VII. Septième Noël
VII - Septième Noël
Je suis sorti du sommeil par des baisers dans le cou.
- Hum, tu sais que j'ai toujours envie de toi, mais le samedi c'est fait pour dormir, grogné-je sans être vraiment conscient.
- Oui, mais aujourd'hui c'est Noël mon amour.
J'ouvre légèrement un œil. J'ai dormi aussi longtemps?
- Tu dis vraiment n'importe quoi pour que je me lève, pas vrai? Nous ne sommes même pas en décembre. Noël c'est dans plus d'un mois!
- Et alors? C'est toi qui dis que ce n'est pas la date qui compte! Aujourd'hui c'est Noël !
J'ouvre un deuxième œil, attrape mon téléphone sur la table de nuit et vérifie la date. Eléonor est penchée au-dessus du lit, je l'attrape et la bascule pour qu'elle s'allonge avec moi.
Je la serre très fort et blotti ma tête dans son cou. Je passe une jambe par-dessus les siennes pour l'emprisonner contre moi et je nous recouvre de notre couette. La semaine a été longue et j'ai besoin d'un peu de repos, il n'est que dix heures...
- Dors avec moi bébé, nous ne sommes que le 18 novembre.
Je marmonne et elle se débat un peu.
- Ceux qui fêtent Noël le 25 sont des mauviettes! Dans notre famille, c'est le 18 Novembre.
- C'est nouveau?
- Oui! C'est bien toi qui dis "Noël c'est un dictat des capitalistes, on s'en fou de Noël ce qui compte c'est qu'on soit tous ensemble".
Je rigole. Oui j'ai dit ça.
- Et donc ?
- Et donc, cette année j'ai décidé de changer la date ! J'ai un cadeau pour toi, et je n'en peux plus d'attendre. Alors debout !
- Tu as un cadeau?
- Oui!
- Alors il fallait commencer par là.
Je retire la couette qui me couvrait jusqu'à lors. Je roule d'un côté pour sortir du lit, la laissant allongée et morte de rire.
- Debout fainéante! C'est Noël aujourd'hui !
Je lui lance un des oreillers présents dans notre lit, ce qui ne fait qu'amplifier ses ricanements. Qu'est-ce que j'aime l'entendre rire. Dès le matin, c'est le plus bon son de l'univers, alors l'entendre rire un matin de Noël c'est super.
J'enfile un t-shirt et le bas de pyjama que je ne mets jamais, sauf quand je sors de la chambre. Elé se redresse. Je ne sais pas vraiment ce qui lui prend de vouloir faire Noël aujourd'hui mais je trouve ça fun! En plus, ça devenait chiant de faire cette fête toujours à la même date. J'aime bien quand elle fait des choses peu conventionnelles, ça m'amuse et l'idée me rend heureux comme un gamin.
- C'est moi qui les réveille, affirme-t-elle en se levant d'un bond et en courant vers la sortie de notre chambre.
Il n'est pas rare que Manon, Zélie, Arthur, Lucas et Alice dorment à la maison, ici ils ont chacun leurs chambres en ayant le droit de dormir tant qu'ils le peuvent. Ils voyagent entre chez nous et chez nos voisins. C'est à dire Mamie Marguerite et Patrick. Hier soirs ils se sont tous endormis ici. Cette maison n'est jamais calme...
Les réveiller, c'est notre petit plaisir. Le mieux c'est la tête de Zélie au réveil, une vraie ado. Elle râle toute la journée si on ne la réveille pas en douceur. Autant dire que je prends mon pieds en retournant son matelas pour l'embêter.
- Moi je réveille Zélie !
Je cris dans le couloir en courant jusqu'à sa chambre avant de déraper sur le parquet devant sa porte.
La bonne humeur d'Elé est contagieuse. Tout le monde décide de fêter Noël aujourd'hui. Eléonor a réussi à convaincre ma mère de fermer le restaurant pour la journée. Tout le monde répond présent, même Cléa, Damien et Marie, à l'exception de Monique et Pierre qui ne peuvent vraiment pas fermer le café. Ils ont promis de passer ce soir, après la fermeture de leur commerce.
