étais vexée. Je me sens toute drôle de le voir me sourire en retour. Un peu gênée par la situation, je me détourne de lui et regarde de nouveau les environs, même si je n'ai fais que ça depuis que je suis rentrée ici.
- C'est vraiment beau ici, dis-je en contemplant le plafond.
- Oui, et c'est calme.
- Depuis combien de temps que tu viens ici ?
J'arrête de regarder le ciel et fixe mon interlocuteur qui en fait de même.
- Je ne sais pas, depuis que je suis enfant je dirais, pourquoi ? , me répond-il en fronçant les sourcils.
- Pour rien, je hausse les épaules.
Je ne sais pas quoi dire d'autre alors je regarde ma montre : il est 19h45 ! 45min que je suis là ! Presque 1h.
- Je dois y aller, déclaré-je mais Gabin ne me regarde plus. Il a les yeux fixés sur le tableau des ancêtres que je regardais moi aussi.
Je ne sais pas s'il m'a entendu ou pas, mais je suis bien trop timide pour me répéter ou insister.
Je décide d'y aller mais au moment où je le dépasse, il agrippe mon bras. Je me raidis, ma respiration se bloque dans ma poitrine.
- Joueuse, dit-il si bas, que ça ressemble à un chuchotement. Un murmure qui me met dans tous mes états, car étant Gillian Ross, élève de seconde de 16 ans, je n'ai jamais été dans ce genre de situation.
- Garou, je réponds sur le même ton.
Et lorsqu'il me lâche je cours presque vers la sortie sans me retourner. Je ne sais pas s'il me regarde mais je suis presque certaine qu'il a ce sourire en coin, moqueur.
Qui ne le serait pas ? Être en émoi pour si peu. Ca ne peut que donner envie de rire.
*************~
- Tu étais où ? , me demande automatiquement Joyce lorsque je rentre au QG. Je suis d'ailleurs surprise de voir que toutes les filles sont réunies au salon. Je me sens immédiatement prise au piège.
- Dehors.
Ma réponse est des plus stupides et Joyce le sait, elle plisse les yeux.
- Oui on sait que tu étais dehors, mais dehors où ?, rétorque Amber-Rose. Son ton m'irrite et me fait grincer des dents. Elles sont toutes là à me regarder comme si je venais de tuer quelqu'un.
- J'étais allé courir.
- Depuis 15 h ?, continue Joyce d'un ton sarcastique.
Durant une mini-seconde, je pense à leur dire où j'étais vraiment, mais les mots restent coincés dans ma gorge.
A la place je hausse les épaules.
- Je n'ai pas vu le temps passé.
Un long soupir retentit. Je ne sais pas qui l'a poussé, mais ce qui est sûr c'est qu'elles ne me croient aucunement.
- Bon, passe-moi ta montre, me demande Gaia. Je m'exécute et enlève l'accessoire. Elle la prend, et va dans le couloir.
- Qu'est ce qu'elle va faire ?
- Ta montre n'a émis aucun signal lorsqu'on a voulu savoir où tu étais. Elle a donc un problème, me répond Lau.
Je ne dis rien. Ma respiration s'accélère. Si la montre avait marchée elles seraient venues.
Un peu étourdie, je leur adresse un sourire avant d'aller dans ma chambre dans l'espoir de me doucher.
******************
Gillian
Gillian
La voix qui m'appelle est douce et envoûtante. Les brumes de mon esprit s'éclaircissent. Je suis dans le même endroit que le jour du test à l'école, le même paysage que j'avais vu sur la plaque. La jeune fille blonde en face de moi. Elle me tourne dos, et j'ai bien l'impression que c'est à elle qu'appartient la voix.
Gillian.
Subitement je me sens revenir. Je ne suis pas dans mon lit, ni à l'extérieur, mais bel et bien dans l'amphithéâtre. La voix d'Elona me paraît lointaine même si nous n'avons débuté il n'ya que quelques minutes. J'ai le temps de comprendre qu'elle va reprendre où elle s'est arrêtée hier avant que la lumière ne disparaisse.
Malgré le calme apparent de la pièce, il y a un bourdonnement permanent et cette voix...
- Vanina fut notre ancêtre, commence Elona. Dans la pénombre se dresse une jolie fille blonde. La même que celle sur le tableau de la bibliothèque abandonnée. C'est la troisième fois que je la vois, mais ça me fait toujours un drôle d'effet.
- Son jeu était grand, très grand. De part sa langue elle obtenait tout ce qu'elle voulait,( La jeune fille sur l'estrade à un large sourire), et le savait.
Vanina disparaît, et les cinq ancêtres font apparition.
- Malgré ça, elles vivaient en harmonie. Le fait que l'une soit garou et l'autre joueuse ne comptait pas. Le plus important était cette appartenance à la même Terre et aux mêmes créateurs, (sur la scène, nous voyons les quatre jeunes filles faisant la cueillette, puis mangeant, riant beaucoup. C'était comme un film sans son. Puis le beau temps, s'estompe, une brume grise vient les envelopper. Elona reprend), mais ça ne dura pas. Nos créateurs décidèrent de tester leur loyauté, les unes aux autres, (un tonnerre rugit, et je nous surprends à sursauter. Je retiens mon souffle, complètement tendue), Ils laissèrent tomber une larme, (du ciel fantôme tombe une goutte translucide qui s'écrase au sol, avant de prendre forme), ils créèrent leur opposé : l'homme.
En effet c'est un homme qui s'est formé, mais nous il nous donne dos. Les cinq jeunes filles arrivent vers lui avant de former un cercle autour de ce dernier. Contrairement à elles lorsqu'elles sont « arrivées », ce dernier est tout nu, seule sa chevelure épaisse recouvre son crâne. Il a la tête baissée, et lorsqu'il la relève, les cinq ancêtres reculent.
- L'homme,( Elona marque un temps d'arrêt), si différent. Elles le surent dès qu'elles le virent.
C'est alors que le mystérieux personnage, comme s'il avait pu entendre notre mentor se retourne vers nous.
J'ai alors le choc de ma vie. L'air me manque, et j'ai une soudaine envie de vomir. Il y a des cris étouffés dans la salle.
- Oh mon Dieu, souffle Gaia à ma gauche et je jurerais qu'elle fait le signe de croix.
L'homme formé n'a pas de visage.
- Elles l'appelèrent Dats. Dats, réunissait en lui, leurs défauts, leurs tentations, mais aussi leurs secrets.
La mise en scène disparaît et la lumière revient. Enora se déplace sur l'estrade.
- 30 lunes après l'arrivée de Dats, Vanina fut condamnée à mort pour désobéissance par les créateurs.
Mon estomac se tord et ma gorge s'assèche.
La lumière paraît de nouveau, aveuglante puis vient un crépitement de feu.
Mon sang se glace aux cris d'agonie qui percutent mes tympans. A travers les flammes, on peut apercevoir un corps, comme attaché à un arbre.
- La règle de l'époque qui engendrait une condamnation à mort en cas de désobéissance, était le vœu de chasteté jusqu'à ce que nos créateurs en décident autrement. Vanina fut brulée sur le bûcher attaché à l'arbre qui avait poussé à la place de l'endroit où son amant s'est formé sur Dom.
Le crépitement cesse.
La salle reprend une ambiance normale.
Je me sens étrange, Elona nous sourit.
- Vous voyez l'histoire est tout sauf ennuyante, plaisante-t-elle, mais tout ce dont j'ai envie, c'est sortir d'ici.
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