Yeji battait des pieds sous la couette, comme une enfant en colère qui ne savait comment exprimer sa frustration. Le front plissé, ses dents mordillant le pourtour de l'angle de son pouce, la jeune femme tentait de concocter un plan pour confronter cet escroc de parasite. Elle avait bien senti qu'ils étaient louches les deux à l'hôpital, ce n'était pas net du tout, et Kai le lui avait confirmer. Le pauvre avait un énorme faible pour elle, ce qu'elle avait remarqué et ce dont elle n'avait pas hésité à se servir pour lui soutirer des informations. Elle l'avait quitté après leur conversation en le laissant tout chamboulé mais arborant un sourire niais, conséquence du baiser sauvage qu'elle avait piqué au coin de sa bouche. Cela ne représentait rien pour Yeji, si ne n'était un moyen de parvenir à ses fins, mais elle savait que Soobin ressentirait de la peine pour l'autre jeune homme alors elle ne pouvait pas lui en parler. En plus si elle essayait de lui cacher un élément il le découvrirait, elle était plutôt mauvaise pour garder des secrets.

L'ennui maintenant était qu'elle savait pour la petite combine sournoise qui avait conduit Yeonjun à parasiter l'appartement de son meilleur ami mais qu'elle ne voyait pas comment aborder le sujet avec Soobin. Celui-ci était tellement soulagé de ne pas avoir de frais à débourser qu'il avait sauté sur l'occasion sans s'apercevoir qu'il se faisait piéger. Il fallait qu'elle amène Yeonjun à se trahir tout seul ou au moins à savoir pourquoi il avait fait ça. C'était bien la seule chose que Kai avait refusé de lui dire malgré tous ses efforts et elle ne pouvait qu'être admirative de sa loyauté même si cela n'arrangeait pas du tout ses affaires.

Yeji quitta le lit, nue comme un ver, et elle se dirigea vers la salle de bain de Soobin. Elle avait partagé la couche de son meilleur ami comme à son habitude, sans que cela ne dérape d'une quelconque façon, mais elle s'était réveillée seule. Soobin avait dû se lever aux aurores, trop stressé par les événements de la veille. Pour sa part elle avait ronflé comme un bébé.

Elle prit une douche rapide, se sécha, et brossa sa longue crinière rousse avant de retourner dans la chambre en tenue d'Adam pour s'habiller. Elle emprunta un long sweat au noiraud, trouva des sous-vêtements à elle qui trainaient dans un tiroir, avant de rejoindre le salon en regardant les notifications reçues pendant la nuit. Peut-être que l'une d'elles pouvaient l'inspirer pour gérer le problème Yeonjun.

Etonnamment Yeji ne trouva pas Soobin dans le salon, pourtant elle avait l'habitude de se laisser tomber comme un flan sur ses épaules qui dépassaient du canapé. Il y avait trois tasses sur la table, de quoi manger, mais pas une âme qui vive. Inquiète, la jeune femme allait sortir de la pièce pour vérifier le reste de l'appartement lorsque la voix de Soobin fit trembler les murs. Ses prunelles noisette écarquillées, elle posa une main sur sa poitrine pour calmer les battements frénétiques de son cœur.

— Non mais tu t'es pris pour qui ? hurla le noiraud. T'es pas chez toi ici, t'as pas à fouiller !

Yeji courut dans le couloir pour rejoindre les éclats de voix et elle se figea à l'entrée de la chambre d'ami. Soobin hurlait, le visage rouge et les larmes aux yeux, sur Yeonjun. Le plus vieux était sur le sol, visiblement victime d'une chute et il était blanc comme un linge. Sa bouche s'ouvrait sans faire le moindre son alors que le noiraud crachait tout ce qu'il avait accumulé en lui depuis des années sans se contrôler.

— Tout ce que tu fous depuis qu'on se connait c'est me pourrir la vie ! Je t'ai fait quoi pour que tu me détestes à ce point au juste ? T'es vraiment qu'un pauvre con égoïste !

La rousse reprit rapidement ses esprits et rejoignit son meilleur ami pour le calmer, ça ne lui ressemblait pas, ce n'était pas le genre de Soobin de vriller comme ça. Elle posa sa main sur son avant-bras pour signaler sa présence mais il la repoussa vivement sans même lui accorder un regard.

— Oh ! s'indigna la danseuse.

— J'te déteste Choi Yeonjun, t'es le pire des enfoirés, cracha le noiraud.

Yeji n'avait jamais vu Soobin dans un tel état de rage et pourtant elle le connaissait depuis toujours, ils avaient presque grandi ensemble. Elle lui attrapa le poignet plus fermement et le força à se retourner pour la regarder, là son cœur s'abima en voyant le visage baigné de larmes de son meilleur ami. Il hoqueta et baissa la tête.

