
Chapitre XXI : You're no good - Hidden citizens
« Aveugle. Je suis devenue aveugle. Tout ça à cause de toi, Eden. Si tu n'étais pas parti, je ne passerais pas autant de temps au QG de la confrérie. Si tu n'étais pas parlé, je ne serais pas aussi épuisée. Je n'aurais pas été inattentive. Je n'aurais pas fait cette erreur. Le monde n'aurait pas perdu ses couleurs. »
Extrait du journal d'Enola sous dilitírio
Je m'avance avec difficulté vers l'entrée de la prison, béquilles empoignées avec force. Au bout de deux mètres, je suis forcée de faire une pause. Lilou me suit en baillant, s'accrochant à ma veste d'une main. Mes bras tremblent. Je voudrais les secouer pour faire passer ses fourmillements infernaux mais j'ai trop peur du moindre vertige. Alors je baisse la tête, souffle et continue. Je me traîne jusqu'au portail, maudissant ma jambe inerte, et attends qu'Ethan appuie sur la sonnette. Un grésillement nous autorise à entrer. Il pousse la porte et la tient le temps que j'en passe le pas. Je suis accueillie à bras ouvert par une senteur piquante de désinfectant. Magnifique... Pile ce qu'il me fallait pour me retourner l'estomac.
Lilou vient se coller à ma jambe paralysée. Je lâche avec peine une béquille pour passer ma main dans son dos. Je la sens s'effondrer contre moi. Mon cœur se serre. Elle est vraiment épuisée... Sa respiration est régulière et je devine qu'elle s'est endormie debout.
— Bonjour, que puis-je pour vous ? nous demande une jeune femme sur ma gauche.
Je ne prends même pas la peine de me déplacer et laisse Ethan gérer les formalités administratives.
— Bonjour, je voudrais rendre visite à une de vos détenues. Morgane Thierness, il s'agit de ma mère.
— Vous avez votre permis ? répond d'une voix lasse la standardiste.
— Bien sûr.
— C'est glauque, ici, commente ma sœur sur ma droite.
Une inspiration. Une expiration. Une inspiration. Une expiration. Une inspiration. Une expiration. Une inspiration. Une expiration. Une inspiration. Une expiration. Une inspiration. Une expiration. Ne réponds pas. Ne la regarde pas. Ne veux pas la voir. Je m'accroche à mes ténèbres comme jamais auparavant et m'ancre au poids de Lilou sur ma jambe pour ne pas tomber dans cette réalité déformée.
— Alors on en est revenu là, pleurniche Laurie, peinée. Tu vas m'ignorer ?
— Et elles ? me sauve la standardiste.
— Ce sont des proches, lui répond Ethan.
— Vous ne pouvez être accompagné que de votre famille.
Je ne laisse pas le temps au fils maudit de parlementer et lâche d'une voix acide.
— Je suis son ex et cette enfant vient voir sa grand-mère. Vous nous avez bien regardées ? Vous croyez qu'on représente une quelconque menace ?
Ethan retient une quinte de toux avec peine, certainement estomaqué par mon mensonge.
— J'ai un protocole, argumente-t-elle, la voix vacillant légèrement. Il est fait pour être appliqué.
— Et vous avez un cœur. Il est fait pour être utilisé. Vous allez vraiment refuser à la petite l'occasion de dire au revoir à sa grand-mère ?
— Je me porte garant d'elles, insiste Ethan.
La femme se tait un instant, tergiversant sans doute avec sa conscience.
— Avancez tout droit à votre droite et vous serez fouillée.
— Merci madame.
— Pour une mauvaise menteuse, tu t'en es plutôt bien tirée, commente ma sœur.
Je l'ignore et me penche pour secouer doucement Lilou.
— Attendez, je vais la prendre, me propose Ethan.
J'ouvre la bouche pour protester mais il ne m'en laisse pas le temps. Il s'accroupit à côté de Lilou et avec une douceur inattendue, il saisit les bras qu'elle avait entourés autour de ma jambe. Elle ne bouge même pas lorsque l'homme la soulève de terre.
