Nous avons passé l'après-midi chez elle à regarder des films. Dans son lit, avec la douce lumière de sa guirlande, dans ses bras, j'étais au Paradis. À 19h, Soraya me dit de me préparer car elle a une dernière surprise pour moi. Je me lève, le sourire aux lèvres et l'excitation qui électrisait mon corps. Nous nous préparons et partons. Soraya se dirige vers sa voiture ; je ne savais même pas qu'elle avait son permis, ni même une voiture. C'est un pick-up gris foncé dans lequel je monte, heureuse. Soraya me rejoint, met le contact et part. Je sais qu'elle ne me dira pas où nous allons, donc je me détends et profite de la musique. Je ne connais aucun des titres qui passent, mais je les écoute attentivement ; si Soraya les aime, c'est qu'il y a une raison. Au bout d'une petite demi-heure, Soraya se parque dans une grande plaine vide et sort de la voiture. Je la suis et elle monte à l'arrière, sur l'espace ouvert. Elle étend une couverture, installe des guirlandes lumineuses et va chercher un panier de pique-nique.

- Installe-toi ! me dit-elle.

Je souris et monte, suivie par Soraya. Elle pose le panier en face de nous et commence à le déballer. La première chose qu'elle sort, c'est une couverture dans laquelle elle m'enveloppe. Je souris et aide Soraya à sortir le repas. Je la remercie et nous mangeons, sans bruit, sous les étoiles et la lumière des guirlandes.

J'ignore combien de temps nous sommes restées comme ça, nous deux, à parler de tout et de rien, dans notre bulle coupée du monde extérieur. Je sais juste que je ne me suis jamais sentie autant en paix et à ma place qu'à cet instant précis. Être allongée contre ma petite amie, ma main dans la sienne et pouvoir l'embrasser quand bon me semblait ressemblait à un rêve. Un rêve qui est ma réalité.

Soraya ne dit rien en conduisant, sans doute se concentre-t-elle. Elle me dépose devant chez moi et sort pour m'ouvrir la porte. Je prends sa main et saute de sa voiture avant de l'embrasser.

- Merci pour cette journée de rêve, je murmure.

Soraya sourit et me donne un baiser délicat et rapide. Elle me tend un paquet emballé de papier rouge foncé.

- Joyeux Noël mon ange.

Je le prends, touchée et impatiente de l'ouvrir. Son cadeau est sur mon bureau ; je lui dis que je lui donnerais le 26, après les fêtes. Je la prends dans mes bras et la remercie. Je lui donne un dernier baiser et rentre chez moi, pas sans un dernier regard vers elle qui me sourit. Je vais me coucher, heureuse et remplie d'amour.

***

Le lendemain, je me prépare silencieusement et vérifie mon sac de cadeaux. J'ai demandé à Avery si nous pouvions passer chez Soraya pour que je puisse lui donner mon cadeau ; il a accepté, un léger sourire aux lèvres. Quand nous sommes prêts, nous partons. Après avoir déposé ma livraison, nous sommes allés chez notre mère. Je ne l'ai pas revue depuis mon anniversaire et je me sens horrible pour ça.

Elle nous accueille avec un immense sourire et une étreinte réconfortante. Depuis mon déménagement, je ne suis pas retournée dans ma maison d'enfance. Mais il y a quelque chose de réconfortant de revenir ici après tout ce temps. Sentir le parquet sous mes pieds nus, reconnaître la décoration, sentir l'odeur du repas et voir ma mère me calme et je me sens bien. Mon cœur se serre en voyant la photo de mon père au mur, à côté de notre dernière photo de famille. Ma mère me prend dans ses bras et tire mon frère contre elle. Tous les trois, nous fixons la photo du grand absent de notre Noël.

- Il me manque, j'avoue.

Ma mère dépose un léger baiser sur ma tempe ; par ce geste, elle me fait comprendre qu'à elle aussi, il lui manque, mais qu'elle est heureuse que je sois revenue. Nous passons au salon et Avery et moi déposons les cadeaux sous le sapin. Je me demande comment ma mère fait pour vivre seule dans une maison qui avait l'habitude d'accueillir quatre personnes. Mais elle a l'air en forme, reposée et surtout contente de revoir ses enfants. Elle me pose des questions sur l'université, se réjouit quand je lui dis avoir trouvé un stage de deux semaines en février. Elle questionne ensuite Avery sur son travail et son projet d'acheter une voiture. Puis elle s'intéresse à notre cohabitation, à notre appartement et surtout à Nuit qu'elle adore et qui est venu avec nous.

Le soir venu, nous sommes les trois assis autour du repas préparé par notre mère. Je la vois se resservir plusieurs fois du vin et je remarque que ses cernes se sont accentués.

- Tout va bien maman ? je demande. Dans ta vie, au boulot... ?

Elle pose son verre de vin et tente de sourire, mais je vois bien qu'elle est à bout.

- C'est toujours la folie au Centre, la charge de boulot de cesse d'augmenter et le patron est de plus en plus sur les nerfs.

Elle soupire et reprend une gorgée de vin avant de finir son verre.

- Je crois qu'il y a un problème, mais je ne sais pas lequel, avoue-t-elle. Je dois dire que ça m'inquiète et m'interroge un peu. Mais personne n'en sait plus...

Je lance un regard à mon frère et repense à la conversation qu'il a eu avec ma mère à notre anniversaire. Quel genre de problème y a-t-il ? Quel en sera son impact ?

Avant que je ne puisse me noyer dans l'angoisse de mes questions sans réponse, ma mère nous invite à aller ouvrir les cadeaux puisque nous avons fini de manger.

Avery a reçu un bon cadeau pour une auto-école du coin, quelques livres (notamment sur la botanique et comment apprendre le japonais). Ma mère a eu des produits de bain relaxants et des romans policiers (son péché mignon). Pour ma part, j'ai eu des livres en anglais (principalement de la romance) et des posters de ma série préférée. Quand tout le monde a ouvert ses cadeaux, je suis allée prendre celui de Soraya. Je le déballe et sors une petite notice :

« Joyeux Noël mon ange~

Tu tiens entre tes mains mon livre Larmes d'or, bonne lecture !

Affectueusement tienne,

Soraya »

Le sourire aux lèvres, je sors un paquet de feuilles. Je peux enfin lire le fruit d'un an de travail et je me sens extrêmement chanceuse et privilégiée. Je vais lire avec un immense plaisir ce roman. Je remarque quelque chose au fond du carton. Je me penche et le sors. Je tire sur la ficelle et déplie les feuilles ; c'est une lettre manuscrite. Je la lis, un immense sourire aux lèvres. Un passage se grave immédiatement dans mon cœur :

« Si je devais faire mon bilan de l'année 2022, tu serais clairement au sommet de ce qui m'est arrivé de mieux. Cette année, nous nous sommes rencontrées, nous sommes tombées amoureuses et nous sommes ensemble. Mais j'ai hâte de voir ce que l'avenir nous réserve, car je suis plus que prête à faire un bout de chemin avec toi, mon cœur. Avec ma main dans la tienne, notre chanson et notre amour, alors tout est possible.

Je t'aime tellement. »

Je m'appuie contre le canapé, le sourire aux lèvres, les larmes roulent sur mes joues et je suis entièrement heureuse.

Je t'aime entièrement, Soraya.