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Chapitre 19 : D'une absence de couleurs

[Guerlain, avec sa couleur. Je ne précise pas les couleurs de chaque personnage, c'est plus implicite, mais vous êtes vraiment attentifs, vous avezremarquer la nuance de certains autres personnages...]

Terrée dans un coin de la mezzanine, Ivanie se pourléchait presque les lèvres. Elle était une prédatrice prête à se repaître de sa proie. Swann n'avait pas le malheur de traîner dans les parages, le choix ne lui retomberait pas dessus. Achille se demandait s'il existait une limite au contrôle d'Ivanie sur les autres.

Une veine battait contre sa tempe, à un rythme fou qui imitait celui du cœur de Sidoine.

Guerlain ouvrit la bouche et Jahia, dont l'attention naviguait entre chaque participant, crut qu'il allait dire quelque chose. Elle l'espéra secrètement, parce qu'il ne craignait pas le ridicule, parce qu'il ne semblait pas craindre Ivanie non plus.

Guerlain referma la bouche après avoir croisé le regard de son ancienne amie.

— Il est pas de ce bord-là, Sidoine, si ?

Les murmures remontèrent le long de l'échine de Sidoine. Ce faible chatouillis agaça ses nerfs déjà à vif. Il s'était ratatiné sur lui-même, comme s'il espérait disparaître dans la matière du pouf.

— Tu en as d'autres, des défis débiles ? s'enquit Jahia, à l'attention d'Ivanie qui se hérissa.

— Autant qu'il en faudra. Alors, Sidoine, tu relèves le défi ? Un baiser, c'est rien, si ? Je t'ai pas demandé de courir à poil dans toute la rue.

— Simon s'en est déjà chargé cet été, pouffa une fille.

— Et les voisins ont failli porter plainte.

Sidoine compta sur cette diversion, mais Ivanie tiqua pour chasser la conversation. Simon ne l'intéressait pas. Il n'était pas là en ce moment et il avait déserté ses pensées à l'instant où il avait quitté son champ de vision. Sans prêter attention à Achille, elle pouvait ressentir un effroi pur à la place où il était installé.

Pourquoi se consumait-il de peur ?

Craignait-il que Sidoine accepte le défi ou craignait-il qu'il décline comme si l'acte seul le répugnait ?

— Guerlain, tu te dévoues ? articula Ivanie.

— Comme si ça allait le déranger.

Guerlain s'épargna la peine de rétorquer. Dans sa bouche, les mots n'avaient aucune consistance. Sa langue, épaisse, imbibée d'alcool, lui était aussi inutile qu'il finissait toujours par le devenir aux yeux des autres. Il parvint tout juste à fendre son visage, un peu trop pâle, d'un sourire.

Le regard de Sidoine glissa jusqu'à Guerlain et ils se considérèrent. Sidoine vit ce sourire tel qu'il était réellement. C'était une décoration, un accessoire de scène, comme au théâtre.

Ce sourire habillait le visage de Guerlain comme un costume.

Autour d'eux, les participants s'époumonaient dans des effusions exacerbées par l'alcool et par la fatigue. C'était si grotesque que Sidoine eut envie de leur hurler de se taire, de la boucler.

Sidoine avait envie d'arracher de sa peau les regards qui s'y attardaient. Il avait envie de s'écorcher la peau pour y décoller les traces laissées par ces œillades. Ses paupières papillonnaient, encore et encore.

Sidoine se leva, Guerlain aussi, un peu maladroitement, comme un pantin dont les fils se seraient emmêlés. Quelle sorte de spectacle renvoyait-il là ? Il était pitoyable, bien sûr, et Ivanie s'en régalait. Tout pour oublier sa propre honte, l'insécurité qui la prenait au cœur et qui lui donnait la nausée.

