ℭ𝔥𝔞𝔭𝔦𝔱𝔯𝔢 9
La porte s'ouvrit sur Angel. Ce dernier avait vêtu un sweat-shirt qui faisait office de croque-top, laissant nus ses deux – non, quatre – bras qui sortaient de son abdomen. Vernon les recompta, perturbé. Il était pourtant persuadé qu'Angel n'en avait que deux...
─ Tu es en train d'écouter à ma porte ? Petit voyeur... ~
─ N-non, c'est, euh, j'ai entendu de la musique, et...
Il ne sut comment terminer sa phrase, aussi, il se contenta de remuer la main en l'air.
─ Voilà.
Angel haussa un sourcil, tic qu'il retrouvait habituellement chez Husk et qui lui déplut instantanément.
─ Si tu voulais un concert privé, il fallait le dire tout de suite, chéri.
Comme le jeune homme semblait embarrassé, Angel s'adossa contre l'encadrement de la porte en croisant ses trois - oui, trois - paires de bras. En baissant les yeux pour regarder ses chaussures, qui devinrent alors la chose la plus intéressante au monde, Vernon constata que le démon portait un jogging rose fuchsia. Il réalisa alors n'avoir pas de vêtements de rechange, ce qui le décrédibiliserait instantanément lorsqu'il devra faire une lessive. Il ira comment, en toge ?
─ Écoute, joli cœur.
La voix d'Angel le ramena au moment présent.
─ Je peux te faire un prix si tu veux me baiser. Faut bien s'entraider entre voisins, non ? proposa-t-il en lui donnant des légers coups de coude tout en haussant des sourcils de façon aguicheuse.
Vernon recula d'un pas en prenant un air sévère.
─ Non, j'ai juste entendu de la musique et j'étais curieux.
Angel fit un pet de bouche avec sa langue et désigna son instrument posé sur son lit. Il prit un air tout à coup parfaitement sérieux. Vernon, méfiant, se pencha pour voir ; il apperçut l'accordéon qu'il avait entendu, mais également une trompette dans son étui.
─ Y'a rien à écouter. J'essayais juste de faire passer le temps.
Au même moment, un petit cochon cornu s'infiltra entre les jambes de son maître pour venir renifler ceux de Vernon.
─ Aww Fat Nugget tu dis bonjour à notre voisin ?~ ronronna-t-il en le soulevant pour le serrer contre lui.
Vernon dut faire de son mieux pour ne pas sourire, car il ne voulait pas donner l'air de se moquer de sa voix guimauve.
─ Bon, eh bien je vais vous laisser..., laissa-t-il entendre en faisant mine de reculer.
Fat Nugget – le cochon en conclut-il – tira son museau dans sa direction.
Groin groin groin.
─ Je crois qu'il t'aime bien, déclara d'une voix douce Angel en lui caressant sa petite tête rose.
Vernon scruta son regard tendre. Il ne l'imaginait pas comme ça, derrière ses airs de J'ai-la-bite-en-feu.
─ Il veut peut-être me remercier de vous avoir mis au lit quand vous étiez trop cuit pour le faire seul ?
Il regretta instantanément ses paroles et rougit d'un coup. Angel planta son regard magenta dans le sien, prenant un air étonné. Vernon s'attendait à une réplique salace mais fut surpris lorsqu'il répondit simplement :
─ Peut-être. Fat Nugget est très affectueux.
Après un moment de silence à se regarder droit dans les yeux, Vernon fit un pas sur le côté.
─ Désolé de vous avoir dérangés. Bonne après-midi à tous les deux.
Angel leva la main.
─ Ciao.
Mais Vernon était déjà trop loin pour l'entendre.
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─ Je suis un gars normal, je n'ai rien fait de mal, scanda Vernon en levant un bras de façon théâtrale. Je, hum, j'aime être gentil, et cueillir des... euh... jonquilles.
Les membres de l'atelier applaudirent sans grand entrain.
─ Mais est-ce que tu céderais à la tentation, de mon divin breuvage maison ?! répondit un homme un peu plus âgé – Vernon avait cru comprendre qu'il se faisait appeler Ricky – en brandissant une bouteille d'eau avec « ALOCOL » écrit dessus (avec la faute d'orthographe).
─ Oh, non, déclara le plus jeune en réfléchissant à une réponse. Je.... ne veux pas de ta maudite boisson. Je pourrais la consommer avec modération, si seulement je n'avais pas la voiture... non non non. L'alcool c'est mal, chacal.
Il se sentit légèrement plus à l'aise lorsqu'il entendit quelqu'un dans le public pouffer de rire. Je n'ai pas perdu mon sens de l'humour, c'est déjà pas trop mal.
Charlie se leva pour applaudir gaiement.
─ Bravo vous deux, c'était formidable !
Vernon et Ricky tentèrent une révérence. En se redressant, il remarqua que Angel Dust papotait avec son voisin d'assise mais que ce dernier essayait de ne pas le regarder, comme s'il était mal à l'aise.
─ Qui veut essayer ?
Le démon gêné leva la main avec vivacité.
─ Moi, s'il vous plait !
Et il se leva avant même avoir attendu de réponse.
─ Wah, j'admire votre motivation, s'enthousiasma Charlie, visiblement très ravie.
Vernon chercha sa chaise mais il semblerait que quelqu'un l'ait pris pour abandonner sa place tout derrière, de l'autre côté d'Angel. Enfin, il semblerait même que personne ne veuille s'assoir à côté de lui... Le jeune homme, sans comprendre pourquoi, s'installa à sa droite en lui faisant un bref geste de la main. Angel, l'air étonné, le lui rendit. Il avait troqué sa tenue décontractée pour son habituel costume rose pâle et blanc.
