Chapitre 5
Je suis arrivée chez mon frère hier. Je me sens mal à l'aise de rester ici parce que Norah refuse de me laisser faire quoi que ce soit dans la maison dû à ma « condition » ; j'ai beau lui expliquer que je me sens en pleine forme et que je peux aider, elle ne veut rien entendre. J'accepte cette condition bien sûr mais j'arrive quand même à les aider à ma manière. Là par exemple, je suis avec Chloé, ça fait une heure qu'elle me parle de ses poupées. Je ne sais pas ce qu'elle leur trouve de si intéressant mais ça l'amuse. Ayden et Norah sont au travail alors la moindre des choses que je peux faire c'est de leur garder la petite. Tiens en parlant du loup, j'entends la porte de l'entrée se refermer.
- J'arrive ma puce, je dis à Chloé en me levant.
Elle hoche la tête tandis je me dirige vers la cuisine où se trouve Ayden. Il est en train de se servir un verre d'eau en s'accoudant à l'îlot centrale et soupire. Je m'approche de lui et lui frotte le dos. Il sourit mais son sourire est forcé. Depuis que Chloé est arrivée, il a arrêté ses études pour commencer à travailler puisqu'avec un salaire, ils ne pouvaient pas subvenir aux besoins de tout le monde. Ils travaillent tous les deux dans un café et Chloé va à l'école depuis peu. Je sais qu'il ne regrette pas d'avoir eu sa fille mais qu'il avait d'autres rêves qu'il n'a pas pu accomplir. Mon frère regarde autour de lui.
- Où est Chloé ?
- En-haut. Je suis allée la chercher à quinze heures à l'école mais elle n'a pas voulu manger quoi que ce soit. Ça fait une heure qu'elle joue avec ses poupées.
Il sourit et détourne le regard. Je vois bien qu'il veut me dire quelque chose mais il n'ose pas : ses cernes me font de la peine, j'aimerais tellement aspirer un peu de sa souffrance. Je me lance.
- Qu'est-ce qui ne va pas ?
Il me regarde dans les yeux.
- Rien, je suis juste content que tu sois là c'est tout, il me dit avec un sourire fatigué.
Je lui souris à mon tour et tourne mon regard vers l'horloge. Il est 19 heures. Au même moment, on entend la porte se claquer. Norah devait sûrement faire la fermeture du café. Elle rentre dans la cuisine tout sourire, quand une enfant dévale les escaliers pour atterrir dans ses bras.
- Maman !
- Ma chérie !
Elles sont tellement mignonnes toutes les deux. Je souris comme une idiote en pensant comment ça va se passer dans quelques mois. Je n'en ai aucune idée mais j'aime la sensation de bonheur que je ressens depuis que j'ai appris la nouvelle. Je me sens comblée, comme s'il me manquait quelque chose dans ma vie avant de tomber enceinte.
Après le dîner, Ayden et Norah veulent regarder un film mais je vois bien que Chloé ne demande qu'une chose c'est d'aller dans les bras de Morphée. Norah s'en aperçoit mais je l'arrête en la prenant dans mes bras. Elle me sourit timidement et je lui conseille de suivre sa fille et elle ne se fait pas prier. Elle embrasse Ayden et monte se coucher pendant que celui-ci débarrasse la table. Je monte la petite dans sa chambre. J'essaie d'y aller doucement mais elle ouvre ses petits yeux fatigués. Je m'assois à côté d'elle et ramène une de ses mèches blondes derrière son oreille.
- Dis marraine, elle demande de sa voix angélique.
- Oui mon ange ?
- C'est vrai que... Je vais avoir une petite cousine ?
Je suis d'abord surprise par sa question mais je me détends et me mets à sourire.
- Oui, c'est vrai.
Un sourire éclatant se place sur son visage. Elle approche sa main de mon ventre, ce qui me fait encore plus sourire. Je vois bien qu'elle ne veut plus dormir mais je sais ce que je vais faire pour l'endormir.
- Ça te dis de regarder Vice-Versa demain, mon cœur ?
Je ne pensais pas que son sourire pouvait encore s'agrandir et pourtant ! Elle me regarde avec un sourire malicieux. Elle se met à chanter.
- Qui veut bien jouer avec moi ?
Je rigole et me mets aussi à chanter.
- S'amuse et vole vers les étoiles ?
- Qui est le roi de la joie, qui s'envole à pleine joie ? Bing-Bong ! Bing-Bing !
