Chapitre 94
Juché sur un toit, Derek observait la ville. Il écoutait les gens, dans la rue, qui vivaient leur vie sans se soucier de rien ou presque ; il entendit deux vieilles femmes se chipoter pour un souvenir apparement incomplet, et plus loin, un couple qui roucoulait à la terrasse d'un café... Une odeur lui parvient soudain aux narines et il fronça les sourcils en baissant la tête. Jared sortait des bureaux du DPCS et traversa la rue à grandes enjambées, les mains dans les poches de sa veste. Intrigué, le loup le suivit du regard jusqu'à ce qu'il prenne la direction de l'immeuble où ils vivaient tous les trois avec Stiles.
— Il rentre à la maison... dit-il en se relevant. Pourtant je suis quasiment sûr qu'il travaille aujourd'hui...
Attrapant son portable, il lui envoya un message. La réponse mit quelques secondes avant d'arriver et elle fit froncer les sourcils au loup.
— Boulot, rappelle ce soir, lut-il. Et il me ment avec ça... Maintenant, je veux savoir pourquoi !
Quittant son poste d'observation, Derek descendit dans la rue et regagna l'immeuble où il avait son appartement. Il entra par l'entrée principale avec son badge, et monta normalement. Jared avait des sens suffisamment affûtés pour savoir qu'il était déjà repéré, et cela ne manqua pas, lorsque le loup sortit de l'ascenseur, Jared l'attendait sur le pas de la porte de l'appartement.
— Tu m'as menti, dit-il simplement en montrant le portable.
— Viens, répondit la Panthère. Je vais tout t'expliquer.
Derek plissa les yeux puis obéit et ferma la porte dans son dos. Il déposa son portable et ses clefs dans une coupelle en bronze sur un meuble près de la porte et chercha ensuite son ami du regard, mais il avait disparu.
— Jared ?
— Dans la cuisine.
Le loup s'y dirigea et observa l'autre qui semblait l'attendre.
— À quoi tu joues ? demanda-t-il.
— Je ne joues pas, Derek, j'ai un truc important à te dire... Ça ne va pas te plaire, mais Stiles m'a conseillé de te le dire...
— Mais de quoi tu parles, enfin ? Tu vas partir ?
Un blanc passa.
— Précisément, répondit la Panthère.
Derek sentir le sang refluer de son visage.
— Quoi ? Combien de temps ? Tu vas revenir ?
— Non, Derek, je ne vais pas revenir... Je pars demain à midi, je rentre à Oshawa. Je ne peux plus vivre ici, c'est devenu trop difficile, je...
— Arrête ! Tu as tout de que tu veux ici ! Je ne te demande même pas de loyer !
Jared serra les mâchoires, les yeux fermés, puis le regarda.
— J'ai tout, oui, dit-il. Sauf toi.
Le loup sentit un poids lui tomber dans l'estomac et son souffle se figea.
— Jared, tu...
— Je t'aime, Derek, depuis toujours, et si au début j'ai tout réfuté en bloc parce que j'avais peur, aujourd'hui, c'est plus possible. Je ne supporte plus d'être la cinquième roue du carrosse, celui qu'on se demande si on emmène en boîte ou au restau à chaque fois...
— Mais... Non, c'est faux, Jared, tu...
— Ne rend pas les choses plus difficiles qu'elles sont déjà, répondit Jared en secouant la tête. Quand nous vivions ensemble, je n'ai jamais osé tenter ma chance, tu m'impressionnais - et c'est toujours le cas, mais aujourd'hui je me rends compte que j'ai perdu une occasion en or d'avoir la vie que je rêvais d'avoir... Si je m'étais manifesté plus tôt, tu n'aurais pas pu faire remonter les sentiments que tu avais pour Stiles, j'aurais pris sa place et tout irait pour le mieux... À la place j'ai été mordu par une panthère-garou et tu m'as tué pour achever mes souffrances... Ma mort t'a brisé et tu es retourné auprès de Stiles sans même t'en rendre compte... Je n'étais pas censé revenir, mais ce connard de Destin en a décidé autrement...
Jared secoua la tête et renifla. Il passa ses mains sur ses joues sous le regard abasourdi de Derek.
— Je... croassa-t-il. Jared, je...
— Tu es désolé, je sais. Tu n'as rien vu parce que tu n'étais pas censé le voir, mais sache que je suis tombé amoureux de toi dès l'instant où tu as sonné à ma porte avec l'annonce pour le colocataire...
Derek déglutit.
— Pourquoi tu n'as rien dit ?! s'exclama-t-il soudain. Jared, bordel, nous avons vécu ensemble pendant cinq ans ! Punaise, sérieux, c'est quasiment toute une vie pour les jeunes !
