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16

Adam sortit rapidement de son bain et s'habilla. Il se rua à la porte, faillit trébucher de manière ridicule. Il en perdit tout de même son petit orteil contre le meuble de l'entrée. Un vague « Putain ça fait mal ! » lui échappa. Il ouvrit enfin sa porte d'entrée et la vit. Enfin, il vit d'abord ses longues locks qu'elle ne quittait jamais et sa collection de colliers qui tintaient autour de son cou.

— Il était temps, je pensais que tu n'habitais plus ici. Heureusement que ta voisine m'a dit que tu étais là, j'allais partir.

Juliette entra sans attendre de réaction de son aînée. Adam fut surpris de la voir là, dans son appartement, son cocon. La surprise quitta son visage quand il se rappela que c'était le genre de Juliette, de se pointer sans prévenir. Elle venait toujours à l'improviste

, prenait un café et repartait une dizaine de minutes plus tard en prétextant qu'elle était pressée. Cependant, elle ne venait jamais plus d'une fois par mois. Une fois, c'était déjà trop. Mais en ce 30 décembre, ce fut la deuxième fois qu'Adam vit sa sœur en moins d'une semaine d'intervalle. Quelque chose cloche.

Adam se positionna face à elle, les sourcils froncés tandis qu'elle lui souriait doucement. Trop de compassion, trop de sourire. Trop de compassion... Il inspira un grand coup et se lança.

— Ne mâche pas tes mots, sois la plus honnête possible.

— ...D'accord ?

— Est-ce que quelqu'un est mort ?

Les sourcils fins de Juliette se froncèrent à leur tour. Elle alla dans la cuisine pour se préparer un café. Elle revint sans un mot, deux tasses en main, tendit l'une d'elles à son frère. Tous deux restèrent en silence, se regardant sans rien se dire. Chacun réfléchissait de son côté.

— Je venais juste voir comment tu allais.

Adam fut encore plus confus. Il ouvrit la bouche, aucun son n'en sortit. L'odeur du café lui parvint aux narines, il but une gorgée.

— Je vais bien.

— Vraiment ?

— Oui, vraiment.

— Mais tu es...

— Je vais bien. Je ne vois pas pourquoi tu t'inquiètes.

— Je comprends pas pourquoi tu te braques.

Adam but une autre gorgée, puis se leva. Les yeux de Juliette suivaient les actions de son frère, le regardaient s'éloigner d'elle.

— Je vais bien, je t'assure.

— Même après les remarques d'André ?

Il se figea. Il entendit Juliette se lever derrière lui et s'approcher. Il entendit la tasse en porcelaine se poser sur la table, les pas de Juliette résonner dans son appartement.

— Ça va vraiment ?

Non, ça n'allait pas. Ça n'allait pas bien du tout. Principalement après les remarques de son oncle. Il avait réussi à le faire douter. De tout. De sa relation, de sa carrière, de lui. Encore. Encore et encore.

Adam détestait André. En réalité, il ne le détestait pas vraiment. Pas du tout, même. C'était ça qui le tourmentait. Le fait de ne pas réussir à le haïr la cause de ses maux. André restait la seule figure paternelle qu'il ait jamais eue, le seul qui lui servait d'exemple. Était-ce sa faute si son seul exemple n'était pas à suivre ? André était le seul qui pouvait faire basculer la balance, le seul qui pouvait lui faire changer d'avis sur n'importe quoi. Il demeurait son modèle, un malheureux modèle.

Adam se rappellerait toute sa vie de la façon dont André le traitait. Il se rappellerait cette violence. Ces violences. Il se rappellerait les commentaires, sur son corps, sur sa vie. Il se rappellerait tout. Comme un vieux film qu'il se repasserait inlassablement en tête.