Les festivités s'organisent. Certains s'occupent des décorations, d'autres de faire les courses, d'autres de préparer le repas de ce soir. C'est une fourmilière mais c'est plaisant.
Avec Damien nous sommes chargés d'acheter les cadeaux. Ce n'était pas le meilleur choix d'équipe pour arriver à un résultat convenable dans la précipitation si vous voulez mon avis. En tout cas, nous ne nous sommes pas vraiment foulé pour chercher mais nous avons bien rigolé. Une fois que nous avons trouvé l'idée s'était vite réglé. Il y avait une boutique de vêtements avec des messages humoristiques, et donc aujourd'hui tout le monde aura le sien.
En rentrant à la maison, nous emballons les cadeaux en cachette et ça non plus ce n'est pas une bonne idée. Je me demande si nous n'avons pas utilisé plus de scotch que de papier cadeaux. Emballer du tissus ce n'est vraiment pas le plus simple alors nous avons une excuse. Nous mettons bien une heure et demi à terminer le travail et il est temps de se préparer.
Je me demande bien ce qu'Elé va m'offrir pour être si pressée au point d'avancer la date de Noël. Mais elle ne m'a donné aucun indice.
Après une douche rapide j'enfile le jeans qu'elle préfère. Soit disant, je cite " Ça te fais le cul de Hugh Jackman, tu sais le mec qui joue Wolverine ?!". Puisque ça reste flatteur, moi, ça me convient. J'accompagne le tout d'une chemise bleue et d'une veste sympa que je vais vite retirer pour être à l'aise. La chemise, je la garderai jusqu'à ce qu'Elé me la déboutonne...
***
Je suis heureuse de voir que tout le monde me suis dans mon idée débile. C'est vraiment une bonne journée que je viens de passer. Je laisse Zélie me coiffer et me maquiller légèrement, elle aime beaucoup ça et c'est la seule façon que j'ai trouvé pour qu'elle arrête de râler. La pauvre, Adelphe l'a réveillé comme un barbare.
Tout est parfait, le sapin, les cadeaux à ses pieds (même si les emballages laissent à désirer), la table décorée, le repas préparé, les invités présents, la musique, la robe que j'ai décidé de porter et mon mari.
Je me demande encore souvent ce qu'un mec comme lui fait avec une fille aussi banale que moi. Il est sublime. Plus il vieilli, plus il est charmant. Il ne devrait pas perdre ses cheveux en vieillissant, mais ils vont sûrement se blanchir. Son visage prend du caractère et je le trouve vraiment irrésistible.
À force de sourire ses fossettes ont creusé sa peau, laissant une petite ride sous ses pommettes. J'aime beaucoup sa petite barbe d'une semaine, il râle parce que ça gratte mais s'il se rase complètement je me coupe les cheveux à la garçonne. Puisque que Monsieur n'aime que les cheveux longs, je suis tranquille. Même s'il résistait à mon chantage, je ne le ferai pas. La longueur de mes cheveux est selon moi, l'une des seules choses qui lui plait réellement.
Quand je nous vois, tous réunis autour de cette table, je suis fière. Fière d'avoir une famille aussi unie. Je suis heureuse aussi. Heureuse de les aimer à la folie. Notre vie n'est pas toujours simple, nous connaissons encore quelques petits drames mais nous avons tous déjà connu pire, alors nous relativisons et nous profitons pleinement de ces petits moments de joies que la vie nous offre.
Nous venons de déballer les cadeaux, Martine et Pierre se sont libérés et nous arborons fièrement nos nouveaux sweat-shirt. Ils sont de très mauvais goût, il n'y a pas à dire, mais qu'est-ce qu'ils ont pu nous faire rire. Sur celui de Zélie est inscrit le message "J'hiberne, à l'année prochaine", jusqu'ici tout va bien, mais sur celui de Tom il est écrit " Attention, lorsque je pète, je pue" et là rien ne va plus car ce n'est pas le pire de tous...