— Et s'en est une aussi pour moi, Derek, mais à l'époque, je n'étais pas du tout dans cette optique, je passais mon temps à m'amuser et me taper tout ce qui avait un joli boule...
Jared serra alors les mâchoires et regarda le plafond. Derek l'observa un moment puis traversa la pièce et le saisit dans ses bras. Il l'enveloppa solidement en pressant son visage dans son cou, et la Panthère eut un hoquet. Il noua ses mains dans le dos du loup, le visage écrasé contre son torse.
— Je suis désolé ! souffla Derek. Je te demande pardon, je n'ai rien vu, je...
— Tu n'as rien à te reprocher, c'est ma faute... Je m'accroche toujours à celui qu'il ne faut pas et...
Derek releva la tête et lui fit face.
— Quand est-ce-que tu pars ? demanda-t-il doucement.
— Demain à midi... Je l'ai déjà dit à Stiles et tu sais quoi ? Il m'a proposé de passer la soirée avec toi, qu'il avait du travail et qu'il allait rentrer très tard...
Levant une main, Jared caressa la mâchoire carrée du loup qui grogna en baissant la tête.
— Je ne le tromperai pas, dit-il. Encore moins avec toi.
— Et je ne te demande rien. Je voudrais juste te dire au revoir convenablement, et pas partir comme un voleur et t'envoyer un message depuis Oshawa...
Derek posa son front contre le sien sans rien dire. Il ne savait pas quoi dire, de toute manière... Jared s'éloigna alors de lui et proposa du café. L'autre le regarda, incapable de décrire ce qu'il ressentait. Il était à la fois furieux mais aussi horriblement triste et terrifié. Oui, it était terrifié parce que Jared allait partir, il allait retourner chez eux, à Oshawa, et qu'il ne le reverrait sans doute plus jamais... Chez eux... Derek secoua la tête. C'était ici chez lui maintenant.
— Ne pars pas, dit-il soudain.
La Panthère esquissa un sourire tendu.
— Je n'ai pas le choix, dit-il. J'ai essayé de vivre seul, je reviens sans cesse ici, partout où je vais je vous croise, Stiles ou toi, même à l'hôpital ! L'endroit où je me disais que je ne verrais pas un seul loup-garou !
Il eut un rire nerveux et appuya sur la cafetière électrique avant de pivoter.
— Je voudrais revenir en arrière, Derek... dit-il en croisant les bras. Je voudrais pouvoir remonter le temps, prendre mon courage à deux mains et te demander de sortir avec moi, mais je sais que c'est impossible, que même avec toutes les créatures ultra puissantes qui nous entourent, aucune n'est capable de ça... Alors je dois accepter d'avoir raté le coche, de t'avoir perdu pour toujours et...
Derek traversa soudain la cuisine en deux enjambées et l'embrassa. Jared lui rendit le baiser après une nanoseconde de flottement, puis il le brisa.
— Non... souffla-t-il. Pourquoi...?
— Je t'aime aussi, Jared, mais Stiles a toujours été ma moitié... Il est mon ancre humaine, sans lui, je serais incapable de redevenir humain quand je me transformes en loup...
Jared passa sa langue sur ses lèvres et renifla en baissant le nez. Il grimaça.
— Pourquoi ? demande-t-il avec un sourire pincé. Pourquoi est-ce que j'ai survécu, hein ? J'aurais préféré rester mort, au moins j'aurais eu un bon souvenir de notre séparation, je n'aurais plus souffert de te voir te balader à moitié à poil dans le loft tous les matins...
Derek eut un rire humide.
— Ne pleure pas, grand con, dit alors la Panthère en l'entourant de ses bras. Tu vas me faire chialer...
Derek l'enserra dans les siens et rigola dans son cou en reniflant. Soudain, il l'entraîna avec lui le long du couloir et Jared freina.
— Non, dit-il en comprenant. Non, Derek, je...
— Je ne veux pas coucher avec toi, dit-il. J'ai juste envie de te serrer dans mes bras une dernière fois, de profiter un peu de ce que j'aurais pu avoir si je ne t'avais pas tué, avant que cela ne disparaisse pour toujours.
Jared déglutit. Derek tendit alors la main et l'autre hésita un moment avant de la prendre et de se laisser remorquer jusqu'à à sa chambre...
.
Stiles leva la tête de son dossier et soupira en regardant la pendule de l'ordinateur. Une heure du matin. Qu'est-ce qu'il faisait ? S'il décidait de rentrer, il pourrait trouver son compagnon dans une posture compromettante et prendre le risque de ne pas le supporter, mais d'un autre côté, il n'avait pas envie de dormir ici... Se mordant la lèvre, il attrappa son téléphone portable et pianota un message.
— Maman, est-ce que je peux venir dormir à la maison ? Envoyer.
