Prouve-le [Seokjin]
La chanson Epiphany, de Jin, est si belle que ça m'a inspiré un nouvel OS. Le message des paroles est magnifique et, si je ne peux pas prétendre pouvoir le retranscrire ici, j'espère au moins que cette très courte histoire vous plaira. :)
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Tous les deux étaient encore très jeunes, après tout il avait vingt-six ans et elle vingt-cinq, mais tout s'était passé très vite, trop peut-être. Ils n'avaient pourtant pas l'impression d'avoir brûlé les étapes ; ils s'étaient mariés trois ans auparavant et étaient ensemble depuis à présent dix ans. C'était probablement pour cette raison qu'il avait la sensation que ses sentiments s'étaient progressivement dissipés et qu'ils n'étaient plus que de doux souvenirs d'un passé qu'il idéalisait.
Mais elle, elle n'avait rien vu venir ; jamais elle ne se serait imaginée si jeune face à ce dossier, stylo à la main, et c'était probablement parce que c'était trop irréel qu'elle ne ressentait rien devant cette situation. Non, son cœur était complètement vide depuis l'instant où il lui avait présenté ces papiers et lui avait demandé de les lire attentivement puis de les signer. Elle avait simplement levé les yeux vers lui, comme pour essayer d'y déceler la moindre trace d'humour, espérant en vain que ça serait sa pire blague.
Pourtant c'était réel, et peu à peu l'évidence s'imposait à elle, apportant avec elle une douleur insoutenable pour la jeune femme.
« Jin... »
Plus elle lisait les lignes du contrat de divorce, plus la réalité prenait forme. Le garçon avec qui elle avait si longtemps cru qu'elle ferait sa vie lui avait demandé d'apposer sa signature sur ce document, et elle n'avait ni la force ni la patience de refuser et de le laisser engager une procédure au tribunal. Si tout devait s'arrêter, que ça s'arrête le plus rapidement possible, à la manière d'un pansement qu'on arrache. De toute façon, la douleur dans son cœur était déjà lancinante au point qu'elle avait la sensation qu'on y portait un coup de poignard. Tout semblait lui tomber dessus brusquement alors que quelques mois plus tôt, elle se considérait comme la plus heureuse des épouses.
Son rêve de bonheur avait volé en éclat quand il lui avait avoué qu'il n'était plus heureux avec elle, qu'il y songeait depuis un certain temps déjà et qu'il avait pris sa décision. Et aujourd'hui il lui demandait de signer ça ; il ne manquait plus que sa signature pour que le divorce soit prononcé, le partage des biens lui semblait équitable - quoiqu'ils n'avaient pas grand-chose à partager, ils étaient tous deux très modestes - et il n'y avait aucun différend sur un quelconque sujet.
Pourtant elle était meurtrie, meurtrie de n'avoir rien vu de l'évaporation des sentiments de son mari, son premier amour, meurtrie de n'avoir rien pu y faire, meurtrie qu'il ne lui en ait même pas parlé. Il aurait dû ; ils en auraient discuté aussi longtemps qu'il le fallait, après tout elle ne souhaitait que son bonheur, peu importe si son bonheur se trouvait avec elle ou non. Car oui, elle l'aimait au point qu'elle était prête à le laisser partir si elle savait que c'était ça qui pourrait lui redonner ce sourire si doux qu'il avait toujours. Mais là c'était trop dur, c'était sorti de nulle part et elle n'avait pas même eu le temps de comprendre ce qu'il se passait que déjà, elle se retrouvait face à ce papier, stylo en main.
Elle serra le crayon en baissant la tête ; où qu'elle regarde, tout dans ce petit appartement lui rappelait ce qu'elle allait perdre, et les biens matériels, elle s'en moquait éperdument. Elle tentait de retenir ses larmes et quand Jin posa sa main sur son dos avec délicatesse pour l'inciter à signer, elle ne put se contenir plus longtemps : ses lèvres se mirent à trembler, ses larmes firent briller ses yeux et elle étouffa un sanglot qui la fit frissonner. Ses mains plaquées sur les yeux, elle se mordait brutalement la lèvre inférieure dans l'espoir que cette douleur annihilerait celle de son cœur, mais c'était peine perdue. Une âme désespérée n'a pas de répit, et même la douleur physique ne lui fait pas oublier. Sa poitrine la faisait atrocement souffrir et précipitait de petites larmes hors de ses yeux.