— Je suis désolé, je dois sortir. Faut que je prenne l'air.

La jeune femme hocha la tête et le relâcha. Elle savait qu'il ne ferait pas de bêtises mais il avait besoin de respirer et elle pouvait lui accorder cet espace.

Elle resta quelques secondes à fixer la porte de la chambre d'ami après avoir entendu Soobin sortir de l'appartement puis elle reporta son attention sur Yeonjun. Si son tempérament de feu la poussait à continuer de le pourrir jusqu'à ce qu'il s'excuse à genoux, même si elle ne savait pas de quoi il était coupable, l'air profondément blessé qui marquait son visage la fit se retenir et elle repensa à ce que Kai lui avait dit. Le garçon lui avait assuré que Yeonjun était bien loin de l'image que Soobin et elle se faisaient de lui. Oui il était rebelle sur les bords, un peu prétentieux et une tête brûlée, mais il était aussi un jeune adulte très sensible qui ne savait pas comment l'exprimer.

Yeji tendit donc la main au danseur encore au sol et, s'il la regarda avec un mélange de surprise et de méfiance, il accepta la main tendue. Elle commença à l'aider à se relever avant de se stopper, un petit rictus au coin des lèvres.

— Maintenant dis-moi ce qu'il vient de se passer. Si c'est un accident je t'aide à finir de te remettre debout, si t'as fait de la merde je te laisse tomber et j'espère que tu te péteras un os cette fois.

Un orage s'éleva dans les pupilles de Yeonjun qui serra les dents mais n'eut pas le choix que d'abdiquer, il n'était pas en bonne posture et il aimait trop danser pour prendre un risque aussi inutile. Yeji se mit à espérer silencieusement qu'il ne mette pas trop de temps à prendre une décision, ses bras commençaient à la tirer à force de soulever le tas de muscles du danseur.

— Je ne sais même pas pourquoi il s'est énervé, avoua le brunet en baissant la tête.

— T'as bien dû faire quelque chose, Soobin n'est pas du genre à vriller comme ça. Sinon tu serais déjà en petits morceaux.

Yeonjun pencha subtilement la tête, comme s'il réfléchissait.

— Il a parlé de fouille non ? Tu as touché à quoi ?

— Mais à rien ! s'agaça Yeonjun. Quand je me suis levé j'ai tapé avec une de mes béquilles dans un carton que j'avais pas vu. Je l'ai juste ouvert pour vérifier que je n'avais rien cassé parce que j'ai entendu un bruit de verre. J'allais le mettre en hauteur pour éviter de shooter dedans encore, j'ai même pas regardé ce que c'était à l'intérieur mais il est arrivé quand j'allais prendre le carton. Il a cru que je fouillais mais c'était pas le cas !

Elle devait reconnaitre qu'il était très convainquant et son air désespéré la fit craquer. Elle tira un coup sec pour le remettre debout et l'abandonna aussitôt pour aller inspecter le colis qui avait causé tant d'émois à Soobin. Accroupie, elle souleva les bords et n'eut besoin que de jeter un œil pour comprendre la situation. Pour un peu elle aurait presque de la peine pour Yeonjun, il n'avait vraiment pas dû comprendre pourquoi la tempête Soobin s'était abattue sur lui. Yeji se mordilla la lèvre, hésitante. Elle voulait expliquer la situation au brunet pour qu'il comprenne et ne reproduise pas cette erreur, mais c'était personnel. Elle ne pouvait rien dire sans l'accord de son meilleur ami.

— Ecoute, dit-elle en se tournant vers Yeonjun. Je te crois et je vais envoyer un message à Soo pour lui expliquer. Je pense qu'il faut que tu sois au courant de certaines choses si tu restes vivre ici un petit peu mais il faut qu'il soit d'accord pour que je te les dise.

La colère qui brillait dans le regard du danseur s'apaisa un peu et l'ombre du soulagement effleura les traits tirés de son visage.

— Par contre, claqua la voix de la jeune femme, il va aussi falloir que tu m'expliques la raison de cette petite combine. Je sais que tu aurais très bien pu rester chez ton frère, il n'y a pas d'étages. Il n'y a aucune raison pour que tu demandes à rester chez Soobin, je trouve ça très louche et je compte bien avoir une explication.

— Je n'ai rien à te dire.

— Ok, du coup t'as pas d'problèmes à ce que j'explique à Soobin que tu lui as menti et que tu l'as manipulé pour qu'il accepte de t'héberger ? Il va adorer, j'en suis sûre.

