Chapitre 21
Mon frère avait raison. C'était parfaitement flippant d'attendre que le frère de Chiara débarque chez nous. Je tournai en rond depuis une bonne demie-heure dans ma chambre et je finis par me rendre dans celle de frère. Ce dernier ronflait et je le réveillai en ouvrant large ses rideaux.
– Enfoiré.
–Debout.
– Va te faire...
–J'ai besoin de me battre avec quelqu'un et tu es le seul dispo. À moins bien évidemment que tu ne veuilles que je dise à Papa où est réellement passé la dernière toile qu'il t'a offerte.
Mon frère se redressa, le sommeil ayant quitté la prunelle de ses yeux.
– T'es un enfoiré de maître chanteur, mais je te préfère comme ça que lorsque tu es en mode midinette en plein blues. Passe-moi un caleçon, sauf si tu veux voir ma bite.
– Je vais m'en passer, elle n'a rien d'exceptionnel ta bite.
– C'est pas ce qu'a dit la dernière femme avec qui j'ai couché !
Je levai les yeux au ciel avant de lui lancer ses habits et je me rendis directement dans l'Arène. Mon frère m'y rejoignit rapidement.
– Nous n'avons pas de témoins alors ne retiens pas tes coups.
– Je n'en avais pas l'intention Sig. C'est la dernière fois de ta vie que je pourrais te vaincre en égal. Tu seras bien trop fragile après !
Nous étions le 23 décembre. Et dans trois jours, si les dieux le voulaient, je débuterai une nouvelle existence.
Le coup de poing d'Asmund en plein torse me réveilla. A chaque fois que nous nous battions tous les deux, nous en profitions pour parler ensemble.
– Tu crois qu'elle acceptera de devenir ma femme ?
– Tu as une bague ? Si tu n'en as pas, c'est même pas la peine d'essayer ! Mais si tu en as une... quand elle te regarde, ses yeux dégoulinent de guimauve. Un peu comme Papa et Maman. Je pencherai pour le oui !
– Tu aimerais te marier toi ?
Je raffermis ma prise sur lui et l'envoyait valdinguer dans la pièce.
– J'apprécie le célibat mais... maintenant que tu as parlé d'enfants, tu as réveillé une fibre paternelle je pense. J'aimerais en avoir mais... je ne veux pas prendre le risque de les voir mourir alors que je serai immortel. Alors je vais me contenter d'accueillir chez moi les enfants de Ragnar. Tu crois que Lili sera heureuse à Milan ?
Il venait de ramasser son épée au sol, et le combat, acharné, continua. J'étais en train de reprendre l'avantage, jusqu'à l'arrivée de Sølvi.
– Les garçons ! Arrêtez tout !
Je fis un dernier croche-pied à mon frère qui s'étala de tout son long. Ma sœur semblait bouleversée.
– Qu'est-ce que tu as ? Réponds ! la pressai-je alors qu'elle cherchait ses mots.
– Je crois que j'ai trouvé mon humain à moi !
Mes yeux s'écarquillèrent ainsi que ceux d'Asmund.
– Quoi ?
– Oui ! Le frère de Chiara ! Son sang a une odeur, mais une odeur ! s'exclama-t-elle. J'ai envie de le bouffer. C'est horrible.
Je me tournai vers Asmund, mais ce dernier était déjà en train de réfléchir.
– C'est la lignée de Chiara, celle qui peut nous rendre notre humanité. Je ne vois pas d'autres raisons. Mais pourquoi elle ?
– Elle descend de Leif Erikson, c'est tout ce que je peux te dire.
– Je vais voir s'il n'y a pas un lien avec nous. Évite de le bouffer. Et vérifie si tu es dans le même cas que Sigmund. Essaye de l'hypnotiser !
–J'ai essayé et ça n'a pas marché, il m'a regardé trop bizarrement. J'ai la honte, mais la honte !
Ma sœur était devenu rose. Je l'attrapai sous mon bras et elle plissa du nez.
– Tu pues la sueur, c'est une horreur. Tu t'es lavé au moins ce matin ?
– Je vais aller hypnotiser le frère de Chiara pour qu'il te voit comme une grosse vache.
Elle me poussa avec force et me menaça avec son doigt pointé vers moi.
– Si tu fais ça, je te jure, je fais en sorte que Chiara prenne le prochain avion qui décolle de Norvège, destination inconnue pour toi, juste pour que tu restes un putain de vampire.