Attristé - car néanmoins il demeurait très attaché à elle -, il lui apporta rapidement un mouchoir qu'elle saisit en le remerciant de sa voix douce, sa si belle voix qui avait toujours réussi à apaiser ses maux.
« Ça va aller, lui assura-t-il avec tendresse, d'accord ?
- Je suis désolée Jin...
- C'est rien, tu as tout ton temps pour signer.
- Non, pas pour ça ; je suis désolée de ne pas avoir vu que tu étais malheureux avec moi, j'étais trop aveuglée par mes sentiments pour voir les tiens et je n'ai pas su être là quand tu avais besoin de moi. »
Ses mots étaient régulièrement coupés par ses sanglots et plus elle parlait, plus il avait mal au cœur. Elle avait toujours été si joyeuse, si douce, et à présent la voilà dans cet état à cause de lui ; il s'en voulait mais d'un autre côté, ça serait mieux pour eux deux.
« Dis pas ça, lui susurra-t-il, c'est moi qui n'aie rien voulu montrer pour ne pas te faire souffrir.
- On est un couple Jin, et c'est justement pour ne pas me faire souffrir que tu aurais dû me parler de ce qui te tourmentait.
- Je crois que j'avais simplement toujours eu la crainte de ne pas te plaire, d'être trop... moi, de ne pas être assez bien pour toi. Je t'aime mais j'ai peur de n'être plus capable de te combler et avec le temps, ça a fini par faire s'estomper mes sentiments, simplement parce que je n'arrivais plus à être heureux à force de tourner ça dans mon esprit : tout est de ma faute, ne t'excuse pas.
- Mais qu'est-ce que tu racontes ? Comment peux-tu espérer aimer quelqu'un si tu ne t'aimes pas toi-même, et comment peux-tu espérer que cette personne t'aime en retour si tu n'es pas capable de lui montrer qui tu es vraiment ? Jin, tu n'as jamais eu besoin de masque, tu es quelqu'un d'incroyable, tu veux toujours aider les autres pourtant une fois que le problème te touche personnellement, tu préfères ne pas en parler de peur de faire mal, simplement parce que tu n'as pas confiance en toi et que tu es persuadé que les autres pourraient te rejeter... Mais ce n'est pas ça l'amour ; tu aurais dû me parler, depuis le début. Apprends à t'aimer, sois en accord avec toi-même, tu le mérites tellement. Je pensais que notre relation te rendait heureux mais si tu ne t'es jamais autorisé à être complètement toi-même parce que j'étais là, est-ce que tu as déjà pu t'épanouir avec moi ? Pourtant tu sais quoi ? Je suis convaincue que le Jin que j'ai vu tout ce temps était bien celui que tu étais réellement, car on peut faire semblant d'être quelqu'un de bon, mais avoir le réflexe de bondir pour prêter son parapluie à une vieille dame quand il pleut, ça n'est pas quelque chose sur quoi on peut mentir. Je suis sûre d'avoir toujours vu le vrai Jin, parce que même si en surface, tu ne voulais pas vraiment me montrer certaines choses que tu considères comme des défauts, au fond tu n'as jamais su dissimuler quoi que ce soit. Tu avais beau faire des efforts, je voyais bien que tu étais aussi timide que moi, mais je trouvais ça mignon, pas repoussant. Tout chez toi m'a toujours attiré, pourquoi est-ce que je t'aurais épousé sinon ? On ne peut jamais cacher qui on est vraiment.
- Je suis désolé si mes mots ont pu te blesser, dit-il d'un air peiné, mais c'est simplement que... Je ne sais pas, quand je vois les autres je me demande toujours comment tu as pu me choisir moi, je n'ai rien d'extraordinaire et parmi mes amis, je suis celui qu'on ne voit jamais, qui est invisible aux yeux d'autrui, alors comment toi tu as pu poser ton regard sur moi ?
- Le regard des gens est peut-être attiré par la beauté, mais leur cœur est attiré par leur confiance en eux, leur personnalité. Tu es timide, tu n'oses pas te dévoiler, mais moi je t'aime, et je suis prête à t'aimer tel que tu es, quels que soient tes défauts, parce que ce n'est pas d'une qualité que je suis tombée amoureuse, c'est bel et bien de toi Jin, de toi tout entier. Je ne t'ai jamais demandé de changer pour moi, je t'aime tel que tu es parce qu'ainsi, à mes yeux, tu es parfait.
- Mais pourquoi... ?
