PARTIE I : chapitre 1
La sonnerie de mon téléphone me fait grincer des dents. Je recroqueville mes jambes contre mon torse et rabats ma couette sur mes épaules. C'est dangereux ce que je suis en train de faire car j'ai de forte chance de me rendormir. Le chant des oiseaux me parvient depuis ma fenêtre ouverte. J'ouvre les yeux doucement, pour qu'ils s'habituent au soleil qui traverse le rideau.
Je balance mes jambes hors de mon lit et enfonce mes pieds dans les pantoufles qui se trouve juste devant. La douceur de ceux-ci me rappelle celle de mon lit et j'ai une très forte envie de me recoucher. Je m'étire et je regarde l'heure sur le radio-réveil : sept heures. Je dois être au lycée pour huit heures moins cinq et vu qu'il ne se trouve pas loin de chez moi je peux me lever plus tard, ce qui n'est pas pour me déplaire car le sommeil est très important pour moi. Je passe devant la glace de mon armoire et attache vite-fait mes cheveux blonds avec un élastique que j'ai sur le poignet. Le résultat n'est pas très convaincant, et je sens déjà mon chignon glisser le long de mon cou mais je laisse comme ça pour le moment.
Mon ventre crie famine ; c'est surtout lui qui m'a poussé à sortir du lit. Je descends les escaliers pour prendre mon petit-déjeuner et je rencontre ma mère au passage qui se dirige vers la buanderie avec un panier rempli de linge :
- Bonjour, ma chérie. Tu n'as pas vu Ayden ?
Ayden est mon grand frère. Depuis sa majorité, il s'enferme dans sa chambre à jouer aux jeux-vidéos ou alors il sort avec ses copains pratiquement tous les soirs. Je la suis dans la buanderie alors qu'elle me dit qu'il n'est pas rentré de sa soirée avec ses potes hier soir.
- Mais je crois qu'il n'a pas cours aujourd'hui, non ? Je demande, perplexe.
- Non, effectivement. Mais il doit m'aider à la pharmacie à cause des notes catastrophiques qu'il a eu à ses partiels. Bon, je vais lui annoncer la bonne nouvelle, elle achève avec un énorme sourire en entendant justement la porte d'entrée s'ouvrir.
J'en connais un qui va passer un sale quart-d'heure. Je me dirige dans la cuisine pour manger un petit quelque chose quand des brides de voix qui s'accentuent de plus en plus. Il a préféré passer son temps à faire des soirées et à rester devant son écran de pc plutôt que de réviser pour ses examens et forcément ses notes en pâtissent. Je l'entends taper des pieds et dévaler les escaliers pendant que ma mère lui rappelle que s'il ne redresse pas la barre il pourra se mettre sa voiture là où il pense.
Il arrive dans la cuisine, furax, en proférant des obscénités qu'il, je pense, n'aura pas le courage de répéter devant maman. Il marmonne en s'asseyant sur un tabouret du comptoir : Il fixe la surface en marbre avec un regard noir. Le silence devient assez pesant surtout que maman passe son temps à faire des allées retours dans la cuisine pour lui lancer des réflexions de temps en temps qui ne font qu'accentuer son énervement. Une fois que maman a quitté la maison en claquant la porte d'entrer, je décide d'entamer la conversation avec lui avec enthousiasme.
- Salut.
Je décide de passer en mode ruse : je prends deux bols, un pour moi et l'autre pour lui, du lait et des pétales de chocolat. Je lui tends une cuillère à café. Même s'il est très en colère, je sais que mon frère ne résiste pas à la nourriture. Même si on lui offrait un million, il préférerait encore manger plutôt que de résister à la tentation de la nourriture.
Il hésite pendant un moment, en me fixant puis pousse un soupir en prenant la cuillère. Il a récupéré un peu de joie de vivre après avoir pris une bouchée de céréales au chocolat.
- Alors, comment ça va, Téa ?
Je m'appelle Mathéa ; quand je suis née, Ayden n'avait que deux ans et il n'arrivait pas à prononcer mon prénom en entier. Alors ce surnom est resté. Je soupire avant de commencer à manger. Les cours recommencent après deux semaines de vacances de Noël et je n'ai aucune envie de me retrouver de nouveau enfermé dans une classe. J'aurais bien aimé aller au sport mais ma mère ne peut pas se permettre de me payer des cours particuliers.