Je la fusillai du regard et je l'invitai à me suivre dans la maison. Je filai rapidement dans ma chambre reprendre une douche pour éviter de me présenter en sentant le bouc. En sortant je captai une odeur et une voix que je ne connaissais pas. C'était lui. Cosimo della Aldosi. J'arrivai dans le salon et Chiara se leva d'un bond pour se rendre vers moi. Elle attrapa ma main et nous nos mains.
– Cosimo ? J'aimerais te présenter Sigmund.
Le jeune homme se retourna et je compris ce que Sølvi lui trouvait. Il était tout à fait son genre. Grand, brun, musclé, un sourire en coin. Un cliché d'italien dans toute sa splendeur. Il s'avança vers moi, le regard franc plongé dans le mien avant de me tendre la main.
– Je suis ravi de faire votre connaissance, même si ma sœur m'a appris votre existence ce matin.
– J'ai appris la vôtre hier au détour d'un déjeuner. Au moins, nous sommes quittes.
Chiara m'écrasa le pied mais son frère affirma son sourire et déposa son regard par dessus mon épaule. Ma sœur venait de faire son apparition. Son regard restait scotché sur elle, comme le mien sur Chiara.
– Vous parlez tous italien super bien ! Vous avez vécu en Italie ?
– À Milan et à Florence notamment, répondit ma mère. Asmund vit d'ailleurs encore là-bas. C'est un grand plaisir de vous avoir à la maison. Nous aimons tous beaucoup Chiara. Je vous prie de m'excuser, je vais devoir aller chercher les parents de nos petits à l'aéroport.
Elle posa sa main sur mon épaule en se levant comme pour me donner de la force et elle rejoignit mon père qui l'attendait, déjà en manteau. Sophie faisait la conversation avec Cosimo alors que Sølvi, elle, restait silencieuse. Cosimo se tourna vers elle.
– Et vous, que faites-vous dans la vie ?
– Je travaille dans l'industrie de la mode.
– En tant que mannequin ?
– Pas du tout, rit-elle. Je ne suis pas faite pour être sur le devant de la scène. Mais dans les coulisses, oui ! Je suis designer.
Cosimo eut un sourire en coin.
– Au contraire, je suis certain que le monde adorerait savoir qui vous êtes. Moi le premier, ajouta-t-il.
– Hum... ta drague est peu subtile Cos'.
Chiara eut le droit à un regard noir de la part de son frère.
– Mais... je ne la draguais absolument pas, tenta de se justifier le jeune italien. Je la trouve juste très élégante, ça ne m'étonnerait pas qu'elle dessine elle-même ses vêtements !
Il semblait terriblement gêné mais je trouvais ça amusant. Cosimo déporta son regard vers moi et capta mon sourire narquois. L'air qu'il avait changea à ce moment précis.
– Je ne pouvais pas le dire devant vos parents qui, d'après ce que j'ai compris, nous héberge ma sœur et moi, mais, si vous venez à la faire souffrir, je vous tuerai. Ce ne sont pas des paroles en l'air. J'ai du mal à comprendre la réaction de ma sœur face à un homme qu'elle a rencontré il y a peu de temps mais je ferai tout pour elle.
– Dans ce cas, vous devriez la convaincre de partir rapidement. Je suis un tueur dans mon domaine.
Ma sœur me fit de gros yeux et Chiara me donna un coup dans le torse.
– Arrête ! Sig' est écrivain, il écrit des romans policiers de folie. Il te vanne comme ce n'est pas possible et toi tu sautes dedans Cos'.
– Tu peux comprendre que je sois un peu déconcerté. Tu m'annonces qu'on vient en Norvège pour Noël puis que tu t'es trouvé un petit copain. Tu n'as jamais rien fait sur un coup de tête, sauf quand tu étais amoureuse et tu as été souvent amoureuse ! C'était toujours de mauvaises décisions.
Chiara se figea à mes côtés.
– Ce n'est pas le cas ici. Je n'ai jamais été aussi sûre de toute ma vie. Je crois avoir passé l'âge de perdre du temps, c'est tout.
– Tu as 28 ans ! Tu es jeune !
– Oui, je le suis. Mais... c'est ma décision, je te prierai de ne pas revenir dessus.
Elle semblait fâchée contre lui et je posai une main dans son dos.
– Je vais aller faire un thé. Sølvi, tu sais où Maman cache ses pains d'épices super bon ?
– Yes, je viens avec toi.