En ce moment, plusieurs discussions sont lancées sur des sujets différents. Je n'ai toujours pas offert mon cadeau à Adelphe. J'aurai pu attendre Noël mais je n'en avait vraiment pas l'envie.
- Alors, c'est quoi, tu ne veux pas me dire où il est ?
Je crois bien que c'est la vingt-troisième fois qu'il me pose la même question. Mon mari est quelqu'un de réellement obstiné et d'absolument pas patient. Je crois qu'il est temps de lui offrir la petite boîte. Je la sort du buffet où je l'avais caché pour la donner discrètement à Adelphe en reprenant ma place près de lui.
- Avant de l'ouvrir promets-moi de ne pas t'emballer trop vite.
Il me sourit, n'ayant vraiment aucune idée de ce qu'il pourra bien trouver dans cette boîte.
- Promis!
Il déchire l'emballage coloré, ouvre la boîte et observe le contenu sans véritablement réussir à comprendre le message. Il me regarde en essayant de confirmer ce qu'il croit penser.
- Qu'est-ce que ça veut dire Elé? Je ne peux mettre qu'un orteil moi là-dedans.
Son regard jongle entre le mien et le contenu de la boîte. Cette boite contient deux petites choses. Ce sont de minuscules chaussons en laine écrue, ceux que ma maman avaient tricoté pour moi quelques mois avant ma naissance.
- Ils ne sont pas pour toi. Cette année mon cadeau est à l'intérieur de moi et il va falloir attendre encore un peu qu'il s'échappe.
Son sourire s'élargit.
- Tu essaies de me dire qu'on va avoir un bébé ?
Je pense qu'il ne réussit pas vraiment à comprendre. Nous avons renoncé à cette idée il y a bien longtemps. Ça nous semblait vraiment impossible. Nous avons essayé tellement de choses pour en arriver là que cette grossesse s'apparente à un véritable miracle.
- Je t'offre simplement le droit d'espérer Adelphe, rien de plus. Il ne faut pas s'emballer. Je te passe les détails mais le médecin m'a confirmé hier que j'étais enceinte. Mais tu sais que ça va être compliqué et...
Ses lèvres se posent sur les miennes me coupant dans mon discours. Je ne veux pas être effondrée une nouvelle fois si le bébé ne réussit pas à s'accrocher jusqu'au bout. Cela fait quelques semaines que je me sens ballonnée, j'ai même eu quelques nausée cette semaine. Une collège, dans la salle des profs, a lancé un "J'avais les mêmes symptômes quand j'étais enceinte de mon deuxième". Bien sûr je n'ai pas voulu réagir tout de suite, puisque ce n'était pas possible.
Cependant l'histoire est restée dans ma tête toute la journée, toute la nuit et le lendemain j'ai acheté un test en pharmacie. Je l'ai effectué en me souvenant qu'un jour j'avais prié pour qu'il n'y ai qu'une barre alors que cette fois je n'espérais qu'une chose; que ce test soit positif.
Les deux barres se sont colorées, je n'y ai pas crue tout de suite mais j'ai foncé chez le médecin. La prise de sang est formelle.
Lorsque le regard d'Adelphe croise le mien, j'y lis tellement d'émotions et de joie que je ne peux qu'être heureuse.
- Depuis combien de temps?
- Quatre mois, quatorze semaines exactement.
Son sourire s'étire et une sorte de soulagement l'envahit. Quatre mois, c'est plus que la dernière fois. Quatre mois c'est presque la moitié. Je regrette légèrement de ne pas m'en être rendue compte plus tôt car mes cycles menstruels sont tellement déréglés que je n'ai pas fait attention à mon immense retard de règle avant cette semaine, mais je suis heureuse d'apprendre que le bébé est toujours là. Il s'est s'accroché.
J'espère plus que jamais. Je sais déjà que notre bébé sera un battant. J'en suis convaincu, comme si s'était écrit au fond de mes entrailles. Il s'accroche.
