Chapitre 8

La tension était palpable dans le restaurant. Jisung et Hyunjin étaient installés l'un à côté de l'autre et n'avaient pas parlé depuis le début de la soirée. Ils ne se regardaient pas, ne se disputaient pas, ils se contentaient de s'ignorer.

La situation était plus qu'étrange pour les deux jeunes hommes, ils n'avaient pas mangé ensemble depuis sept ans et ils ne s'attendaient pas à devoir revivre cette situation de sitôt.

— Si on vous a demandé de venir c'est pour une bonne raison. Avait commencé Changbin en souriant, essayant de ramener un petit peu de positivité.

Hyunjin n'avait rien dit mais avait pensé un ; J'espère bien. Ils devaient mettre la barre haute pour ne pas le décevoir, il avait fait l'effort de voir Jisung cette soirée alors il devait avoir une contrepartie équitable.

Un silence se fit entendre, Changbin avait entrelacé sa main avec celle de sa femme tout en continuant de sourire. Cette dernière s'en voulait un petit peu d'avoir forcé le destin pour les retrouvailles de Jisung et Hyunjin, elle espérait vraiment qu'ils ne passaient pas un trop mauvais moment par la présence de l'autre, elle ne voulait pas tout gâcher.

— Allez, accouche. Avait dit Hyunjin, trouvant le temps soudainement plus long.

Jisung n'avait toujours pas parlé de la soirée.

— Dans sept mois je le ferais.

Aucune réaction, Hyunjin souffla même pensant que cela voulait dire qu'ils allaient devoir attendre encore une heure ou deux avant l'annonce.

Face au blanc qui se mettait en place, elle reprit la parole.

— Je suis enceinte. Dit-elle à moitié en riant face à l'émotion.

Un blanc se remit en place, mais cette fois pour des raisons différentes. Les deux ennemis étaient bouche bée.

— De qui de nous quatre ?

Changbin cogna dans la jambe de Hyunjin qui se retenait de geindre de douleur alors que Jisung souriait en coin, cette scène l'avait fait rire mais il retrouvait surtout le même côté blagueur et audacieux que Hyunjin avait toujours eu. Il n'avait pas changé depuis le lycée et Jisung était heureux de pouvoir le constater. Et Miya l'avait remarqué.

Le regard de Jisung était bloqué sur Hyunjin, tête contre la table tellement la douleur s'emparait de lui, souriant sincèrement comme elle ne l'avait jamais vu faire.

Très rapidement, il se rendit compte de son état et secoua sa tête de droite à gauche. Il s'était promis de ne pas laisser les souvenirs l'envahir aujourd'hui et c'était déjà raté.

Une fois calmé, Hyunjin s'était relevé, la tête rouge, tout en tuant Changbin du regard.

— Pauvre enfant, il sera minuscule. C'est pas le mètre soixante-six de Miya qui le sauvera face au mètre soixante-sept de Changbin.

La jeune femme soupira alors que l'homme se retenait d'asséner un second coup à l'ébène. Ce dernier donnait l'impression d'avoir totalement oublié la présence de Jisung et celui-ci lui fit se le rappeler en s'exclamant à son tour.

— Félicitations, j'espère pour vous qu'il n'aura pas le sens de la mode de son père sinon c'est peine perdue.

Et voilà que Jisung s'y mettait à son tour. Plus la jeune femme les observait plus elle comprenait pourquoi ils s'étaient aimés autant de temps, ils étaient tout simplement compatible à cent pour-cent.

Le repas s'était déroulé en plutôt bonne ambiance après l'annonce, ils avaient retrouvé le sourire, presque oubliant la présence de l'un et de l'autre.

A la fin du repas, ils s'étaient tous les quatre retrouvés au dehors. Le couple marié était reparti en s'assurant bien que leurs amis n'allaient pas s'entretuer, et après avoir vu Jisung consulter les horaires de bus sur son téléphone alors que Hyunjin fumait une cigarette quelques mètres plus loin, ils avaient compris qu'ils pouvaient partir sans inquiétudes.

Cependant, ils n'avaient pas pensé au fait que les bus ne passaient plus depuis bien longtemps. Jisung n'y avait absolument pas pensé en voulant limiter ses déplacements en voiture et il se retrouvait à présent dans une impasse. Seule une odeur horrible de fumée qu'il haïssait semblait lui montrer sa seule solution.

C'était hors de question ! Jisung refusait d'user sa fierté ainsi, quitte à rentrer à pieds, il le ferait. Il ne supporterait pas de se retrouver dans une voiture en compagnie de Hyunjin.

Cependant, l'ébène avait bien remarqué que le blondinet semblait dans une situation délicate, en temps normal il l'aurait laissé se débrouiller par ses propres moyens, utilisant le karma pour seule excuse, mais la nuit était tombée et il savait pertinemment que le quartier dans lequel ils se trouvaient avait de mauvaise fréquentation à partir d'une certaine heure.

— Tu peux t'éloigner ? Tu pues la clope.

Pour la première fois de la soirée, Jisung lui avait parlé. Cette simple phrase méritait qu'on le laisse seul à son propre sort, mais Hyunjin savait pertinemment qu'il regretterait s'il arrivait quoi que ce soit à son ex compagnon.

— Tais-toi et monte dans ma voiture, je vais pas te laisser pourrir dans la nuit.

C'était la première fois en sept ans qu'il s'était montré gentil auprès de Jisung.

— Je n'ai pas besoin de ton aide. Je sais que tu me détestes et je n'ai pas besoin de ta fausse générosité.

— Pour connaître la valeur de la générosité, il fait avoir souffert de la froide indifférence des autres... Eugène Cloutier.

Encore et toujours, Hyunjin ne changeait jamais.

L'ébène tira une dernière fois sur sa cigarette avant de l'écraser au sol et de la jeter dans la poubelle la plus proche. Il fit demi tour et Jisung se sentir obligé de le suivre. Il n'avait pas vraiment d'autre solution.