- Il n'y a pas de raison, justement, c'est parce que mon cœur l'a décidé, un point c'est tout ! »
Alors que ses sanglots s'étaient calmés, ils refirent surface. Elle l'aimait, elle l'aimait tellement, mais lui était trop aveugle pour le voir, il voulait tant lui plaire qu'il avait fini par essayer de changer ce qu'il était sans se rendre compte que c'était justement ce qui le rendait malheureux.
« S'il n'y avait qu'une seule personne à qui tu devais donner ton amour, ça devrait être toi, reprit-elle. Tu es la seule personne qu'il est important que tu aimes. Ce n'est pas égoïste, on a tous besoin de se sentir bien avec nous-mêmes, tu n'as pas à avoir honte de qui tu es. Mais tu sais quoi ? Je crois que le pire, c'est de me dire que finalement, on a tous les deux gâché toutes ces années avec une relation qui n'a abouti qu'à ça.
- Non, ne dis pas de telles choses, on n'a rien gâché du tout.
- Bien sûr que si, on a tous les deux perdu notre temps, j'aurais voulu que ça se passe autrement.
- Je ne regrette pas de t'avoir aimée, tu m'entends ? J'ai passé les plus belles années de ma vie à tes côtés, simplement je n'ai plus ces sentiments que j'avais avant.
- Alors prouve-le, montre-moi que ça n'a pas été vain, montre-moi que je n'ai pas à avoir ni regrets ni remords. »
Elle leva vers lui son visage ravagé par la douleur. Ses joues étaient rougies, ses yeux brillants mais cerclés de rouge, ses lèvres qu'elle avait mordillées avaient commencé à saigner et son nez qu'elle avait exagérément mouché avait pris la teinte de ses joues. La voir dans cet état à cause de lui lui fit particulièrement mal et il se sentit coupable de la rendre si triste. Il avait longtemps pesé cette décision, il y réfléchissait depuis des mois, et quelques larmes suffisaient à ébranler ses convictions. Même triste à ce point, elle demeurait si belle, et elle avait l'air si fragile qu'il n'avait qu'une envie : la prendre dans ses bras et lui assurer une fois de plus que tout irait bien. Mais elle le repousserait probablement en le suppliant de ne pas rendre ça compliqué ; alors lui aussi souffrait, mais il ne voulait rien en montrer pour ne pas la peiner davantage.
Elle soupira bruyamment et posa le stylo près de la feuille avant de se mettre debout, à sa hauteur.
« Prouve-moi que tout ça n'a pas été vain et je signerai. Prouve-moi que tu as un jour eu assez confiance en moi pour m'aimer sans placer de barrière entre nous, et je signerai sans regrets, mais ne m'oblige pas à accepter de divorcer en pensant que je suis la cause de notre situation à tous les deux, en pensant que c'est parce que j'ai été aveugle que tu n'as pas été heureux. Ne me laisse pas croire que je ne te méritais pas, je t'en prie...
- Chérie...
- Pitié Jin, je ne peux pas mettre un point final à cette relation en pensant que j'ai perdu dix ans de ma vie et, pire encore, que je t'ai fait perdre dix ans de ta vie que tu as passés à être malheureux. Je ne veux pas imaginer que tout ce temps tes sourires étaient faux, même si tu prétends le contraire.
- Tu m'as toujours fait sourire, tu ne le vois donc pas ? demanda-t-il en passant sa main sur sa joue pour en effacer les larmes. Je t'assure que j'ai su me dévoiler face à toi ; peut-être pas tout le temps, je te l'accorde, mais assez pour que tu puisses voir que mon amour pour toi était sincère.
- J'ai cru le voir, mais maintenant j'en doute, Jin.
- Alors si c'est ce que tu veux, je vais te le prouver. »
Tandis qu'il appuyait ses mots avec assurance, il sortit quelque chose de sa poche : il prit son téléphone et alla dans sa liste de chansons avant de trouver celle qu'il cherchait et de la mettre en route. Dès la première note, elle la reconnut : la chanson de leur rencontre.
Dix ans plus tôt, alors que tous deux avaient été invités à la fête d'amis qu'ils avaient en commun, ils avaient échangé des regards toute la soirée sans oser s'adresser la parole, timides qu'ils étaient. La soirée progressant, l'alcool avait poussé certains à s'endormir, d'autres avaient préféré filer aux toilettes, et il n'avait resté que peu d'invités sobres à trois heures du matin. C'était à ce moment que la chanson était passée. Ils n'avaient que quinze et seize ans ; ils s'étaient levés d'un même mouvement et il lui avait tendu la main en lui demandant si elle souhaitait danser avec lui, vainquant sa timidité. Le cœur tambourinant dans la poitrine, elle lui avait souri en baissant les yeux et avait simplement acquiescé en entrelaçant ses doigts fins aux siens.
