Chapitre 8.1 : route toute tracée.
-Prends soin de toi, Kate ! me lança Emma alors que je me couvrais pour aller dehors.
Je ne pus m'empêcher de sourire en roulant mes yeux.
-Mais oui ! Ça va bien se passer, Emma, promis.
Elle hocha lentement la tête, perdue dans ses pensées. Depuis la veille, elle était étrangement silencieuse. Elle devait être préoccupée par sa campagne électorale qu'elle devait préparer, et je n'avais pas envie de la déranger. Je partis dans les rues dégivrées, le col du manteau relevé et les mains dans les poches, marchant d'un bon pas. Mes bottes frappaient les pavés dégelés et le soleil couchant caressait la ville, renvoyant les reflets des fenêtres sur le sol.
Arrivé au point de rendez-vous, aux abords Est de la Ville, je fus surprise de voir des voitures. À l'intérieur de la citée, ces engins étaient interdit sauf pour les milices spéciales. La pollution avait été si forte pendant un temps à cause des usines de l'industrialisation qu'un des décrets du gouvernement avait été de supprimer définitivement ces machines de nos rues, pavant toutes les avenues jusqu'aux toutes petites ruelles. Les bas-quartiers n'avaient pas échappés à la règle, sauf sur les limites extrêmes du territoire civilisé – si on pouvait décrire les bas-quartiers comme tel.
Le Docteur Morwe Brad m'attendait à l'intérieur d'un véhicule. Lorsqu'il me vit, il lâcha l'écran de son téléphone pour me sourire. Il n'avait pas sa blouse de travail, mais une tenue décontractée composée d'une chemise blanche, un pantalon bleu nuit et des chaussures de ville. Ses cheveux blonds étaient remis en arrière sur son crâne et ses yeux bleus me scrutèrent. Je remarquais pour la première fois une cicatrice sur son cou.
-Doc ? m'étonnais-je. Mais... les voitures existent encore pour les civils ?
-C'est une voiture de fonction, rit-il. J'ai certaines missions dans la Jungle, pour observer la biodiversité et chercher de nouveaux vaccins contre les maladies ou autres cancers. C'est un peu ennuyeux à expliquer.
Je hochais la tête, ayant oublié ce détail. Le Docteur m'invita à entrer dans l'engin, ce que je fis avec un peu de réticence : jamais je n'étais entré dans une voiture. Mais Brad su trouver les bons mots pour m'apaiser et je fermais la portière dans mon dos.
-Il faut s'attacher, me dit-il en me montrant la ceinture de sécurité.
-Pourquoi ?
-Un accident de la route peut te tuer si tu ne mets pas ta ceinture.
Des sueurs froides me prirent et j'ouvris la portière. Le docteur me prit doucement le poignet pour m'empêcher de sauter à l'extérieur.
-Kate ! Ça ne risque pas d'arriver ! Mais on n'est jamais trop prudent...
-Vous trouvez ça naturel d'entrer dans un truc qui peut vous tuer si vous ne vous y ligotez pas ?
Le Docteur Brad rit. Quant à moi, mon instinct refusait de se calmer. Cette chose métallique n'avait rien de rassurant à mes yeux.
-Doc ! Je suis sérieuse !
-Kate, mon chauffeur n'a jamais eu le moindre accident, la route sera plate et on ne dépassera pas les cinquante kilomètres heure et même moins si tu n'es pas rassurée.
Je le regardais dans le fond des yeux. Il était sérieux, même si un sourire amusé continuait de planer sur ses lèvres. De mauvaise grâce, j'acceptais à nouveau de fermer la portière et accrochais la ceinture de sécurité en tirant dessus pour être presque soudée au siège. Le Docteur s'amusa de ma nervosité et se pencha vers le siège avant, où un homme en noir attendait.
-Prenez la route vers l'Est.
-Bien, monsieur.
-Où allons-nous ? demandais-je.
-À Wadestreet, m'indiqua le Docteur en reprenant son téléphone. J'ai passé une journée éreintante et je n'ai pas encore eu la chance de manger.