L'hyperphagie, il l'a rencontrée à ses douze ans. Âge où il fit la connaissance de la mort. Cette fin à laquelle on ne peut échapper. Dont ses parents n'ont pu échapper. Quand un oncle vous empêche de pleurer, de montrer vos peines, que vous reste-t-il ? Que vous reste-t-il quand pleurer, ce n'est « pas pour les hommes, les vrais. » ? Adam mangea. Quand il était triste, quand il était en colère, il mangeait. Heureux ? Manger. S'ennuyer ? Manger. Pas d'émotion du tout ? Manger. Dès qu'il avait le malheur de ressentir quelque chose, Adam mangeait. Et plus l'émotion était grande, plus Adam mangeait. C'était comme ça. André n'allait pas l'empêcher de manger... Pas au début.

Quand le « problème » d'Adam commença à se voir, qu'il prenait de plus en plus de poids, André intervint. Pas de la bonne façon. Non, pas du tout de la bonne façon. Il intervenait en lui pinçait le ventre, « ça, c'est pas bon, c'est trop gras ». Quand il lui faisait des assiettes plus petites ou qu'il venait par jeter les aliments gras de la maison « pour pas que tu te jettes dessus comme un affamé ».

Adam se rappellerait la salle de sport, et André qui le faisait travailler jusqu'à ce qu'il n'ait plus de force. Il se rappellerait le pseudo-coach bien-être qui clamait haut et fort que, plus on transpire, plus on perd ! Transpirer, c'est perdre. Adam intégra peut-être trop bien cette idée. Il perdit beaucoup en peu de temps. Puis reprit tout, rapidement.

Il se mit à manger en cachette pour évacuer la pression du sport. Il était lui-même. Puis, il réalisait. Il était lui quand il mangeait, il finissait par se dégoûter et retourner au sport.

André finit par perdre son travail, se mis à boire et prit du poids. Toutes les choses qu'il imposait à Adam, lui-même ne les faisait pas. Adam devait garder un poids correct, Adam ne devait pas exprimer ses émotions, Adam devait rester fort... Et quand le jour vint où Adam lui dit enfin ses quatre vérités, André nia. Non, il ne lui imposait pas tout ça, il lui conseillait. C'était Adam qui les faisait, pas lui. Il ne l'obligeait pas, il le conseillait. Lorsqu'Adam remit ce sujet sur le tapis quelques années plus tard, André répondit plus brutalement. Adam perdit un bout de son âme quand il entendit son oncle prononcer ces mots. « Ça fonctionnait que pour toi, ça. Je n'allais pas te laisser dans ta merde, et j'ai bien fait de te conseiller. Lila n'aurait jamais posé les yeux sur toi sinon. ».

— Adam ?

La voix enrouée de sa petite sœur le ramena à la réalité. Où était-il parti si longtemps ? Juliette le regardait intensément, attendant peut-être un geste, une réaction de sa part. Quelque chose, peu importe, même un seul mot. Et, tandis que Juliette commençait à perdre espoir d'en savoir plus sur son frère, il parla enfin, exprimant les maux qu'il avait gardés sur son cœur.

— Tu as raison, je vais pas bien. Pas bien du tout.

— Dis-moi, raconte-moi, chuchota-t-elle de peur de le froisser.

Juliette était la seule qui connaissait toutes les facettes du trouble de son frère. La seule à connaître tous les détails de la mécanique, la seul à connaitre tous les rouages. Elle en voulait terriblement à André. Juliette avait vu son frère sombrer, se relever, retomber, puis aller mieux et rechuter. Encore et encore. À chaque fois, elle se sentait impuissante, lâche. Le voyant là, les yeux mouillés, elle se sentit coupable. Pourquoi passait-elle son temps à éviter la seule vraie famille qui lui restait ? Pourquoi devait-elle être aussi égoïste ? Pourquoi partait-elle à chaque fois qu'on lui criait « à l'aide » ?

— Je n'arrête pas de douter de tout. De... De ma carrière, de Lila, de moi. J'ai honte, putain. Honte de réaliser que j'ai encore rechuté. Mais encore plus honte de réaliser que cette fois, j'y arriverai pas, Juliette.... J... J'ai l'impression de.. de devenir fou ! Je... Je passe mon temps à m'engueuler, à... C'est ridicule... Je sais plus quoi faire. Je sais plus... Je... Putain ! Il m'énerve ! À Chaque... À chaque putain de fois où je vais bien, il est là, à me rappeler que... Que je suis qu'une sombre merde...