La réponse ne se fit pas attendre malgré l'heure plus que tardive. Il savait que Beth ne travaillait pas le lendemain et qu'elle adorait regarder les programmes absurdes de la troisième partie de soirée.
— Bien sûr, la clef est où tu sais, lut-il avec un sourire. J'arrive alors.
Il quitta aussitôt sa chaise, éteignit la lampe en empoignant sa veste et quitta le bâtiment du DPCS. Il traversa la ville rapidement et se gara devant la maison, à côté du camion de son père aux couleurs du Shérif. Quand il entra dans la maison, cependant, Beth l'attendait dans le canapé et elle l'invita à la rejoindre en tapotant les coussins. Il ne se fit pas prier.
— Tu t'es disputé avec Derek ? demanda-t-elle.
— Non, j'ai travaillé tard et... Bon, en vérité, Jared m'a annoncé qu'il rentrait à Oshawa et il ne voulait pas le dire à Derek. Mais je lui ait dit de lle lui dire et... de passer la soirée ensemble.
— Oh, Stiles... Pourquoi ?
— Jared est amoureux de Derek depuis toujours, répondit le jeune homme en secouant la tête. Je ne peux pas le laisser partir comme un voleur, sans rien dire à celui qui a partagé sa vie pendant cinq ans... C'est pas bien.
Beth serra les lèvres.
— Derek l'aime aussi, ce garçon ?
— Je pense, oui, mais quand il a du abréger ses souffrances, ces sentiments sont morts avec Jared et ceux qu'il avait pour moi sont remontés à la surface. C'est pour ça qu'il est revenu à Beacon Hills sans même s'en rendre compte...
Berh sourit doucement et lui caressa la joue.
— Papa est couché ? demanda alors Stiles.
— Oui, il avait une migraine...
— Les loups ne peuvent pas tomber malade...
— Je sais, mais n'oublie pas qu'il a décidé de rester en retrait de la meute pour continuer à être le Shérif... L'absence de lien avec Scott le fait souffrir, mais il ne renoncera pas à sa liberté tant qu'il sera Shérif.
Stiles soupira.
— Je peux rester avec toi un moment ?
— Bien sûr, mon chat. Viens là.
Le jeune homme bascula alors contre elle, le regard rivé sur la télévision. Il ramena le plaid de la femme sur son épaule et elle lui caressa les cheveux en l'embrassant sur le front. Quand elle avait découvert que l'homme qu'elle fréquentait avait déjà un grand fils dont la mère était morte, elle s'était aussitôt prise d'affection pour le jeune homme et quand ses deux filles avaient commencé à désigner Noah comme leur père, il avait demandé à appeller Beth Maman...
— J'ai été la femme la plus heureuse du monde quand tu m'as demandé l'autorisation de m'appeler Maman, tu sais ? dit-elle alors.
— Oui, tu me l'as dit au moins mille fois depuis...
— Et cela ne sera jamais assez, répondit la femme avec un sourire. J'avais abandonné l'idée d'avoir un autre enfant, mais voilà que quatre ans plus tard, j'ai non seulement un fils aîné, mais aussi un bébé... Danny est le bébé le plus gentil et agréable que j'ai connu.
— C'est un Magicien, sourit Stiles avec un haussement d'épaule. Il sait très bien que tu es sa maman de remplacement et qu'il doit être gentil avec toi s'il veut rester ici.
— Il n'a même pas un an, je t'en prie... sourit Beth. Pour en revenir à Derek...
— Non, je n'ai pas envie d'en parler.
— Bien. Dans ce cas, continuons à regarder cette émission totalement absurde.
La seconde suivante Beth rigolait bruyamment dans sa main et Stiles sourit. Il se laissa glisser sur ses genoux en ramenant le plaid sur lui et se perdit dans la contemplation de la télévision...
.
Jared inspira et fronça les sourcils. Se frottant le visage, il chercha sa montre sur la table de nuit sans la trouver. Un bras jaillit alors de nulle part et l'écrasa littéralement sur le meuble. Jared se tourna sur le dos.
— C'était ma montre préférée... dit-il.
— Je t'en offrirai une autre, répondit Derek en se redressant sur un coude.
La Panthère l'observa. Du bout des doigts, il lui caressa le torse et esquissa un sourire.
— Et dire que j'ai raté d'avoir cette vue tous les matins au réveil... dit-il.
Derek esquissa un sourire, lui prit la main et déposa un baiser dans la paume avant d'aller l'embrasser.
— Même si tu avais trouvé le courage de te déclarer, nous n'aurions pas pu finir notre vie ensemble... dit-il ensuite.
— Parle-moi de cette histoire d'ancre humaine... Est-ce que c'est obligatoire pour les loups-garous ?