Je le dévisageais. Wadestreet était tout le contraire de Wallstreet. Une rue illuminée en permanence par milles feux, on tirait les jours de fêtes des feux d'artifices et toutes les maisons paraissaient dorées tellement les paillettes sur les tenues brillaient sous les lampadaires. Les coupes de champagne s'y enchaînaient avec la fureur des danses mondaines. Le Docteur sentit mon regard et se tourna vers moi.
-Ça ne te dérange pas ?
-Non. Mais je vous préviens tout de suite : je n'ai pas de quoi payer l'apéritif.
Le blond sourit d'un air paternel.
-Je t'invite, Kate. J'ai pensé que te mettre dans une ambiance loin des bas-quartiers t'aiderait peut-être à parler de ce qui t'es arrivée.
Je frissonnais, ce qu'il ne manqua pas de remarquer. Avant qu'il ne me questionne, je revêtis mon visage impassible, lui souriant poliment en le remerciant de son attention. Je ne l'avais pas dupé, mais il eu la galanterie de ne pas insister. Le chauffeur alluma le moteur et roula sans plus tarder.
Quand j'allais raconter ça à Emma, elle serait sans aucun doute jalouse. Toutes les adolescentes de la Ville rêvaient de pouvoir accéder à Widestreet, rien qu'une soirée, pour rencontrer le prince charmant et passer une vie aux milles merveilles. Malheureusement, Widestreet était fermée par un péage qui nécessitait une carte pour entrer. Les policiers et autres gardiens armés surveillaient en permanence la limite de la rue, ce qui refroidissait quelques peu les ardeurs des aventuriers. Les métamorphes, proies comme prédateurs, étaient strictement interdits dans l'enceinte de ce quartier – par pur racisme, ce qui en faisait crier plus d'un. Le dernier problème était que cette rue n'est accessible que par voie motorisée. Il fallait une voiture ou un engin technologique du même acabit pour arriver jusqu'au péage, ce que n'avait pas la majeure partie des habitants de la Ville.
-Monsieur, nous sommes suivis.
Je sortis de ma rêverie pour regarder par la fenêtre. Un fourgon blanc se trouvait derrière nous. Le Docteur Brad lâcha son téléphone pour jeter un regard vers l'arrière. Il pinça ses lèvres.
-Semez-les.
-Oui Monsieur.
-Qui est-ce ? m'alarmais-je.
-Sans doute des prédateurs.
-Ils savent conduire ? Depuis quand ?
Morwe pinça ses lèvres et fusilla du regard le fourgon dans notre dos.
-Je l'ignore, mais j'ai appris avec le temps à ne surtout pas sous-estimer nos ennemis. Ils ont déjà essayés quelques fois de faire sauter nos fourgons alors que nous essayions de récolter des échantillons dans la Jungle.
Je frissonnais. La voiture accéléra, tout comme les battements de mon cœur. Puis, je vis une forme courir sur la route, passant devant nous. Je lâchais un hoquet.
-Doc ! Il y a quelque chose dehors !
Le Docteur se pencha vers moi pour voir ce que j'observais, lorsqu'un rugissement nous parvins de devant. Le chauffeur hurla alors qu'un tigre nous sauta dessus, toutes griffes dehors, frappant le pare-choc. Je hurlais à mon tour en voyant les yeux mauves brillants de cet animal sauvage. Il réussit à traverser la fenêtre et griffa violemment le chauffeur, qui perdit le contrôle de la voiture. Elle fit plusieurs tonneaux, valdingua vers les fossés et finit par s'écraser sur le côté dans un bruit sourd. Le crissement du métal contre le béton fit saigner mes oreilles.
Sonnée, ma première réaction fut de me détacher et de sortir en hâte de cet engin de malheur. Puis, je me rappelais que le Docteur était encore à l'intérieur. Je me ruais vers la voiture, mais une explosion frappa juste devant moi et le souffle de l'air m'envoya violemment rouler dans la terre fraîche et molle des champs alentours. De la fumée envahit mes poumons et me força à tousser. Je regardais par réflexe vers la voiture qui venait de prendre feu. Mes muscles étaient hors service. Mes mains avaient râpées le sol et des cailloux s'étaient incrustées dans mes paumes.