Sidoine s'avança vers Guerlain qui savait qu'on allait se jouer de lui et l'utiliser comme un jouet avant de s'en débarrasser. Le corps de Sidoine qui se penchait sur lui ne servait qu'à le rappeler. Il n'était pas le genre d'hommes dont on tombait amoureux, mais il se laisserait faire. Parce qu'il ne pouvait rien faire d'autre. Du moins s'y était-il résolu, jusqu'à ce que le visage d'Achille se présente à lui. Ses cheveux bruns, lumineux, étalés sur ses épaules, sa figure d'homme défaite et mortifiée. Il n'en fallut pas davantage à Guerlain pour se dérober.

— Ton choix a pas l'air coopératif, souligna Ivanie, comme s'ils avaient besoin d'une commentatrice. Il y en a d'autres, choisis !

Guerlain souffla à l'intention de Sidoine, dans l'écho provoqué par les paroles de son ancienne amie :

— Désolé.

Sidoine n'était pas désolé. Il était en colère, véritablement, pleinement, pour la première fois depuis près de deux ans.

Et l'explosion serait encore plus violente que ce que Guerlain avait prédit. En réalité, il ne s'était pas excusé pour le baiser, pour le défi, pour cette humiliation en règle, mais pour avoir conclu sans le vouloir cette descente aux enfers. Pour avoir mené Sidoine jusqu'au paroxysme de cette rage sourde. En cela, Guerlain était désolé.

— Non, s'entendit-il articuler.

— Non ? s'étonna un garçon, en fronçant les sourcils. Non, t'es pas assez bourré pour embrasser un autre mec ?

— Non, il ne t'a pas demandé ton avis, marmonna Achille, entre ses dents serrées.

— Non, il le fera pas, claironna Ivanie.

Elle avait repris ses esprits. La manière dont Guerlain s'était dérobé, puis la colère Sidoine qui montait comme la marée, l'avaient privée de son répondant quelques secondes. Lorsqu'elle s'attardait sur les orbes fuyants de Sidoine, elle voyait une falaise rongée par l'érosion et la chute qui s'étalait à ses pieds. En dessous, le gouffre était au moins aussi profond que celui qu'Ivanie ignorait depuis longtemps.

— Non, la partie est terminée.

Sidoine avait planté ses yeux verts dans ceux d'Ivanie pour lui adresser ces mots. Presque pour les lui intimer. Il enjamba ensuite un pouf abandonné sur le sol, manqua de bousculer la maîtresse du jeu, et s'en fut sans plus de cérémonie.

Contrairement à ce que Guerlain avait imaginé, il n'exploserait pas sous leurs yeux. Le maître des lieux ne pouvait pas non plus le laisser seul, alors il chercha à désigner celui qui l'accompagnerait. Celui que Guerlain libérerait du joug d'Ivanie.

— On dirait que les enfants sont allés se coucher, commenta Ivanie.

Guerlain hésitait : Jahia ou Achille ? Jahia serait plus appropriée, d'autant plus qu'elle avait les épaules pour tout supporter. Guerlain se savait en construction, ou en déconstruction, comme chaque personne qui l'entourait. C'était le propre de l'adolescence. Jahia, elle, semblait sûre de ce qu'elle était, pleinement accomplie, déjà adulte. Achille ne l'était pas encore, il avait mis un terme à ce processus et le choix de Guerlain se porta sur lui.

Il se versa un verre d'alcool, peut-être ce qu'il restait du rhum arrangé de son père, et en prépara un second tandis qu'Ivanie poursuivait, imperturbable :

— Passons aux choses sérieuses.

Guerlain se planta devant Achille, lui tendit le verre, et le renversa malencontreusement sur son t-shirt. Il n'eut alors qu'à s'épouvanter, à s'excuser quelque fois et à proposer à Achille de changer de haut dans la salle de bain. Ivanie était dubitative, mais elle laissa le garçon lui échapper sans un mot, les ongles plantées dans ses paumes et un sourire crispé aux lèvres. Ce n'était pas bon signe, mais personne ne s'y attarda.

La partie était finie.

Pour Achille et pour Sidoine, du moins. Guerlain alla se rasseoir, l'air de rien, en adressant un clin d'œil appuyé à l'attention de Jahia. Elle esquissa une moue excédée et Ivanie établit que le jeu ne s'achèverait pas ainsi, pas sur cette note-là. Ce serait le terme de la première manche.

