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Chapitre 11 : Le témoignage de Martine

  À huit heures trente précises, Martine Dubocage entra dans l'agence de détectives privés. Ewen, Maggie et Djamila étaient déjà prêts à la recevoir dans leur salle de réunion. Béthanie, quant à elle, ne s'était pas jointe à eux afin de ne pas risquer d'interrompre leur interrogatoire en devant retourner filer Laura Varet.

Martine était une petite femme fatiguée par la vie, comme pouvaient en attester ses cernes sombres sous ses yeux. Sa chevelure noire grisonnante était attachée avec un énorme chouchou délavé. Elle portait une longue jupe bohème avec un châle bariolé tout élimé. De manière complètement clichée, Maggie l'imagina sans peine essayer de lire l'avenir dans une boule de cristal. Mais si elle le pouvait vraiment, elle ne serait certainement pas devant eux.

Les détectives se présentèrent. Plutôt silencieuse, Martine les détaillait de ses yeux couleur d'ambre. Mal à l'aise, ils avaient l'impression qu'elle sondait jusqu'à leurs âmes.

« —Qu'est-ce que vous pouvez nous dire à propos de votre fille, Madame Dubocage ? demanda Maggie qui prit l'interrogatoire en main.

—Chloé est une jeune femme très intelligente, commença Martine après avoir pris une longue inspiration pour se donner du courage. Elle est... enfin... était, étudiante en philosophie. Son souhait était de devenir professeure de philo. Mais ça, c'était avant qu'elle rencontre Mélusine.

—Qui est Mélusine ?

—C'était une autre étudiante. Elles se sont rencontrées sur les bancs de la fac. Clo a toujours été très sensible à la nature, l'écologie, les plantes, le développement durable, toutes ces choses quoi. Mélusine, c'était pareil. C'est comme ça qu'elles ont commencé à accrocher. »

Martine fit une pause durant laquelle elle ferma les yeux. Ce moment dura quelques minutes. Gênés, les détectives pensèrent même qu'elle s'était endormie sur son siège.

« —Avant de vous raconter la suite, reprit la femme avec sa voix naturellement grave, il faut que je vous parle encore un peu plus de ma Chloé. Et plus particulièrement de son enfance.

« Chloé est mon premier enfant. Elle n'a pas le même père que mes deux fils. Son géniteur n'a pas voulu la reconnaître. Il est parti pendant la grossesse car j'ai refusé d'avorter ce bébé imprévu. Nous n'avions pas une bonne situation. Nous étions sans domicile fixe. Un jour hébergés dans la famille, l'autre chez des amis, après une nuit dans un hôtel miteux, en passant par quelques jours dans notre voiture quand les températures nous le permettaient.

« Nous aimions cette vie. Une vie sans attaches, sans obligations. Une vie libre. Nous étions licenciés ? Aucun problème, nous trouverons bien autre chose. Et il a fallu que mon implant me fasse défaut. Naïve, je pensais que je pourrais continuer à vivre cette vie de libertés. Mais j'ai très vite compris qu'on me retirerait mon bébé, à moi, la femme qui était considérée comme une SDF. Jamais je ne me suis vue sous cet angle.

« Je n'ai quand même pas souhaité avorter. J'avais cette vie en moi, ce n'était pas sans raison qu'elle ait été plus forte que la contraception. Le destin avait choisi pour moi, il fallait que j'aille au bout. Sauf que cet homme n'a pas vu les choses de cette façon. Lui voulait continuer de jouir de sa non-aliénation au monde. Alors il est parti, en changeant complètement de région.

« Moi, je suis retournée vivre chez mes parents. Ils m'ont soutenue le temps que ma fille naisse. Et peu à peu, j'ai quitté le nid, puis j'ai refait ma vie avec Francis. Nous avons eu nos deux fils. C'était aussi une belle vie, à sa façon.

« Malheureusement, Chloé ne s'est jamais sentie à sa place dans cette famille recomposée. Elle était terriblement mal. Elle se voyait comme l'enfant rejetée, celui dont on ne veut pas, celui qui n'est pas digne d'amour. Elle allait souvent chez mes parents. Je pensais qu'ils pourraient lui procurer un certain équilibre. Ils l'ont presque élevée. Cela a accentué le sentiment de rejet de ma fille.

« Et puis elle a vécu plein d'autres choses très difficiles. Sa meilleure amie est décédée d'un cancer quand elles avaient huit ans. Elle a vu un camarade à elle se noyer à la piscine pendant le cours de sport quand elle en avait onze. À quinze ans, elle est tombée amoureuse d'un garçon qui a été violent avec elle. Le jour de ses dix-huit ans, elle s'est faite agressée dans la rue par un homme à qui elle a refusé de donner son numéro. Il lui a mis un coup de poing en plein dans le nez qui a été cassé.

« Vous l'aurez donc compris, Clo était une jeune femme abîmée. C'était devenu une cible parfaite pour leur secte. Si je ne l'ai pas vu à l'époque, aujourd'hui, j'en suis persuadée, Mélusine était l'un de leurs membres. Je suis sûre qu'elle avait stratégiquement été envoyée à la fac afin de recruter du monde. Et c'est tombé sur ma Clo. »

Martine marqua une autre pause. Ses yeux s'emplirent de larmes, mais elle n'en laissa pas une seule s'échapper.