Sans un mot, je lui emboîte comme je peux le pas, abandonnant mon fantôme de sœur. Je me traîne sur une dizaine de mètres avec toute la difficulté du monde. Mon cœur tambourine dans ma poitrine à un rythme effréné, je transpire comme jamais. Je sens qu'Ethan hésite à me proposer son aide lorsqu'il ralentit plusieurs fois, mais il n'en est rien. Tant qu'il ne s'éloigne pas avec Lilou, je peux tolérer toutes les difficultés du monde. Je finis par arriver par je ne sais quel miracle au portail de fouille.
— Effets personnels dans ce bac, permis de visite et nom du détenu, s'il vous plaît.
Il pose un bac en fer devant nous dans un tintement qui m'agresse les tympans. Je grimace en m'exécutant. Personne ici ne semble connaître Ethan puisque tout le monde lui demande son nom. J'imagine qu'il n'a pas du venir souvent. Voire pas du tout si j'en crois ce qu'il m'a raconté.
— Morgane Thierness, déclare Ethan alors que je pose ma besace et ôte ma cape pour ne garder que ma tenue civile.
— Votre permis ?
Nouveau temps d'arrêt pour tout contrôler.
— C'est bon, installez-vous, je vais la chercher.
L'homme nous déverrouille la porte et m'indique gracieusement une chaise sur laquelle je laisse tomber mes fesses avec délice. Je tends les bras vers Ethan qui me tend ma fille toujours endormie. Lorsque je la serre contre moi, je respire à nouveau.
— Merci, soufflé-je.
Une personne entre en face dans un bruit qui me parait étouffé. Je tends la main devant moi. Nous sommes séparée d'une vitre percée de petits trous afin de nous permettre d'échanger. Je m'adosse à la chaise alors que quelqu'un s'installe de l'autre côté.
Le fils maudit qui n'a jamais autant bien porté son nom ne dit rien. Comme s'il ne savait pas comment engager la conversation. Sa mère le fait pour lui.
— Ethan... le salue une voix froide. Et vous, vous êtes..?
Je ne retiens pas une moue d'agacement devant son dédain non voilé. Je suis ton ange gardien, ma grande. Actuellement, j'ai droit de vie et de mort sur toi, alors je te conseille de baisser d'un ton.
— Juliette Huhio... Et ma fille.
— Une enfant en prison... Comme c'est original... C'est la presse qui vous envoie, c'est ça ? me coupe-t-elle, glaciale. J'imagine que vous vous êtes faite passer pour un membre de notre famille ? Que se passerait-il si je criais le contraire ? J'ai déjà dit que je ne répondrais à aucune de vos questions !
Une tirade et elle m'agace déjà. Même si l'histoire d'Ethan m'avait bien introduit son personnage, je ne m'attendais pas à une telle arrogance. Comment peut-on être à l'origine de si grands progrès humanitaires et médicaux et être aussi méprisante ? Comme quoi l'habit ne fait vraiment pas le moine.
— Ce n'est pas la presse, Maman... soupire Ethan. Et j'ai demandé à ce qu'on ne soit pas écouté, donc je t'en prie, crie. Personne ne t'entendra.
— Rassurez-vous, je ne suis pas plus heureuse que vous d'être là, je ne peux m'empêcher d'ajouter.
— Alors que fais-tu ici Ethan ? Tu t'es soudain rappelé que tu n'étais pas né par l'opération du Saint Esprit ? Et que donc tu avais une mère ?
Je souffle. Je ne suis pas venue ici pour les écouter régler leur problème de famille. J'ai des choses nettement plus importantes à faire. Alors je ne laisse pas le temps à son fils de rétorquer et m'impose dans la conversation en recalant Lilou qui, lourde de sommeil, glisse de mes bras.
— Bon écoutez, j'ai peu de temps devant moi alors je vais aller droit au but. Est-ce que vous voyiez quelqu'un qui peut vous en vouloir au point de manigancer tout cela ? Quelqu'un en rapport avec de l'eau, une noyade ou que sais-je.
Elle marque un temps. J'ignore si elle se demande si je mérite une réponse ou si elle réfléchit à ma question.
— Pourquoi me demandez-vous ça ? Vous pensez que l'on m'a piégée ?
— Pas vous ? raillé-je. À moins que vous n'avouiez avoir écrit ce journal, je ne vois que cette possibilité. Et comme apriori la cible n'était pas votre mari, cela ne peut être que vous. Et le commanditaire a forcément un rapport avec l'eau alors réfléchissez !