Des années plus tard, c'était lors de l'ouverture de bal de leur mariage qu'il était venu la voir et lui avait tendu la main en lui demandant de danser avec lui. Elle avait rougi et, envoûtée par l'ambiance romantique de leur mariage ainsi que par le regard amoureux de celui qu'elle venait d'épouser, elle avait souri, baissé les yeux et acquiescé avant de lui donner la main.
Aujourd'hui, il lui tendit la main une fois de plus.
« Danse avec moi. »
Les larmes avaient repris possession des yeux sombres de la jeune femme qui sourit d'une façon qui mélangeait nostalgie et mélancolie. Comme elle était belle. Elle leva son visage au plafond en fermant les yeux ; la pluie qui battait le sol dehors se mêlaient tristement à leur musique, et les nuages noirs qui avaient assombri le ciel et, de fait, la pièce, donnait une ambiance parfaite pour cette situation. Le bruit était doux, régulier, contrebalançant les battements anarchiques de son pauvre cœur qu'elle tentait vainement de consoler. Elle souffla doucement en tentant de garder son calme et d'apaiser ses sanglots, après quoi elle fit un pas vers lui et accepta la main qu'il lui tendait ; terminer leur relation comme elle avait commencée, voilà comment il comptait lui rappeler à quel point ils avaient tous deux été sincèrement heureux, car ils l'avaient été.
Il la serra contre lui dans l'espoir de lui montrer qu'il serait toujours la pour la soutenir, quoi qu'il arrive, car le fait que ses sentiments s'estompent n'avait pas effacé l'affection qu'il lui portait. Elle s'accrocha au t-shirt qu'il portait, elle avait la sensation qu'une fois qu'elle le lâcherait, il disparaîtrait pour toujours, et cette sensation était la plus douloureuse qu'elle puisse imaginer. Il chantait doucement tandis que leurs pas se faisaient lents, rythmés par la cadence si douce de la chanson. Il avait une voix magnifique, elle lui avait si souvent réclamé qu'il chante quelque chose quand elle ne se sentait pas bien. Et lui il avait toujours accepté, l'apaisant au simple moyen de son chant en passant affectueusement sa main dans ses cheveux tandis qu'il la prenait dans ses bras.
Elle sentit qu'il mettait une main dans le creux de ses reins, l'autre derrière sa tête, l'obligeant à poser sa joue contre son torse. Jin quant à lui cala sa tête contre sou cou ; tous deux dansaient lentement, et tandis que la chanson avançait, elle revivait chacun des plus beaux moments de leur relation, chacun de leurs sourires, chacun des baisers qu'ils avaient échangés. Tous ces instants qu'ils avaient partagés et pendant lesquels ils sentaient leur cœur tressauter dans leur poitrine, si bien qu'ils savaient alors qu'ils étaient le plus heureux des couples du monde, car même quand il arrivait que le ton monte, ce n'était jamais long et les deux regrettaient rapidement et s'excusaient en souriant d'une façon gênée.
Jin revoyait leur rencontre, leur premier baiser ce soir-là une fois que la chanson s'était achevée, alors même qu'ils ignoraient tout l'un de l'autre, simplement parce qu'ils sentaient un lien qui s'était immédiatement crée entre eux. Il revit leur première fois, cet acte d'amour charnel qui avait été si doux, puis leur installation dans ce petit appartement qu'ils pouvaient louer malgré leur situation... puis il l'avait demandée en mariage. Il l'avait emmenée au sommet de la colline où ils aimaient se balader, et tandis qu'ils observaient, assis sur une serviette, le soleil se coucher en colorant d'un rose inoubliable les quelques nuages qui se promenaient dans le ciel ce soir-là, il lui avait demandé de se lever et s'était agenouillé face à elle en lui tendant la bague qui avait appartenue à sa grand-mère. Il avait été bouleversé de la perdre, et elle lui avait laissé cette bague en partant, lui promettant que la fille au doigt de laquelle il la passerait serait la femme de sa vie. Il n'avait pas hésité un instant à lui offrir cette bague si précieuse à ses yeux, car alors y brillait les flammes d'un amour qu'il croyait éternel et indéfectible.