Juliette se leva et revint avec un verre d'eau. Elle le tendit à son frère qui oublia presque comment prendre un verre dans ses mains. Quand il s'en rappela enfin, il tendit la main, prit le verre froid sous sa paume et bu une gorgée. Adam se mit à secouer la tête de gauche à droite, de droite à gauche.

— Non. Non. C'est trop facile de le blâmer pour mes torts. Trop facile. C'est trop facile de lui mettre la faute sur le dos. La vérité, c'est que j'allais déjà mal avant Noël. Bien avant Noël. J'ai... J'étais déjà en train de lutter contre moi, de me battre avant les fêtes. J'étais déjà là, à lutter pour éviter de faire une connerie. Je te jure... j'ai l'impression de sombrer dans la folie. Je passe mes putains de journées à lutter contre un ennemi invisible. Je passe mes journées devant le frigo, à l'ouvrir et à le fermer. Ou à aller dans ma chambre, sur le balcon, pour éviter de voir mon frigo, pour m'aérer l'esprit. Puis, je m'ennuie et je retourne faire un petit coucou au frigo. Et... Et là je... Je me torture comme un con. Je l'ouvre et je referme, je l'ouvre encore juste pour regarder à l'intérieur. Et euh... Et je fais ça une dizaine de fois, comme un con, avant de... Avant d'échouer et de prendre le premier truc qui me passe sous la main. Et... Et là je mange. Et je mange. Puis, je me rends compte que c'est trop tard. J... J'arrive plus à m'arrêter. Je prends un autre truc et je le bouffe, j'ouvre le frigo encore une fois et hop « pourquoi pas le vider ? », et je vide.

Lorsqu'il osa enfin regarder sa sœur dans les yeux, une larme coula sur sa joue. Adam but une autre gorgée d'eau, désormais tiède. Regardant à nouveau Juliette, il continua :

— Tu sais... J'ai déjà hésité à pas faire les courses. Juste pour éviter de manger comme un porc. J'ai... J'ai hésité à ne prendre que le strict minimum. Histoire de pas sombrer, mais de quand même rester en vie.

Juliette l'écoutait déverser son désespoir en silence. Elle savait exactement ce que ça représentait pour son frère. Elle l'avait vu plus d'une fois en crise. Elle était la seule. La seule qui avait ce droit-là, ce droit de le voir aussi vulnérable. Et, jusque-là, dans son appartement niçois, Adam n'avait jamais mis de mots sur ce qu'il ressentait. Juliette l'avait toujours vu à l'action, mais ne l'avait jamais entendu prononcer son mal-être. Jamais, pas une seule fois.

Adam se frotta le visage. But à nouveau. Recommença.

— Hier, c'était le 29. Jour de fermeture annuelle du « Clémence ». Guillaume a fait la distribution des derniers produits. Dans sa bonté, il s'est dit qu'il m'en donnerait un peu plus pour que je n'aie pas à faire les courses, pour que je puisse me reposer. J'ai pas attendu dix putains de minutes ici avant de tout bouffer comme un porc. J'ai défoncé six putains de boîtes en moins d'une heure. Et j'ai tout recraché parce que j'ai trop mangé. La seule chose que j'ai trouvée à faire pour aller mieux, c'était de remplis à nouveau mes placards. Ça fait pitié, hein !

— Dis pas ça de toi. Tu ne fais pas pitié. Pas du tout.

— Si...

— Non, Adam ! Tu es mal. Tu peux pas faire pitié parce que tu es mal ! Tu ne vas pas non plus te blâmer parce que tu ressens des émotions. Tu es humain... Et, si manger c'est la seule chose qui t'aide à aller mieux, alors voilà ! Si tu gères de cette façon, c'est pas grave.

— C'est justement ça le problème. Je gère rien du tout, Juliette. C'est ça le putain de problème. Je suis en train de me perdre. Ce n'est pas vraiment ce que j'appelle gérer.