Ou du premier acte, du point de vue de Guerlain.

***

Sidoine prit une profonde goulée d'air. Il lui fallait mettre autant de distance que possible entre lui et cette maison. Son ombre imposante, monstrueuse, coulait sur lui, et il fut aveuglé par l'obscurité nocturne l'espace de quelques instants. Ses jambes flageolaient et même s'il l'avait souhaité, il n'aurait pas pu aller plus loin.

Il trébucha sur le sol pourtant égal du jardin. Il ouvrait et refermait ses poings, dans un réflexe compulsif. Sans savoir ce qu'il essayait de retenir ou de repousser.

La nuit, tout autour, ne lui avait jamais semblé aussi hostile, aussi inhospitalière. Obernai se couchait à ses pieds, si paisible que Sidoine fut tenté de hurler à s'en briser les cordes vocales. Assez fort pour éveiller la ville endormie. Assez fort pour qu'elle cesse enfin d'ignorer sa peine.

La solitude resserra ses bras autour de ses épaules. Il prit quelques inspirations heurtées, imprimées par une respiration chaotique. Planté au milieu du jardin délimité par une haie haute et parfaitement taillée, il s'imposa une complète immobilité. Il sentait monter la panique par vagues et un vertige lui tomba dessus avec une violence inouïe. Il y eut ensuite la nausée, la peur et, par-dessus tout, la colère.

Au moins aussi monstrueuse qu'Ivanie savait l'être.

Au moins aussi colossale que l'était son désir de la museler.

Sa volonté n'était plus à la hauteur. Ce soir, Sidoine avait franchi un point de non-retour.

Et il était loin d'être le seul.

Des pas étouffés par l'air humide bruissèrent non loin de Sidoine qui se braqua. Il avala sa colère jusqu'à l'indigestion, s'étrangla avec l'un de ses filaments. Achille tâcha de se faire discret jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il avait été repéré. Alors, il appela :

— Sidoine ?

— Reste où tu es.

La voix était coincée au fond de la gorge de Sidoine qui avança d'un pas chancelant. Toute cette colère, Achille ne la méritait sans doute pas. L'histoire semblait sur le point de se répéter. Sauf qu'il n'y avait pas de rivière dans laquelle Sidoine pouvait pousser Achille et qu'Achille avait appris la prudence. Il ne se jetterait pas les yeux fermés dans la gueule du loup.

Sous son nez, il y avait Sidoine et, à l'intérieur, la bombe à retardement indiquait un décompte proche du terme.

— Sidoine, répéta Achille.

— Elle sait.

Un sanglot sec remonta jusqu'à ses lèvres tremblantes. Il répéta :

— Elle sait quelque chose. Ivanie sait pour moi, hein ? Tu lui as dit ? Ou peut-être Jahia ? Non, pas elle. Toi, alors. Tu lui as dit ?

Sidoine se répondait à lui-même. Plutôt que de lui confirmer qu'il n'avait pas parlé de lui à Ivanie, car c'était bien d'elle dont il parlait, Achille posa une question, d'une voix tempérée, ferme et calme :

— Qu'est-ce que j'aurais pu lui dire, d'après toi ?

— Tu sais très bien. Elle m'a demandé d'embrasser un garçon.

Sidoine ne criait pas, mais ses gestes brûlaient d'une violence mal contenue. Si Achille avançait ne serait-ce que d'un pas, il s'y frotterait à nouveau. Peut-être qu'un coup partirait. La tension qui paralysait les membres de Sidoine ne demandait qu'à jaillir.

— Et tu n'as pas voulu.

— Non !

Achille se força à sourire, même si ses lèvres s'écorchèrent en dévoilant ses dents régulières. Le refus de Sidoine ne l'avait pas surpris. Il s'y était préparé, mais l'espace d'un instant, il avait cru qu'il accepterait de voler un baiser à Guerlain. Le dégoût qui avait défiguré son visage avait marqué Achille et il n'était plus sûr d'avoir encore envie de s'approcher de Sidoine. Il ne supporterait pas que son ancien ami lui adresse un tel regard.