Alors des larmes commencèrent à poindre au coin de ses yeux et une vive douleur s'empara de tout son être. Il sentit que le corps maigre de sa femme tressautait encore de temps en temps à cause des sanglots qu'elle espérait camoufler. Elle enroula ses bras autour de son cou et soupira contre son torse, si bien qu'à travers le fin tissu de son t-shirt, il put sentir son souffle chaud s'écraser sur son pectoral, y faisant naître des frissons et réchauffant son cœur à la fois. Plus les secondes passaient, moins il voulait la lâcher, et quand les dernières notes résonnèrent, c'était comme si une explosion ravageait tout ce qu'il croyait, ne laissant derrière elle que des doutes.
La chanson s'acheva, mettant fin à un moment de parfaite osmose entre les deux époux.
« Merci Jin... »
Le souvenir de tous ces merveilleux instants qu'ils avaient vécus lui avait fait comprendre : rien n'avait été vain, chacune de leur expérience avait été unique et magique, il n'y avait rien à regretter et plutôt que d'en pleurer, elle devait en sourire, car même s'il était difficile pour elle d'imaginer que tout cela était derrière elle, elle se dit qu'elle avait encore de nombreuses choses à vivre - avec un autre.
Apaisée, elle retourna s'asseoir face au document que Jin avait ramené de chez le notaire. Elle ne pleurait plus, elle n'avait plus de larmes à verser et si son cœur était toujours aussi lourd, son esprit du moins était léger car elle était finalement parvenue à relativiser cela. Si le divorce permettrait à Jin d'être heureux de nouveau, alors il était hors de question qu'elle le prive de son bonheur ; si Jin ne pouvait être heureux que seul, en parvenant enfin à s'accepter, alors soit, elle le laisserait seul. C'était la seule chose qui avait de l'importance, car il avait un si beau sourire qu'elle ne voulait pas que son mal-être l'empêche de le montrer. Il n'aurait plus à se sentir obligé de cacher qui il était vraiment.
Sa main toujours tremblante trahissait cependant sa douleur, car cela demeurerait sûrement l'acte le plus compliqué dont elle ait jamais eu à décider. Elle retira d'abord la bague qu'elle avait à l'annulaire et la posa sur la table, près de Jin ; elle savait la valeur sentimentale que cet anneau avait aux yeux du jeune homme et il était hors de question pour elle de le garder. Un jour Seokjin trouverait une femme à qui il passerait cette alliance, et tous deux seraient heureux comme jamais.
« Tu auras toujours une place dans mon cœur, » lui murmura-t-elle en traçant lentement les lettres de son nom à l'emplacement requis.
Son cœur se serrait mais elle l'ignora, or elle ne put ignorer la main de Jin qui se posa sur le dos de la sienne, mettant un terme à ce qu'elle était en train de faire. Elle demeura immobile, ne se rendant pas vraiment compte de ce qu'il était en train de faire.
« Jin, qu'est-ce que tu fais ? l'interrogea-t-elle sans se tourner vers lui.
- Une erreur monumentale. »
Elle ne comprenait plus ; que voulait-il dire ? Sa main toujours sur celle de sa femme, il écarta le stylo du document alors qu'elle n'avait pas encore signé et tandis qu'il faisait cela, il glissa à l'aide de sa main libre l'anneau à l'annulaire de la jeune femme. Elle regarda sa main, abasourdie, son cœur hurlant dans sa poitrine, son visage exprimant la plus totale incompréhension. Jin serra ses mains dans les siennes et la tira doucement pour lui signifier silencieusement de se lever. Elle se laissa faire sans discuter et lorsqu'ils furent face à face, elle put voir qu'il avait lui aussi les yeux remplis de larmes qui ne demandaient qu'à s'échapper.
« Merci de m'avoir permis de m'en rendre compte. »
Elle n'eut pas le temps de réagir qu'il la serra dans ses bras avec une infinie tendresse. Tous ces souvenirs qui avaient rejailli en lui, tous ces sentiments desquels il s'était rappelé ; il ne pouvait pas abandonner tout ça, il ne pouvait pas l'abandonner, elle, il l'aimait beaucoup trop pour ça. Il avait eu des doutes, il avait été persuadé de ne plus rien ressentir, mais il s'était trompé, il n'était simplement plus en mesure de voir à quel point elle lui était précieuse, mille fois plus que cet anneau qu'elle avait à son doigt, et infiniment plus que sa propre vie. Elle était tout à ses yeux, rien ni personne ne pourrait la remplacer, mais désormais son cœur s'emballait et il savait que c'était à cause d'elle, à cause de ses larmes. Elle était la personne la plus belle et la plus incroyable du monde, la chaleur de son corps et la douceur de sa peau étaient inégalables, sa tendresse et son calme étaient admirables et il s'était attaché au fil des années à tous les aspects de sa personnalité si particulière. Comment avait-il pu ne serait-ce qu'envisager le divorce ?