J'entendis Sophie quitter la pièce après que sa fille l'ait appelée depuis l'étage.
– Wow. Il est protecteur. J'adore ça. Je suis fan du côté un peu homme des cavernes.
Je coulai un regard étrange à ma sœur et elle ricana.
– Enfin homme des cavernes civilisés et féministes quoi ! Mais c'est mignon comme tout.
J'écoutais leur conversation où Chiara lui révélait ses sentiments pour moi. Je ne devais pas écouter mais c'était plus fort que moi. Ma sœur se rapprocha de moi et posa sa main sur mon avant-bras.
– Laisse-leur de l'intimité et regarde le message que Asmund vient de m'envoyer.
« Bon, j'ai la réponse pour la lignée de Chiara. Appelez-moi quand vous aurez une minute ».
Elle appuya sur sa photo de profil et quelques minutes plus tard, mon frère était en haut parleur.
– Bon, j'ai demandé à ton ex. Y'a une explication, enfin je pense. Elle a utilisé une dague pour le rituel et elle appartenait à cette famille là. Ça ne m'étonnerait pas qu'il y ait eu un peu de sang de leur famille qui s'y soit mêlé. Les règles d'hygiène à l'époque... je vais pas vous les rappeler ! Rit-il.
– Donc ton humain ou ton humaine viendrait de cette lignée ? On a tout intérêt à les laisser en vie, réfléchit ma sœur.
– Notre lignée va bientôt se mélanger à celle-ci. Interdiction de buter mes descendants, merci.
– Elle a accepté de faire des enfants... avec toi, répondit mon frère d'un air perplexe. Wow. Passez-moi Chiara, je dois la convaincre de ne pas faire une chose aussi sotte. Déjà te supporter, c'est un défi, mais alors des mini-toi ? L'horreur !
– Toi, je te défonce quand tu veux.
–Garde tes forces pour ta dulcinée, tu n'auras plus autant d'endurance dans quelques jours. Ton nouveau surnom ce sera mou du genou !
Sølvi ricana et je quittai la cuisine. Elle me cria de revenir mais j'en profitai pour retourner dans le salon avec le thé. Le frère et la sœur se parlaient à grand renfort de gestes et cette discussion se calma quand j'arrivai.
– Je comprends ta réaction Cosimo, lâchai-je en passant en tutoiement. Si ma sœur ramenait un mec et le présentait à toute la famille après quelques jours, je trouverai ça super bizarre. Et je serai méfiant.
Chiara me coula un regard mauvais et j'en frémis presque.
– Tu joues contre ta team là.
– Je me targue d'être une personne honnête, c'est tout. Mais... ce que je peux faire, c'est faire en sorte de répondre à l'intégralité de tes questions, sans filtre, ajoutai-je en fixant le frère de mon humaine.
– Ça me va.Vous vous êtes rencontrés quand la première fois ?
– C'était ici en Norvège, je te l'ai d...
Je posai ma main sur son avant-bras et Chiara se tut aussi vite.
– C'était à Paris. Dans la rue. Elle est passée à côté de moi mais je n'ai pas eu le temps de me retourner qu'elle avait disparu. Et elle est venue poser un courrier chez mon frère à Milan. Je l'ai vue depuis la fenêtre. Mais la première fois qu'on s'est parlé, c'était après ma chute du toit parce que ma mère trouve que c'est cool d'avoir une maison qui clignote et de faire installer les guirlandes par ses enfants sur un toit enneigé.
Cosimo me paraissait perplexe et il passa une main dans ses cheveux en attrapant la tasse que je venais de lui servir.
– Comment tu sais que c'était elle à Paris ? Puisque ma sœur ne se souvenait pas de toi manifestement.
– Elle a une odeur unique au monde. Une odeur de Paradis terrestre. Je ne peux pas expliquer pourquoi j'ai cette sensation quand elle est près de moi. Autre question ?
Il me scruta avec attention et j'eus l'impression qu'il pouvait lire en moi. Je captai le son des pas de ma sœur et le frère de Chiara leva les yeux pour la regarder s'installer près de lui.
– Tu fais quoi dans la vie ? À part écrire. Personne ne vit de sa plume actuellement. Ou en tout cas, c'est rare.
– J'avais un taf en marketing mais je me suis fait jeter parce que j'ai fait comprendre devant mon big boss que ma N+1 était une tocarde inculte.
Chiara se tourna vers moi surprise.
– T'es sérieux ? T'es chômeur ?
