Rendus à eux-mêmes
Alors gens de Wattpad.
Je mourais d'envie d'écrire cette nouvelle, et j'avais besoin de ça pour me remettre un peu dans le bain après deux bonnes semaines d'artblock bien chiantes (je repars dans une phase de larve lorsque je bosse pas et c'est très pénible), mais je préfère vous prévenir tout de suite, c'est du spoil de niveau oméga.
On parle d'une scène juste avant le combat final du tome trois des Chroniques, donc de la conclusion de la saga principale (j'ai des idées pour des prequels et des sequels mais ce sera pas pour tout de suite), donc vous risquez de vous prendre un concentré de spoil ultime dans votre grande gueule. Enfin, ce bouquin est déjà une machine à spoil, certes, mais bon. Dernier tome des Chroniques, c'est pire encore que ma dernière nouvelle sur se sixième tome de Lysara.
Donc vous êtes prévenus. Si vous lisez, c'est totalement à vos risques et périls.
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Est-ce qu'on pouvait dire qu'Altera était tombée ?
Pas vraiment.
Elle avait simplement été rendue à elle-même.
Après dix ans sous un joug imbécile, une sorte d'Etat qui ne conviendrait vraiment qu'aux aziliens, le dernier coup que venait de porter Deimos à la tête de cette configuration absurde marquait la fin d'années qui ne leur convenaient pas. Le peuple allait pouvoir revivre ses traditions et sa culture, les chamans seraient libres, et le prix à payer paraîtrait peut-être immense aux yeux de son peuple, mais à ses yeux, ce ne serait jamais qu'un bonus. Ce qui lui semblait bien. Il avait rempli sa part du contrat.
Enfin, pas tout à fait. Mairù lui avait demandé expressément de garder Altera sous contrôle jusqu'à ce que lui et ses alliés aient repris Necrima. Ce ne serait pas long ; quelques heures tout au plus, voire quelques jours si le combat s'éternisait. Mais il devrait se réfréner d'annoncer la bonne nouvelle au peuple, pour l'heure. Ah, là là. Qu'est-ce qu'il ne ferait pas pour ses beaux yeux, franchement. Un petit rire s'échappa de ses lèvres alors qu'il fixait les jumeaux, les seuls à avoir survécu lors de leur raid sur le Temple d'Emotion, la base de Phobos. Ces derniers ne semblaient pas blessés, mais il savait que les apparences étaient trompeuses : Il les avait vus encaisser bien plus de coups que lui. Simplement, eux pouvaient se le permettre, grâce à leur lien familial avec Baku Claro, qui leur avait fait don d'une régénération plus ou moins absolue. Quels veinards, tout de même.
Son rire s'éteignit sans que les jumeaux, trop occupés à inspecter le temple, ne l'entende, et il se pencha sur le cadavre de sa grande sœur, étendu sans tête sur le sol. Elle avait les bras en croix, et sa tête roulée au sol affichait une expression proche de la panique de celui qui sait qu'il va mourir. Sans doute le jugerait-on s'il avait prononcé ces mots à voix haute, surtout les jumeaux qui étaient très proches ; mais il avait pris plaisir à porter le coup fatal. Son épée en travers de la gorge de Phobos avait représenté l'accomplissement de plus de trente ans de souhaits de vengeance, dissimulés derrière une adoration artificielle. Trente ans, c'était long. En trente ans, il pouvait se passer tellement de choses. D'ailleurs, il s'était passé tellement de choses. La chute puis l'apogée d'Azilis, l'apogée puis la chute d'Altera. De nouvelles rencontres, le monde qui s'éteignait. Et lui qui regardait, à côté, jusqu'à ce que Mairù le libère du sort et le protège contre tout autre acte de cette sorte. Il lui serait éternellement redevable de lui avoir fourni une arme et une occasion, mais bon, il ne semblait pas homme à se souvenir des dettes de vie. Alors l'appui du peuple alterin tant qu'ils vivraient tous deux suffirait. Le petit Hazaël allait devoir reconstruire son royaume, de toute façon.
Il sourit, et étendit la main. Ses doigts se refermèrent sur les cheveux de Phobos et il souleva sa tête au niveau de la sienne, avant de sourire à son visage sans vie.
