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9e Bougie : Emeth

          Les légendes ne naissent pas du néant. Nombreuses furent celles qui commencèrent par le biais d'un élément anodin de la vie quotidienne ou d'une croyance erronée en une donnée scientifique à présent maîtrisé. Mais il en existe dont leurs origines restent encore inconnues, mystiques, incompréhensibles... Il s'agit des plus splendides d'entre toutes. Mais il arrive aussi, contre toute attente, que la plus rayonnante ne soit pas la plus mystérieuse. Il suffit parfois de la contempler pour en admirer toute la pâle beauté désincarnée.

          À cet instant, voilà exactement ce que Sébastien Oster faisait, plus immobile qu'un golem d'argile durcie. Il fixait une légende en devenir de son regard vert sombre plus tranchant qu'une épée effilée. Sa colère initiale s'était lentement transformée en ressentiment, puis au final, il retombait dans l'inquiétude. Pire qu'un père avec sa fille ! Et ses sentiments n'avaient d'ailleurs rien à voir. Il devait bien admettre qu'il se sentait lié à cette « gamine ». Une sorte de fil invisible les attachait l'un l'autre aussi solidement qu'une paire de menottes. Depuis l'accident dans sa chambre, où elle lui avait « aspiré » de l'énergie, ce sentiment s'était durci. Ô bien sûr, il l'avait d'abord ignoré, comme le reste quand l'idée le dérangeait.

           Plus maintenant. Car à travers le gouffre de l'inconscience, il sentait Lola dans ses entrailles. Il percevait son esprit englué dans les ténèbres et qui essayait avec force de s'en échapper. Et la seule tentative de Sébastien de s'approcher d'elle lui avait encore valu une journée de sommeil...

– Encore là, vieux ? demanda posément Gaël.

           Ce dernier déposa une main qui se voulait réconfortante sur l'épaule de son collègue et ami. Face à son désespoir palpable à des kilomètres à la ronde, il n'osait plus vraiment plaisanter avec lui, d'ailleurs. Il n'avait jamais connu cet homme dans un tel état et personne ne savait quoi faire pour l'aider.

– Son pouvoir est extraordinaire... Pourquoi la plonge-t-il dans le coma à chaque utilisation ? marmonna rageusement Sébastien.

           Les médecins spécialisés rattachés à son cas ne comprenaient rien. Sur le plan purement médical, Lola se trouvait en parfaite santé, quoiqu'un peu anémiée. Ils s'étaient empressés de lui faire passer une série d'examens incroyables, pour aucun résultat. Elle était normale, en forme... mais inconsciente.

– Elle manque peut-être de muscle...
– Hein ?
– Bha oui, tu sais, ces athlètes qui s'entraînent des années pour participer aux J.O. ? Ils se font du muscle pour supporter l'épreuve. P't'être qu'elle a juste besoin de muscle, avança Gaël, comme un aveugle en pleine autoroute.

          Pourtant, son idée étrange résonna en Sébastien longtemps. Si le muscle permettait de courir, qu'est-ce qui permettait d'arrêter des projectiles dans les airs et soigner des maladies incurables ? Qu'est-ce que Lola lui avait pris les deux fois où ils s'étaient touchés ? Il appelait cela de « l'énergie », mais de quoi ?

           Son regard toujours fixé sur la jeune femme inconsciente dans son lit blanc semblait fiévreux. À travers la grande baie vitrée, il devenait fou. Tous les sous-sols du bureau ressemblaient à une fourmilière depuis son arrivée dans l'espace médical. Le monde entier avait contemplé ces balles en lévitation dans les airs... et tous ignoraient que Lola s'en trouvait responsable.

          Jusqu'à quand ?

           Un champ de fleurs. Une forêt immense tout autour. Un arbre au centre, gigantesque. Lola se rapprocha de ce dernier avec respect et humilité. Il dégageait une force et une puissance qui semblait résonner jusque dans son corps. Où se trouvait-elle ? Elle l'ignorait. Tout ce qu'elle savait provenait de ses sens. Elle voyait la nature, respirait l'odeur des fleurs et la verdure, entendait le bruissement des feuilles, goûtait la douce brise et sentait l'air chaud de cet espace ensoleillé. Mais contre toute attente, elle pouvait prédire l'arrivée du vent quelques secondes à l'avance, tout comme elle percevait nettement toute l'énergie qui circulait tout autour d'elle et se regroupait en ce point précis : ce chêne immense.