Je me mets à la chatouiller et elle éclate de rire. J'adore son rire. C'est non un rire d'enfant mais encore un rire de bébé.
- Bonne nuit princesse, je finis en l'embrassant sur le front.
Je sors de sa chambre et tombe nez à nez avec mon frère. Je souris.
- Elle dort, je lui apprends en souriant devant son regard insistant.
Il me sourit. Je me retourne pour aller dans ma chambre mais il me retient le bras. Je le regarde en fronçant les sourcils. Il a l'air d'hésiter.
- Tu seras une merveilleuse mère.
Je souris face à sa remarque et me dirige vers ma chambre. Je me change et vais au lit. Je m'endors aussitôt.
***
Je me réveille en sursaut à cause d'une douleur au ventre. Ça ne va pas recommencer ! Elle est beaucoup plus violente que celle de la dernière fois. Je me mets en position assise car rester allongée m'est insupportable. Je me dirige finalement dans la salle de bains et me mets à vomir. J'ai cru que ça allait passer mais ça empire ! Je ne veux pas crier sous peine de réveiller Chloé et je ne veux pas qu'elle me voit en deux pliée de douleur. Je lâche un cri de douleur, incapable de me retenir plus longtemps. Quelle conne ! J'entends des pas précipités dans le couloir et mon frère rentrer en trombe dans ma chambre. Il me voit par terre et vient vite à ma rencontre.
- Mathéa ! Qu'est-ce qui ce passe ?
- Je... Ah ! Je ne sais pas...
- Où est-ce que tu as mal ? Me demande une voix féminine.
Norah s'est penchée sur moi et me regarde avec attention. Je lui montre le bas de mon ventre et je sens quelque chose dévaler ma cuisse. Je passe ma main à l'intérieur de ma cuisse et la ressort ensanglantée. Elle commence à être inquiète et se retourne vers Ayden.
- Appelle une ambulance ! Maintenant.
Mais il ne bouge pas. Je le comprends, il veut savoir ce que j'ai.
- Qu'est-ce qu'elle a ?
- Elle est en train de perdre le bébé...
Je prends cette nouvelle en pleine face. Je commence à paniquer. Une autre douleur arrive et me force à retourner aux toilettes pour vomir. Ma respiration est saccadée et je sens que je vais m'évanouir. Je me place le long du mur et essaye de respirer le mieux possible. Je tremble de tous mes membres. Norah est restée à côté de moi et me passe un gant de toilette humide sur le front le temps qu'Ayden appelle les ambulances.
- Respire ma belle, ça va aller hein ?
Je n'ai pas le temps de répondre puisque les pompiers arrivent. Mon frère me porte jusque dans mon lit. J'entends des personnes s'activer autour de moi mais moi tout ce que je veux entendre c'est le cœur de ma fille bordel ! Une autre contraction arrive ce qui me fait hurler. Je sens quelqu'un me prendre la main et je me tourne vers Ayden qui me regarde impuissant. Je ferme doucement les yeux, à bout de force.
[Ayden]
Elle s'endort à bout de force. Les pompiers l'emportent dans l'ambulance. Je prends le téléphone mais Norah m'arrête.
- Ayden... Vas-y, je reste ici. Juste donne-moi des nouvelles d'elle s'il te plaît.
Je me retourne vers elle et l'embrasse tendrement.
- Promis.
Je suis à l'entrée de l'hôpital. Je demande sa chambre à l'accueil et me dirige vers celle-ci. Je ne vois personne dans le couloir, je prends mon téléphone et appelle Nino. Non pas que ça me fasse plaisir mais ma sœur l'aime encore, ça se voit. J'attends deux sonneries avant qu'il décroche.
- Allô ?
- Nino, c'est Ayden. Je voulais te dire que je suis à l'hôpital avec Mathéa. Si tu tiens encore à elle, rejoins-moi ici.
Je n'attends même pas sa réponse que je lui raccroche au nez. Je m'assois sur une chaise. Je mets ma tête dans mes mains et mes coudes sur mes genoux. Au bout de cinq minutes, je vois un médecin arriver.
- Vous êtes là pour Mademoiselle Morel ?
- Oui, je suis son frère.
- Elle est très mal en point, je ne vais pas vous mentir. A-t-elle eu des problèmes respiratoires dans le passé ?
- Oui, il y a cinq ans pourquoi ?