« — Et qui est l'échec maintenant ? »
Sans doute avait-il aimé sa sœur, à une période. Lorsqu'ils étaient encore petits, et innocents. Maintenant, il n'y avait plus sur son visage que l'expression d'une intense haine et satisfaction. Phobos ne répondit pas. Comment aurait-elle pu ? Elle avait rejoint leurs parents dans l'autre Lieu, ne laissant derrière elle qu'un corps sans vie et des terres exsangues. Il soupira. Ça allait encore être à lui de réparer les dégâts.
Un vrombissement attira son attention sur le trône que sa mégalomane de sœur s'était attribué dans le temple d'Emotion, sans doute autrefois le trône du dieu avant qu'il ne meure. Apparemment, quelque chose y fonctionnait, quelque chose que les jumeaux avaient négligé de vérifier. Il se dirigea vers la source du bruit, la tête de sa sœur toujours en main, avant de remarquer sur le coussin gris une sorte de plaque de verre reliée à un appareil. C'était elle qui émettait le vrombissement. Rien de dangereux, visiblement : C'était un de ces appareils de communication qu'ils utilisaient, à Necrima, lorsqu'ils cherchaient à communiquer entre personnes ne disposant pas de la très particulière magie des voyageurs et de l'espèce de montre de communication. Phobos avait peut-être oublié de mettre fin à la communication avant que le combat ne débute, ou bien peut-être n'en avait-elle surtout pas eu le temps. La deuxième hypothèse était la plus probable.
Titillé par une pointe de curiosité, il récupéra l'appareil avec sa main libre, et appuya sur l'affichage vidéo. Un visage blafard qu'il connaissait bien apparut alors à l'écran, l'air surpris de reprendre l'appel maintenant.
Akira avait sans doute décidé d'adopter son apparence masculine aujourd'hui, vu que Deimos pouvait détailler la courbe dure de sa mâchoire et la forme plus angulaire de son visage. Ses cheveux lui retombaient autour des yeux dans un motif presque artistiquement désordonné, et il avait encore plus de cernes que lorsqu'ils s'étaient vus, dans la maison des Castellaño-Perez la première fois : Ils creusaient son visage et se détachaient clairement sous l'onyx de ses prunelles. Il semblait à bout. Un moment, Deimos éprouva une petite pointe de culpabilité à l'idée de ce qui allait lui tomber dessus, bien vite dissipée. Après tout, c'était un peu de sa faute, si Phobos avait transformé Altera en Etat fédéré. Même si ce n'était pas son intention, il avait bel et bien laissé la bride sur le cou à son... associée ? Amie ? Amoureuse peut-être. Akira était un être tellement dur à cerner, même dans ses relations.
Voyant le visage de Deimos se détacher sur son propre écran de communication, les traits d'Akira se détendirent imperceptiblement, avant qu'il ne se rende compte de l'incongruité de la situation, et ne hausse un sourcil surpris.
« — Deimos ? On te croyait disparu... Je suis content de te voir, mais tu pourrais me dire où est passée ta sœur ? J'ai un mauvais pressentiment... »
Oh, à quel point il avait raison de ressentir ce pressentiment. En ce moment-même, Mairù, Baku, Selene et Hazaël devaient être en route pour son palais, prêts pour l'acte final. Il ne savait pas comment tout cela allait se terminer, mais une chose était sûre, Akira ne regagnerait jamais le contrôle total des Quatre dans ces conditions. Même s'il tuait Hazaël, le peuple se retournerait contre lui si ça fuitait. Et Selene était désormais plus que capable de l'achever. Davar luttait à leurs côtés. Hezur était entièrement détruit. Non, ce serait un tournant dans l'histoire d'Hindiale. Bon ou mauvais, Deimos attendait de voir. Il haussa les épaules.
« — Je vais très bien, merci. Par contre, si tu cherches Phobos... »
Ça le faisait presque rire. La tête coupée pesait lourd dans sa main, et une euphorie qu'il n'avait pas ressentie depuis longtemps le remplissait de l'envie de jouer avec juste sous le nez de l'Empereur. Mais il se contenta de faire simple, et releva sa main avec un petit sourire qui, à n'en pas douter, allait faire terriblement peur aux jumeaux s'ils le voyaient.