          Comme si elle abordait un animal blessé, elle se rapprocha de lui par petits pas jusqu'à frôler son écorce rugueuse. Il n'était ni chaud ni frais, juste tiède, comme le bras d'un être vivant où pulsait la sève au-dessous.

– Bonjour...

          Pour unique réponse, l'énergie qui circulait à travers l'arbre fluctua un peu avant de vrombir vers sa frondaison luxuriante. Une autre ramure de feuilles fit son apparition aussi facilement qu'un coup de pinceau sur une toile. Lola sourit de toutes ses dents face à ce phénomène impossible et regretta de n'avoir personne avec qui parler de cela.

– Et moi ? Je suis là. J'ai toujours été là pour toi, Eola, déclama une voix androgyne.

          De surprise elle se retourna non sans se mettre face au chêne, comme pour le protéger de l'intrus. Mais la personne ne fit pas mine d'approcher. Il ou elle se tenait simplement devant elle, les bras croisés sur un vêtement noir ajusté près du corps, un manteau sombre par-dessus. Même la coupe de cheveux au carré et les traits du visage radieux n'aidèrent pas Lola à fixer le genre de cette apparition. Tout ce qu'elle savait, c'était que ce nouveau venu arborait un regard aux yeux vairons ; un marron, l'autre vert.

– Qui êtes-vous ? Et où suis-je ? demanda la jeune fille, soudain prise de panique.
– Dans le neuvième naeva, l'Emeth, la Vallée aux Âmes, les limbes hauts, le nirvana... Appelle-le comme tu le souhaites. Et je suis... une représentation chimérique de ton inconscient.

          Contre toute attente, elle reçut une réponse. Pas exactement celle qu'elle espérait, ceci dit. Néanmoins, ce début d'explication la détendit.

– Qu'est-ce que je fais ici ?
– Ton âme a été repoussée jusqu'à l'Emeth à cause de ta manipulation intensive de forces. En tant que Gardienne du Destin encore incarnée et réceptacle d'Eola, tes facultés à maîtriser la matière sont bien supérieures à celle des autres vivants. Mais ta capacité à user de ta puissance est mauvaise, alors tu te bloques toi-même ici.
– Bon... Tu viens de me perdre. Ce n'est pas grave.

          Lola souriait telle une demeurée dans un asile tout en se rapprochant de ce qu'elle considérait maintenant comme « un petit bonhomme » à défaut de réussir à lui donner un autre nom. Une fois arrivée à sa hauteur, elle s'assit et lui fit signe d'en faire autant. Ils se contemplèrent un long moment dans un parfait silence, juste rythmé par cette belle « journée », ce vent, cette douceur et le bruit adorable des petits oiseaux... qui n'existaient pas plus que le reste, si elle comprenait bien.

– Tu as dit que nous sommes... en Emeth ?
– À l'Emeth, oui.
– Explique-moi.
– Considère les mondes comme des mille-feuilles. Pour chacun d'entre eux, il en existe neuf, les naevas. La neuvième correspond à l'Emeth. Généralement, seules les âmes désincarnées peuvent trouver le chemin vers ce naeva, car son accès est réservé aux êtres spirituels.

          Super. Elle imaginerait maintenant la Terre comme une pâtisserie géante et elle comme un phénomène de foire.

– Je ne suis pas normale, donc ?
– Tu as déjà conscience d'être Eola, je me trompe ? Tu as même libéré Aloé dans l'Hélom. Vous êtes des âmes très spéciales. Vous n'avez pas besoin d'être désincarnés pour atteindre l'Emeth...

          Bien avant son accident de car et son coma, elle avait aidé son père pour une dernière « tâche » d'importance : sauver le massivers (1). Seulement durant l'opération, elle avait appris qu'elle était une âme issue d'une entité à l'origine de l'univers. Tout comme Aloé, l'autre moitié de cette même entité. Mais...

– Hélom ?
– Le cinquième naeva. Mais tu ne t'en souviens plus de cela...
– Donc j'ai atteins cet endroit par accident... Comment je fais pour en partir ?

          L'œil marron et celui vert du « gamin » le fixèrent avec un sérieux implacable.

– Apprend à dompter ton esprit, Eola. Ressens l'énergie autour de toi. N'utilise plus ton âme pour t'opposer aux autres Forces. Maîtrise tes pensées. Accepte ta puissance, ne la combat pas. Et surtout... N'use pas ta supériorité pour briser l'Équilibre.
– D'accord... Tu as conscience encore une fois que je ne comprends rien, hein ?

          L'être face à elle poussa un soupir avant de mimer un air désespéré en se prenant la tête entre ses doigts. S'il représentait réellement son subconscient, elle était en train de se moquer d'elle-même... Ou bien elle devenait folle et délirait, ce qui restait une possibilité tout à fait acceptable.