Silence. J'espère vraiment qu'Ethan a raison et que nous ne faisons pas tout ça pour rien.
— Qui me dit que je peux vous faire confiance ?
Je soupire. J'espère de l'aide du côté de mon voisin mais ce dernier se tait et croise les bras contre sa poitrine. Il n'a visiblement pas l'intention de m'aider dans cette entrevue. Peut-être que s'adresser à sa mère est difficile pour lui. Une fois les larmes taries, la haine est une alliée si conciliante...
— Rien, mais vous n'êtes pas forcément en position de pouvoir choisir vos alliés et il semblerait que je sois votre dernier recours.
Le femme souffle et tapote de ses ongles le bois de la table, méditant j'espère ma question.
— Je ne vois pas...
— Réfléchis ! insiste son fils. Ne va pas me dire que tu n'avais aucun ennemi ?
— Si... Comme tout scientifique. Mais aucun n'a de rapport direct avec l'eau.
— Bon et si on oublie l'eau, tu en vois un qui pourrait t'en vouloir à ce point ?
— Au point d'assassiner mon mari et de m'inculper huit ans plus tard ? ironise-t-elle. Non.
— J'imagine qu'on sous-estime toujours ses proches, soufflé-je pour moi-même.
— Je ne m'entoure que de gens de confiance ! siffle-t-elle telle une vipère en colère.
— Bien sûr... Tu ne t'entoures que d'amis. Comme trente pour cent des victimes d'homicides...
Personne n'est assez parano pour imaginer une trahison de ses amis. Ou alors il est largement temps d'en changer. Enfin sauf l'homme assis à côté de moi, qui lui n'a aucun mal à enquêter sur ses proches.
— Cela peut coller cela dit... continue Ethan en se tournant vers moi comme s'il venait d'avoir une révélation. Quelqu'un a forcément déposé le journal dans le grenier. Et il n'a pas de fenêtre, la seule entrée est la porte qui est constamment fermée à clé depuis des années...
—... car tu avais la mauvaise habitude d'y fouiller avec...
— Ne finis pas ta phrase ! siffle son fils avec colère.
Je fronce mon sourcil. Lilou sursaute lorsqu'il hausse la voix. Elle se redresse contre moi. Je resserre mon étreinte sur elle, craignant une vive réaction. Mais je le sens hagard.
— Je suis là, je suis là, tu es en sécurité, lui murmuré-je à l'oreille.
— Papa... chouine-t-elle en se blottissant contre moi.
Mon cœur remonte dans ma gorge.
— Je suis là, Lilou...
— Alors comme ça, tu es père, Ethan... ironise sa mère. Le faire-part a dû se perdre.
— Et en quoi ça vous dérangeait ? la coupé-je en berçant ma fille qui a à nouveau sombré dans les affres du sommeil. Il y a quoi dans ce grenier ?
— De vieux souvenirs de familles, rétorque Morgane. Mais je n'aime pas remuer le passé et ça, Ethan n'a jamais voulu l'entendre. Pour lui, c'était avant tout une caverne aux trésors de l'ancien temps...
— Ce n'est pas le sujet ! s'agace l'homme. Le grenier, personne n'y avait accès à part ceux entrant dans la maison et nous n'avons jamais constaté de trace d'effraction... Donc c'est forcément quelqu'un qui a utilisé la clé.
Je sens à sa voix qu'il pense tenir quelque chose. Et si c'était le chef que nous cherchions qui avait déposé le journal ? Nous ne l'avons jamais évoqué mais ça me parait logique, effectivement. Il découvre la liste de suspects d'Ethan, décide de lui envoyer un avertissement en faisant arrêter sa mère et pour cela dépose les preuves nécessaires dans le grenier. Nous nous sommes trop concentrés sur nos potentiels suspects et ce que je savais des chefs mais l'affaire en elle-même peut nous donner des indices. Qui a encouragé Morgane à vider son grenier ce jour-là ? Je ne me souviens plus. Il faudra en reparler avec Ethan. Nous avons complètement occulté un pan de l'enquête !
— Il est impossible de rentrer chez nous sans faire sonner les alarmes, me coupe Ethan dans mes réflexions. Il faudrait les désactiver et donc avoir le code.
Il tape la table de son poing et jurant.
