Ils venaient d'arriver devant une porte quand ils s'arrêtèrent. Soyeon avait le visage fermé et serrait fortement la main de Jungwoo.

—Avancez, ordonna un des combattants.

—Est-ce que vous pouvez nous laisser une minute ? demanda Soyeon.

Sa requête eut pour effet de faire rire les cinq hommes les entourant.

—Je ne crois pas que tu sois en position de réclamer quoi que ce soit.

—S'il vous plait. Je vous revaudrai ça.

—Je crois que tu ne m'as pas bien compris. On vient de t'arrêter parce que tu étais avec lui. Alors on ne va pas te laisser lui parler en privé. C'est non.

—Et tu nous parles de nous revaloir ça ? railla un autre combattant. Ce soir est peut-être le dernier de ton existence.

Il attrapa le bras de Soyeon tandis qu'un de ses compagnons attrapait celui de Jungwoo afin de les séparer.

—On y va.

Les combattants les poussèrent vers la porte en leur maintenant les bras dans le dos. Ils entrèrent dans une grande salle pourvue d'une estrade sur laquelle était installés neuf hommes derrière une table.

—Les voilà, annonça l'homme qui tenait Jungwoo en le relâchant.

Les hommes installés sur l'estrades les jaugèrent pendant ce qui sembla durer une éternité pour Jungwoo. Ils ne disaient rien, le silence pesait dans la salle. Jungwoo pouvait entendre la respiration accélérée de Soyeon. Heechul, assit à la droite de celui qui devait être le parrain de l'organisation, avait un coude posé sur la table, la main sur le front et les yeux fermés. Il semblait dépité.

—Soyeon, explique-nous ce que tout ça signifie ? demanda finalement l'homme assis au centre de la table.

Elle s'avança de quelques pas la tête baissée puis se laissa tomber à genoux.

—Il s'appelle Kim Jungwoo. C'est un des hommes qu'on a recrutés ce soir.

—Heechul ?

Il s'était tourné vers celui que Jungwoo avait déjà rencontré. Les deux hommes échangèrent un regard entendu.

—Donc si je comprends bien, reprit le Parrain, tu me dis que c'est une recrue n'ayant pas encore prêté serment qui se permet d'entrer chez nous ?

—Oui.

Jungwoo ne prêtait qu'une oreille distraite à ce qu'il se disait. Il analysait la pièce, les gens mais avant tout, ses chances de survie. Chances qui semblaient bien minces car il savait que toute tentative de fuite était impossible. Il y avait des gardes devant les deux portes menant dans la pièce, mais aussi les cinq combattants qui ne se faisaient certainement pas appeler combattant sans aucune raison. Puis il y avait aussi les neuf hommes assit sur l'estrade. Jungwoo était certain qu'ils savaient non seulement tous se battre mais qu'ils étaient aussi tous armés et capables de l'abattre en un rien de temps. Il avait beau réfléchir, il ne trouvait pas d'autre échappatoire que de faire ce pour quoi il était doué : manipuler.

—Soyeon, reprit le Parrain. Tu connais les règles. Alors pourquoi...

—Comme il allait venir demain j'ai pensé que...

—Et tu ne t'es pas dit qu'il pouvait être un espion ?

Soyeon tremblait, elle craignait pour sa vie, Jungwoo le sentait. Il savait que s'il devait mourir, elle mourrait sans doute avec lui.

—Je ne suis pas un espion, intervint Jungwoo en s'avançant d'un pas. Je veux vous rejoindre.

—C'est exactement ce que dirait un espion.

Le Parrain posa sa main sur sa joue et regarda Jungwoo dans les yeux. Puis il leva la main et dit :

—Combattants ? Vous savez quoi faire.

Les cinq hommes entourant Jungwoo et Soyeon se rapprochèrent. Jungwoo eut à peine le temps de comprendre ce qu'il allait lui arriver qu'il reçût un premier coup dans les côtes. Puis s'ensuivit un second dans le ventre. Jungwoo se plia en deux sous l'impact de ce dernier coup.

—Pour qui tu travailles ? l'interrogea le Parrain.

—Personne, répondit Jungwoo en relevant la tête.

Pour toute réponse, il se prit un nouveau coup dans le ventre. Puis il en eut assez et il riposta en esquivant les coups suivants.

—Combattants ? Pourquoi est-il encore debout ? demanda le Parrain d'un air arrogant.

—Je ne vous ai pas entrainé pour vous faire battre par un jeune effronté, dit un des hommes de l'estrade.