– Eola, tu as vu l'âme de ton père terrestre se transformer en Protecteur du Massivers, comment peux-tu renier ce que je viens de t'expliquer ? Tu n'as aucun dérèglement psychologique, il va falloir t'y faire. Tu dois juste apprendre à maîtriser tes capacités hors norme. Si tu retrouves Aloé, il pourrait t'aider et te soutenir, il a déjà vécu cela, une fois.

          Lola n'eut pas le temps d'ouvrir la bouche pour répondre ou poser une autre question, que le « petit bonhomme » disparaissait comme un hologramme. L'immense chêne derrière elle continuait de résonner au son entêtant de la sève qui circulait en rythme. Le vent soufflait dans les branchages. Les animaux n'émettaient plus aucun bruit.

– Il a dit... de ressentir l'énergie... Maîtriser mes pensées... et accepter...

          À toute allure, elle se releva pour foncer droit sur l'arbre et déposer sa paume contre son écorce. Depuis son arrivée ici elle réussissait à percevoir la force tout autour d'elle ! Il ne lui suffisait plus que s'occuper de son esprit encombré d'idées parasites et...

           La main s'enfonça dans le tronc de l'arbre, puis le bras et enfin tout le corps fut entraîné dans la chute. Comme si un trou béant venait d'apparaître face à elle...

            Elle bondit du lit où elle se trouvait allongée pour s'y asseoir, en panique. Ses yeux marron rencontrèrent ceux vert forêt de Sébastien à travers la vitre de séparation et un sentiment de plénitude retomba aussitôt sur ses épaules. Ils se regardèrent un long moment sans bouger, dans un silence calme et reposant. L'instant d'après, plusieurs médecins apparaissaient à son chevet pour l'ausculter, incapables de comprendre comment elle s'était réveillée seule.

          Lola esquissa un sourire. Sébastien lui répondit de la même manière, soulagé.

           Elle venait de retrouver son corps... après ce qui ressemblait à un voyage astral involontaire. Mais cette fois, non seulement elle se souvenait de ce qu'elle avait vécu, mais les informations récoltées à l'Emeth revenaient dans son esprit aussi clair que des pages de livre noircies à l'encre. Elle pouvait accéder à toute la conversation étrange avec son inconscient sans effort. Pis ! Elle comprenait même certains détails qui restaient obscurs depuis lors.

          Son pouvoir, c'était celui du Destin. Elle pouvait le manipuler, l'influer, le tordre, le stopper, l'empêcher, le remonter... Voilà pourquoi les balles de fusil s'arrêtaient. Voilà comment elle guérissait. Il ne s'agissait pas de magie, mais bien d'une faculté à contraindre une Force de l'univers. Et pas n'importe laquelle...

« Tu dois juste apprendre à maîtriser tes capacités hors norme. Si tu retrouves Aloé, il pourrait t'apprendre, il a déjà vécu cela, une fois. »

          Un objectif dans son monde encore chaotique. Deux, si elle comptait la maîtrise de ses capacités. Jusque là, elle utilisait directement l'énergie de son âme pour plier le Destin à sa volonté... Il allait falloir trouver une autre méthode moins risquée. Sans éveiller plus les soupçons du bureau machin-truc qui devait déjà être bien sûr les nerfs, vu qu'elle n'était pas à l'hôpital. Peut-être avec l'aide de Sébastien... ? Ah... Et passer le baccalauréat, en option.

– Tu te sens mieux ?

          Les médecins impuissants avaient disparu. Il ne restait que son garde-chiourme et elle. À sa question polie, elle hésita à lui révéler ce qu'elle venait de vivre, même si elle en mourait d'envie d'en parler à quelqu'un.

– Ah. Alors ça y est ? Tu as trouvé tes réponses ?

           Elle se décida à sourire, l'air de rien.

– Oui.

           Sébastien effectua un lent hochement de tête compréhensif, non sans pianoter une seconde sur le rebord du matelas et esquisser un balancement de hanches digne d'un professionnel de l'indécision. Cela ne lui ressemblait pas, elle en avait bien conscience.

– Austère ?
– Tu comptes faire quoi ?

          Lola émit le plus magnifique sourire qu'elle possédait en stock et prit son air le plus innocent de la planète, qui tromperait jusqu'à sa mère...

– Passer le BAC bien sûr !

          ... mais pas Sébastien.

(1) cf Le Passeur de Mondes

Publié le 12/04/17

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