« Je crois que tu arrives un peu trop tard. »
Silence. Akira écarquilla les yeux, focalisé sur le regard sans vie de sa dernière associée. Puis, sur le visage satisfait de Deimos. Puis, de nouveau sur la tête sans corps de Phobos. Avant enfin, de comprendre ce qu'il venait vraiment de se passer. Ce qui était en marche.
Il semblait se retenir avec difficulté de cracher une malédiction, à en juger par la crispation générale de son visage fin. Pourtant, c'est d'un ton calme qu'il lança à Deimos, qui le fixait toujours à travers le communicateur :
« — Je suppose que je ne peux pas te faire de reproches sur le désir de tuer ses propres frères et sœurs, mais dois-je comprendre par là que tu viens de trahir ? »
Deimos poussa un profond soupir.
« — Aussi idiot que ça puisse te paraître, je n'ai jamais trahi, Akira. J'ai simplement été libéré. Tu es bien mignon mais je ne t'ai jamais suivi de mon plein gré, j'étais simplement sous l'emprise d'un sort que je viens de briser. Oh, je t'ai donné de fausses idées ? »
Les yeux du prochainement ex-Empereur d'Azilis donnaient l'impression de sortir de leurs orbites. Il gardait de moins en moins bien son calme légendaire, ce qui ne disait rien de bon à Deimos ; dans peu de temps, s'il ne coupait pas la communication, il allait sentir passer sur son échine toute la force du Domaine Cauchemar. Il le sentait venir jusque dans ses os. Pourtant, il ne pouvait plus s'arrêter de parler.
« Tu t'adresseras à Phobos pour ce rouage sauté dans ton plan, c'est elle qui a eu l'idée de la dévotion artificielle. Je suis sûre qu'elle aurait aimé renforcer le sort à ton égard mais elle ne voulait pas prendre le risque que je lui passe sous le nez, pas vrai ? Plutôt idiot de sa part, mais bon. Au final, même si on avait pu partager davantage qu'une simple discussion dans ta chambre, ça se serait quand même passé comme ça. »
Son sourire s'élargit encore un peu, les yeux plongés dans le regard onyx de son interlocuteur. Tant de variables, tant de possibilités, pour qu'ils finissent l'un dans les yeux de l'autre, alors que Deimos allait prononcer les mots qui allaient mettre fin au semblant de lien qu'ils auraient pu tisser. Est-ce que tout ça aurait pu se passer autrement ? Peut-être. Peut-être, si Akira avait été un peu différent, s'il n'avait pas été soumis à l'influence de sa sœur, si le monde ne se mourait pas derrière eux, si la destruction des valeurs d'Altera n'avait pas conduit Deimos à prendre cette guerre pour une affaire personnelle, peut-être. Mais aujourd'hui il n'y avait plus que le visage horrifié de son interlocuteur, et le sourire qui se dessinait sur ses propres lèvres, dévoilant ses canines et stimulant ses réserves de magie. Les soldats devaient hurler de peur en cet instant, ou bien peut-être était-ce Korrin et Lamia ? Bonne question. Il sentait tout juste son aura de terreur agir aux alentours, focalisé qu'il était sur Akira et sur ses paroles.
« Désolé mon vieux. Mais cette fois, tu es tout seul.
—Deimos, att- »
Trop tard. Il venait d'appuyer sur le bouton de fin de communication. Mettant ainsi fin à leur interaction. S'ils se revoyaient un jour, soit l'un d'entre eux serait en prison, sout l'autre serait voué à une mort certaine. Ou alors ce serait l'Autre Lieu. L'Autre Lieu restait l'option la plus probable. Et pas la moins réjouissante, dans un sens. Il soupira, avant de se détendre. L'aura de terreur se dissipa aussitôt.
Deimos se redressa, avant de se retourner vers les jumeaux qui avaient l'air d'avoir suivi toute la conversation, et leur sourit, un sourire bien plus chaleureux que celui qu'il avait réservé à Akira.
« — Désolé pour le coup de flippe, les jeunes. Vous pouvez y aller, je prends le relais. »
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