Chapitre 3 - Theo
J'ai encore ma chemise lorsque nous atteignons mon appartement. Franchement, je n'aurais pas parié là-dessus, parce qu'en entrant dans l'ascenseur, ma danseuse semblait bien décidée à la faire disparaître en vitesse. Mais elle a eu plus de mal à progresser à partir du moment où je l'ai soulevée pour la plaquer contre la paroi de la cabine, plongeant explorer son décolleté de ma bouche. Instinctivement, ses jambes se sont resserrées autour de ma taille ; je n'ai eu aucune difficulté à la maintenir en hauteur, mes mains sous ses cuisses.
Habituellement, je déplore que mon ascenseur ne soit pas très rapide. Ce soir, j'aurais pu y passer de longues minutes supplémentaires sans le moindre souci.
Elle se décolle de moi juste assez pour que je récupère ma clé dans ma poche. Un instant plus tard, ma porte est déverrouillée, et je l'invite à entrer.
— Wow. C'est plus grand que je le pensais, commente-t-elle.
— Et encore. Tu ne l'as pas encore vue dans toute sa splendeur.
Ma danseuse roule des yeux, mais pouffe, amusée.
— Je parlais de ton appartement.
J'avais compris : il n'est pas rare que mes amis soient surpris lorsque je les y invite pour la première fois. La plupart des étudiants qui logent en-dehors du campus disposent d'un studio ; moi, j'habite dans un trois pièces d'une centaine de mètres carré. Je peux remercier mon père pour ça : quand Emilia, l'aînée de mes sœurs, est entrée en première année à la WestConn, il a anticipé le fait que nous serions cinq à nous y succéder dans la décennie qui suivrait, alors il a préféré régler la question de notre logement une bonne fois pour toutes en achetant un appartement non loin de l'université. Et comme l'argent n'est pas un problème pour lui, il a voulu s'assurer que nous y serions bien : il a vu grand.
Il y a deux chambres : mes sœurs étant rapprochées en âge, elles y ont passé leurs études en colocation, le plus souvent à deux, à trois l'espace de quelques mois. Moi, étant donné que j'ai cinq ans d'écart avec Alexandra, la plus jeune avant moi, je bénéficie de toute cette place pour moi seul : elle a obtenu son diplôme avant que je ne fasse ma première rentrée. Du coup, je me suis aménagé un grand bureau, qui me sert aussi de salle de musculation à l'occasion ; et pour organiser des fêtes, j'ai les coudées franches.
Mes sœurs aiment me charrier à ce sujet en disant que c'est encore une preuve qu'en tant que seul fils et petit dernier, je suis pourri-gâté. Mais bon, elles sont aussi coupables que nos parents : je sais qu'elles m'adorent. Et puis il est inutile que je nie faire partie des privilégiés : je n'en tire aucune mauvaise conscience, mais je serais hypocrite d'essayer de prétendre que ce n'est pas le cas. Mon père est riche – vraiment très riche. Il a fondé l'entreprise leader sur l'installation et la maintenance de distributeurs d'eau dans les entreprises et collectivités du nord-est du pays. Une activité extrêmement spécifique, mais qui rapporte.
Depuis que je suis petit, je sais que si je le souhaite, papa me trouvera une place pour travailler à ses côtés lorsque viendra le temps pour moi d'entrer dans la vie active : c'est son souhait de transmettre sa société à ses enfants. Emilia y est déjà entrée comme commerciale, tout comme Daphne, ma troisième sœur, à la comptabilité. Les rejoindre à mon tour me plairait bien : avec le cursus en management que j'ai choisi, je pourrais intégrer la branche des ressources humaines. C'est une carrière qui me parle, être au contact constant des gens. Et si c'est dans l'entreprise familiale, c'est encore mieux. Iris, ma deuxième sœur, répète souvent qu'elle souhaite faire ses preuves par elle-même, tracer son propre chemin : pour ma part, je ne ressens pas ce besoin. Apporter ma pierre à l'édifice dont mon père a posé les bases à la génération précédente est une idée qui me séduit.
Bon, j'avoue qu'avoir un filet de sécurité comme celui-là m'aide à rester insouciant là où beaucoup de mes camarades se laissent gagner par le stress des études : je sais que j'aurai beau enchaîner les fêtes, du moment que j'ai mon diplôme sans trop de casse, un job garanti m'attend à la sortie de l'université. J'en profite sans scrupule, je ne vais pas mentir.
Et ce soir, justement, la soirée est trop belle pour la gaspiller à penser à mon avenir – de toute façon assuré. Le présent est bien plus séduisant, en la personne de ma danseuse. Elle s'est avancée un peu plus dans le salon. Certaines filles prennent le temps de le détailler à ce stade, mais pas elle : très vite, son regard revient sur moi, brûlant d'un feu ardent. Je n'attends pas plus longtemps : je fonds sur elle en quelques pas. Nous entrons en collision, avec l'intensité de deux étoiles en plein crash. Puisque plus rien ne nous retient, mes mains veulent tout d'elle, de son corps que je suis assoiffé de découvrir dans son entièreté. Elle gémit, soupire crescendo ; je me débarrasse bien vite de sa brassière ornée de sequins, pour dévoiler un soutien-gorge en tulle et satin noir qui rend sa poitrine encore plus affriolante. Comme dans l'ascenseur, je la soulève, saisissant ses fesses à pleines paumes pour la déposer sur le comptoir de ma cuisine : elle réagit en faisant enfin sauter le dernier bouton de ma chemise, qu'elle envoie valser au loin, sur mon micro-ondes.