— Putain, comment ai-je pu ne pas y penser plus tôt... La confrérie ne paye jamais personne pour effectuer leurs basses besognes, alors c'est forcément le commanditaire qui l'a posé là... On connaît ce putain de commanditaire... Et c'est quelqu'un de très proche.
Voilà, en une phrase, il vient de justifier tous nos futurs interrogatoires. Mission dans cet endroit de malheur terminée. Je vais dire à Ethan que nous n'apprendrons rien de plus ici quand Morgane choisit cet instant pour s'adresser à son fils, d'une voix plus calme.
— Malgré la situation, je suis contente de te voir, Ethan.
Je me fige, stupéfaite par cette perversité. Si j'en crois les confessions d'Ethan, ses parents ne l'ont jamais regardé. Et à présent qu'elle est en prison, que son fils se bat pour elle, elle commence à ouvrir les yeux ? C'est facile tout ça ! Facile pour elle et très dur pour Ethan. Car il l'a dit lui-même, elle reste sa mère. Il a passé sa vie à attendre une marque d'attention. Il lui sera bien difficile de continuer à la haïr si elle se met à lui témoigner de la gentillesse.
— Plaisir non partagé, réplique celui-ci en se raidissant.
— Je ne pensais pas que tu cherchais encore... Tu te mets en danger, Ethan, le réprimande sa mère. Et commence par mettre une écharpe. C'est pas le moment de mourir d'une pneumonie.
Celui-ci renifle de dédain et étouffe un ricanement qui lui arrache une quinte de toux.
— Oh je t'en prie, ce n'est parce que tu ne t'es pas occupée de moi quand j'étais gamin que tu dois te rattraper maintenant. Je n'ai plus besoin de toi, merci bien.
— Pourquoi tu m'aides, Ethan ? le questionne-t-elle, froidement. Dans mes souvenirs, tu m'as bien fait comprendre que tu t'arrangerais pour que je plonge.
L'homme s'accoude sur la table et s'avance comme avant de porter un coup.
— Que vous tombiez tous les deux pour violence conjugale ! la corrige-t-il en tapant du poing. Pas pour homicide ! Il y a une légère nuance entre l'amende que vous auriez eu à payer grâce à vos avocats et la peine de mort.
— Stop ! Temps mort ! Qui le connaissait ce fichu code ? m'impatienté-je coupant court à la dispute qui bout.
Lilou s'agite à nouveau et je jure en le redressant contre moi. Mes bras commencent à s'engourdir et elle glisse de plus en plus. Un instant de silence suit ma prise de pouvoir durant lequel j'imagine chacun se regarde comme des chiens de faïences. Je me fiche de cette histoire de code en réalité mais je sens le genou d'Ethan trembler de plus en plus fort contre le mien. Je ne sais pas si c'est de la haine, du chagrin passé qui ressurgit, de la colère. En revanche, ce que je sais, c'est que cette conversation ne fait que rouvrir des plaies passées.
Ethan tourne la tête vers moi. Il pousse un soupir comme pour se calmer avant de reprendre d'un ton plus calme.
— Je peux la prendre si vous voulez. Elle va finir par tomber.
Je mets un instant avant de comprendre qu'il parle de Lilou. J'hésite un instant avant d'acquiescer. J'ai les bras en compote et j'en ai encore besoin. De plus, je ne vois pas où Ethan pourrait aller avec elle. Il tend les bras et la soulève avec délicatesse pour la passer sur ses genoux. Lilou gémit une fois mais je l'entends se blottir contre lui une seconde après. Quant à moi, je frissonne, privée de sa chaleur.
— Moi, Iris, ma mère et mon père, reprend Ethan d'une voix apaisée.
— Pas votre grande-tante ? noté-je.
— Oh non ! rit jaune Morgane. Dorianne n'est venue chez nous que pour profitez de notre argent. Mais vu ses tendances dépravées, nous n'allions pas lui donner le moyen de faire rentrer le premier inconnu venu dans la maison !
— Dorianne a le code, la détrompe Ethan. Je l'ai vu le taper plusieurs fois. Papa avait dû lui donner dans ton dos.
— Vous vous trompez de piste, nous affirme Morgane comprenant notre raisonnement. Dorianne n'a ni le cran, ni les neurones pour mettre en scène un tel coup... Et elle était sous tutelle financièrement parlant.