Les yeux d'Adelphe pétillent comme du champagne. Je suis tellement amoureuse de lui que parfois ça me fait peur. Je ne pourrais pas le perdre, je ne survivrai pas mais je préfère ne pas y penser dans un moment pareil. Je redoutais l'annonce de cette nouvelle mais mon mari ne me déçoit pas. Je l'embrasse rapidement car nous sommes toujours autour de la table même si personne ne prête attention à nous.
- Mon amour, après tout ça, tu veux me faire croire que tu ne t'emballes pas ? dit-il en me montrant d'un geste ce que nous avons fait aujourd'hui.
Évidemment que si, je m'emballe, mais c'est plus fort que moi. Nous n'avons jamais été aussi proche de ce rêve de bébé. Nous avons traversés tellement d'épreuves pour en arriver là. Apprendre cette grossesse a d'abord été un choc mais ensuite j'étais tellement heureuse, je flottais sur un petit nuage et il fallait que je l'annonce à mon mari. Cette idée est la seule qui m'ai traversé l'esprit.
- Pas du tout, je ne vois pas de quoi tu parles.
Je feins l'ignorance et il sourit.
- C'est vraiment le plus beau Noël qu'on ait eu.
L'une de ses mains se mêle à la mienne et il regarde notre famille. Dorénavant il flotte sur le même nuage que moi.
- Je t'aime Adelphe.
- Pas plus que moi.
- Impossible!
Il rigole.
- Qu'est-ce que l'on fait, on leur dit?
- Je crois qu'ils savent déjà que nous nous aimons, dis-je malicieusement en sachant pertinemment que là n'était pas la question.
- Je pensais plutôt au fait que tu sois enceinte, rit-il.
- Ça serait s'emballer non?
- Tu n'as pas tort.
Il est déçu par ma réponse, comme moi, il a envie de le crier à la terre entière. Je ne veux pas que se moment soit gâché.
- Mais de toute façon, ils finiront bien par le voir. Alors je te laisse l'honneur de t'emballer et fais le bien comme il faut. Mets le paquet Bibou.
Nous rigolons, jusqu'à ce que Adelphe se lève. Personne ne fait attention à nous, alors il monte sur sa chaise. Les conversations des uns et des autres s'arrêtent en se demandant ce qu'il peut bien faire comme ça.
- Ma chère famille, commence-t-il en faisant une révérence débile sur sa chaise en manquant de trébucher faisant rire toute l'assemblée, c'est l'heure du discours. D'abord, merci d'être venu et d'avoir rendu cette journée inoubliable. Fêter Noël un 18 Novembre ce n'est pas commun. Quelque part vous vous demandez tous ce qui a bien pu passer par la tête d'Elé pour en arriver là. En réalité, je suis heureux et fier de vous annoncer que nous venons de subir sa première grosse envie de femme enceinte.
Je suis persuadée qu'il pensait entendre des éclats de rire. Mais ce n'est pas un sujet sur lequel nous rigolons habituellement dans la famille compte tenu de la situation, tout le monde le prend très au sérieux. Peut-être même que certains pensent à une mauvaise blague. Toute l'assemblée le regarde, sans dire mot.
- Vous avez le droit de sourire, ce n'est pas une connerie. Eléonor est enceinte et c'est probable que je sois le père!
Je lui lance ma serviette de table en lui envoyant des éclairs.
- N'importe quoi, évidement que c'est toi le père!
Il sourit et descend de sa chaise pour m'embrasser rapidement. Nos regards se tournent vers toute notre famille, attablée et horriblement silencieuse.
- Eléonor, c'est vrai? demande Alice incrédule pour confirmation.
- Oui, je l'ai appris hier, je suis enceinte de quatre mois.
Je ne peux m'empêcher de sourire en affirmant cela. Depuis longtemps, je m'étais interdite de m'imaginer cette scène et de prononcer cette phrase "Je suis enceinte.".
- Je me disais bien que t'avais pris des seins! s'exclame Damien.