- Son manque de respiration a affecté l'enfant mais autre chose a dû entraîner ses crises. Nous avons remarqué des hématomes sur son ventre.
Nous sommes coupés par l'arrivée de Nino. Je sens la rage monter en moi. Je ne sais pas qui l'a frappé mais si c'est lui, il ne reverra plus jamais la lumière du jour. Je me précipite sur lui et le plaque sur le mur. Je place une de mes mains sur son cou mais il se libère avec une force incroyable. Un vigile se trouve à l'autre bout du couloir alors je me contente juste de lui parler. Je ne veux pas créer de problème dans un hôpital.
- Tu as du bol que ma sœur est folle de toi parce que je te jure que tu aurais déjà reçu mon poing dans ta gueule !
- Je n'ai jamais touché ta sœur !
- Ne me prends pas pour un con ! Elle m'a raconté ce qui s'est passé quand vous vous êtes disputés ! Pourquoi est-ce qu'il y a fallu que tu plonges dans cette merde maintenant ?
- J'ai mal agi, je l'avoue mais je pourrais mourir pour elle ! C'est grâce à elle si je n'ai pas plongé !
- Comment ça se fait que tu t'es retrouvé avec de l'herbe alors ?
Nous sommes interrompus par une infirmière qui nous annonce que son état s'est stabilisé et quand je lui demande comment va le bébé, elle sourit tristement et retourne à ses occupations. Je montre la chambre de ma tête à Nino pour lui dire qu'il peut y aller.
[Mathéa]
J'ouvre les yeux et mon regard est directement posé sur Nino. J'essaye de lui sourire mais je n'y arrive pas. Nous restons comme ça pendant cinq minutes, jusqu'à l'arrivée du médecin. Je pleure déjà parce que je sais ce qu'il va le dire. Il s'avance vers moi, son calepin à la main avant de remonter doucement la tête et de soupirer. Les secondes deviennent des heures, j'ai presque envie de lui hurler de parler.
- Je suis vraiment désolé...
J'éclate en sanglots dans les bras de Nino. Je me fiche de son comportement des derniers temps, seuls ses bras peuvent me calmer. J'ai du mal à respirer alors une infirmière vient me donner un masque à oxygène. Une fois la crise passée, Nino s'assoit sur le siège à côté de moi et pose sa main sur la mienne ; je ne le repousse pas mais je ne lui serre pas la main non plus. Le médecin semble gêné de demander quelque chose, je le ressens : il cale finalement son dos contre le mur avant de demander.
- Nous avons remarqué des hématomes sur votre ventre, avez-vous reçu des coups il n'y a pas longtemps ?
- Oui.
J'ai sorti ça naturellement. Le médecin balaye son regard entre moi et Nino. Je m'empresse de prendre la parole.
- Non. Ce n'est pas lui, il n'aurait jamais levé la main sur moi.
J'avais dit ça sans le regarder puisqu'il sait autant que moi que c'est faux. Le médecin hoche la tête et sort de la chambre. Nino se tourne vers moi mais mon regard est resté sur l'autre bout de la pièce.
- Bébé...
- Sors.
Il ne bouge pas.
- Sors je t'ai dit ! Je réplique en haussant le ton.
Il se lève et sors en claquant la porte. J'ai eu une vision quand il m'a touché la main, il m'a laissé apercevoir quelque bride de souvenir, je ne sais pas si c'était conscient ou non. Je sais qui t'a éloigné de moi et je te promets de le faire souffrir...
[Nino]
Je traverse l'hôpital en courant. J'entends Ayden m'appeler mais je ne m'arrête pas. Une fois dehors je tape le mur et hurle tout ce que je peux. Je sens quelqu'un me prendre le bras mais je le repousse.
- Mec, calme-toi.
- J'avais une seule chose à faire c'était de les protéger et je n'ai pas réussi à le faire putain ! Je crie à moi-même.
- Calme-toi ! Ce n'est pas ta faute, d'accord ? On fait tous des erreurs, on est humain c'est normal. Arrête de tout mettre sur ton dos.
- Mathéa ne veut plus m'adresser la parole. J'ai plongé comme un con alors qu'elles avaient besoin moi !
- Dis-moi qui t'a donné la came.
Je me retourne vers lui. Je ne sais pas si je lui dis ou pas. Et puis merde, je viens de perdre ma fille et la femme de ma vie.
- Matthieu...
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro