Nous sommes en juillet, le soleil estival tape sur ma fenêtre. J'ai eu mon bac avec mention bien, je suis super fière de moi. Même avec tous les évènements qui se sont produits, j'ai réussi à ne pas foutre mon avenir en l'air. Avec Nino tout va bien, c'est un peu la beauté du début de relation. Tout est beau et tout est rose.

Je suis assise à mon bureau, pensive. Je regarde les dessins que l'on faisait, Telma et moi. Certains sont bien fait, la plupart sont ceux de Telma. Elle avait un sérieux talent pour le dessin, elle voulait devenir styliste. Parler d'elle au passé fait ruisseler les larmes sur mes joues. Elle ne méritait tellement pas de mourir.

La sonnerie de mon téléphone retentit. Je sèche mes larmes et regarde qui c'est. Nino me propose de sortir au cinéma et je ne refuse pas l'invitation. J'ai besoin de sortir maintenant que les cours sont terminés sinon je vais finir léthargique sur mon lit.

Je descends l'escalier et rejoins ma mère et mon frère dans la cuisine.

- Bonjour tout le monde, dis-je.

Mon frère est en train de préparer à manger pour ce soir et ma mère regarde Grey's Anatomy à la télé. Elle est folle de cette série, enfin plus du Docteur Mamour ! Je la fixe en rigolant en voyant ses yeux pétiller à chaque fois que Patrick Dempsey passe à l'écran.

- Tu crois qu'il existe un Tinder avec des célébrités ? je chuchote à Ayden.

- Il ne faut pas le dire à maman, mais je crois que le docteur Mamour est marié dans la vraie vie.

On entend notre mère râler en nous disant qu'on lui gâche son épisode alors qu'elle le connait sûrement par cœur. Je vais m'asseoir sur le comptoir de l'ilot central, à côté d'Ayden.

- Comment va Norah ?

Norah est la petite copine d'Ayden. Elle est super sympa, il nous l'a présentée il y a un mois. Il est fou d'elle et je pense que c'est réciproque.

- Ça va, et comment va Nino ? dit-il avec un sourire.

Je le fixe en riant. Je regarde mon téléphone, il est quatorze heures. Je dois y aller.

- Maman, je vais au cinéma avec Nino, je rentre pour le dîner.

- D'accord, pas de bêtises ! Me crie ma mère.

Je sors dans la rue ensoleillée. Il ne fait pas froid du tout, au contraire. Je vais chez le fleuriste prendre une simple fleur et me dirige ensuite vers le cimetière.

Je sais que ça parait bizarre, mais j'aime bien venir ici. Je viens souvent me confier ici et c'est moins cher qu'un psychologue. Je m'approche de la tombe de Telma.

Telma Dupuis

17 mai 1999~26 février 2016

- Salut Telma, dis-je en posant la rose, j'espère que tout va bien pour toi, moi ça va. Je m'en veux tellement, tu ne peux pas savoir.

Ça y est, je me mets à pleurer. Je suis de plus en plus sensible en ce moment et je pense que ce n'est pas une bonne nouvelle. Je croyais que toute cette histoire allait me rendre plus forte mais c'est l'inverse. Je suis un petit enfant qui a perdu sa maman dans le magasin ; je pleure à chaque contrariété.

- Tu n'as pas à t'en vouloir, ma belle, dit une voix douce derrière moi.

Je me retourne et me retrouve face à Telma, mais pas la Telma flippante de la dernière fois dans mon cauchemar. Elle a une robe blanche qui lui arrive en dessous des genoux, elle n'a plus aucune trace, les cheveux très bien coiffés. Elle est en paix, j'ai réussi ma mission. Je décide d'en profiter pour vider mon sac.

- Je suis vraiment désolée, si j'étais arrivée cinq minutes avant j'aurais pu faire quelque chose, dis-je entre deux sanglots.

- Non, non, non, ma chérie, tu aurais juste vu Matthieu en train de me consoler. Tu pouvais juste retarder ma mort et non l'annuler, répliqua-t-elle avec douceur.

Elle regarde au ciel, comme si on l'appelait.

- Je dois y aller, on m'a autorisé à venir mais qu'un très court instant, prends soin de toi.

- D'accord, tu m'attends, dis-je.

- Toujours.

Elle disparaît sans que je puisse l'arrêter.

- Mathéa ! tu es là ?

Je me retourne et cours vers lui.

- Tu es en avance, je remarque.

- C'est toujours mieux que d'être en retard, il se défend en bombant le torse.

Je souris et l'embrasse. On commence à avancer quand je me rends compte d'un détail. Telma sera en paix tant que je serais en vie jusqu'à ce que je la rejoigne. Elle est devenue mon ange gardien.