— Elle ne pouvait pas te forcer, énonça Achille, en signe d'apaisement. Tout le monde a vu que...

— Ça me dégoûtait, lâcha Sidoine. Rien que l'idée de devoir faire... ça, j'aurais pu gerber.

Sidoine prononça ces paroles les yeux plantés dans ceux d'Achille. Il n'avait pas suffisamment bu pour être ivre. L'alcool avait juste servi à aiguiser sa fébrilité et l'avait rendu trop honnête. C'était ce qu'Achille craignait et la déception se devina dans la manière dont ses épaules retombèrent.

— C'est pour ça que tu es revenu vers moi, murmura Sidoine.

— Quoi ?

— Dis-moi pourquoi tu es revenu vers moi.

— Parce que tu étais l'un des seuls visages que je reconnaissais.

Achille avait été seul, au cours de l'exil que sa mère lui avait imposé et même après, lorsqu'il avait travaillé aux côtés de son oncle, avant de décider de réintégrer le système scolaire. Cependant, la réponse qu'il venait de servir n'était pas exacte et la voix de Sidoine s'éleva :

— Tu mens !

Achille conserva un silence prudent, en guise de compromis entre le mensonge et une vérité qu'il préférait garder pour lui. Il avait toujours à l'esprit le regard de dégoût de Sidoine.

Ce regard-là écrasait la plus petite trace de courage.

— Tu n'as pas changé, asséna Sidoine. J'avais raison, tu n'as pas changé.

— Tu le savais depuis le début, rétorqua Achille, avec un pâle sourire.

La tête de Sidoine bascula vers le ciel. Les nuages y occultaient les étoiles. De là où il se trouvait, l'obscurité était totale. Il prit une grande inspiration et une émotion jaillit des tréfonds de ses entrailles.

Elle monta en flèche dans le noir.

— Tu aurais pu lui dire que je suis ce genre de personnes, moi aussi.

Qu'il était de ce bord-là.

Et que, de fait, les insultes qui pleuvaient sur Guerlain ne l'épargnaient pas.

Achille se jeta sur Sidoine à l'instant où le contrôle lui échappa. La maîtrise qu'il avait assise sur sa colère lui glissa entre les doigts et Achille eut tout juste le temps de le couvrir de son corps pour étouffer l'explosion.

Ses bras se refermèrent sur Sidoine. Un cri s'éleva dans le calme nocturne et le silence qui suivit n'en fut que plus vertigineux, lorsque les échos du hurlement eurent disparu.

Achille incita Sidoine à s'asseoir. Sidoine s'écroula, s'effondra comme une construction faite de pièces, de cases, de boîtes. Remplies de ses obsessions pour le contrôle, mais vides.

Vides malgré tout.

Sidoine s'effondra, pièce par pièce, et Achille cessa de bouger. Les soubresauts l'ébranlaient à peine et pressé contre la carcasse éparpillée de Sidoine, il formait le dernier vestige de sa solidité. La seule case qui avait survécu à l'explosion. La case spéciale qui portait le nom d'Achille et qui ne possédait aucune couleur. C'était tout ce qu'il restait à Sidoine. Cela, et le corps de cet adolescent, qui recouvrait le sien comme pour le protéger. Pas vraiment des autres, mais surtout de lui-même.

En sa compagnie, la nuit semblait un peu moins monstrueuse.

La peur un peu moins grisante.

Et la colère lui parut un peu moins fatale.

Sidoine éclata en sanglots.

Vous l'aurez compris : pas de bisous avec le jeu à boire. Je ne voulais pas pousser le vice jusque là et ça a, de toute façon, eu assez de conséquences pour ne pas en ajouter. 

Je précise, au passage, que j'ai envoyé ma participation au concours Hachette pour Mosaïque. Il ne reste plus qu'à croiser les doigts, très très fort. J'ai envie d'y croire, sur ce coup-ci. 

Je vous souhaite une agréable semaine !

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