Pendant le passage sur scène de deux résidants, Vernon traînait sur son téléphone. Durant sa pause en chambre, il avait téléchargé un jeu visiblement très addictif.
─ Tu joues à quoi ? chuchota Angel contre son oreille.
Vernon recula un peu, n'appréciant pas vraiment cette proximité, et lui montra son écran.
─ Tu connais ?
─ Je ne suis pas vraiment porté sur la technologie, chéri, sauf si on parle de sexe toy-...
─ Essaye quand même, proposa-t-il en lui mettant le téléphone entre les mains.
Le démon observa le portable sous tous les angles, légèrement perdu. Il toucha un peu partout sur l'écran pour essayer de faire fonctionner le jeu.
Au même moment, tout le monde applaudit la prestation des deux participants.
─ Tu n'as pas l'habitude de la technologie, tu as raison, se moqua Vernon par-dessus le brouhaha.
─ J'ai vécu jusque dans les années quarante, ça t'étonne ?
─ Tu viens du futur ? s'interrogea Vernon.
─ Mille neuf cent quarante, corrigea Angel en croisant les bras derrière la tête.
─ Il y avait une vie avant deux-mille ?!
Comme Angel ne réagissait pas, Vernon s'expliqua.
─ Je blaguais, j'avais compris de quoi tu parlais...
Mon humour est à chier en fait.
─ Je sais. C'était drôle de te voir creuser dans ton malaise, le taquina-t-il en retour avec un clin d'œil.
Vernon roula les yeux. Il constata qu'il n'avait plus six bras, mais quatre : deux qui se croisaient derrière la tête, et deux sur les genoux avec son téléphone.
─ Chuuuuut, s'énerva une vieille dame devant avec une monture en fond de bouteille.
─ Ça va, si c'était pour écouter des abrutis faire rimer des putain de disquettes, j'aurais préféré rester en chambre, vociféra-t-il un peu trop fort.
─ Angel ! s'énerva Vagatha en se levant de sa chaise.
─ Laisse, Vaggie, la retint Charlie en posant sa main sur son épaule. Angel, on pourrait peut-être terminer avec toi ?
─ Quoi ? Non ! refusa Angel en croisant des bras.
Charlie fit les grands yeux.
─ S'il te plait, supplia-t-elle en croisant ses doigts devant elle.
─ ... Okay, bien !!
Il se leva en jetant le téléphone – que Vernon rattrapa au vol avec un air apeuré – et monta sur scène.
─ Qui veut faire avec lui ? demanda la princesse au public... mais personne ne réagit.
Angel affichait une expression blasée, certainement pour cacher sa contrariété.
─ Quelqu'un ? Personne ?
─ Je me propose.
Tous les regards se tournèrent vers Vernon.
─ Merci pour ta motivation ! s'exlama-t-il en levant le poing.
Vernon se dirigea jusqu'à la scène, l'air un tantinet plus mal à l'aise. Contrairement à son premier passage, cette fois, il ressentait le trac... Devant lui, le démon-araignée gardait les bras croisés et le sourcil levé, ce qui le déstabilisait davantage.
─ Cette fois, le thème se portera sur « agir en faisant attention à la portée de ses actes », annonça Vaggie qui lisait le même document depuis une heure. Angel, tu commences.
─ Alors babe, tu m'attendais ? ~
─ Les rimes, Angel. N'oublie pas les rimes, lui signifia discrètement – pas très discrètement – Charlie.
─ Oui oui, j'ai compris, râla le démon en roulant des yeux.
Il se racla la gorge et reprit une position séductrice.
─ Alors bébé, tu m'attendais ? ~
Vernon ne sut quoi répondre.
Ah. C'est pour ça que personne ne voulait faire avec lui.
─ On pourrait le faire sans protection, j'aime bien finir dans les fions-...
─ Non, refusa Vernon, sans faire savoir au public s'il jouait un rôle ou pas. Le VIH se transmet de toute manière, alors ne touche pas à mon derrière. Tu as le droit de te faire plaisir, mais pense à ta santé parce que crever, y'a rien de pire.
Angel s'approcha de Vernon – un peu trop près – et lui susurra à l'oreille.
─ On n'a qu'une vie, chéri, profite.
─ Tu n'as pas fait rimer « profite », fit remarquer Vernon en restant parfaitement de marbre face à leur menaçante proximité.
─ Parlez plus fort ! motiva Charlie depuis le public.
─ Fais pas des trucs que tu pourrais regretter, t'as clamsé une fois et t'es punis pour tes péchés, attaqua Vernon en élevant sa voix. Reste digne putain, si tu ne te respectes pas, qui le fera, hein ?
Angel ouvrit la bouche, mais aucun son n'en sortit.
─ Fais attention à ce que tu dis, Angel. On est pas dans un bordel, mais dans un hôtel.
─ J'arrête, j'en ai marre !
Tous les regards se posèrent sur son co-équipier d'improvisation qui avait reculé en levant les mains en l'air.
─ Angel, attends ! implora la princesse en essayant de le retenir, en vain.
Parce qu'il avait déjà quitté le réfectoire.
─ Je... j'y suis allé un peu fort ? demanda Vernon au public, se rétractant lorsqu'il entendit un « oui » général. Je vais... aller le voir...
Et il courut à sa suite, manquant de se manger le sol lorsqu'il bondit de la scène.
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