Chapitre XXXV : Crétin insolent
Il ne manquait plus que ça...
Mon père m'avait prévenu ce matin quand nous partions, lui au travail et moi au gymnase, d'une chose dont j'aurais bien voulu me passer de connaître.
Deux membres en tout cas des Minuit avaient été vus à la frontière, dont apparemment Jeffrey.
Nous devions donc nous attendre au pire...Plus le temps passait, plus je craignais une attaque...
N'importe où. Sur le chemin du retour, au gymnase même ou encore chez moi.
J'avais bien pris la peine et le soin de prévenir Amaryllis pour qu'elle ne soit pas prise au dépourvu et pour éviter un drame comme la dernière fois lors de notre rencontre avec ce détestable beau parleur de Jeffrey.
Sincèrement, je ne saurais pas dire qui est le pire entre lui et Ricardo, je ne serais pas capable de les départager.
Je crains même quand Amaryllis sera seule chez elle, avec ses parents, le soir. Normalement, les loups-garous n'ont pas le droit de s'en prendre à des civils mais Amaryllis reste ma compagne, et civile ou pas, les Minuit ne reculeront pas devant ce genre de détail insignifiant pour agir.
En plus, ces temps, on a cet abruti de Ricardo qui nous colle aux basques et c'est très frustrant.
En temps normal, je dirais que je ne serais pas content de sa présence car il m'empêcherait d'être romantique avec ma tendre Amaryllis, par pur égoïsme, mais là, il s'agit plus de cas extrême, une question de vie ou de mort, alors je n'apprécie pas que cette chose nous suive.
Toute la journée, j'ai été sur les nerfs. Amaryllis a fait du mieux qu'elle a pu pour me détendre et je pense que malgré les apparences, elle a bien réussi car sans elle et son soutien, je pense que j'aurais déjà explosé entièrement en mille morceaux, mon cerveau le premier.
Avant-dernier cours. Je serre fort la main de guimauve d'Amaryllis sous la table. Elle ne dit rien, ne fait pas de drôles de mimiques, ne montre aucun signe extérieur de douleur et son air impassible dont l'attention est portée sur le cours. Je ne peux m'empêcher d'admirer ça. Moi, j'ai mal quand Heiling me serre la main comme si c'était la pâte à pain du souper à malaxer...Amaryllis, non. Juste, non.
J'essaie de me concentrer moi sur le cours mais je peine beaucoup, tellement les Minuit sont omniprésents dans mon esprit tourmenté par les images des visages de Fabrizia et Jeffrey qui tournent devant mes yeux.
Quand on sort du cours, on tombe sur, devinez qui ? Ricardo. Il est à la recherche de son amoureux. Je tiens toujours Amaryllis par la main, l'autre cette fois pour ne pas faire souffrir une seule des deux et ne pas rendre ma tendre petite amie asymétrique, et Ricardo nous sourit un peu comme Nadejda et Tina combinées quand il nous aperçoit. Bizarrement, de sa part, je n'aime pas du tout ce regard empli de sous-entendus...
-James est encore dans la salle ?
Il a une voix grave, très grave, et même de mon point de vue de garçon, je la trouve très belle. James qui a une voix moyenne paraît en avoir une très aiguë à côté de celle de son copain. C'est Amaryllis qui répond, car si je le faisais moi en ce moment, je me jetterais sur lui pour défouler mes nerfs tendus à l'extrême depuis ce matin de bonne heure :
-Non, il a dû se dépêcher pour prendre son bus.
-Mais, vous avez encore un cours, vous, non ?
-Oui, on est tous en arts visuels, ici, sauf lui, qui est en musique, et son enseignant est absent.
-Je vois...Je voulais lui parler, mais bon, du coup c'est pas grave...
Finalement ne restent bientôt dans le couloir que ma bien-aimée, Ricardo et moi. Les cours vont bientôt reprendre. Il nous lance alors un magnifique sourire narquois :
-Je sais pas vous, mais je trouve que James et moi formons un beau couple, sous les projecteurs, non ?
Amaryllis lui lance un regard amusé, mais comme si elle avait pitié de lui, comme si elle le trouvait vraiment idiot.
-Pour commencer, ta phrase n'était pas française et ensuite, chacun ses goûts. Par contre, sous les projecteurs, je ne prétends pas l'inverse.
-Les couples homosexuels ne sont pas si communs à notre âge. Et surtout dans ce gymnase de coincés.
Je sens Amaryllis s'énerver parce qu'elle serre sa main légèrement plus fort autour de la mienne. Moi je ne tente rien, ne rien dire et ne rien faire, ou sinon, Ricardo va finir en charpie.
