La montre de Simon sonna. Il démarra sa voiture. Il emprunta le boulevard et arriva gentiment jusqu'à une première intersection. Au loin, il aperçut la voiture de son client, un homme d'un certain âge dans une Rolls Royce marron. Pile à l'heure, comme tous les matins, son client allait au golf. Trop facile.

Simon ne perdit pas de temps et emprunta une rue pour doubler son client et le rejoindre un peu plus loin, il ne voulait pas gâcher la surprise.

La petite rue était déserte, bien dégagée. Au feu, perpendiculaire à sa rue, Simon aperçut à nouveau la voiture de son client, arrêtée au feu. Simon se lança, pied au plancher, pneus crissèrent, il prit de l'élan. Dans sa rue, le feu passa au rouge, feu qu'il grilla sans ménagement. Continuant sur sa lancée, concentré, il maintint son allure à pleine vitesse. Dans la rue de son client, le feu passa au vert, et sa Rolls démarra tranquillement.

Alors que le client s'engagea dans l'intersection, un vrombissement lui parvint : c'était Simon. Le client vit le bolide foncer sur lui et se figea, il n'eut le temps que de sourire et de prononcer le mot « enfin » avant de se faire percuter de plein fouet.

Comme au ralenti, les vitres de la Rolls éclatèrent en mille morceaux, un bruit assourdissant de tôle froissée résonna dans la rue. Simon n'avait pas à un seul moment essayé de freiner. La luxuseuse berline s'éleva dans les airs, projetée par le choc. Le client, non attaché, s'envola littéralement de son siège et traversa la fenêtre de sa voiture. L'homme resta coincé dans sa portière, la colonne vertébrale brisée. Une mort courte et spectaculaire. Le coup de l'accident de voiture, c'était leur meilleure vente, Simon ne s'en lassait pas.

Une fois les deux véhicules stabilisés, Simon détacha sa ceinture et sortit de sa voiture, le nez en sang et le souffle court. Habitué aux collisions, il retrouva vite son équilibre. Heureusement, rien de cassé, sa combinaison renforcée l'avait une fois de plus sauvé.

Simon approcha de la Rolls encore fumante, faisant craquer sous ses pieds le verre brisé. Calmement, il s'approcha de son client et prit son pouls. Il était mort. Contrat rempli. De sa veste, Simon sortit un appareil photo instantané et, devant les témoins qui se rassemblaient là, prit une macabre photo de la victime. Puis, il sortit de sa poche intérieure un journal et un papier, agrafa le papier, la photo et le journal avant d'annoncer sa prestation :

- Bonjour, je suis Simon, tueur sur contrat chez AME. Monsieur Roger Leclerc ici présent, a souscrit à une prestation d'accident de voiture mortel. Voici son contrat, dit-il en brandissant son papier. La police va venir sécuriser le corps ainsi que les effets personnels de M. Leclerc. Merci de ne pas déranger leur travail et de circuler. Si vous aussi vous êtes intéressés par nos prestations, consultez notre site internet et offrez-vous le plus beau dernier jour de votre vie.

Les badauds qui s'étaient rassemblés autour de la voiture restèrent stoïques, aucun ne se soucia de du conducteur, nul ne se précipita, aucun ne s'offusqua. Presque lassés, tous restèrent là à regarder le défunt avec une certaine jalousie. Vu la voiture, le vieux riche n'était déjà pas à plaindre, mais ce chanceux avait en plus eu les moyens de se payer les services d'un professionnel et était mort. Quelques spectateurs demandèrent une carte à Simon, et tous finirent par passer leur chemin, visiblement habitués et aigris. Pour eux, la vie continuait, et on était lundi.