Noir - Cyan
Noir-Cyan
Je t'ai vu prendre possession du monde
Doucement, en premier,
Brutalement, ensuite.
Sans m'y attendre,
Du jour au lendemain,
Il était à toi.
Et tu t'es tourné vers moi,
Et tu m'as tout tendu,
De tes mains fragiles.
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« -TaeHyung, tu es parti hier soir.
-C'est vrai.
-Rattrape ton retard. »
Il toise son supérieur qui s'éloigne le long de l'allée jaunâtre. Et des allées, il y en a tant. Puis il croise le regard de son voisin de droite, plein de jugements et de réprimandes. TaeHyung ne ressent aucune honte. Il se sent un peu étrange. Et alors qu'il débute un nouveau programme pour machines, il sent ses gestes devenir lourds, il sent ses doigts devenir lents, il sent les yeux de son voisin qui se heurtent à son crâne brûlant et puis il sent le poids de tous les autres. Comme s'ils s'effondraient sur ses épaules. Au bout de quelques minutes, ou de quelques heures, il a des sueurs froides dans le dos, ses yeux pleurent des larmes acides, et ses tremblements sont devenus des spasmes violents. Il relève la tête de l'écran. Ses yeux balayent la salle, droit devant lui, des points de lumière jaunes, et des ombres noires entassées, accolées, toutes brouillées.
Et pour la première fois de sa vie, TaeHyung se demande comment ils en sont arrivés là.
Il ne s'en est pas rendu compte, mais il s'est levé de son siège. Debout, dominant tous les autres. Il regarde le monde qui l'entoure d'un œil nouveau. Le souvenir affreux de son enfance, assis devant des télévisions aveuglantes, lui revient en mémoire. Il se dit alors que la vie est comme une guerre, une guerre spirituelle. Même s'il n'y connaît pas grand chose à tout ça, il y croit. Et vu du dessus, son univers a l'air plus absurde qu'il ne l'a jamais été.
« -TaeHyung, assieds toi. »
Son regard flotte droit devant lui. Il voit tout. Il sent tout. Le monde est si lourd. Le monde est si lourd. Que fais-tu ? Ses jambes flageolent. Tout le monde l'ignore. Ce n'est qu'une crise de passage. Le travail c'est plus important. L'argent c'est plus important. Il n'existe pas de toute façon. Il n'existe pour personne. Est-ce que j'existe pour toi ?
« -TaeHyung, assieds toi. »
La même patience. La même confiance. TaeHyung reste là, à penser à lui. A penser à lui si fort que son estomac se tord et que sa gorge est sèche, que son palet flambe et que ses cils sont tout humides. Il pense à lui et il ne comprend plus rien. Il pensait savoir. Il ne sait rien. Son maintien, son équilibre, tout ça, ça expire.
« -TaeHyung. »
Il s'assoit.
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Viens me comprendre.
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Les nébuleuses noires
Comme des gouttes d'eau
Dans tes cheveux trop longs
Attachés en chignon.
Et tu reviens
Comme les vagues
Sur la baie.
TaeHyung s'oublie lui même. Dansant, essayant d'être quelqu'un d'autre. Perdu dans une foule d'imbéciles, une liste des choses incompréhensibles, et une silhouette qui n'est pas comme eux. Et ses bras dans les airs, avec ceux des autres, et ses mains dans ses cheveux, et sa peau dans la lumière bleutée, et ses lèvres qui scintillent, et son cœur qu'on entend, plus fort que le reste. Ses gestes sont légers comme le vent, pendant que les humains sont lourd et hargneux. Et pendant qu'ils se débattent avec eux mêmes, lui n'est qu'un oiseau.
JungKook le contemple. Il croit planer. Dans un monde comme celui-ci, il y a une créature comme lui.
La lumière va.
La lumière vient.
JungKook s'avance entre la foule. Le temps s'est engourdi. Son cœur s'engorge, son cœur déborde, quand il le voit. Il reste un moment comment ça, comme un incapable. Il le décrit, il l'admire, et il le décrit encore, dans sa tête. Sa fascination n'en est pas. Et ses yeux brillants, ses paupières un peu faibles, lui donnent un air d'obsession. Puis quand son corps n'y tient plus, à un doigt de se casser en deux, il s'avance. Il a l'impression de voler dans cette atmosphère bizarre. Il tend la main bien avant de l'atteindre. Il lui manque tellement. TaeHyung, les yeux clos, ne le voit pas. TaeHyung est toujours seul à cet instant. Jusqu'à ce qu'une paume passe sur son flanc, par dessous sa veste. Un bras l'entoure et le serre. Des doigts s'enfoncent entre ses côtes. Et TaeHyung le découvre lentement. Son visage est comme un souffle de soulagement. Il croit à un rêve. Et d'un coup il se met à sourire, et puis à pleurer. Pour de bon.
Ce n'est pas un rêve. C'est encore mieux.
C'est comme une bonne chanson.
C'est comme la couleur sur le mur.
C'est comme quand la nuit est clémente.
C'est comme plonger dans un bain de silence.
C'est tout ça à la fois, quand TaeHyung laisse ses mains redescendre et se poser sur ses épaules, dans son cou, dans sa nuque, contre son buste. Il ne sait plus s'il a arrêté de danser. Il se sent si bien. Il se sent si bien lorsque JungKook s'approche de son oreille et y murmure son nom. Son nom à lui. C'est un secret. TaeHyung aime les secrets. Alors il lui lance un regard qui promet. Il promet de le garder. Il laisse son visage s'approcher du sien, juste pour l'observer de très près. Juste pour voir qu'il est réel, qu'il est en vie, que c'est bien lui. Et leurs yeux se regardent. Ils aperçoivent les plaines sombres et vallonnées, les déserts de dunes brunes, tout autour de l'iris. Magnifique. Et JungKook a envie de lui dire autre chose mais lui même ne sait pas quoi. Il l'a sur le bout de la langue. Mais il ne sait pas quoi. Il ne comprend pas. Tout est cyan.
Alors ils restent là. Au milieu du monde. Et si loin à la fois.
Peu importe.
Ils se serrent fort.
Et personne ne sait pourquoi.
Ce sont des secrets que le cœur ne dit pas.
Jusqu'à ce que l'âme elle même ne l'avoue en silence.
Quelle chose étrange
Dans un univers étanche
Que celle d'aimer.
« JungKook. »
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