Le sourire narquois de Yeji s'agrandit alors que son vis-à-vis perdait des couleurs.

— Tu ferais pas ça...

— Pourquoi pas ? Je t'aime pas, tu ne m'aimes pas. J'ai aucune raison de te rendre service ou de t'aider.

Elle se redressa et mit les mains sur les hanches, confiante même si Yeonjun la dominait de vingt bons centimètres. Elle était en position de force et elle le savait parfaitement. Le jeune homme serra les dents et les poings sans cesser de la fusiller du regard.

— Okay, je vais te dire pourquoi, t'es contente ? cracha Yeonjun.

— On verra, j'appelle Soo et je vais ranger ça. Va voir ailleurs si j'y suis pas.

Le brunet leva les yeux au ciel et fit exprès de la bousculer lorsqu'il passa près d'elle. Il claudiquait maladroitement sur ses béquilles et pendant un court instant la rousse envisagea de le balayer avant de se retenir, Soobin lui en voudrait s'il y avait un mort dans son appartement. Pestant contre le fait que Yeonjun était un imbécile profond, elle attrapa l'imposant carton et le cala contre sa hanche pour aller le déposer dans la chambre de son meilleur ami. De là elle envoya un message à ce dernier pour lui raconter la version du parasite. Plus calme, Soobin lui répondit de faire ce qu'elle voulait, qu'il ne s'y opposait pas, et prévint qu'il ne rentrerait pas avant le soir.

Yeji soupira, elle n'aimait pas le savoir mal. Bien plus maussade qu'au réveil, elle regagna le salon où était installé Yeonjun. Elle s'installa face à lui, son regard de chat l'étudiant de bas en haut. Le jeune homme grogna, mal à l'aise, et elle sourit fière de son petit effet.

— Alors ?

Il grogna et marmonna quelque chose qu'elle ne comprit pas.

— J'ai rien compris, allez.

— Je suis amoureux de Soobin et je voulais passer du temps avec lui ! siffla Yeonjun rouge comme un rubis.

Eberluée, Yeji resta quelques secondes sans voix. Puis elle éclata d'un rire sonore si bien qu'elle en eut les larmes aux yeux et des crampes à l'estomac. De toutes les explications qu'elle avait envisagées celle-ci était bien la plus ridicule, elle ne l'avait pas vue venir. Elle s'arrêta quand le souffle lui manqua et qu'elle vit à quel point le visage de Yeonjun était écarlate. Il regardait vers le sol mais elle put apercevoir ses yeux brillants et ses poings serrés.

— Attends, t'étais sérieux ? s'exclama la jeune femme.

— J'ai l'air de plaisanter ?

— Mais... ça fait trois ans que t'es le pire des connards avec lui ! Tu le rabaisses à chaque fois, t'es toujours en train de le critiquer et d'être désagréable !

— J'ai... quelques lacunes en communication, avoua Yeonjun du bout des lèvres. Quand quelqu'un me plait je panique et je fais n'importe quoi, je peux pas m'en empêcher...

Sous le choc, Yeji se laissa tomber dans le fond du canapé. Elle ne savait pas quoi dire et elle était un peu embarrassée de s'être moquée de lui, elle pensait réellement qu'il plaisantait.

— Ouais enfin c'est plus des lacunes là...

— J'essaye vraiment de faire des efforts mais c'est compliqué... Il me déteste et j'étais désespéré, venir ici était la dernière solution que j'ai trouvée pour essayer d'arranger les choses...

— Même dans les dramas ils font pas des merdes pareilles, soupira Yeji. Qu'est-ce qu'on va faire de toi sérieux ?

Un vent de panique passa sur le visage du brunet et il inclina rapidement le haut de son corps. Surprise, la jeune femme eut un mouvement de recul.

— Laisse-moi une chance, je t'en supplie...

— Ouais alors ça tu verras avec Soobin, m'embarques pas là-dedans. S'il accepte que tu restes je m'y opposerai pas mais si tu changes pas d'attitude rapidement avec lui je te tuerai. T'as intérêt de m'avoir dit la vérité. Soo veut toujours qu'on accorde le bénéfice du doute alors je vais l'écouter pour une fois et ne pas interférer mais je te surveille et au moindre écart...

Elle fit glisser son pouce sur son cou en un mime grossier d'un égorgement. Le message était clair, il allait devoir faire ses preuves rapidement car c'était la dernière chance qui lui serait accordée.

Nda :
Après une petite pause d'une semaine c'est le retour des publications ! J'espère que vous avez passé une bonne lecture  :)

Dalion~ Kiss :3