— Que ceux qui sont susceptibles de perdre le contrôle. Scott est extrêmement puissant mais il se contrôle parfaitement, Anise fait office d'ancre pour lui, mais elle n'est pas humaine, elle l'a simplement lié à elle magiquement. Concernant Stiles, c'est différent. C'est un pur humain et après tout ce qu'il a traversé depuis que Scott a été mordu, il est toujours là, il n'est pas devenu fou et il est prêt à en découdre avec qui que ce soit qui s'en prendrait à la meute. J'imagine que c'était écrit, nous concernant...
— Je vois. Les ancres sont-elles toujours des amants ?
— Pas que je sache. Stiles a été l'ancre de Scott au début, et ils sont comme des frères.
Jared hocha la tête. Jetant un coup d'œil vers la fenêtre occultée par des persiennes, il soupira.
— Il a l'air d'être encore tôt... dit-il.
— Stiles a dû aller dormir chez ses parents, répondit Derek. Ce qui signifie que nous sommes tous les deux jusqu'à ce soir au moins...
— Je pars à midi... Et non, tu ne me feras pas changer d'avis simplement en te tenant là, dans le plus simple appareil ou presque...
Jared détourna la tête et Derek rigola. Il l'attira alors à lui et l'enlaça dos à lui. La Panthère rigola.
— Tu crois qu'on aurait été heureux ensemble ? demanda-t-il alors, sur un ton plus sérieux.
— Heureux et très heureux, même, répondit le loup. Tu as été ma lumière, Jared... Quand je suis parti de Beacon Hills, j'étais un homme brisé, un loup mortifié, tu m'as aidé à remonter la pente sans même t'en rendre compte ; nous étions les meilleurs amis du monde, nous partagions même les nanas !
Jared rigola.
— J'avais oublié ça !
Il se retourna alors et fit face à son ami.
— Je voudrais rester, avoua-t-il. Je te le jures, mais c'est trop douloureux.
— Et si tu dois partir pour ne plus souffrir, alors qu'il en soit ainsi. Les distances sont abolies de nos jours, un simple e-mail ou un SMS et nous pourrons vérifier que l'autre est toujours vivant... Je voudrais que tu restes, mais j'aime trop Stiles pour lui imposer ta présence dans ma vie comme une sorte d'amant à cacher...
Jared baissa le nez. Il se mordit la joue puis Derek se redressa au-dessus de lui et l'embrassa. La Panthère s'abandonna à ses caresses ; ils avaient passé toute la nuit à se câliner et Jared avait engrangé tout l'amour qu'il pouvait, car il savait que jamais il ne retrouverait quelqu'un du même niveau que Derek Hale...
.
Stiles ne rentra à l'appartement qu'en fin de journée. Il avait un peu d'appréhension en sortant de l'ascenseur, mais quand il entra dans l'appartement et trouva Derek dans le canapé, devant la télévision, son anxiété s'envola aussitôt.
— Salut, chéri.
— Salut, tout va bien ?
Derek hocha la tête en coupant le son. Stiles se pencha alors sur lui et l'embrassa une longue seconde.
— C'est en quel honneur ? demanda le loup.
— Parce que Jared est parti et que je sens d'ici ta tristesse.
Derek déglutit. Stiles quitta ensuite le salon et entreprit de préparer du thé. Quand il revint, il s'assit près de son compagnon et lui demanda de tout lui raconter.
— Je voudrais garder cela pour moi, si tu n'en vois pas d'inconvénients... répondit le loup. Mais ne t'en fais pas, il ne s'est rien passé.
— Je te crois, mon amour. Je te fais confiance, sinon je n'aurais pas autorisé Jared à passer la soirée avec toi. Et la nuit, peut-être ?
Derek esquissa un sourire.
— L'après-midi, la soirée, la nuit et la matinée, répondit-il.
— Pardon ? Eh bien...
— Je n'ai consenti à le lâcher que quand il m'a dit qu'il ne restait plus que quinze minutes pour enregistrer ses bagages... Si j'avais pu le téleporter...
Stiles esquissa un sourire. Il inspira ensuite et, se relevant, il prit les mains du loup et l'entraina dans le couloir.
— Stiles, qu'est-ce...
— Tu es triste et j'ai le remède parfait à la tristesse.
— Tu veux vraiment faire l'amour maintenant ?
— Maintenant, il y a une heure, demain, je te veux tout le temps, Derek, je t'aime et je veux qu'on puisse fonder une famille un jour, qu'elle soit biologique ou pas...
Le loup haussa les sourcils puis eut un sourire en coin et un roulement monta de son torse. Quand il saisit Stiles par la ceinture du pantalon en le hissant sur ses hanches, celui-ci comprit parfaitement le sous entendu et lui décrocha un large sourire...
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro