- Julia -

Il y a des fois où vous vous réveillez le matin et où vous vous dites que le soleil est étonnamment rayonnant, que le ciel est étonnamment bleu, que les oiseaux sont étonnamment gais et que la vie est étonnamment belle. Enfin là, c'est juste moi qui suis étonnamment de bonne humeur.

Je me rappelle encore de la réaction de Javannah et Laurel quand je leur ai annoncé que j'étais amoureuse : elles ont ri (enfin Hannah n'a pas ''ri'', mais vous m'avez comprise).

C'est vrai qu'il en faut peu pour me plaire. La plupart du temps, il suffit que quelqu'un soit gentil ou drôle. Or, Zander possède ces deux qualités. Sans compter le fait qu'il soit super sexy.

Mes meilleures amies sont très jolies, donc elles ne peuvent pas comprendre la joie que me procure l'attention qu'il me porte. Ce n'est pas tous les jours qu'un garçon aussi beau que lui s'abaisse à me demander de passer du temps avec lui. J'ai l'impression d'être dans un rêve.

Aujourd'hui nous n'avons pas cours, étant donné que c'est la rentrée des aînés. Javannah et moi avons décidé de nous promener dans la forêt qui entoure l'Université.

Laurel dort encore et il est hors de question que nous risquions nos vies pour la réveiller, surtout si c'est pour une promenade matinale. Aby, quant à elle, est sortie voir un ami.

La balade n'a duré qu'un quart d'heure. Nous parlions de Laurel lorsque le téléphone de mon amie a sonné. C'est rare que son petit-ami l'appelle et qu'elle décroche. Ça fait longtemps qu'ils ne se sont pas revus. Je leur laisse un peu d'intimité et accélère le pas.

Puis je me retourne et la vois assise sur l'un des bancs en bois. Elle me fait un signe de la main qui se traduirait par ''Continue seule je te rejoindrai, pauvre fille célibataire.'' Enfin, c'est comme ça que je m'amuse à l'interpréter. Je sais bien qu'Hannah n'a aucune arrière-pensée, elle n'est pas comme moi. Je la laisse donc avec son amoureux et reprends ma promenade de santé.

Devinez sur qui je tombe une fois arrivée au grillage blanc ? Oui, il s'agit bien de Zander Nordy ! Et cette fois, il est seul. Quelle chance !

- Salut Julia ! lance-t-il. Qu'est-ce que tu fais ici toute seule ?

''Mes meilleures amies refusent de passer du temps avec une laideur comme moi. Et j'ai faim.''

- Rien, je me promène, dis-je simplement. Et toi ?

Il me montre son magnifique sourire. Je n'ai plus si faim que ça, finalement. Je crois que je viens d'avaler des papillons.

- Je vais acheter à manger pour les gars, ça te dirait de te joindre à nous ?

... Je vais m'évanouir. Ou plutôt je me suis déjà évanouie et tout ça n'est que le fruit de mon imagination. Je me demande pourquoi je me sens obligée de répondre :

- Ça dépend, où vas-tu ?

Mais qu'est-ce qu'il me prend de jouer les filles inaccessibles ? Pour une fois qu'un beau garçon m'invite !

- J'vais au resto chinois pour commander des nouilles à emporter, tu aimes ?

Tu me proposes de manger des nouilles sautées avec le gars pour qui je craque et tu me demandes si j'aime ?

- Je suis partante !

***

Et c'est comme ça que je me suis retrouvée devant le bâtiment B des garçons, en portant des sacs en papier contenant des boîtes de nouilles chinoises encore chaudes.

Le dortoir est très différent du nôtre : pour faire court, il ressemble à un logement social. Zander a sûrement remarqué mon air décomposé :

- Ouais, c'est plutôt différent ici, dit-il, côté budget et esthétique.

Je hoche simplement la tête. Nous nous dirigeons vers une porte où il est écrit ''Bureau du concierge''

- Le concierge ne sera pas là de la journée, ajoute-t-il, alors ne fronce pas les sourcils.

Il s'approche et pousse mon front avec son index, juste entre mes deux sourcils. Je pense qu'à ce moment précis j'ai les joues aussi rouges que le logo du resto chinois.

Nous traversons un bureau avant d'arriver dans une salle de réunion. Plusieurs tables sont rassemblées au milieu de la pièce avec des chaises autour. Toute la bande est là. Les remarques fusent dès notre arrivée :

- C'est pas digne d'un homme tout ça, chef, siffle un premier, faire porter des sacs à une nana.

- Tu nous présentes pas ? dit un second.

Zander rougit légèrement sous les moqueries de ses amis. Il est vraiment trop adorable. Il se dépêche de faire les présentations. Je suis sûre que je ne vais retenir aucun des noms. Je m'assois sur l'une des chaises lorsque j'entends Zander demander :

- Où est Avril ? Elle n'est toujours pas arrivée ?

Je me raidis. Qui est Avril ? La petite-amie de Zander ?

- Quand on parle du loup, intervient Marcus (enfin je crois qu'il s'appelle Marcus), la voilà !

J'entends le bruit d'une porte qui se ferme et quelqu'un entre dans la pièce.

- Eh vous n'allez pas m'croire les gars ! Je me suis rendue compte que j'avais oublié les boissons alors que j'allais ouvrir la porte ! Vous imaginez, j'ai dû refaire tout le trajet !

Les garçons l'applaudissent alors qu'elle brandit fièrement deux sacs plastiques remplis de boissons rafraichissantes. Ses yeux s'arrêtent sur moi :

- Oh mais tu dois être la Julia dont Zander m'a parlée ! Enchantée, je suis Avril, la seule et unique fille de la bande.

- Ça faisait un moment que je voulais te la présenter, ajoute Zander, j'espère que vous allez bien vous entendre, toutes les deux.

Le reste du repas se passe dans la joie et la bonne humeur. Je ne peux m'empêcher d'admirer le charme sauvage qui émane d'Avril.

Ses yeux bruns et profonds s'accordent parfaitement avec ses cheveux qui sont d'une teinte plus claire. C'est quelqu'un qui a confiance en soi (contrairement à moi) et a un corps d'athlète (contrairement à moi).

Néanmoins je passe un agréable moment avec tout le groupe qui semble m'apprécier autant que je les apprécie. Je les remercie une dernière fois avant de rentrer à la chambre 27 :

- J'ai adoré passer du temps avec vous. J'aime beaucoup cette ambiance chaleureuse et familiale. J'espère pouvoir revenir.

- C'est quand tu veux ! me répond quelqu'un dont j'ai visiblement oublié le prénom.

Je sors du bâtiment alors que Zander m'appelle :

- Attends, je te raccompagne !

Il veut... me raccompagner ? Moi, Julia Hastings alias la Baleine ?

- Non, vraiment ça ira, dis-je, je vais rentrer seule.

Et voilà que je recommence à jouer les filles inaccessibles...

- J'insiste, je veux marcher un peu avec toi.

Il plante ses beaux yeux dans les miens. Ils sont bruns et il est tellement proche de moi que j'ai l'impression qu'ils ont des reflets rouges.

Bon Dieu, comment vais-je faire pour oublier ce regard envoutant ?