La suite est une saturation exquise. Un tourbillon sensuel, celui de sa peau dorée, de son odeur d'agrumes piquetée de sa sueur, de ses ongles dans mon dos. De nos halètements qui se répondent, de ses caresses qui m'enveloppent tout entier, de ma bouche sur son humidité, l'amenant une première fois à l'orgasme.
Plus tard, elle me chevauche sur mon canapé, mes paumes sur ses hanches à la rondeur parfaite. Elle a la tête rejetée en arrière, ses mèches blondes dessinant des rivières d'or le long de son cou. Je la contemple, déjà mis au bord du précipice par cette vision qui m'évoque une divinité luxurieuse ; mais c'est quand, d'un coup, elle se redresse pour me regarder droit dans les yeux que quelque chose dans mon ventre se noue. Il y a une faim dans ses prunelles qu'elle ne masque pas ; qu'elle revendique, au contraire. D'habitude, avec mes partenaires, je m'efforce toujours de trouver les cordes qui vont les faire vibrer, celles sur lesquelles je dois jouer pour les amener aux plus hauts sommets du plaisir : pour certaines, ce sont des zones sensibles, pour d'autres, des mots crus, pour d'autres encore, des positions en particulier. Avec elle, j'ai l'impression que tout ce que je tente entre dans une caisse de résonance, est démultiplié dix fois, cent fois. Tout chez elle est symphonie charnelle, concerto sensuel. Il n'y a rien que j'essaye auquel elle ne soit pas réceptive : si elle a des limites, je ne les entrevois pas encore.
C'est comme si je couchais avec une boule de feu, consumant la nuit, marquant ma mémoire d'une empreinte inoubliable. Nous deux, notre alchimie, ça éclipse tous les autres coups d'un soir que j'ai pu avoir jusque-là. La quintessence de la jouissance, la redéfinition de tout ce qui constituait mes horizons.
Elle me fait basculer dos à la banquette en velours émeraude. Son visage me surplombe ; je suis hypnotisé par ses lèvres rosées entrouvertes, à deux souffles de laisser échapper leur dernier éclat. Je ne peux pas résister à l'envie de l'attirer contre moi, de mêler ma bouche à la sienne. Un baiser, pour sceller l'explosion à laquelle nous arrivons ensemble. Il est exceptionnel, comme tout le reste. Ardent, passionné, un énième ballet où nous n'avons aucun mal à trouver notre harmonie.
Je sens son corps se tendre tout entier pour la dernière fois au moment où le mien fait de même. Elle se réceptionne contre ma poitrine, pantelante, trouvant naturellement sa place au creux de mon bras. Quelques secondes seulement s'écoulent avant qu'elle ne me pose une question qui est un délice à mes oreilles :
— Si je reste encore un peu... tu seras opérationnel pour un nouveau round ?
— Évidemment. Nous avons toute la nuit devant nous, ce serait du gâchis de nous arrêter en si bon chemin, n'est-ce pas ?
Elle se fend d'une petite tape amusée sur mon pectoral, qui se gonfle de fierté : si elle envisage de recommencer, c'est que j'ai été à la hauteur des promesses que je lui ai faites. J'en doute rarement, mais avec elle, cela me semblait encore plus essentiel que d'ordinaire.
Elle se lève, file à la salle de bain pour se débarrasser du préservatif et se rafraîchir un peu. Pour ma part, je passe un bras derrière ma tête, comblé, et je ne peux que remercier l'aube d'être encore loin, parce qu'avec un astre pareil dans mon appartement... Quel besoin ai-je encore de voir le soleil se lever ?
***
Salut à tous ! Sans surprise, Theo et son héroïne continuent sur la voie de l'anti-slow burn, et ce chapitre explore encore un peu plus l'alchimie sensuelle entre eux. Leur dynamique est totalement différente que celle des couples des tomes précédents : j'espère que vous appréciez également cette nouvelle voie... et que vous apprécierez aussi les surprises que l'histoire vous réservera !
A ce propos, ce tome 4 sera plutôt long, puisque je prévois pour l'instant 56 chapitres en tout. Eh oui, c'est un chemin plein de rebondissements qui nous attend !
J'attends vos commentaires avec impatience ! Surtout vos hypothèses sur l'héroïne, que l'on ne voit pour l'instant qu'à travers le point de vue de Theo... Qu'imaginez-vous sur elle à ce stade ?
A très bientôt pour la suite en tout cas !
Camille Versi
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