- Ça va, je réponds sans grande conviction.
- Dis-moi, ce qui ne va pas, petite sœur.
- Je te dis que ça va Ayden !
Je ne sais pas pourquoi je me suis énervée mais c'est sorti tout seul. Il me regarde, incrédule. Je baisse les yeux sur mes céréales. Il faut que j'apprenne à calmer mes sautes d'humeur ; c'est sûrement le temps nuageux qui me fout un cafard pareil.
- Excuse moi.
Il fait un geste désinvolte avec sa main. La colère en moi est partie aussi vite qu'elle est venue.
- Oh ce n'est pas grave, t'inquiète.
Je relève la tête et vois qu'il sourit, ce que je lui rends une seconde après. Ce qui est bien avec Ayden c'est qu'il n'est pas rancunier, à moins d'avoir une vraie raison pour en vouloir à quelqu'un. Je regarde l'heure et remarque qu'il est sept heures et quart. Je commence à ranger la table à une vitesse hallucinante avant de me diriger vers la porte de cuisine.
J'entre dans ma chambre en essayant de me calmer un peu. L'accès de colère que j'ai eu, est venu d'un coup, du fin fond de moi ; je n'ai pas pu le contrôler. Je me pose sur le lit et essaye de respirer calmement. Je cherche mon téléphone et le vois sur ma commode. Je n'ai pas envie de me lever pour aller le chercher, ça serait très cool si on pouvait attraper les objets sans avoir à bouger. Pour rigoler, je tends la main vers ma commode et fais semblant de me concentrer pour que mon téléphone bouge de lui-même. Bien sûr, ça ne fonctionne pas.
Je me place devant l'armoire, les mains sur les hanches et la phrase que je me répète tous les matins tourne dans ma tête tandis que je parcours mes vêtements : vu le temps qu'il me reste je décide de mettre un jean, un t-shirt et ma chemise à carreaux. Je me brosse les cheveux et les relève en une queue de cheval. Quand je me dirige vers la commode pour aller chercher mon téléphone, il n'est plus à cet endroit. J'ai un mouvement de recul. Je fais un tour sur moi-même et le retrouve sur mon lit, là où j'étais assise tout à l'heure. J'ai dû le récupérer sans m'en rendre compte c'est tout
Je prends mon sac que j'avais préparé la veille et je redescends les marches. Voilà qu'il faut que je cherche mes chaussures dans la maison alors que je suis sûre de les avoir laissées dans le hall en rentrant hier. Quelle plaie !
- Ayden ! Elles sont où mes chaussures ? je lui crie.
- Qu'est-ce que j'en sais moi ? Cherche par toi-même.
Je le voie qui passe sa tête à travers l'embrasure de la porte et il me fait le sourire qui veut dire : "Tu galères ? Je m'en fous". J'ai envie de l'étriper quand il joue avec mes nerfs comme ça, surtout que je suis de très mauvaise humeur ce matin.
Je retrouve finalement mes converses sous le canapé du salon, ce qui me fait maudire le chien d'avoir joué avec la veille dans la soirée. Je dis au revoir à Ayden à travers la maison et maman étant déjà partie je ne peux donc pas lui dire au revoir ; je confie donc la tâche à mon frère de le faire quand elle rentrera ce midi. Je vérifie bien si j'ai tout ce qui me faut pour la journée dans mon sac ; mes clefs, mon carnet de correspondances, mon téléphone, mes écouteurs. Je suis prête à partir
Je mets mes écouteurs durant le trajet. Si je n'ai pas de musique le matin, la journée commence très mal ; le bruit de la ville m'angoisse de plus en plus alors je préfère m'enfermer dans la musique. Ça m'aide aussi à ne pas trop réfléchir, ce qui est une très mauvaise habitude chez moi ; depuis quelques mois, j'ai de grosses migraines qui se sont déclarées et les médecins n'ont rien trouvé. Mais ça arrive souvent le soir, quand je réfléchis trop. Je regarde mes pieds en marchant tout en balançant ma tête au rythme de la musique. Au moment où je tourne au coin de la rue qui mène au lycée, quelqu'un me bondit dessus. Je sursaute et enlève mes écouteurs pour entendre ce qu'elle est en train de me dire. Je suis obligée de la tenir par les épaules et lui demander de parler moins fort pour qu'elle arrête de s'exciter dans tous les sens.