- Tu veux vraiment que je te pète la gueule aujourd'hui toi? répond Adelphe entre menace réelle et amusement.
Ma grand-mère, qui ne sais plus qui je suis depuis longtemps se met à applaudir et lorsque je lève les yeux vers elle, elle m'envoie un baiser de la main. Je ne sais pas si elle a un éclair de lucidité et qu'elle comprend qu'elle deviendra arrière-grand-mère dans peu de temps mais elle semble heureuse et émue comme si c'était le cas. Je m'imagine peut être tout ça, mais j'ai envie d'y croire. Envie que ma mamie soit fière de moi.
Tout le monde semble se réjouir de la nouvelle mais une aura d'appréhension et de réserve flotte dans la pièce comme un "on ne sait jamais" pour se protéger contre une mauvaise nouvelle, contre un nouveau mauvais coup du sort. Pour moi, c'est déjà trop tard, je n'ai plus aucune barrière de protection, elles se sont envolées quand j'ai appris que cela faisait quatre mois que je portais un petit être en moi. J'aurais cet enfant, parce que je dois bien ça à Adelphe. Je nous dois bien ça.
Exténuée je m'assoie dans l'un des canapés après que les choses soient rentrée dans l'ordre. Tom a mis un DVD et je pense m'endormir contre son épaule. Je suis assez fatiguée c'est dernier temps et je comprends mieux pourquoi maintenant.
Je ne sais pas à quel moment de la nuit nous sommes, mais je sens parfaitement l'odeur d'Adelphe près de moi, je sens même ses bras m'entourer et me soulever. J'entends aussi son cœur battre à un rythme régulier lorsque ma tête se blottit contre son torse. Ce moment de pure douceur et de confort m'est très agréable. Dans un demi-sommeil, c'est avec le sourire que je prends conscience qu'il grimpe les escaliers pour me déposer dans notre lit.
***
Elle est bien belle, ma femme, quand elle s'endort sur le canapé. Mais sincèrement qu'est-ce qu'elle est lourde. C'est bien parce qu'elle est enceinte de notre enfant que je prends la peine de la porter dans les escaliers, sinon elle aurait fini sa nuit dans le salon ou je l'aurais réveillée. Je suis gentil d'accord, mais punaise elle fait son poids. J'ai manqué plusieurs fois de lui claquer la tête dans le mur, cependant, je ne vais pas lui dire ça demain.
Une fois dans notre lit, j'essaies comme je peux de lui ôter ses collants, puis sa robe. Très jolie robe d'ailleurs mais je n'y arrive pas, le tissus reste bloqué au niveau de sa poitrine. Alors je décide de l'observer un instant. Sans me venter, c'est un canon et apparemment je ne suis pas le plus laid de la terre alors notre bébé sera une merveille.
Je ne sais pas dire ce qu'il me rend le plus heureux ce soir, si c'est le bonheur de ma femme qui émane doucement de son visage apaisé, si c'est parce que je vais devenir père et que nous allons devenir enfin de vrais parents, ou encore si c'est parce que je l'aime comme un fou et que je n'aurais jamais souhaité une autre mère qu'elle pour notre enfant. Je suis tout simplement heureux, au comble du bonheur, je ne sais pas comment je fais pour aimer autant, et pourquoi mon cœur continue de s'agrandir mais une chose est sûre j'aime.
Je ne sais pas comment c'est possible d'aimer la vie à ce point. Comment c'est possible d'aimer avec une telle frénésie. Mais j'aime.
J'aime la famille que nous avons construit, nos amis, ma femme et les surprises que la vie nous réserve.
J'aime notre futur bébé. Même si je ne suis pas certain de pouvoir le connaître un jour, je l'aime et il prend déjà une place énorme dans mon cœur. Même si je ne sais pas quel taille il a, ni quel forme il aura, je l'aime.