-Ce n'est pas une question d'être coincés ou pas ! dit Amaryllis avec un ton virulent. C'est notre orientation sexuelle qui détermine notre attirance pour tel genre de personnes. Si je ne suis pas attirée par les filles, c'est parce que biologiquement, je ne suis pas faite pour, mais pas parce que je suis plus coincée qu'une autre.
Ricardo nous fixe de ses yeux perçants et dérangeants.
-Probablement...Moi je dis que vous êtes tous des coincés et que James est comme moi, et que la fille avec qui il est sorti comme pour affirmer qu'il n'était pas homosexuel, ce n'était pas sérieux, ils ne s'aimaient pas.
Je sors de mes gonds aussi soudainement qu'un éclair s'abat quelque part.
-Déjà, tu ne connais même pas James alors que tu es censé être son âme sœur, en quelque sorte. Tu ne sais rien de son orientation sexuelle ou bien tu fais semblant de ne pas la voir par orgueil, et l'un comme l'autre, tu es égoïste et imbu de toi-même. Le monde ne tourne pas autour de toi. Et avec cette fille, dont je t'apprends le prénom au passage, Mélusine, c'était sérieux. C'est juste que ça n'a pas duré longtemps.
Amaryllis renchérit alors :
-Cesse de juger les gens. Apprends à les connaître et à savoir. Se fier entièrement à son jugement, ce n'est pas toujours bon.
On voit le visage de Ricardo se tordre dans un drôle de rictus nerveux.
-Mais en plus, vous me faites la leçon ? J'y crois pas...Au moins, James lui, ne se plaint jamais et se laisse faire.
Amaryllis et moi nous retenons le plus fort possible de dire quelque chose. Si James ne tentait rien, c'est probablement car sa rupture avec Mélusine lui trottait en tête et qu'il avait besoin de se sentir tout petit dans les bras de quelqu'un.
Ricardo affiche alors devant nous sans se cacher une mine dégoûtée. Il nous dit avec de l'horreur dans la voix :
-Vous savez quoi ? Vous craignez, comme couple. Vous faites rien en public, on sait rien sur vous. Ça craint.
Je sors de mes gonds et me retrouve hors de moi.
Je m'approche de Ricardo en lâchant la main rassurante et détendante d'Amaryllis. Il fait presque la même taille que moi, il me dépasse de quelques centimètres mais il paraît plus imposant vu qu'il fait beaucoup de sport, il paraît donc bien plus large.
Je le saisis au col de son pull à manches courtes, le rappproche de mon visage pour que je sois sûr qu'il ouvre ses petites oreilles bouchées et je montre les dents.
-Arrête ce petit jeu avec nous tout de suite ! On n'a aucune envie de jouer avec toi et certainement pas sur le sujet de James et toi ou encore Amaryllis et moi.
Ricardo paraît pris au dépourvu les trois premières secondes puis il se reprend. Il essaie de se dégager de ma prise mais il n'y arrive pas.
Sportif ou non, j'ai une force surhumaine qu'il ne pourra jamais égaler.
-Alors affichez-vous, faites les choses comme un couple ! nous dit-il.
-Si on n'en a aucune envie, c'est notre droit, dit alors Amaryllis, les bras croisés sur sa poitrine, l'air dur. On n'aime pas les couples qui se montrent ouvertement ensemble, ou plutôt explicitement, alors on n'inflige pas ça aux autres. Ça conserve notre intimité et on a le droit. Maintenant, cette discussion est terminée. Nous avons encore des cours. Viens, Alexis.
-Oui, fis-je en lâchant Ricardo avec un geste dédaigneux. Tâche de ne pas faire plus de grabuge.
Amaryllis et moi nous dépêchons d'aller dans notre salle de cours. Nous reprenons le projet que nous avions commencé il y a quelques semaines déjà.
Je me sens terriblement frustré...Et en colère. Je bous de l'intérieur.
Je ne peux décidément pas encadrer ce charmeur de mes deux de Ricardo...Je n'en peux plus.
Au bout de quelqurs minutes, je sors de ma classe en prétextant aller aix toilettes. Tiens donc, un grand classique, vu que même chez les Minuit avec Fabrizia, j'ai fait exactement la même chose.
Je retrouve alors hors de la classe Gary, qui me fait face.
-Tu as besoin de ta doublure ?
-Je suis hors de moi...je grogne en montrant mes crocs qui sont déjà bien grands. Tu me remplaceras pour la fin de la journée...
-Bien, me répond Gary, en me faisant le salut des Primus, voyant bien que ce n'est absolument pas le moment de me faire des plaisanteries.