Je cherchais le Doc du regard, horrifiée. Une main s'abattit sur ma bouche pour me tirer en arrière. Je criais et me débattais, essayant de me défaire de la poigne saisissante de l'homme qui me tenait. Un nouveau rugissement de tigre s'éleva dans les ombres face à moi. On me traîna sur le sol sur quelques mètres, puis me redressa en bloquant mes bras au niveau de ma taille. Un souffle se déposa dans mon cou.
-Bonsoir, Princesse.
Je ne connaissais pas cette voix. Mais ce surnom me rappelait les métamorphes que j'avais déjà vu. Je me crispais, sentant le danger, et me débattis plus encore. Mon ravisseur rit et me traîna sur le sol. Il prenait un malin plaisir à me mener vers les ombres, loin du brasier. Je ne savais pas si le Doc était encore en vie. Je voulais savoir, lui apporter mon aide, mais l'homme ne me laissait pas partir.
L'imposant tigre qui nous avait attaqué gronda face à nous, les yeux brillants. Il s'avançait parmi les flammes, la gueule ouverte, le nez froncé. L'envie d'attaquer scintillait dans ses pupilles améthyste. Des coups de feus retentirent derrière moi et me firent sursauter. Le prédateur fut obligé de reculer pour se mettre à couvert. Un grondement de douleur lui échappa. Il avait été touché.
J'ordonnais dans un hurlement à l'homme qui me tenait de me lâcher. Mes paroles n'étaient pas compréhensible. Une ombre s'approcha et me mit un sac sur la tête. Une odeur étrange s'en dégageait et me donna le tournis. L'homme qui me maintenait me tourna face à lui, prit mes poignets dans ses mains, et en quelques gestes les lia avec ce que j'identifiais comme une corde. Je cherchais à m'enfuir. Des mains attrapèrent mes jambes et me soulevèrent.
-Pourquoi elle n'est pas assommée ? se renseigna un homme.
-C'est plus drôle comme ça, s'amusa l'homme qui me tenait. Aller, embarque-la. Elle ne devrait pas tarder à s'endormir.
-Maître, on va où ?
-D'après toi, sombre idiot ?! râla une voix féminine. Dans les champs de pâquerettes pour se bourrer les phéromones, peut-être !
Un grondement contrarié lui répondit.
-Edwige, soupira la voix masculine qui me portait.
Je ne compris pas ce qu'il dit ensuite. Mes sens se brouillèrent, mes jambes devinrent du coton. Je compris trop tard que l'étrange odeur sur le sac était en réalité un somnifère. Je luttais pour garder les yeux ouverts.
-Libérez-moi !
Ma voix me fit l'effet d'une supplique. On me jeta sur une une surface confortable, m'arrachant un petit cri. Je cherchais à sortir, mais on me poussa à nouveau en arrière.
-Oh non, Princesse. Tu ne sors pas de là. De toute façon, mes phéromones t'ont marquées, alors même si tu t'échappes, je te retrouverais.
Je poussais un cri étranglé. Le somnifère prenait peu à peu le pas sur ma peur. Comment ça, ses phéromones ? Ce métamorphe m'avait marqué ? Et pourquoi ?
Un grondement de moteur me fit sursauter. C'est là que je compris que j'étais dans le fourgon blanc qui nous avait suivis. Alors que nous nous engageâmes à nouveau sur la route, je sentis un sommeil forcé me gagner et me faire sombrer dans l'inconscience.
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Bonjour par ici ! J'espère que vous allez bien :3 c'est un chapitre assez long que je vous propose (1796) et j'espère qu'il vous a plu. Si c'est le cas, n'hésitez pas à le signifier avec un petit commentaire ou une petite étoile !
Je vais essayer de publier plus rapidement pour la suite des événements, je vous avoue que je n'avais pas prévue d'être aussi lente dans la publication.
(Petite indication : dans les prochains chapitres, y'a de grandes chances que ça se casse la gueule --^--)
En attendant, prenez soin de vous !
Auvouar !
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