Il y a quelque année l'idée d'avoir une fille m'était inconcevable. Aujourd'hui je me fiche complètement du sexe de l'enfant que nous aurons. Avec tout ce que nous avons subi pour en arriver là, je ne ferai pas le difficile. Tout ce qui compte c'est qu'il soit en bonne santé et qu'il s'accroche pour vivre dans le corps fragile de ma femme.
J'angoisse un peu, le fait de devenir père se concrétise un peu alors que je ne m'y attendais plus et je ne sais pas si je serais un bon père. J'angoisse aussi parce que rien n'est gagné, il nous reste cinq mois avant la fin de la grossesse et je redoute que le bébé arrive prématurément ou qu'il n'arrive pas du tout.
Eléonor est toujours allongée sur le dos, sa robe remontée de façon pas très élégante certes, mais elle est belle et elle respire calmement. Mon regard accroche sur son ventre nu, je ne sais si je me fais des idées, mais je le trouve légèrement plus arrondis qu'avant. Je décide de le caresser du bout des doigts pour mieux appréhender le volume.
Je me demande comment j'ai pu faire pour ne pas remarquer plus tôt que son corps changeait, que son ventre était si dur et ses seins si gonflés. Je m'allonge près d'Eléonor et rapproche ma tête de son ventre pour l'embrasser.
Peut-être que c'est débile de faire ça, mais d'instinct je me mets à parler au ventre légèrement rebondi de cette femme que j'aime plus que tout au monde, comme s'il était possible d'avoir une conversation avec un si petit bébé.
- Salut petit truc, j'espère que tout va bien pour toi. Quelque part tu as de la chance, moi aussi j'aimerais bien être dans le corps de ta maman toute la journée et surtout toute la nuit. Par contre je t'interdit de comprendre ce que je viens de dire avant que tu aies 18 ans, voir même 30 si tu es une fille. Normalement, lundi, je devrais avoir un aperçu de toi lors de l'échographie, mais même s'il te manque un doigt, ne t'inquiète pas, je t'aimerai quand même. Tout ce qu'il compte c'est que tu ailles bien et que tu grandisses comme il faut.
Doucement mes doigts caressent la peau d'Eléonor, et je pense qu'elle se réveille un peu car sa main vient se perdre dans mes cheveux.
- Tu sais, je suis content que tu sois là, je suis pressé de pouvoir te voir. Mais pas trop non plus, prends ton temps pour sortir d'ici. Je ne suis pas certain de te prendre dans mes bras tout de suite, parce que tu seras vraiment petit et que ça me fait peur. Je ne voudrais pas te casser ou te faire tomber avec ma délicatesse, mais ta maman le fera, elle n'a peur de rien. Je ne suis pas certain de changer tes couches, je veux bien être un bon père mais il y a des limites. Par contre, si tu te réveilles au milieu de la nuit compte sur moi pour venir voir ce qu'il ne va pas, parce que ta mère ne sais pas se rendormir une fois debout et je t'assure que quand il lui manque quelques heures de sommeil elle fait peur à voir.
La main d'Elé dans mes cheveux bouge pour me les tirer.
- Je t'entends, murmure-t-elle pleine de sommeil
- Chut, je suis en train de parler avec mon bébé.
- D'accord, dis-lui que je l'aime.
- Tu as entendu? Maman dit qu'elle t'aime. Moi aussi, je t'aime, tu verras je te le prouverai. On fera beaucoup de chose ensemble. D'abord, il faut absolument que je te montre ce que c'est la pâte à sel, c'est vraiment génial. Après je pourrais peut-être t'apprendre à jouer du piano, tu casseras les oreilles de tout le monde. J'ai hâte de pouvoir te montrer comment faire des bêtises mais ce sera notre secret, il ne faudra pas qu'on se fasse griller.
J'entends Eléonor sourire et je dépose un baiser sur son ventre.