- Téa ! Il faut trop que je te raconte quelque chose ?
- Ça ne peut pas attendre le lycée ? je demande, quand même interloquée par ce qu'elle a de si important à me raconter.
- Y'a un nouveau mec qui vient d'arriver au lycée et devine dans quelle terminale ?
- Vu ton état d'hystérie absolu, je dirais dans notre classe.
Je fais mine de proposer alors que je donnerai ma main à couper que j'ai tapé dans le mille. Elle se remet à sautiller partout ce qui me fait doucement rire malgré mon humeur matinale encore présente.
- Telma, calme. Tu ne sais même pas comment il s'appelle.
Ah, Telma. Elle adore les garçons et je ne sais toujours pas pourquoi elle en est toujours autant obsédée ; depuis trois ans que je la connais, elle ne peut pas passer une journée sans regarder un garçon autre part que par le physique. Je pense que si elle pouvait les transformer en statue et les placer sur une étagère pour en faire une énorme collection, elle le ferait.
Nous finissons le trajet ensemble, en parlant du mystérieux garçon, elle me sort toutes les théories possibles sur à quoi il peut ressembler et son caractère digne du plus grand film à l'eau de rose. Mon lycée est petit : j'aime le fait de vivre dans une petite ville du sud de la France. Je suis née à Menton et j'y resterai. Je pense avoir toujours eu cette peur de l'inconnu et je reste constamment dans ma zone de confort. Ma mère me pousse à partir à Nice pour mes études mais c'est trop grand pour moi. Pourquoi aller dans une ville très touristique en bord de mer alors que j'ai la même chose à Menton. Je déteste les grandes foules et c'est une angoisse qui mettra du temps à passer. On passe le portail du lycée et on traverse la cour remplie de personnes qui se racontent leur week-end où ils ont passé leur temps à sortir en soirée. Le lundi me semble déjà compliqué à affronter et Telma s'en rend compte car elle me frotte le dos doucement pour m'inciter à respirer doucement. On rentre dans le hall et je n'ai pas fait trois pas qu'une deuxième personne me saute dessus dans la même matinée : Nino, mon meilleur ami. Le seul garçon en qui j'ai confiance ici et qui me connait mieux que personne. Il remarque mon visage et me prend directement dans ses bras. Ma respiration se calme un peu, et j'essaye d'arrêter le flot de pensées qui m'assaillit depuis ce matin.
Les yeux verts de Telma regardent autour de nous tandis que les yeux bleus de Nino se concentrent sur moi et mes états d'âmes. Depuis mon réveil, je suis en ébullition. Mes crises d'angoisse ont toujours été facile à cacher mais celle-ci est différente : je me sens différente depuis ce matin. J'ai beau me dire que j'ai dû déplacer mon téléphone moi-même et qu'il ne s'est pas retrouvé tout seul sur le lit, je n'ai aucun souvenir de l'avoir eu dans les mains. Un acouphène me fait grimacer quand la sonnerie retentit.
Telma va retrouver son petit ami qui l'appelle à l'autre bout du hall tandis que Nino et moi restons devant mon casier. Je regarde celui-ci et lui demande quel est notre premier et en regardant son emploi du temps, il m'apprend qu'on a Histoire Géographie. Je soupire de désespoir en pensant que je vais devoir rester assise à une chaise pendant une heure avec un professeur qui me fout les jetons. Nino remarque mon désarroi ce qui le fait rire avant de m'ouvrir ses bras. Je cours dedans encore une fois car j'adore son étreinte. Je pose ma tête dans son cou, et inspire profondément. Il essaye d'avancer mais je reste collé à lui car je n'ai aucune envie d'aller en cours. Il rigole encore plus face à l'énergie que je mets en place juste pour rester accrochée à sa taille.
- Allez petit paresseux, on va se faire disputer si on arrive en retard.
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