– Non, parce que je suis suffisamment riche pour ne pas avoir à demander de chômage, mais... ouais j'ai plus d'emploi salarié. Je vais en retrouver un après Noël, je n'ai jamais eu beaucoup de problèmes pour trouver du travail.
– Je présume qu'avoir des parents riches comme Crésus, ça aide, ricana son frère.
Un sourire sarcastique s'afficha sur mon visage. J'aurais pu l'envoyer chier depuis un moment, mais je n'avais pas envie de l'hypnotiser. Chiara ne pourrait pas l'oublier à moins que Vivi ne s'occupe d'elle... et elle finirait par m'en vouloir.
– Je me suis bâti ma propre fortune par des choix faits judicieusement. Je parle plusieurs langues, et j'ai étudié beaucoup de domaines. J'en ai peu dormi d'ailleurs durant ces périodes, souris-je. Mais ça m'a permis une chose absolument essentielle dans notre société : négocier mon salaire.
– Tu as déjà été violent avec une femme ?
– Tu parles de quel type de violence ? lui demandai-je de préciser.
– Physique ?
– Je n'ai jamais levé la main sur une femme. Ce n'est pas comme ça que j'ai été élevé. Mon père... même s'il parait bourru au premier abord a toujours eu un profond respect pour les femmes et il me l'a inculqué.
– Psychologique alors ?
– Non. Pas consciemment en tout cas, ajoutai-je après un silence. Je... n'ai jamais voulu faire du mal à une femme. Je ne suis pas une personne mauvaise. J'ai toujours donné le fond de ma pensée, c'est comme ça que je suis fait.
– Si elle te quitte comment réagiras-tu ? Tu auras envie de la frapper ? De l'étouffer ? De la retenir ?
– Honnêtement ? Je suis du genre à me vexer. Il est probable que je la regarde d'un air sarcastique en lui disant bon vent, mais que juste après, j'appelle ma sœur et mon frère pour qu'ils viennent picoler avec moi pour oublier mes problèmes.
– Il l'a déjà fait pour information.
Ce fut à mon tour de fusiller ma sœur du regard, mais son sourire s'agrandit.
– Il en a même pleuré. Mon frère est un nounours guerrier, capable de partir au front pour défendre ceux qu'il aime. Il n'a pas d'enfants, mais il se comporte comme un père pour chacun de nos petits cousins. Je ne sais pas vraiment pourquoi vous lui posez ce genre de question, Cosimo, alors qu'il suffit de regarder l'amour avec lequel il regarde votre sœur. Dans la vie, il faut savoir prendre des risques et se lancer, corps et âme dans ce qui nous semble juste et bon.
Ma sœur plongea son regard dans celui de Cosimo puis dans celui de Chiara.
–En ce qui me concerne, j'ai hâte d'apprendre à mieux te connaître et je sais que c'est un sentiment qui est partagé par un grand nombre de personnes dans ma famille. Mon père et ma mère t'apprécient tous les deux énormément et pour ça... on a pas besoin de connaître quelqu'un depuis des années. Quand le feeling passe, tout va bien.
Cosimo se tut le temps de prendre une gorgée et présenta ses excuses pour avoir paru abrupt.
– Ma sœur a été tant de fois maltraitée dans sa vie, je n'ai pas envie que cela recommence.
– Je peux vous jurer que cela n'arrivera pas, répondit ma sœur à ma place. Sinon, je le tuerai de mes propres mains et ce ne sont pas des paroles en l'air.
Elle posa sa main sur son avant-bras et lui adressa un sourire.
– Ayez un peu confiance dans les autres et...
Ma sœur fronça ses sourcils et se leva pour aller en bas des escaliers. Sa voix nous parvint rapidement.
– Andor ! Lâche ton petit frère avant que je ne vienne pour te botter le derrière !
– J'ai rien fait !
– Je t'entends !
Elle monta les escaliers et elle ouvrit la porte de la chambre. Je tournai mon attention vers le frère de Chiara.
– Elle a une excellente ouïe.
– Quand des enfants dans la maison, on est sur nos gardes... surtout face à un silence répété.
Ma sœur revint avec Andor, littéralement, sous le bras et elle le déposa devant moi.
– Occupe-toi de ton filleul. Il estime que donner des coups à son frère Einar est une bonne idée alors que ce dernier est à terre.
Mes sourcils se froncèrent alors que Andor baissait les yeux. J'allais lui donner une leçon, digne de l'enfant de Viking qu'il était.
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