Il prit doucement son menton entre ses doigts et l'amena jusqu'à lui pour déposer chastement et amoureusement ses lèvres sur les siennes, si douces malgré les morsures qu'elle s'était infligées. Le baiser était tendre, chacun de leurs sentiments s'y mêlaient dans une explosion d'amour qui se répercuta dans tout leur corps.
Elle avait raison, il n'avait pas été capable de se dévoiler entièrement, et c'était cela qui avait freiné ses sentiments, car au-dessus de l'amour qu'il lui portait, il y avait la peur qu'un jour elle le voie tel qu'il était et qu'elle le quitte pour ça. Ils s'étaient rencontrés à l'adolescence et déjà, Jin était quelqu'un de renfermé qui n'osait aller vers personne d'autre que ses six amis. Pourtant il y avait eu cette fille, cette fille dont le charme ensorcelant lui avait permis de s'ouvrir. Il avait voulu faire des efforts pour elle, quitte à ne plus vouloir montrer ses faiblesses, mais il n'avait pas compris que c'était avec ces faiblesses qu'elle l'aimait. C'était lui qui avait eu tort depuis le début, il n'aurait pas dû changer pour elle puisque dès le départ, elle l'avait accepté tel qu'il était, puisque dès le départ, leurs deux cœurs avaient battus avec une parfaite synchronisation, en une délicieuse harmonie. Il n'avait jamais eu besoin d'un quelconque masque derrière lequel se dissimuler.
Il l'aimait au point qu'il ne pouvait pas comprendre comment elle pouvait le désirer lui, il l'aimait au point de se dénigrer. Mais grâce à elle, grâce à ses mots et son amour, parce qu'elle avait été prête à le laisser partir pour qu'il puisse se sentir de nouveau libre et heureux sans avoir à se cacher, il avait compris. Elle était prête à lui offrir son corps, son cœur et son âme, pas parce qu'elle ne voyait pas ses défauts, mais parce qu'elle les acceptait, parce qu'elle l'aimait tel qu'il était, parfait ou non. Elle était prête à accepter de divorcer si cela pouvait le rendre plus heureux en lui permettant de s'aimer lui-même, et le fait qu'elle accepte de faire passer cela avant son bonheur à elle - car elle était déchirée à l'idée de le laisser partir - c'était probablement la plus belle preuve d'amour qu'il puisse imaginer.
Et c'était ça qui lui avait fait ouvrir les yeux : la tendresse immense qu'elle lui portait, même dans un tel moment. Comment avait-il pu ne pas voir tout cela ? Elle était un diamant et lui son écrin, pas parce qu'elle était plus belle et précieuse que lui, non, mais bel et bien parce qu'il avait juré trois ans plus tôt qu'il serait toujours là pour la protéger, la chérir, et parce qu'à jamais il serait lié à elle, à ses côtés.
Le baiser se prolongea quelques secondes, ce contact les apaisa tous deux, ils en avaient besoin plus que des mots.
« Je ne te remercierai jamais assez, susurra-t-il finalement à son oreille en s'écartant d'elle.
- Je t'aime Jin, si tu savais... »
Elle le serrait si fort contre lui qu'il en eut un pincement au cœur, et pourtant il sentait la douce chaleur de la joie l'envahir de nouveau, comme au premier jour. Cette chaleur qui le poussait à sourire, à affronter ses défauts sans les nier ou les cacher, cette chaleur agréable qui prenait son cœur, enveloppait son âme, et lui faisait dire que peu importe les lendemains, tant que le présent était heureux. De toute façon il n'avait plus à s'inquiéter de l'avenir s'il était avec elle, car elle saurait toujours quoi dire pour qu'il retrouve confiance en lui.
« Je sais. Moi aussi je t'aime.
- Au point d'être honnête avec moi ? demanda-t-elle avec un sourire.
- Oui, je t'aime à ce point.
- Et au point d'être honnête avec toi ? »
Elle lui offrit un sourire malicieux et de nouveau il déposa un baiser sur ses lèvres avant de passer une fois de plus ses doigts sur sa joue.
« Oui, à ce point. »
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