-Tu viendras aux toilettes à la fin des cours, on échangera de place là-bas.
-Bien.
Il rentre dans la salle après quelques minutes, comme si j'avais été aux toilettes tandis que moi, je m'assieds sur une chaise à une table dans le couloirs, celles qui sont prises en général à midi aux repas. J'essaie d'appliquer ce qu'Amaryllis m'a dit de faire quand elle n'est pas à côté de moi pour tenter de me calmer. Je serre mes mains entre elles et inspire et expire avec lenteur. Mais malheureusement, mes pensées tournent dans ma tête et je les rumine avec amertume...
Je soupire quand je vois la porte s'ouvrir. Je vois alors Amaryllis sortir en refermant soigneusement la porte. Elle s'approche furtivement de moi avec un air inquiet sur le visage.
-Alexis, ça va ? J'ai vu Gary débarquer à ta place, alors j'ai eu peur que tu ailles mal.
Je la laisse à peine finir sa phrase. Elle est a quelques centimètres de mes jambes, je la tire donc à moi par les bras en la faisant s'asseoir sur mes genoux. Elle pousse un petit cri aigu de surprise qui comble mes sens auditifs.
Je sens alors bien que mon corps est sous sa forme de demi-loup...Mes canines pointues, mes yeux jaunes...Mon désir devient incontrôlable...Surtout maintenant qu'Amaryllis est si proche de moi...Tellement proche...Trop proche...Assise sur mes genoux, sans défense...
Je ne peux plus retenir ma double frustration plus longtemps...Je plonge alors ma tête dans son cou chaud, où je sens son sang pulser à travers sa peau fine.
Je sors les crocs et mordille sa peau, mes mains dans son dos, le parcourant avec désir, refusant de la laisser partir plus loin. Elle est serrée contre moi, elle a ses mains contre le haut de mon torse et ses coudes au niveau de mon ventre. Elle se laisse faire, avec à la fois un désir naissant et une contrainte.
Je la serre encore plus fort contre moi et mord son cou de tous les côtés, le dégageant de ses longs et nombreux cheveux d'un magnifique noir d'ébène qui brille en brun sous les rayons du Soleil.
Je la mords, encore, encore et encore...
Quand je suis très en colère, c'est une des seules façons que mon corps a trouvée pour l'extérioriser et ensuite s'en débarasser pour un moment. Mais malheureusement, je suis contraint de devoir avoir Anaryllis près de moi et de lui faire un peu mal.
Je ne sais pas si elle a vraiment mal ou pas mais je ne peux pas m'empêcher de vouloir la mordre...Toujours plus fort...Je peux à peine me retenir de ne pas la mordre trop fort et trop violemment, je dois veiller à ne pas aller jusqu'à son sang...
Je ne sais pas comment elle fait pour supporter cette petite douleur mais constante que je lui inflige...Mais je ne connais pas ses pensées, je ne peux pas décider à sa place...Si elle souffrait vraiment, je pense qu'elle partirait. Elle serait partie depuis bien longtemps...
Je ne la remercierai jamais assez du fait qu'elle reste à mes côtés, qu'elle reste là pour moi...
Je l'aime...Fort...Tellement fort...Trop fort !
Quand je réussis enfin à m'arrêter, je la contemple, mes canines et mes yeux n'arrivant pas à reprendre de suite leur apparence humaine. Elle n'a pas fait un seul petit bruit durant tout ce temps. Ne lui fais-je plus aucun effet ni ne lui cause plus aucune douleur ou se retenait-elle ? Comme si elle lisait mes pensées, elle me sourit comme pour me rassurer avant de déposer un doux baiser sur mes lèvres encore désireuses.
-Je suis censée être aux toilettes. Pardon, Alexis, mais je vais devoir y retourner.
-Je sais bien...dis-je avec un ton dépité que je tente de camoufler en lui tenant la main.
Je vois à travers ses longs cheveux qui couvrent un peu son cou fin qu'il est rouge à force d'avoir été autant sollicité en si peu de temps, encore couvert de quelques marques de morsures et de crocs que j'ai laissées. Peu discret...
Je n'arrive pas à croire que j'y ai été si fort. Pourtant, je me suis retenu, mais elle est quand même marquée...Marquée par mes crocs et mon désir de loup...Je lui donne un dernier baiser avant de la laisser partir à contrecœur.
Des fois, je voudrais la garder rien que pour moi, même si c'est égoïste.
Mais les loups ne sont-ils pas censés être fidèles à vie et très possessifs ?
Je soupire un bon coup avant de constater que je suis parfaitement détendu.
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