Je soupire. Être sous-estimé est une des meilleures armes qu'il existe. Cela dit, elle a raison, elle n'est certainement pas le commanditaire. En revanche, elle peut très bien être le chef que nous cherchons. Tout comme Iris. Cette entrevue aura au moins eu le mérite de rayer Aaron de la liste des suspects s'il n'a pas le fameux code pour entrer et poser le journal.
— Peut-être mais nous n'avons pas d'autres pistes, lui rétorque Ethan. Donc ne nous en veux pas, mais on va suivre celle-ci pour le moment.
— Et ta chère et tendre ? crache Morgane avec venin.
Ethan se fige avant de se lever, ma fille dans les bras.
— Je sors, si vous avez encore des questions à lui poser allez-y. Je vous attends devant la porte.
— Elle t'a arrachée à nous ! s'énerve sa mère en se levant à son tour. Elle t'a entraîné dans ses bêtises et t'a jeté comme une ordure ! Alors oui, excuse-moi bien mais j'ai dû mal à tourner la page.
Mais son fils ne répond pas. Il se dirige vers la porte d'un pas calme et serein.
— Pourris en taule, après tout, c'est tout ce que tu mérites, lâche Ethan sans se retourner.
Il part en claquant la porte derrière lui.
— Et il la défend encore, s'esclaffe-t-elle.
Je pince les lèvres. C'est quoi ces parents qui ne se rendent même pas compte qu'ils appuient sur des plaies à vif ? Je suis impressionnée, mais pas dans le bon sens du terme, par cette femme. C'était une imminente chercheuse, promise à un avenir grandiose, et tout a été noyé en même temps que son mari dans cette rivière. Pourtant même en prison, même en attente de sa condamnation, elle garde son panache et continue d'attaquer. Je pense même que telle une vipère, morte, elle mordra encore. J'imagine que c'est ce qu'on appelle un voilage de face en bonne et due forme. S'excuser, discuter posément avec son fils en sachant que c'est peut-être la dernière fois qu'on a la chance de lui parler reviendrait à accepter son destin tragique. Tu en sais quelque chose, hein toi, Enola... Refuser la mort, refuser de s'excuser, ça te parle. Je souffle et me lève en équilibre précaire sur mes béquilles.
— Merci de vos réponses.
J'aimerais lui souffler un mot d'encouragement, mais aucun ne me vient alors je préfère me détourner. Cette femme n'a pas besoin de soutien, elle est son propre pilier. Il ne tient qu'à son fils qu'elle ne s'effondre pas...
— Attendez ! m'interpelle-t-elle au moment où je fais volte face.
Je ne me retourne pas, mais me fige.
— Ne cherchez pas de commanditaire. Pour moi, il n'y en a pas. Il n'y en a jamais eu.
Je fronce mon sourcil brûlé et tourne la tête vers elle d'un quart de tour.
— Pardon ?
Morgane soupire avant de se lancer.
— J'ai contribué à créer le premier remède contre la première version du dilitírio. Pas celle que les Naufrageurs consomment, celle qui a ravagé le pays il y a une dizaine d'années. Mais quand j'ai appris que l'existence de cette confrérie, j'ai laissé courir le bruit que je travaillais sur un nouvel antidote pour cette nouvelle version.
Quoi ? Tout mon sang se glace dans mes veines alors que Morgane poursuit, indifférente à mon trouble.
— Je n'ai jamais pensé que les deux affaires pourraient être corrélées, mais juste avant mon arrestation, j'avais repris ces travaux, pour de vrai cette fois. Avec ce que je savais, j'ai tenté de mettre au point cet antidote. Et maintenant, je suis ici. J'ai ignoré le premier avertissement qu'ils m'ont envoyé et voici le résultat.
— À qui en avez-vous parlé ? lui demandé-je d'une voix rocailleuse.
— Quelques confrères et ma fille. Mais vous savez ici, tout se sait...
Iris. À nouveau. Toutes les pistes semblent mener à cette fille. Je meurs d'envie de lui demander où elle en était dans l'antidote. Certainement bien proche pour les chefs décident de la mettre sur la touche. Mais je sais que nos discussions sont sans doute écoutées. Ethan misait même là-dessus. Et si je fais mine de m'intéresser à ce sujet, cela risque de remonter à des instances qui ne doivent surtout pas le savoir.
— Nous allons trouver, lui assuré-je. Vous ne mourrez pas.
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