- Par contre, sache que le jour où tu me mettra une raclée au basket je te renierai. Hep, on ne discute pas j'ai ma fierté. Avant ça, je t'apprendrai à marcher, puis à te brosser les dents comme dans les pubs, de haut en bas. Maman t'apprendra à lire, c'est elle la prof après tout et moi je te montrerai comment tricher sans ce faire prendre parce qu'en maths ni ta mère, ni moi, ne pourrons t'aider. Ah, ne compte pas sur moi pour te donner une éducation de bricolage, c'est trop risqué et surtout ne compte pas sur ta mère pour t'acheter des belles fringues, la mode ce n'est pas son truc.
Eléonor rigole doucement.
- Maman va dire que je m'emballe trop vite mais tant pis. Tu vas changer nos vies petit truc, et je t'en suis reconnaissant. Je ne vais pas te mentir, là où tu es, tu es bien au chaud et protégé mais la vie n'est pas toujours simple et belle, ce n'est pas pour autant que tu dois renoncer parce que je donnerais beaucoup pour vivre encore cent ans. Je serais là pour te protéger et t'aider à te relever. J'espère que tu m'entends un peu, car je te promets d'être le meilleur père possible, j'espère que je ne ferais pas d'erreurs irréparables. Tu verras. Nos vies seront chouettes du moment que tu ne vomisses pas dans ma voiture tout devrait bien se passer entre nous. Je rigole, pas de panique, je ne te ferai jamais de mal volontairement, quoi que tu fasses.
Je sors mon portable de ma poche et le mets sur mode avion pour qu'il émette le moins d'onde possible. Je préfère prendre des précautions. Je baisse un peu le son et enclenche l'enregistrement.
- Tout à l'heure, quand maman dormais, j'ai enregistré un peu de piano. Tiens écoute, peut être que si tu l'entends maintenant, quand tu sortiras la mélodie te rassurera et je me ferai un plaisir de te la jouer.
L'autre main d'Elé vient rejoindre la mienne posée sur son ventre.
- C'est nouveau? Chuchote-t-elle.
- Oui, je l'ai joué en pensant à vous, ça te plait?
- C'est un très beau cadeau de Noël, merci mon amour.
Le morceau ne dure pas très longtemps, juste assez pour apaiser l'atmosphère. J'ai moi-même assemblé les notes dans un élan d'inspiration pour en faire une berceuse à mon goût, avec le plus d'amour possible.
- Tu seras un bon papa. N'en doute jamais.
- J'espère.
Soudain, quelque chose de presque magique et totalement incroyable se produit.
- Tu l'as senti toi aussi? me demande Eléonor.
- Je n'ai pas rêvé, il a bougé?
Ce n'était pas très perceptible mais j'ai senti quelque chose.
- Oui, c'est la première fois que je le sens.
- Il se manifeste. Tu crois que c'est parce qu'il aime nos voix?
- Oui, il aime que tu parles de lui. C'est vraiment étrange comme sensation.
Mes deux mains sont maintenant sur son ventre comme s'il allait recommencer. Ce microscopique mouvement nous prouve que nous ne sommes plus seuls, qu'il est là, qu'il vit. Tout devient plus concret.
- Il va le refaire?
- Je ne sais pas, parle-lui.
Nous attendons au moins une bonne dizaine de minutes en lui parlant comme deux idiots heureux mais notre bébé semble s'être rendormi. Je me déshabille pendant qu'Elé enfile un de mes t-shirt.
Après un long baiser et une douce étreinte pour nous prouver notre amour et notre bonheur nous nous endormons heureux et amoureux avec un avenir nouveau et différent qui se profile à l'horizon. Un avenir plein de promesses.
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Mes chers lecteurs,
Voilà un chapitre qui en réjouira quelques uns!
Je ne pouvais vraiment pas ne rien publier le jour de Noël, c'est en quelque sorte mon cadeau pour vos votes, vos lectures et vos commentaires!
Commentaires auxquels je n'ai pas encore eu le temps de répondre, je préférais écrire ce chapitre porteur de bonne nouvelle, mais c'est promis, j'y répondrais dans la semaine!
Voilà, j'espère que ça vous auras plu!
Au plaisir et à bientôt !
Joyeux Noël, je vous souhaite qu'il soit aussi réussi que celui d'Eléonor et Adelphe !
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