— Je suis désolée. Sincèrement.

— T'en fais pas...

Juliette approcha sa main de celle de son frère, essaya de lui prendre. Adam recula.

— Est-ce que je peux faire quelque chose pour t'aider ?

— Je pense pas. Enfin, pas vraiment. Je sens que c'est une merde que je dois gérer tout seul.

— Je sais que tu n'as pas du tout envie que je le dise, mais je pense que tu...

— Je n'irais pas chez un psy. Je peux pas. Ça s'est mal passé les deux premières fois, je vois pas comment ça pourrait fonctionner maintenant. Je peux pas m'infliger ça encore une fois. J'arriverai pas à ...

— Alors quoi ? Tu comptes faire quoi ? Attendre que ça passe ? Attendre que la solution te tombe du ciel ? Adam, tu peux pas te soigner tout seul... Je suis pas en train de dire que tu y arriveras pas, bien au contraire. Je sais que tu es fort, courageux... Mais je pense qu'un petit coup de pouce te ferait pas de mal.

— ...

— Écoute. Si un psychologue, ce n'est pas une option pour le moment, je pense qu'écrire t'aidera.

— Écrire ?

— Oui !

Adam se leva, prit les deux tasses ainsi que le verre d'eau vide et entreprit de les laver.

— Je vois pas ce que je pourrais écrire, cria-t-il de la cuisine.

Juliette se leva à son tour. Elle s'appuya sur le plan de travail.

— Tout ce qui te passe par la tête. Qu'est-ce qui te rend triste, ce qui te rend heureux... Comment tu te sens pendant tes crises, ce qui pourrait les causer... Tout ça.

Il ouvrit la bouche pour répondre, mais un appel les coupa. Juliette s'excusa et s'éloigna pour répondre. Adam en profita pour terminer sa vaisselle, pour réfléchir.

— C'était une... amie. Je dois y aller, mais je crois en toi. Je sais que tu peux t'en sortir. Ça ira, t'en fais pas.

Adam acquiesça d'un hochement de tête. Et, tandis qu'il raccompagnait sa sœur à la porte, il eut envie de la prendre dans ses bras. Brève accolade à l'entrée, où la porte déjà ouverte laissait place à une Armande curieuse. Adam referma rapidement sa porte, les pas de sa sœur s'arrêtèrent sur le palier. Armande l'avait interceptée.

D'un pas las, il se traîna jusqu'à son salon où il prit place sur son fidèle canapé brun. Il resta là, assis dans le silence. Le soleil terminait doucement sa journée de travail, il remballait ses affaires, laissant des lueurs orangées entrer dans l'appartement d'Adam. Reparler d'André l'avait remué. Il ne s'imaginait pas que repenser à tout le mal que son oncle lui avait fait lui causerait encore du tort.

Des frissons le parcoururent. Alors, il se leva et entra dans sa chambre en évitant son miroir. Il attrapa un gros pull qu'il enfila. Il sortit de sa chambre, chemin inverse jusqu'à sa place fétiche, le canapé. Mais il ne put s'empêcher de faire demi-tour. À nouveau devant son miroir, Adam jeta un coup d'œil. Images enfouies qui réapparaissaient sans crier gare. Lui à 12, 15, 17 ans. Lui avant. Lui et son corps trop gros. Il se revit comme avant. Comme la grosse merde que je suis. Son image restait figée dans le passé. Seule chose qui différait entre toutes ses versions, c'était son regard. Il était éteint.

Adam s'approcha davantage de son miroir, souleva son pull. Ses yeux se fermèrent brusquement tandis que son ventre se reflétait. Il passa sa main sur sa peau, là où elle était distendue. Il avait perdu du poids trop vite, son corps n'avait pas eu le temps de s'adapter. Il tira un peu dessus ; on dirait de la pâte à pain, ça me dégoûte. Il abaissa son pull, claqua la porte de sa chambre. Assis à nouveau sur son canapé, son ventre gargouilla. Une nouvelle crise l'attendait. 

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