Les cinq combattants se tournèrent vers celui qui les avait entrainés et s'inclinèrent légèrement avant de se jeter sur Jungwoo pour le tabasser. Jungwoo connaissait la douleur, il s'était entrainé toute sa vie à se battre. Quand ils étaient encore que des enfants, leurs parents, à lui et au reste des membres de NCT, les avaient entrainés durement à endurer toute sorte de douleur. Mais malgré toutes ces heures d'entrainement, rien ne l'avait préparé à ça. En un rien de temps, il avait fini à terre recroquevillé sur lui-même, le visage en sang. Il aurait préféré mourir d'une balle dans la tête plutôt que subir cette douleur, ça aurait été plus rapide. Mais il savait qu'il se devait de tenir. Il avait son rôle à jouer. Les membres, sa seule famille, comptaient sur lui. Tout le monde doit jouer son rôle, sans quoi tout s'effondre. Il se répétait cette phrase en boucle. Elle lui donnait de la force.

—Leeteuk.

Jungwoo tourna la tête vers la voix et vit Heechul tourné vers le parrain. Leeteuk, c'était donc son nom, leva une main et le supplice s'arrêta.

—Relèves-toi, lança Leeteuk.

Jungwoo utilisa ses dernières forces pour se remettre sur pied. Il essuya d'un revers de main le sang coulant de sa bouche et son nez. D'un coup d'œil sur le côté, il vit que Soyeon était toujours à genoux et qu'elle pleurait.

—Pour qui tu travailles ? demanda encore Leeteuk.

—Vous pouvez me tabasser autant de fois que vous le souhaitez, ma réponse sera toujours la même. La vérité pure : personne.

—Alors que fais-tu ici ?

Jungwoo émit un ricanement.

—Soyeon m'a fait venir ici parce qu'on voulait coucher ensemble.

Toutes les personnes présentes dans la pièce étaient abasourdies. Il y eu un moment de flottement durant lequel ils purent presque entendre les corbeaux. Puis soudain, Leeteuk éclata de rire.

—Tu te fous de ma gueule Soyeon ? Tu l'as fait venir ici parce que tu voulais baiser ? Alors que tu pouvais le faire au casino !

—On n'avait pas de quoi se protéger là-bas, dit Soyeon d'une voix chevrotante, alors je n'ai pas réfléchi et...

—J'espère au-moins que ça en valait le coup, de mettre ta vie en jeu pour lui.

Jungwoo ne savait plus quoi penser. Il avait la désagréable sensation que les jeux étaient faits. Que quoi qu'il dise, Leeteuk avait déjà pris une décision. Le silence avait repris ses droits. Plusieurs minutes s'écoulèrent avant que Leeteuk ne le brise.

—Yesung, convoque tout le monde dans la salle des jugements.

—Tout le monde ?

—Oui. Tous les membres de l'organisation présents ici ce soir. Ces deux ont commis un crime, ils doivent donc être jugés.

—Monsieur, est-ce que vous souhaitez qu'on les emmène dans la salle des jugements ? demanda un des combattants en désignant Soyeon et Jungwoo d'un signe de tête.

—Oui. Et attachez-les.

Les combattants les attrapèrent sans faire preuve d'une once de douceur et les poussèrent afin qu'ils avancent. Ils se rendirent ainsi dans une salle attenante, possédant des gradins. On les fit s'assoir au centre de la pièce à même le sol avant de leur attacher les mains dans le dos. Puis ils attendirent.

—Je suis tellement désolé, murmura Soyeon en larmes.

—Est-ce que ça en valait le coup ? demanda Jungwoo.

—Je ne sais pas. Sur le coup oui mais maintenant qu'on doit mourir...

Elle étouffa un sanglot.

—Je sais, souffla Jungwoo. Je ne t'en veux pas.

La salle se remplit peu à peu d'hommes et de femmes. Certains habillés de costumes, d'autre de vêtements de marque, d'autre encore de survêtements. Jungwoo pouvait distinguer qui appartenait à quelle unité par la manière dont ils étaient habillés. En un rien de temps, les gradins furent plein. Mais alors que Jungwoo s'attendait à ce qu'il y ait du brouhaha, le silence régnait. Puis les neuf hommes firent leur entrée, Leeteuk en tête.

—Bonsoir mes amis, commença Leeteuk. Je sais que certains d'entre vous dormaient et je m'excuse de vous avoir dérangé. Mais comme vous le savez, un jugement important requiert la présence de tout le monde.

Il fit quelques pas avant de s'arrêter devant l'assistance.

—Si je vous ai réuni en cette heure tardive, c'est pour que vous soyez tous témoin du jugement de notre Ange Jeon Soyeon et de Kim Jungwoo.