« —Pour en revenir à sa rencontre avec Mélusine, poursuivit Martine, elles étaient très copines. Ça me faisait plaisir de voir ma fille, qui avait été harcelée à l'école parce qu'elle était introvertie et qu'elle ne rentrait pas dans les cases, avoir une vraie amie avec qui elle partageait sa passion pour la nature.

« Et un jour, Mélusine lui a proposé qu'elles fassent un séjour de reconnexion à la Terre. Il s'agissait de faire trois jours de jeûne avant de commencer un régime alimentaire plus respectueux de son propre corps, en harmonie avec son environnement, et antispéciste.

« Je m'en rappelle très bien parce que j'ai été très emballée, et j'y serais bien allée. C'était sans compter sur ma Clo qui ne souhaitait pas que sa mère vienne interférer dans son séjour entre copines. Pensant être une bonne mère, j'ai respecté son souhait, et je le lui ai même offert pour son anniversaire. En réalité, j'étais en train de la jeter dans la gueule du loup. »

À ces mots, Martine s'effondra dans un râle de désespoir. Ses épaules furent secouées par de gros sanglots bruyants, remuant au passage toutes les franges de son châle qui s'agitaient dans des soubresauts anarchiques. Discrètement, Ewen approcha une boite de mouchoir de la femme. Les détectives n'avaient rien à faire d'autre qu'attendre que l'orage passe.

« —Et moi, lança Martine toujours en pleurant avec une douleur profondément ancrée dans l'océan de la culpabilité, moi, je n'ai rien vu et j'ai même continué à encourager ça. Je leur ai offert ma fille sur un plateau en argent. Ils ont juste eu à la cueillir !

« Parce qu'après son séjour, elle y est retournée pour faire un stage d'initiation à la naturopathie. Cette fois, c'était Mélusine qui le lui a offert. Clo en est revenue toute épanouie. Elle avait des étoiles plein les yeux. C'était décidé, elle voulait arrêter la fac pour se concentrer sur sa carrière naissante de naturopathe. Et là encore, je n'ai rien vu.

« L'été qui a suivi, elle a pu retourner travailler dans leur complexe gigantesque, un peu en dehors de Jouville. Elle m'a dit qu'elle avait été sélectionnée parmi tous les anciens stagiaires qui avaient postulé pour intégrer leur équipe en job d'été avant d'être prise en apprentissage. Elle me disait qu'ils la voyaient comme quelqu'un de spécial, avec un certain don pour se connecter à la nature et comprendre l'esprit humain. Et moi, conne que je suis, au lieu d'y voir une quelconque dérive sectaire, et bah j'étais aux anges de voir ma fille épanouie, et égoïstement fière de moi d'avoir engendré cette femme aussi douce et sensible.

« Sauf que, à son retour de ces deux mois de job d'été, c'est là que j'ai vu qu'il y avait un problème. Chloé avait le visage fermé. Elle évitait les conversations. Elle nous évitait, tout court. J'ai tout de suite imaginé qu'elle s'était faite agresser là-bas. Et le lendemain de son retour, je me suis rendu compte qu'en fait, le problème, c'était nous. »

Martine passa sa main sous son châle et en ressortit une feuille très abîmée. Sans un mot de plus, elle la tendit aux détectives. Le plus délicatement possible, Maggie s'en saisit. Religieusement, elle déplia le papier tandis qu'Ewen et Djamila se rapprochaient d'elle en prenant garde à ne surtout pas taper dans son bras au risque de provoquer une déchirure fatale.


Mamoune,

Je pars. Je ne me plais plus ici. Je n'ai jamais été désirée, jamais été comprise. Maintenant, j'ai trouvé un sens à ma vie. Je sais que, grâce à mon nouveau choix de vie, je vais enfin pouvoir être apaisée. J'espère que tu le seras aussi de me savoir heureuse, qu'importe où je serai.

Je vous souhaite de vivre heureux. Embrasse Gabin et Hugo.

Clo


C'était le message d'adieux de Chloé Dubocage.

  Un adieu pourtant pas éternel car elle était revenue. Elle était revenue pour repartir. Peut-être que leur faille se trouvait-là.

« —Qu'attendez-vous de nous ? demanda finalement Maggie, le visage grave.

—Je vous retourne la question, lui répondit Martine. Pourquoi m'avoir contactée autrement que pour remuer le couteau dans la plaie avec vos questions ? Je n'ai pas les moyens de vous payer pour retrouver ma fille.

—Quelqu'un a accepté de le faire à votre place.

—Qui ? Oh... J'imagine que c'est Baptiste ?

—C'est lui.

—Sa bonté le perdra. Pauvre garçon. Mais pourquoi vous vous intéressez tous autant à notre histoire ? Qui est cette personne portée disparue ?

—Une journaliste qui enquêtait sur les Naturels. Une mère de famille. »

Martine pinça ses lèvres dans une mimique de douleur. Passé le soupir de souffrance, elle regonfla ses poumons et fixa les détectives avec détermination :

« —Elle a posé les pieds dans quelque chose qui la dépasse. J'ai mis Baptiste en garde, et je le fais avec vous à votre tour. Qu'importe votre expérience professionnelle, vous mettez le nez dans un nid de cobras. C'est malheureux pour cette famille, mais je pense que vous devriez laisser tomber. Même si elle devait revenir un jour, elle ne sera plus jamais la même. On ne ressort pas indemne des Naturels. Si tant est qu'on puisse vraiment s'en échapper un jour. »

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